Première année Nos 1 et 2.

Avril et Mai 1920

l

11- M-

CONGO

n !

Revue générale de la Colonie belge,'

Algemeen tijdsonrift van de Belgische Kolojsfe

SOMMAIRE : nv

Lt Général Baron WAHIS,

L. PHILIPPART . , .

Edm, LEPLAE

Th. GUTERSOHN. . . ,

La Participation belge à la Conquête du Cameroun et de l'Afrique orientale allemande . . p. 1 L'organisation sociale dans le Bas -Congo . p. 46 La situation de l'agriculture au Congo-belge p. 67 Het Economisch leven van den Mongo-ncger. p. 92

MÉLANGES : Questions économiques : La question des Bois, p. 106. Les oléagineux des Colonies françaises, p. 110,

Politique économique et méthodes commerciales, p. 114. Voies de communication : La question des transports, p. 118 Construction du chemin de fer Beira-Zambèze, p. 121. De l'emploi des avions pour les recherches d'ordre scientifique, p. 122. Pour une flotte coloniale, p. 124. Compagnie du chemin de fer du Bas-Congo au Katanga, p. 124. La photographie aérienne et la cartographie, p. 12G. Ethnographie : Des populations du district Kasempa, p. 127. Géographie : La mission Tilho, p. 128.

Sciences Naturelles : Collections zoologiques de l'ituri et du Haut-Uelé, p. 131. Enseignement '• Ecole de médecine tropicale, p. 138. Ecole coloniale supérieure, p. 134.

RENSEIGNEMENTS DE L'OFFICE COLONIAL

DU MINISTÈRE DES COLONIES

Commerce et industrie, p. 139 : Province du Katanga : Chaussures, Autres articles en cuir, Quincaillerie, Boissons, Automobiles, Motocyclettes, Bicyclettes. Vue exploi- tation diamantaire àTshikapa,p, 152. Transports, p. 158 : Taux de fret actuel d'Anvers à Banana, Borna et Matadi et retour. Modifications aux règlement des transports et tarifs de chemin de fer de Aiatadi à Léopoldville. Informations, p. 165 : La documen- tation coloniale. Avis d'adjudication, p. 167.

ASSOCIATION POUR LE PERFECTIONNEMENT DU MATÉRIEL COLONIAL

M. Willemoes d'OBRY. La Navigation sur le Haut-Congo, p. 160. BIBLIOGRAPHIE : Les Livres, p. 189. Les Revues, p. 194.

Les numéros 1 et 2 réunis : 5 francs

EDITEUR :

J. GOEMAERE, IMPRIMEUR DU ROI

l^tie de la Limite, 21, Bruxelles

Voir NOTICE, page 3 de la Couverture

CONGO

Publication périodique mensuelle dix livraisons, mille pages 25 fr. l'an. Maandelijksch tijdschrift - tien afleveringen, duizend bladzijden -25 j t. per jaar,

Étranger : 30 francs l'an.

Parait à la fin de chaque mois, sauf en août et septembre.

Verschijnt op het laatste van elke maand, buiten Augustus en September.

COMITE DE REDACTION

Fondateurs de la Revue

Président d'honneur : Cooreman, Ministre d'État, Président de l'Union Coloniale.

Membres : Broden, le Docteur, Directeur de l'Ecole de Médecine tropicale. Cattier, F., Professeur honoraire à l'Université de Bruxelles,

Membre du Conseil Colonial. De Jonghe. Ed., Professeur à l'Ecole Coloniale de l'Université de

Louvain, Directeur au ministère des Colonies. Denyn,V., Professeur à l'Ecole Coloniale de l'Université deLou- vain et à l'Ecole supérieure Coloniale d'Anvers, Conseiller juridique au ministère des Colonies. Gillain, Ll- Général, [ancien Chef d'Etat Major de l'armée, Pré- sident du Cercle africain, Secrétaire général de l'Union Coloniale. Halewyck, M., Directeur général des affaires politiques et administratives au ministère des Colonies, auditeur du Con- seil Colonial. Leplae, E. , Professeur à l'Université de Louvain, Directeur géné- ral de l'agriculture au ministère des Colonies. Liebrechts, Ch., Conseiller d'État, ancien Secrétaire général du département de l'Intérieur de l'Etat Indépendant du Congo. Mahieu, Inspecteur d'Etat honoraire, Directeur Général de la Société Nationale des Transports fluviaux au Congo, ancien Secrétaire Général de l'Union Coloniale. Mortier, Supérieur général des Missions de Scheut, membre

du Conseil Colonial. Olyff, J. Chef du Cabinet du Ministre des Colonies, Directeur chef du service de l'Industrie et du Commerce (Office Colonial). DIRECTEURS : MM. V. Dexyx et Ed. De Jonghe. SECRÉTAIRES : Sdmar, Th., Bibliothécaire au ministère des Colonies. Janssens, Al., Missionnaire de Scheut (pour les articles flamands). Janssen, Franz., Sous-directeur au ministère des Colonies,

(pour les Renseignements de l'Office Colonial). Tielemans, Colonel retraité (pour l'Association pour le perfectionnement du Matériel Colonial).

Pour les Abonnements et pour les Annonces, s'adresser à l'éditeur : GOEMAERE. imprimeur du Roi, Bruxelles.

ia Participation Belge à la Conquête du Cameroun et de l'Afrique Orientale Allemande

L'opinion générale en Belgique, affirme que si nos dirigeants avaient écouté la voix de Léopold II, notre territoire n'aurait pas été envahi en 1914.

L'ennemi qui voulait une solution rapide, n'aurait pas atta- qué une armée nombreuse et bien organisée qui aurait donné le temps à l'adversaire principal de lui faire face.

Ce que l'on connait moins, c'est que la grande prévoyance de Léopold II a préservé de l' envahis sèment de l'ennemi, des destructions et de la ruine, les belles régions voisines de l'Est Africain Allemand.

Il est établi que les Allemands avaient dans l'Est Africain Allemand, au moment la guerre a éclaté, de grandes forces en personnel blanc et noir, en armes, munitions, en outillage militaire de tout genre.

Les troupes de notre Colonie étaient-elles en mesure de contenir l'ennemi dès l'ouverture des hostilités?

Depuis 1891, le Roi Léopold II, renonçant aux recrutements à la Côte Occidentale d'Afrique, très onéreux, avait introduit dans l'Etat, la conscription, qui en quelques années lui assura une force indigène d'une vingtaine de mille hommes, ayant passé par des camps d'instruction.

L'organisation de ces troupes fut peu à peu perfectionnée en se basant sur l'expérience.

Les militaires servaient 7 ans, au bout desquels ils passaient à la réserve ou ils restaient inscrits pendant 5 ans.

Les réservistes rentraient dans leurs tribus d'origine ou bien formaient, avec l'autorisation du Gouvernement, des .groupements qui constituaient dans certaines régions de grandes

agglomérations, notamment sur l'itimbiri et près de Stanley- ville.

On avait craint à l'origine que ces groupements ne consti- tuassent un danger pour les régions ils étaient établis. Les révoltes qui s'étaient produites antérieurement à ces organi- sations, pouvaient donner lieu à des appréhensions, mais les craintes ne se réalisèrent pas. L'esprit de révolte avait peu à peu disparu, par suite des mesures judicieuses qui avaient été prises, notamment en composant autant que possible, les unités d'hommes de quatre races différentes. Les soldats de même race sont frères, ils se soutiennent toujours avec grande énergie, mais ils n'obtiennent que rarement dans leurs revendications, l'appui des hommes d'autres races.

Quand la guerre commença, il y avait donc sous les armes, la force permanente de 18,000 hommes environ et le Gouver- nement pouvait assez rapidement trouver des renforts dans la réserve.

Le Roi Léopold II, omnipotent au Congo, avait voulu, malgré les faibles ressources dont il disposait, avoir des forces toujours suffisantes pour faire face à ses puissants voisins. Une partie notable de ses budgets était consacrée à l'entretien de ses troupes, nombreuses surtout aux frontières. Sa confiance dans l'observation des traités n'était pas grande. Il y eut du reste sur certains points, commencement d'envahissement qui aurait pu s'étendre, mais il fut vite arrêté. Il fallait être assez fort et prêt partout à la lutte pour éviter le fait accompli.

La préparation et la valeur de la force publique congolaise devait être mise en évidence dès l'ouverture des hostilités par sa coopération à la conquête du Cameroun et l'arrêt des com- mencements d'offensive allemande au Kivu et en Rhodésie.

Les réserves d'armes de ses arsenaux de l'Est africain permettaient à l'Allemagne d'armer dès le début de grandes forces anormales : ce fait seul prouve ses desseins de con- quête.

L'Angleterre n'avait dans l'Uganda, le British East, le Nyassaland, la Rhodésie, que de faibles effectifs; il n'y avait donc pour le Congo aucun secours immédiat à attendre du côté anglais.

La Colonie belge au contraire avait dès le principe des forces suffisantes pour empêcher l'envahissement de la Pro- vince Orientale et du Katanga. Elle le fit bien voir et son

3

organisation, complétée, lui permit de passer à l'offensive qui devait inévitablement mener à l'écrasement complet de l'ennemi.

Si la force publique telle qu'elle existait en août 1914 avec ses cadres européens insuffisants et son armement ancien, pouvait de façon certaine, tenir l'ennemi en échec aux fron- tières ou participer à des opérations offensives comme celles du Cameroun, il n'en était plus de même quand il s'agissait d'une campagne dans l'Est Africain les Allemands avaient une force d'une quinzaine de mille indigènes encadrés par deux à trois mille européens, une artillerie nombreuse, des mitrailleuses, de grands approvisionnements de munitions, d'équipements, le tout proportionné aux effectifs, c'est-à-dire une préparation à la guerre ressemblant beaucoup à celle que l'on trouvait en Europe dans les pays prévoyants.

Il fallait donc un travail d'organisation complémentaire.

La base existait : les soldats en nombre suffisant, instruits, disciplinés, mais il fallait donner aux effectifs qui seraient mis en mouvement des cadres proportionnés et tout le matériel qu'une bonne organisation comporte.

Cette tâche très lourde et compliquée, vu les distances et les moyens de communication, le Gouvernement sut l'accom- plir. Elle aurait été grandement facilitée si nous avions eu la maîtrise sur le lac Tanganika, mais celle-ci appartenait aux Allemands, et les approvisionnements destinés aux forces qui devaient opérer par le nord du Tanganika, la Ruzizi, le Kivu et le nord du Kivu durent être dirigés sur ces régions par porteurs partant de Kasongo, de l'embouchure de l'Elila par Fundi Sadi et de Kirundu au sud de Ponthierville, pour aboutir respectivement à Baraka, Luvungi et Bobandana.

Les transports initiaux étaient faits par chemin de fer et par bateaux sur les sections navigables du Congo.

Les milliers de porteurs nécessaires aux transports entre le fleuve et la frontière ne furent pas réunis sans peine. Ceux qui se rappellent les difficultés que le Gouvernement eut à surmonter, avant l'établissement du chemin de fer Matadi- Léopoldville pour faire arriver le matériel et les approvision- nements dans le Haut- Congo, se rendront bien compte du mérite du personnel qui sut recruter et diriger la masse dos porteurs destinés à l'organisation des colonnes devant opérer dans l'Est Africain allemand.

En ce qui concernait le personnel blanc destiné à compléter les cadres de la force publique, le Gouvernement fit appel à l'armée métropolitaine ; 700 officiers et sous-officiers furent envoyés en Afrique pendant les trois années que dura la cam- pagne.

Le contingent de noirs recrutés annuellement fut j^orté de 3,500 à 5,000.

Le corps expéditionnaire reçut 15,000 fusils Gras avec un approvisionnement de 2,000 cartouches par arme.

Certaines unités de la frontière Est, qui dès le temps de paix avaient le fusil Mauser, reçurent pour chaque arme le même approvisionnement de cartouches.

Les envois successifs portèrent à 158 le nombre de mitrail- leuses en usage auprès des troupes . Chaque mitrailleuse devait recevoir 100,000 cartouches.

Les usines de Saint-Chamond fournirent et assurèrent l'ex- pédition de 4 batteries de 4 canons à tir rapide de 70 m/m. avec approvisionnement immédiat de 2,000 coups par pièce, porté plus tarda 4,000 coups.

L'artillerie en service au Congo était peu nombreuse ; un certain nombre de pièces de 47 m/m et de canons Krupp de 75 m/m furent utilisés au début par les troupes de campagne. Ces pièces servirent dans la suite à la défense des lignes de communication.

Prévoyant la nécessité d'établir sur le Tanganika une base navale permettant d'y monter des unités chargées d'enlever aux Allemands la maîtrise du lac, le Gouvernement y envoya :

2 canons de 16 c. avec cuirassement; 1 canon de 10 c. ; 1 batterie de 6 pièces Krupp de 75 m/m, à tir accéléré.

Des approvisionnements en matériel hospitalier, médica- ments, vivres conservés pour Européens et noirs, outils de campagne, matériel pour pontonniers, pour télégraphes, télé- graphie sans fil, arrivèrent à destination soit par Borna, soit par le Cap, ou encore par Mombassa et le chemin de fer anglais vers les lacs.

Sur la ligne Stanleyville-Lukuga, un service de l'arrière entra en fonctionnement avec magasins, dépôts, et services techniques. A partir du moment surtout la maîtrise du lac Tanganika fut assurée, ce service facilita singulièrement les opérations.

Ces grands préparatifs demandèrent du temps. Avec une

grande décision le Gouvernement les commença dès l'ouver- ture des hostilités et son effort fut couronné d'un plein succès.

La neutralité de la Belgique

dans le Bassin conventionnel du Congo.

L'Allemagne a- 1- elle violé la neutralité permanente du Congo-Belge ? Il n'est pas douteux qu'en Afrique comme en Europe, elle s'est peu souciée du respect des conventions.

En Belgique, dans les cas les plus flagrants de culpabilité, nous la voyons chercher à établir sa complète innocence. Le Gouvernement allemand, le commandement militaire, les journaux sont unanimes à proclamer la parfaite loyauté des agissements.

En Afrique vu les distances, la difficulté des communi- cations, la vérité n7a pu être rapidement établie, mais des preuves formelles montrent que la conduite de notre Gouver- nement et de ses troupes a été d'une absolue correction.

Les parties contractantes de l'acte général de Berlin, à la tête desquelles se trouvait l'Allemagne, s'engagèrent par l'article 10 à respecter la neutralité des territoires du bassin conventionnel du Congo, aussi longtemps que les puissances exerçant des droits de protectorat sur ces territoires usant de la faculté de se proclamer neutres, rempliraient les devoirs que la neutralité comporte.

Le 1er août 1885, l'État du Congo en conformité de l'article 10 sus-indiqué, se déclarait perpétuellement neutre et réclamait les avantages garantis par l'acte, en même temps qu'il assu- mait les devoirs que la neutralité comporte.

Cette déclaration de neutralité avait été renouvelée en 1894 à la suite de modifications survenues dans les limites terri- toriales de l'État du Congo.

Quand la guerre commença, en août 1914, la situation au Congo était donc très claire et les instructions envoyées au Gouverneur général prescrivirent d'observer une attitude strictement défensive sur les frontières allemandes.

Le Ministre des Affaires Étrangères de Belgique avait informé de cette décision les Gouvernements français et anglais qui n'avaient pas proclamé la neutralité de leurs colo- nies du centre de l'Afrique et ne la proclamèrent pas.

6

A différentes reprises les journaux allemands ont prétendu que les premier actes d'hostilité avaient eu pour auteurs les soldats belges qui auraient participé, dès le/6 août 1914, aux opérations françaises de l'Ubangi et qui notamment auraient attaqué, enlevé et occupé le poste de Singa, situé à l'embou- chure de la Lobaye. En réalité, ce poste fut pris par les Fran- çais seuls dans la nuit du 6 au 7 août.

Interpellé à ce sujet par le Gouvernement belge, le Commis- saire du district de l'Ubangi déclara de façon très formelle que ses troupes n'avaient pas participé à l'opération. Il y avait eu une concentration de forces belges àLibenge, rive gauche de l'Ubangi, mais les troupes restèrent en position jusqu'à l'arrivée de la nouvelle des attaques allemandes sur notre fron- tière orientale, le 15 août, fait affirmé et prouvé par le Vice- Gouverneur général Malfeyt. C'est alors seulement que le Com- missaire du district de l'Ubangi envoya une partie de ses forces en territoire français, à Dongu, poste qui était menacé par une colonne allemande.

Tous les faits, toutes les déclarations concordent. Le Gou- vernement et ses fonctionnaires ont été vis-à-vis de l'Alle- magne d'une correction absolue.

En examinant de très près toutes ces déclarations, nous sommes très fiers de la grau de loyauté indiscutable qui a pré- sidé à tous les rapports que la Belgique a eus, dans cette ques- tion de neutralité, tant avec l'ennemi qu'avec nos alliés.

La conquête du Cameroun,

La Campagne du Cameroun les troupes belges eurent un rôle important et brillant, mit en évidence, comme je le disais plus haut, la valeur combative de la force publique, telle qu'elle était dans tous les districts, avec ses cadres blancs trop peu nombreux et un armement très inférieur à celui de l'en- nemi ; mais les chefs et les soldats très entraînés à la marche, étaient prêts à entrer en campagne, quand le 29 août 1914, ils reçurent l'ordre de passer sur la rive droite de l'Ubangi, pour opérer avec les troupes Françaises contre les Allemands.

La France n'était pas liée, comme la Belgique par un acte de neutralité dans le bassin conventionnel du Cong-o et dès le

7

commencement des hostilités, elle prit des mesures militaires dans ses possessions de la cote Occidentale d'Afrique.

Les deux antennes allemandes qui aboutissaient à PUbangi, l'une à Bonga, à l'embouchure de la Sangha, l'autre à Singa, à l'embouchure de la Lobaye, étaient singulièrement menaçantes pour les communications françaises vers le nord,

tant par eau que par le télégraphe. Aussi dès le 7 août dans la nuit, les deux postes furent attaqués, pris et occupés par des troupes françaises. Le 15 août, les Allemands ayant fait une attaque sur un de nos postes du Tanganika et notre neutralité étant ainsi rompue, une force belge passa, à la demande du commandement français, sur la rive droite de PUbangi, et remplaça, le 29 août, les garnisons de Bonga et de Singa.

8

Comme la suite des opérations le prouva, le Cameroun pou- vait mettre des forces importantes sur pied. -

Le commandement français, avec une grande et rapide déci- sion, établit un plan de campagne de concert avec l'Angle- terre.

Une force militaire Franco-Anglaise occupa Duala, capitale- du Cameroun, située à la Côte et créa deux postes d'observa- tion vers l'intérieur, à Edea et Yabosi pour couper les commu- nications avec la mer. Des navires de guerre Anglais et Fran- çais croisaient sur les côtes.

L'invasion du Cameroun devait se faire à la fois par toutes les frontières.

Au nord par les Anglais venant de la Nigérie.

Au nord-est par les Français venant du Tchad.

Au sud-est par des colonnes françaises partant de Singa et de Bonga et suivant la Lobaya et la Sangha.

Dès le commencement des hostilités, Duala avait été en grande partie abandonné et le Gouvernement avec le comman- dement militaire s'était retiré vers le centre du pays a Yaunde, localité importante, point de croisement de nom- breuses voies de communication. *

Les lignes d'opération des différentes colonnes devaient converger vers ce centre.

Les forces françaises étaient sous le haut commandement du général Aimerick, marchant avec la colonne de la Sangha qui fit l'effort principal. C'est à celle-ci que vinrent se joindre les troupes belges.

Le total des renforts envoyés successivement s'élevait à 750 hommes avec quelques canons de 7.5 et de 4.7 et des mitrailleuses. Ces détachements partirent de Léopoldville rapidement et bien organisés par le commandant du district du Stanleypool, le lieutenant-colonel Moulaert.

Une série de postes fortifiés allemands échelonnés sur la Sanga et ses affluents défendaient cette région.

Le général Aimerick qui avait en octobre 1914 son quartier général à Ouesso, demanda au gouverneur du Congo belge un premier renfort qui lui fut envoyé sous le commandement du lieutenant Bal.

Le détachement fut transporté par le steamer belge Le Luxembourg- qui avait un blindage en plaques d'acier. Ce ba- teau rendit, au cours de plusieurs opérations de grands ser- vices.

9

Le général Aimerick décida aussitôt l'attaque du poste im- portant de N'Ziniu, situé à une quarantaine de kilomètres en amont de Ouesso.

Il prit persounellement la direction de l'opération. L'atta- que commença le 26 octobre. Ce ne fat que trois jours plus tard que le village fortifié et le fort furent enlevés, après des péripéties le détachement belge, engagé pour la première fois côte à côte avec des troupes françaises, se conduisit avec la plus grande bravoure et s'attira une considération qui fut maintenue pendant toute la campagne. Le steamer blindé Le Luxembourg eut dans l'attaque un rôle brillant. Remon- tant la rivière, il avança à hauteur de la première ligne d'as- saut. Son commandant, le capitaine Goranson, le conduisit au milieu du combat, avec autant de calme et de précision que dans ses voyages en temps de paix.

Le Gouverneur général de l'Afrique equatoriale française, M. Merlin, qui était alors à Brazzaville, exprima à cette occa- sion au Gouvernement belge de la Colonie, ses sentiments d'admiration pour la vaillance que les troupes belges avaient montrée dans l'attaque et la prise de N'Zimu,

Admirons aussi le général Aimerick qui se met à la tête d'une force de 3 à 400 hommes, conduit les attaques, est tenu en échec pendant plusieurs jours et finit, grâce à sa ténacité, par emporter la position.

La valeur des éloges qu'il fut amené à faire de nos troupes est singulièrement rehaussée par la grande considération dont il sut, dès le début, s'entourer parmi elles.

Ce n'est pas à l'importance de la force qu'un chef com- mande, que l'on juge de la valeur de sa décision, de son éner- gie, de sa bravoure, qualités qui sont à la base de toutes celles que doit posséder un général.

Un second renfort belge arriva à Ouesso, le 22 novembre, et la reprise de la marche en avant fut décidée. Les premiers retranchements importants à enlever sont situés à une centaine de kilomètres de Ouesso, à Molundu. Le lieutenant-colonel français Hutin a le commandement des troupes qui doivent emporter la position.

Des reconnaissances sont envoyées vers le poste. Un déta- chement sous le commandement du lieutenant Bal, après une marche pénible, arriva devant Molundu et s'y maintint, mal- gré les attaques, jusqu'au moment il put être relevé.

10

Un mouvement enveloppant de la position était commencé, quand l'ennemi, avec des forces supérieures, obligea les élé- ments avancés à battre en retraite.

Les troupes de l'attaque étaient exténuées ; les pluies conti- nuelles avaient fait de Molundu une vraie forteresse, aux abords rendus inaccessibles par des marais profonds.

Le lieutenant-colonel Hutin estima qu'il ne pouvait enlever la position avant d'avoir reçu des renforts et il établit ses troupes en position d'attente.

Le 14 décembre, un détachement belge de 225 hommes, commandé par le capitaine Marin, venait renforcer la colonne.

Le lieutenant-colonel Hutin reprend, le 17, la marche en avant.

De sérieux combats sont engagés autour de Molundu, les 20 et 21. Le steamer Le Luxembourg a de nouveau un rôle important dans l'attaque.

L'assaut allait être ordonné, à l'aube le 22, quand on s'aper- çut que. dans la nuit, l'ennemi avait abandonné la position.

En suite de ces opérations, le général Aimerick cite à l'ordre du jour les commandants de compagnie Marin et Bal, ainsi que les sous-officiers Van Roy et Margotteaux.

Les opérations qui s'étaient terminées par la prise de Mo- lundu avaient beaucoup fatigué les troupes. Le service de ravitaillement fonctionnait mal. La saison des pluies rendait les marches pénibles. Pour ces motif s_, le lieutenant- colonel Hutin mit ses troupes en cantonnement au nord-ouest de Molundu. Quelques ressources en vivres furent trouvées dans les plantations de la Société « Concession du Sud Cameroun », qui avait dans cette région une organisation importante.

Les mois de janvier et février furent consacrés à de petites opérations sur les flancs des cantonnements et vers Lomié.

Au cours de l'une d'elles, le sous-officier Servais se distin- gua de façon si brillante, qu'il attira sur lui l'attention de tout le corps expéditionnaire. Le lieutenant-colonel Hutin le proposa pour la médaille coloniale française avec le motif suivant : « Commandant une troupe de 40 hommes, avoir battu succes- sivement trois détachements de force très supérieure aux siennes, eu ne brûlant que 250 cartouches. »

Au commencement de mars 1915, le général Aimerick apprend qu'une concentration de forces importantes se fait autour de Lomié. Les garnisons de tous les postes qui avaient pu battre en retraite s'y étaient concentrées.

11

Lomié est à 250 kilomètres au nord-ouest de Molundu, dans la direction de Yaunde, nouveau siège du Gouvernement.

La marche en avant ne peut commencer dans de bonnes con- ditions qu'à la fin de la saison des pluies, vers le milieu de mai 1915.

Des reconnaissances sont opérées en avril et au commence- ment de mai. Les sous-officiers Billemont et Margotteaux font à nouveau preuve d'entrain et d'intelligence dans les petites opérations dont ils sont chargés.

La marche vers Lomié commence en mai 1915, sur trois colonnes, celle du centre comprend les forces belges. Elle est, dès le premier jour, en contact avec l'ennemi qui se retire en combattant sur des positions fortifées, défendant tous les obstacles du terrain.

Il est refoulé sur Monzo, à une centaine de kilomètres de Lomié. Le poste de Monzo a une garnison importante, enca- drée par 19 Européens. Le lieutenant-colonel ïïutin en fait Tinvestissement complet.

Dans la nuit du 31 mai au 1er juin, une forte sortie rompt le cordon des troupes. Une partie seulement de la garnison est faite prisonnière.

Les Allemands considéraient Monzo comme l'un de leurs plus importants centres de résistance. Sa chute rapide impres- sionne beaucoup leur moral. Les résistances sont moius éner- giques.

Après deux mois de marche et de combats, les colonnes arrivent devant Lomié, centre commercial et administratif très important dont les Allemands avaient fait uue véritable place forte.

La localité ne fut pas défendue ; les troupes y entrèrent sans combat.

Le 25 juin 1915, la colonne franco-belge était au cœur du Cameroun. Parlant des difficultés vaincues, le lieutenant- colonel Hutin dit dans un de ses rapports : « De Molundu à » Lomié, il y a 250 kilomètres dans une région désertique, » une piste étroite, piste indigène, épousant au hasard les dîf- » férences de niveau, tombant tantôt à pic dans un ravin, » coule un torrent, ou escaladant par la plus courte pente une » crête abrupte. Parfois elle s'égare dans la brousse; il faut la » retrouver; le plus souvent il faut la retracer. C'est un ma- m gnifique résultat d'avoir pu la faire suivre par une colonne

12

» encadrée d'Européens, mais c'est un véritable tour de force » que d'avoir traîné, hissé deux pièces de 80 sur cette piste. »

Après la chute de Lomié, la colonne franco-belge, débar- rasse la région des postes qui dans la marche en avant sur Yaunde auraient pu menacer les communications.

Ces opérations donnèrent lieu à des combats les Belges eurent à nouveau l'occasion de se distinguer, notamment les compagnies Bal et Weyenberg, ainsi que le détachement commandé par le sous-officier Margotteaux.

Le 28 octobre la marche en avant fut reprise sur deux colon- nes : celle de gauche, franco-belge, sous les ordres du colonel Hutin ; celle de droite commandée par le colonel Morisson. La distance entre Lomié et Yaunde est de 280 km.

La résistance de l'ennemi fut encore énergique. Comme précédemment les troupes belges prirent dans toutes les opéra- tions la part la plus active. L'extrait suivant d'un rapport donne une idée de cette lutte de tous les jours :

« L'avant-garde de la colonne commandée par le premier » sous-officier De Ruyck atteignit l'adversaire, un vif combat » s'engagea. Bien qu'à court de munitions, De Ruyck tint tête » jusqu'au moment des renforts amenés par le commandant » de compagnie Van Weyenberg vinrent le soutenir ; la lutte » se fit dure. Espérant percer le centre de la ligne, les Allemands » prononcèrent de vigoureuses attaques, mais Van Weyenberg » y fit face obstinément; pendant ce temps le restant de la » colonne achevait un mouvement enveloppant qui força » l'ennemi à la retraite. Quatre jours plus tard, Van Weyen- » berg refoula un parti allemand qui tentait de couper la route » suivie par la colonne. Pendant plusieurs jours, il soutint la » marche contre de nombreux détachements qui harcelaient nos » troupes par l'arrière. »

Pendant le mois de décembre la résistance de l'ennemi faiblit; sa défaite complète est certaine. La colonne anglaise du Nord avance rapidement sur Yaunde. L'enveloppement va être achevé.

Sous la menace des forces anglaises et françaises qui con- vergent vers cette position, les troupes assez nombreuses encore qui protégeaient le Gouvernement battirent en retraite vers la Guinée Portugaise et passèrent sur son territoire.

L'ordre du jour du général Aimerick dit éloquemment l'opinion que les troupes belges lui ont laissée :

13 -^

« Avant de me séparer du contingent de la force publique belge, j'ai le devoir d'exprimer combien la collaboration de ces belles troupes nous a été précieuse et j'adresse de tout cœur aux officiers, aux sous officiers européens, a tous les gradés et soldats indigènes le tribut des éloges qu'ils ont mérités par leur bravoure au feu, par la patience et l'abnéga- tion dont ils ont fait preuve pendant toute la durée de cette longue et pénible campagne.

» Cette fraternité du champ de bataille, ce sang versé en commun pour la même cause, aura resserré encore les liens •d'amitié qui ont toujours uni les deux nations voisines.

» C'est pour moi un grand honneur d'avoir eu sous mes ordres pendant quelques temps, de si vaillantes troupes.

» Yaunde, le 24 février 1916.

» Le Général Command. Supérieur des troupes,

» (S,) AlMERICK. »

Pendant toute cette dure campagne du Cameroun, les troupes belges, comme le prouva l'ordre du jour du général Ainierick, donnèrent un bel exemple de discipline et de bravoure.

Ces premiers combats livrés par des troupes de l'intérieur du Congo, qui n'avaient aucune préparation spéciale, devaient faire bien augurer des opérations qu'allaient entreprendre les forces de l'Est, mieux composées et qui devaient recevoir des cadres européens complets, une organisation bien étudiée, un matériel perfectionné et tous les services auxiliaires néces- saires.

Il est vrai que l'ennemi très prévoyant disposait de ce côté, de grandes ressources et qu'il allait mettre a profit le temps qui lui était laissé pour fortifier ses positions et créer, sur toutes les lignes probables des opérations, des obstacles sérieux à la marche.

La victoire serait difficilement remportée et exigerait de lourds sacrifices.

Conquête de l'Est Africain Allemand.

Nous avons vu comment, dès le 15 août 1914, les Allemands avaient violé le traité de neutralité qu'ils avaient conclu avec

14

Roùhuru . ÏW

15

la Belgique, en ce qui concernait les territoires du bassin conventionnel du Congo.

Les forces des districts de l'Ubangi et du Stanleypool, dès lors libres d'agir, avaient, à la fin d'août 1914, accordé leur concours aux troupes françaises qui avaient commencé l'enva- hissement du Cameroun. Leur participation à l'effort français fut brillamment établi par Tordre du jour que le Général Com- mandant en chef Aimerick adressa aux troupes quand la cam- pagne fut terminée.

Sur les frontières de l'Est, les Allemands très menaçants, trouvaient partout leurs essais d'envahissement annihilés par des résistances qui leur faisaient voir l'impossibilité d'une campagne offensive au Katanga et dans laProvince Orientale.

D'un autre côté, les forces belges très combatives, suffisam- ment nombreuses pour tenir en échec une offensive allemande, n'avaient toutefois ni l'organisation, ni les ressources en matériel qu'il fallait pour une campagne dans un pays défendu par des forces considérables, bien encadrées, très bien armées et pourvues de tous les services auxiliaires nécessaires.

Le manque de préparation des forces congolaises devait donc retarder le commencement de la campagne offensive.

Une autre raison très puissante devait la différer. L'Angle- terre n'avait dans ses Colonies voisines de l'Est Africain Allemand que peu de troupes. A différentes reprises, celles-ci durent même recourir au début à l'assistance belge.

Insuffisamment préparée à la guerre sur terre, en Afrique comme en Europe, l'Angleterre sut faire l'effort nécessaire pour arriver à la victoire, mais il fallut du temps et ce ne fut qu'en mars 1916 qu'elle put mettre en mouvement les forces considérables qu'elle avait concentrées vers Mombassa et au Nord du Kilimandjaro.

Les régions les opérations militaires de la première cam- pagne belge allaient conduire nos troupes sont limitées à l'Ouest par le lac Kivu, la Ruzizi, le lac Tanganika;

au Nord par l'Uganda et le lac Victoria;

à l'Est par une ligne joignant Muanza (port du lac Victoria) à Tabora;

au Sud par la Rhodésie.

Au nord du théâtre des opérations, l'attention est surtout attirée par la position de la Sebea, située à la pointe nord du

16

lac Kivu, et dont les hauteurs escarpées couvrent les chemins menant vers le sud. Une succession de sommets couverts de fortifications bien comprises et bien armées sont occupés par des forces allemandes.

Les chaînes de montagnes élevées qui bordent le Kivu, la Ruzizi et le nord du Tanganika, en atteignant parfois 3,000 mètres, s'abaissent par étages successifs vers l'Est pour arriver aux grandes plaines de l'Usivwi et de la région s'éten- dant au sud vers Tabora.

Ces étages successifs sont des plateaux élevés, souvent coupés, dans l'Ouest, de ravins profonds coulent les rivières à travers d'immenses marais de papyrus. C'est le Haut Buanda et au Sud de celui-ci le Haut Urundi; vers l'Est, le Bas Buanda et le Bas Urundi.

L'altitude des plateaux du Buanda et de l'Urundi, qui va de 1,800 à 2,800 mètres, met ces régions dans des condi- tions de salubrité exceptionnellement favorables. Déjà vers 1,400 mètres d'élévation dansles contrées tropicales, qui ont cette altitude, les fièvres x^aludéennes disparaissent et même à la saison chaude, il n'y a plus de température excessive. L'Européen peut y vivre sans être obligé d'aller périodique- ment refaire ses forces dans d'autres contrées. Certaines par- ties du Katanga ont les mêmes avantages.

Les régions à l'Est du Buanda et de l'Urundi, voisines du lac Victoria qui n'a que 1,132 mètres d'altitude, sont dans des conditions beaucoup moins bonnes. La malaria y produit ses effets pernicieux; les températures y sont plus fortes.

Les régions à altitude élevée du centre de l'Afrique ont évi- demment un grand avenir. Leur possession assurera une domi- nation très facilitée sur les vastes territoires les noirs seuls sont à l'abri des effets déprimants des chaleurs excessives.

L'influence des grands centres de population blanche qui y seront créés s'étendra au lom dans les meilleures conditions. L'autorité des dirigeants qui pourront être permanents, s'exer- cera avec une suite dans les idées et une puissance qui ne sau- raient exister maintenant.

Les hauts plateaux de l'Afrique Centrale, riches par leur sol, favorables au peuplement par les Européens complètent ainsi de la façon la plus heureuse les régions à faible altitude de la Colonie, augmentent leur valeur dans de grandes pro- portions.

17

Les parties élevées des régions que les troupes du général Tombeur auront à traverser se prêtent bien à la défense et l'ennemi en a tiré le meilleur parti.

Mais si les marches sont ainsi facilement contrariées dansles régions les plus accidentées par des obstacles naturels ou créés, des rivières qu'il faut franchir, des marais de grande étendue difficiles à traverser ou qu'il faut contourner en perdant beau- coup de temps, les troupes ont l'avantage de trouver dans ces régions des populations, de l'eau et souvent des vivres, à la condition toutefois que les récoltes soient arrivées à ma- turité.

Il n'en sera pas de même dans les grandes plaines qu'il faudra parcourir de Biaramulo(S.-0. du lac Victoria) à Tabora.

Dans ces étendues immenses, d'aspect désertique souvent, les marches sont facilitées, mais pendant des journées entières, par une chaleur torride, les troupes sont sans eau. C'est la pire 4es calamités. Même les vivres qui doivent arriver par por- teurs manquent parfois.

L'une des colonnes, quiapassépar ces phases pénibles, a eu le grand mérite de maintenir dans ses régiments un moral élevé qui les a menés victorieux à Tabora.

Les rivières Yawaronga et Huwuwu, affluents de la Kagera (sources du Nil), sont des cours d'eau importants que les troupes venant du Nord auront à passer sous le feu ennemi.

La Yawaronga et la Ruwuwu, dans leurs cours supérieurs, ainsi que l'Akandjaru, forment des obstacles sérieux à la marche des forces venant de l'Ouest.

Le Kivu et la Ruzizi sont aussi une barrière favorable à l'ennemi, mais le Tanganika surtout fut pour lui, pendant une grande partie du temps que durèrent les opérations militaires, une protection efficace, les Allemands ayant la maîtrise du lac.

Dès le 22 août 1914, Y Alexandre Delcommnne, le seul steamer belge du lac, est mis hors de service; poursuivi par le von Wissmann, il est atteint par plusieurs obus et obligé de se réfugier dans le port de la Kalemie. On parvient plus tard à le remorquer jusque M'Toa il sera renfloué.

Outre le steamer von Wissmann, de 50 tonnes, les Allemands possédaient le steamer Kingàni, de 20 tonnes. Tous deux étaient armés de canons et de mitrailleuses.

En juillet 1915, ils mettaient à flot le steamer Graf von Göt- zen, de 350 tonnes, armé de 3 canons et d'une mitrailleuse.

18

Ce n'est qu'à partir de juillet 1915 que situation s'amé- liore pour les Belges.

Les Anglais vont monter deux canonnières bien armées et servies par un personnel de marins et d'artilleurs nationaux.

Les Belges mettent à flots 3 petits bateaux à vapeur armés de canons; le steamer Alexandre Delcommune est renfloué. On l'appelle Le Vengeur.

Dès lors la lutte commença dans de bonnes conditions. Le steamer Kingani est coulé le 26 décembre 1915. Le von Wiss- mann est coulé le 9 février 3 916. Le Graf von Gbtzen seul restait menaçant et conservait aux Allemands la supériorité.

Au commencement de 1916, le Gouvernement belge décida de contribuer à la destruction des bateaux allemands, en envoyant au port de la Lukuga des hydro-avions de bombar- dement.

Sous l'énergique direction du capitaine aviateur de Bueger, toutes les difficultés furent vaincues, et après plusieurs, attaques sur le port de Kigoma stationnait leGraf von Gbtzen,. ce steamer est atteint par deux bombes et mis liors de service.

Les bombardements par avions eurent un autre résultat très important.

Ils provoquèrent parmi les troupes qui occupaient Kigoma et Ujiji une véritable panique, et quand ces points furent attaqués par terre, ils tombèrent facilement au pouvoir de nos troupes.

Le steamer Graf von Gbtzen qui avait été réparé fut coulé par les Allemands eux-mêmes avant la reddition de Kigoma.

Le lac Tanganika était complètement libre à la fin du mois de juillet 1916. Les transports vers l'Est du lac donnèrent alors une grande assistance aux troupes de la brigade Sud.

La maîtrise sur le Tanganika fut ainsi obtenue par un tra- vail intelligent, énergique et persistant, du surtout au lieute- nant-colonel Moulaert, commandant de la rive Ouest du Lac.

L'admiration va aux dirigeants et aux exécutants.

L'opinion publique esta leur égard unanime, manifestation fort rare.

L'examen géographique du théâtre des opérations et l'in- fluence exercée par le lac Tanganika nous montrent que la contrée les Allemands allaient faire campagne, leur était nettement favorable.

19

Les renseignements concernant les forces que les Allemands firent agir dans l'Est Africain, sur toute l'étendue du terri- toire, de l'Océan Indien au Tanganika, sont assez vagues. On les a estimées à une quinzaine de mille soldats noirs, encadrés par 2 à 3000 blancs.

Ce qui est certain, c'est que dans tous les combats, la pro- portion des blancs était forte. Outre leurs troupes régulières, ils employaient, en nombre très considérable, des indigènes armés souvent de fusils. Ces irréguliers étaient de bons éclai- reurs.

On ne saurait déterminer avec quelque précision, la partie de ces effectifs qui fut opposée aux Belges. Il est certain qu'après les premiers combats, l'ennemi sut souvent mettre en ligne des forces supérieures en nombre aux nôtres.

Les Chefs allemands avaient l'avantage important d'opérer dans un pays dont ils connaissaient bien la topographie et le s ressources.

Cette supériorité jointe aux difficultés d'accès du terrain, aux fortifications créées sur les lignes d'opérations obligées, mettaient les Allemands dans des conditions très favorables, qui expliquent leur longue résistance et aussi certaines retraites qu'ils parvinrent à exécuter.

Les forces belges portées à la frontière Est (Tanganika et Huzizi) et au Nord du Kivu furent mises sous les ordres du colonel d'état-major Tombeur, officier ayant une grande expé- rience des choses d'Afrique. Il avait pendant plusieurs années exercé des commandements importants aux frontières de l'Est, puis sur les territoires de l'IJellé-Nil et du Katanga. Il fut nommé général au commencement de l'offensive, en 1916.

Ces forces comprenaient 14 bataillons que le commandant en chef du corps expéditionnaire groupa en 4 régiments et ceux-ci en deux brigades.

Trois batteries de 4 pièces à tir rapide étaient attachées aux brigades, ainsi que les unités techniques et les unités auxi- liaires.

Le tableau suivant donne le détail de cette organisation :

A. Brigade Nord :

3e régiment (VIIIe, IXe et Xe bataillons).

4e régiment (XIe, XIIe et XIIIe bataillons).

20

lre et 3e batteries de 70 millimètres St Chainond. lre compagnie de pionniers-pontonniers d'Afrique, une com- pagnie de télégraphistes.

Un service médical comprenant : Un hôpital de base, Deux hôpitaux volants.

B) Brigade Sud :

1er régiment (Ier, IIe et IIIe bataillons). 2 e régiment (IVe, Ve et VIIe bataillons).

2e batterie de 70 mm. St Chamond (une 4e batterie St Cha- mond rejoignit les troupes après la prise de Tabora). 2e compagnie de pionniers-pontonniers d'Afrique. Un service médical comprenant : Un hôpital de base. Deux hôpitaux volants.

Chacune des brigades comprenait en outre des services de l'intendance, de la trésorerie, de l'aumônerie, de l'auditorat et de l'arrière.

Le bataillon, unité mixte, comprenait en principe 3 compa- gnies d'infanterie, deux sections de mitrailleuses et une section d'artillerie de 4,7 cm. Sa force était de 700 hommes.

A chaque régiment était rattachée une section spéciale de mitrailleuses.

C) Troupes non enrégimentées. XIVe bataillon.

XVe bataillon formé au moyen de 3 compagnies de la réserve d'alimentation.

6 compagnies de réserve.

Ces troupes devaient servir, après la marche en avant, à l'oc- cupation du territoire conquis, à la garde des communications et au renforcement des brigades.

D) A la défense de la rive O. du lac Tanganika fut affecté le VIe bataillon renforcé par une compagnie.

Ces dernières troupes étaient mises à la disposition du lieu- tenant-colonel Moulaert qui exerçait le commandement sur toute la rive Ouest du lac Tanganika et avait à organiser la

21

défense des ports et à prendre ou à proposer toutes les mesures nécessaires pour arriver à la maîtrise du lac. Nous avons vu comment son énergique activité et sa grande compétence lui permirent de mener à bien sa lourde tâche.

La mise en mouvement de troupes nombreuses exige des moyens de transport qui créent des complications même en Europe, il y a de bonnes routes et du charroi perfec- tionné.

Pour opérer dans les montagnes et la brousse, faire vivre les troupes, leur donner en temps voulu les munitions, il n'y avait qu'un moyen, attacher à chaque colonne un nombre suf- fisant de porteurs. Le gouvernement parvint à les avoir et l'on comprend que ce ne fut pas un problème facile à résoudre, quand on se rappelle les grands efforts que le gouvernement fit dans le passé sur différents points du territoire pour faire arriver les charges à destination.

L'intérieur du Congo devait fournir 5,000 porteurs.

L'Uganda, dans cette circonstance comme en beaucoup d'autres, nous vint en aide et fournit plus de 5,000 porteurs qui furent rattachés au groupement de gauche de la brigade Nord.

L'ordre de bataille des troupes renseignées au tableau ci-dessus était le suivant :

Commandant en chef : colonel d'état-major Tombeur ;

Chef d'état-major : lieutenant-colonel A. E. M. Tilkens ;

Adjoint à l'état-major en 1916 : lieutenant-colonel A. E. M. Brassel ;

Brigade Nord : colonel A. E. M. Molitor (ex-chef d'état- major des troupes de l'Est et commandant en second) ayant comme chef d'état-maior le commandant A. E. M. Renard ;

3e régiment : major Rouling, puis le major Bataille.

VIIIe bataillon : commandant Pirot ;

IXe bataillon : commandant Herion ;

Xe bataillon : major de Brouwer.

4e régiment : major Bataille, puis le lieutenant-colonel Huyghé ;

XIe bataillon : commandant Loken (étranger);

XIIe bataillon : major Gilly;

XIIIe bataillon : commandant Pauwels ;

22

Au début de la campagne de 1916, le XIV® bataillon (com- mandant Weiler) avait été adjoint à la brigade Nord.

Brigade Sud : lieutenant-colonel Olsen, avec le capitaine commandant A. E. M. Libert comme chef d'état-major;

1er régiment : major Muller;

Ier bataillon : commandant Kesler ;

IIe bataillon : commandant Olivet, puis commandant Declercq ;

IIIe bataillon : commandant Ermens.

2e régiment : lieutenant-colonel Thomas;

IVe bataillon : commandant Daelman ;

Ve bataillon : commandant Beernaert;

VIIe bataillon : commandant Liégeois.

Toutes les organisations de troupes s'étaient faites sous la protection des forces de la Province Orientale et du Katanga; elles ne furent terminées que dans les premiers mois de 1916.

Au mois de février de 1915 déjà, des négociations avaient été entreprises avec le Gouvernement britannique pour assurer à l'offensive la coopération des forces anglaises, mais elles ne purent aboutir, les efforts de l'Angleterre étant alors unique- ment dirigés vers les opérations en Europe.

Le Gouvernement voulait dès lors tenter l'offensive avec ses seules forces dans la région du lac Kivu, tandis que les troupes échelonnées le long de la Buzizi et du Tanganika, tout en se maintenant sur la défensive générale, agiraient de manière à retenir devant elles le maximum de forces ennemies.

Les autorités dirigeantes laissèrent cependant au colonel Tombeur le soin de décider si le mouvement avait des chances de succès.

Le commencement du mouvement avait été fixé à la fin d'avril 1915, au moment la saison des pluies est terminée.

Mais le mouvement des troupes du Katanga vers le Tanga- nika, sous le commandement du colonel Olsen, fut retardé par la nécessité de soutenir les forces rhodésiennes oontre une offensive allemande.

Les bataillons qui devaient protéger la Ruzizi étant ainsi retenus dans le Sud, l'opération offensive ne pouvait être exé- cutée et du reste l'organisation prévue pour les troupes n'était pas suffisamment avancée.

23

En septembre 1915, le commandement belge annonçait au commandant en chef des forces britanniques de l'Uganda son intention de porter ses troupes sur un front déterminé par le N"ord du Tanganika et le Sud du lac Victoria, couvrant ainsi les territoires situés au nord de cette ligne. Les forces se trouve- raient alors en mesure de se porter sur les postes allemands de Muanza et de Tabora ou vers Ujiji et Kigoma, selon toutes probabilités sur Tabora, centre principal politique et militaire de l'ennemi.

Ce plan comportait la division des troupes en deux grou- pements d'effectifs à peu près égaux, avantage considérable qui facilitait les ravitaillements si difficiles par porteurs.

En outre une attaque venant de la Ruzizi menacerait immé- diatement les communications de l'ennemi en position à l'Est -de la pointe Nord du Kivu.

La séparation des forces en deux groupements, vu leurs effectifs et ceux de l'ennemi au cours des premières opéra- tions, ne présenterait pas de danger.

Après la concentration des forces allemandes qui devait nécessairement se produire à la suite des retraites successives qui leur seraient imposées, la situation pouvait être moins fa- vorable, mais on comptait sur l'habileté manœuvrière du com- mandement.

Au moment l'offensive commença, les forces allemandes opposées aux troupes belges, formaient à l'Ouest et au Nord, trois groupements principaux.

Le premier, sous le commandement du capitaine Wintgens •eut, dans toutes les opérations, un rôle important.

ïl occupait au Nord-Est du lac Kivu de fortes positions sur les sommets bordant la rivière Sebea, Les ouvrages de cam- pagne avec fossés profonds, bien flanqués, à l'abri d'une attaque de vive force, étaient reliés entre eux par des cour- tines et des boyaux de communication. Il y avait en outre des détachements défendant la rive Est du Kivu, notamment à Shangugu et à Rubengera.

On attribuait au capitaine Wintgens un millier d'hommes de troupes régulières soutenues par de l'artillerie et des mitrailleuses.

Le second groupement d'environ 700 hommes, sous les ordres •du major von Langen, défendait la Ruzizi et avait des détache- ments à Usumbura, à Kigoma et à Ujiji.

Enfin, dans le Bukoba, le capitaine Godrovius faisait face aux troupes anglaises de la basse Kagera. Il avait environ les mêmes forces que le capitaine Wintgens.

.S00 hommes défendaient les passages de la Kagera.

Toutes ces troupes étaient bien organisées, encadrées de nombreux Européens, armées de fusils à tir rapide, soutenues par une forte proportion d'artillerie et de mitrailleuses.

En vue de l'exécution du plan définitivement adopté, les brigades occupaient les positions suivantes face aux frontières Ouest et Nord du territoire allemand :

La brigade Nord, sous le commandement du colonel Molitor, avait son 4e régiment et le XIVe bataillon en face de la ligne allemande de la Sebea.

Ces troupes tenaient de fortes positions sur les monts Goma et les plateaux plus à l'Est.

Le 3e régiment stationnait dans la région de Rutshuru et fournissait les garnisons des postes anglais de Kabali, Lutobe, Eigesi, Tsafi, Bilaira.

La brigade Sud, lieutenant-colonel Olsen, avait à la gauche son 1er régiment dans la région de Kilawa, au Sud-Ouest du lac Kivu; à la droite, le 2e régiment avait un bataillon à Lu- vungi, un bataillon à TJvira et un bataillon en route pour rejoindre.

En mars 1916, les forces anglaises organisées pour la cam- pagne dans l'Est Africain Allemand étaient concentrées au Nord du Kilimandjaro et vers Mombasa.

Elles s'élevaient dans cette seule région à plus de vingt mille hommes, admirablement organisées, pourvues de tout le matériel nécessaire à une campagne en Afrique.

Mais ces troupes tirées des Indes et de la colonie du Cap, allaient opérer dans un climat fort différent du leur et les pertes par la maladie devaient être énormes.

Le général anglais Smuts, qui commandait en chef, avait devant lui, en mars 1916, le gros des forces allemandes sous les ordres du général von Lettow-Vorbeck.

Les opérations des troupes belges et anglaises devaient commencer simultanément pour empêcher le déplacement rapide des forces allemandes par le chemin de fer de Dar-Es- Salam au lac Tanganika, dont la voie était bien protégée sur toute son étendue.

25

Dans le courant d'avril, le général Smuts porta ses forces en avant et s'empara des positions allemandes du Kilimanjaro.

Pendant ce temps la brigade montée Van Deventer faisait un raid audacieux vers le Sud et arrivait devant Kondoa- Irangi, menaçant le chemin de fer de Dar-Es-Salam au Tan- ganika.

Les pertes énormes qu'il avait éprouvées, l'immobilisèrent longtemps sur ce point ; elles auraient même pu le mettre en danger, mais grâce à ses grandes qualités militaires, il sut faire face à toutes les difficultés.

La pression des troupes belges mises en mouvement aussi en avril, se faisant dès lors sentir, l'ennemi ne put disposer de forces pour les porter vers l'Est et agir contre la colonne du général Van Deventer. Le chemin de fer du Tanganika à Dar-Es-Salam, resté entièrement libre, aurait singulièrement bacilité un mouvement dans ce sens.

L'exécution du plan des opérations belges indiqué ci- dessus commença fin mars.

Suivant les instructions du commandant en chef, la brigade Molitor fut divisée en deux groupes.

Le premier, composé du 3e régiment renforcé par le XIVe bataillon et une batterie et demie St-Chamond devait se porter sur Lutobe il recevrait ses porteurs venus de l'Uganda.

Il avait à marcher sur Kigali, nœud de communication, grand centre de population ; éventuellement il se porterait vers l'Ouest pour couper la retraite aux troupes de la Sebea.

Le 2e groupe, composé du 4e régiment et d'une demi batte- rie St-Chamond, devait par des préliminaires d'attaque main- tenir l'ennemi sur sa forte position de la Sebea.

La brigade Sud ^colonel Olsen) devait concentrer son 1er régiment à Kilawa, pointe Sud du lac Kivu et se porter sur Nyanza en refoulant les troupes de Shangugu et celles du major von Langen

La canonnière « Paul Renkin » qui assurait la maîtrise sur le lac Kivu, avait à protéger les opérations sur Shangugu qui devaient être faites en partie par le lac.

Le 2e régiment était maintenu sur la Euzizi : le IVe batail- lon à Luvungi ; le VIIe qui était à Uvira devait menacer Usum- bura. Le Ve bataillon était encore éloigné. Le VIe bataillon restait à la disposition du lieutenant- colonel Moulaert qui

26

exerçait le commandement des ports et de la côte Ouest du Tanganika.

Pour des raisons de facilité de concentration et de marche, les forces du 1er groupe Nord avaient été réunies à Kamiwezi au lieu de Lutobe.

Les opérations commencèrent le 21 avril.

Un bataillon, le VIIIe avec une section d'artillerie Saint Chamond, une section du génie, précédé d'une avant-garde d'une compagnie du IXe bataillon, marcha directement sur Kigali. Les autres s'y portèrent par l'Est du lac Mohasi, pour faire tomber immédiatement toute résistance qui se serait produite à Xyanza (Ouest du lac), point facile à défendre.

Le 30 avril, le VIIIe bataillon attaqua et prit le fort de Ka- sibu. Il continua sa marche par l'Ouest du lac sur Kigali.

Le Xe bataillon marcha sur Batangata et porta deux com- pagnies vers l'Est pour faire la reconnaissance de la Kagera et tâcher d'avoir des renseignements sur les forces du capitaine Godovius.

Les IXe et XIVe bataillons arrivèrent à Kigali, le 9 mai.

Le 15 mai, le IXe bataillon se porta sur Mogo s'était retirée la garnison de Kigali.

Ce même jour, une compagnie du XIVe bataillon passa la Xyawongo à l'Ouest de Kigali.

Le 16 mai, le restant du bataillon franchit à son tour l'obstacle.

Le 17, le XIVe bataillon avec 3 mitrailleuses fut acheminé sur Kirundo en vue de couper la retraite aux forces de Wint- gens. D'autres troupes devaient suivre

Le 18 mai, un télégramme du major Rouling, commandant du 4e régiment, annonce que Wintgens a abandonné la position de la Sebea.

Le 20 mai, le lieutenant-colonel Huyglié reçut le comman- dement du groupement opérant à l'ouest du Nyawarongo et comprenant les XIVe et VIIIe bataillons et une batterie Saint- Chamond. Arrivé à Xyanza, le 22 mai, il y rencontra le grou- pement Muller.

Parti de Shangugu le 4 mai, celui-ci avait atteint son objectif: le 19. après avoir, dans un combat important, battu l'ennemi qui l'occupait.

Il apprit que le capitaine Wintgens commandant des forces

allemandes du Nord avait déjà dépassé Isawi au Sud de Nyanza.

Celui-ci avait très liabilem ent échappé à l'étreinte qui le me- naçait, mais le but était en partie atteint, puisque le major Eouling avait pu, sans éprouver de fortes pertes, parvenir à déloger l'ennemi de la position bien fortifiée de la Sebea.

Le major Rouling pour ménager ses troupes avait com- mencé, le 5 avril, une attaque pied à pied, mais le manque d'artillerie rendit ses progrès difficiles.

Dès le 27 avril, il s'aperçut que les Allemands préparaient l'évacuation de leurs positions.

Ils .avaient évidemment des renseignements sur la marche des colonnes qui devaient les envelopper.

Pour contrarier ces préparatifs et si possible leur couper la retraite, le major Rouling fit une attaque avec un bataillon sur la droite de la position; elle fut repoussée, le 5 mai.

Le bataillon se retira sur une forte position en dehors de l'aile droite ennemie.

L'arrivée d'une batterie d'artillerie de 70mm décida le major Rouling à renouveler ses attaques et dans la journée du 11 mai, deux ouvrages avancés furent enlevés de vive force; la nuit suivante les Allemands abandonnèrent leurs positions.

Le manque de porteurs retarda la poursuite qui ne com- mença que le 14, par une marche sur Rubengera se trou- vait alors le gros des forces allemandes.

Elle fut continuée sans arrêt vers Niundo, mais l'ennemi avait une avance de trois jours et ne fut pas rejoint.

Nous avons vu que le major Muller était arrivé à Nyanza à peu près en même temps que le lieutenant colonel Huyghé.

Parti de Kilawa au Sud du Kivu, le 18 avril, le major Muller avait très habilement manœuvré pour prendre Shan- gugu fortement occupé par l'ennemi. Un de ses trois bataillons avec une batterie de 4e, 7 passa le lac Kivu sous la protection de la canonnière « Paul Renkin » et se porta sur Shangugu par le Nord.

Les deux autres bataillons passèrent la Ruzizi à quelque distance en aval de Kilawa, opération difficile vu la force du courant.

Ils se portèrent sur Shangugu par le Sud.

28

Le j)oste sous cette double pression tomba sans combat important. ^MWj

Jusqu'au 2 mai, le commandant de la brigade Sud maintint ces trois bataillons dans la région de Sliangugu pour préparer la marche sur Niauza.

Une tête de pont fut établie sur la Ruzizi à Nyalukemba et gardée par le premier bataillon.

Le second régiment de la brigade Sud avait à couvrir le flanc droit du premier régiment. Une tête de pont fut établie sur la Ruzizi à May-a-Moto.

Le 4 mai, le major Muller commença son mouvement sur Nianza. Il disposait des IIe et IIIe bataillons et de la seconde batterie St-Cbamond.

La nature montagneuse du pays et le manque de chemins l'obligèrent à faire un mouvement étendu vers le Nord.

Le 11 mai seulement, il est à Mitabili il crée une base intermédiaire.

Le 19, après un combat sérieux contre des forces du major von Langen, il arrive à Nianza.

Le chef Muzinga, roi du ïtuanda, vint y faire sa soumission.

Cette marche à travers un pays très montagneux, n'ayant, sur la ligne suivie, pas grandes ressources, fut très bien con- duite; elle fait grand honneur au commandant des troupes.

L'ennemi qui avait passé entre les colonnes Huyghé et Muller était arrivé à Isawi .

Celui-ci dirigea de fortes reconnaissances dans cette direc- tion et, le 23 mai, ce poste fut occupé par un bataillon.

Le général Tombeur voulut avec raison poursuivre immé- diatement les opérations, bien que les troupes des trois groupe- ments fussent très fatiguées.

Il fallait profiter des succès déjà obtenus.

Les instructions du général prescrivirent d'atteindrele front May-ya-Moto, Luessero, Ukusswa.

D'une façon générale, la colonne Molitor devait s'orienter vers Biaramulo, la colonne Olsen sur Usumbura, le groupe Rouling, au centre, assurerait la liaison.

Le 26 mai, la situation des troupes ennemies était mieux connue, elles semblaient vouloir tenir sur la ligne Usumbura- Akandjaru avec un détachement sur la Kagera, vers Ukusswa.

En conséquence, le commandant en chef prescrivit à la bri-

29

gade Nord de former deux colonnes, celle de gauche, composée des VIIIe, IXe et Xe bataillons, reçut l'ordre de se porter sur TJkusswa afin de se relier éventuellement à une colonne anglaise qui devait marcher de Namirembe, dans la direction de Biaramulo.

La colonne de droite, composée des XIe, XIIe et XIIIe bataillons devait d'abord prêter son concours à la brigade Sud.

La brigade Sud avait son premier régiment vers Isawi, son deuxième régiment à Uvira et May-a-Moto.

Le premier régiment devait continuer son mouvement de poursuite vers le Sud.

Le second devait se porter sur Usumbura, puis sur Kitega pour arrêter l'ennemi en retraite et joindre son action à celle du premier régiment.

Le commandant de la brigade Sud était prévenu qu'il pour- rait réclamer le concours du 4e régiment de la brigade Nord.

Les bataillons IV et VII du 2e régiment marchent sur Usumbara et, le 6 juin, après un combat d'avant-garde ils entrent dans la localité qui était abandonnée.

Le 8, le Ve bataillon, venant de May-a-Moto il avait gardé le passage sur la Ruzizi, rejoignait le régiment.

Le 18 juin, celui-ci arrivait à Kasaka.

Le 1er régiment de la brigade Sud marche par Isawi vers l'Akandjaru des forces de la colonne Wintgens sont restées en position.

Le Ier bataillon fait une démonstration.

Les IIe et IIIe bataillons avec la batterie Saint Chamond franchissent le 1er juin la rivière sans combat.

L'ennemi continue sa retraite vers le Sud.

Le 6 juin, le Ier régiment marche en deux colonnes à faible distance l'une de l'autre, vers la haute Ruwivwu l'ennemi a concentré des forces : celle de droite comprenait l'état-major du régiment, le IIIe battaillon et la batterie Saint Chamond; celle de gauche, le IIe bataillon et la batterie Nordenfelt. Le Ier bataillon avait deux compagnies à Nyanza. La 3me opérait la liaison avec le 2e régiment.

Dès le matin du 6, l'avant-garde de la colonne de gauche est en présence de l'ennemi occupant les hauteurs de Kiwitawe.

Un combat s'engage contre des forces très importantes commandées par le capitaine Wintgens et dure jusqu'à la nuit.

30

Le commandant de la colonne de droite qui avait entendu la fusillade envoya un détachement dans la direction du combat. Les renseignements qui lui parvinrent la nuit, le décidèrent à se porter vers Kiwitawe; mais l'ennemi avait abandonné la position.

Le 11 juin, le major Muller apprend que les Allemands continuent leur retraite sur Kitega.

Il les rejoint, le 12 juin, à Xyawogi ils occupent une forte position.

L'avant-garde soutenue bientôt par un ' bataillon et la batterie Saint Cliamond attaque l'ennemi et après sept heures de combat la position est emportée.

Le XIIe bataillon de la brigade Nord couvrait dans cette marche le flanc gauche du 1er régiment. Bien que retardé dans sa mission, au passage de l'Akandjaru il trouva de la résis- tance, il put reprendre son mouvement et une de ses compag- nies entra la première à Kitega, le 16 juin, la mission de flanc-garde cessa.

Il fut alors porté à Muyaga et y stationna pour établir la liaison avec la brigade Sud.

Le 1er juillet, ce bataillon quitte la région de Muyaga pour aller rejoindre son régiment vers l'Est.

Le premier régiment qui était entré à Kitega, le 17 juin, stationna dans cette localité et son commandant y reconstitua ses approvisionnement en munitions.

Le 2me régiment créa une nouvelle base à Usumbura et les opérations ultérieures de la brigade furent ainsi grandement facilitées.

Les instructions du général Tombeur avaient assigné à la colonne de gauche de la brigade Nord, la marche sur Ukusswa et Biaramulo.

Il s'agissait de tourner les défenseurs de la Kagera, ainsi que les troupes du capitaine Godovius et d'attaquer les forces signalées au poste important de Biaramulo. Ces instructions avaient déjà, au moment de leur réception, reçu un commen- cement d'exécution.

Le groupe Huyglié, fut d'abord porté de Kigali à Nsasa. Seul le XIVe bataillon restait vers Kigali pour assurer l'occu- pation du Huanda,

Vers le 4 juin, les renseignemens signalaient la retraite des

31

troupes allemandes qui se trouvaient sur la basse Kagera en face des Anglais. Il devenait indispensable pour leur couper la retraite de marcher vers l'Est.

En outre la brigade se rapprochait ainsi du lac Victoria qui permettrait le ravitaillement plas facile en vivres pour Euro- péens. La distance de la base du Nord était devenue très grande.

Le 8 juin, les VIIIe, IXe et Xe bataillons arrivaient devant la Kagera et occupaient des points de passage sur la rivière.

Le 19 juin, les VIIIe et IXe bataillons sont sur la rive droite de la Kagera qu'ils ont franchie en amont du confluent de la Ruwuwu. Une partie du Xe bataillon garde les passages en aval, une autre partie doit se porter vers l'Est pour protéger le flanc gauche dans la marche sur Biaramulo.

Le 24 juin, cette localité était occupée sans combat par le IXe bataillon, rejoint le même jour par le VIIIe.

Les XIe et XIIIe bataillons du major Rouling avaient, comme il a été dit plus haut, reçu l'ordre de rejoindre la colonne Huyghé; ils marchèrent par Kaninga et Rugari sur Biara- mulo.

Le XIIe bataillon resté dans la région Xyanza-Isawi proté- geait le flanc gauche de la colonne Muller, en marchant par Siberiti et Mugera sur Muyaga.

Après son passage de la Ruwuwu, le Major Rouling trouva certaines résistances de partis qui devaient, d'après les ren- seignements surpris sur des courriers, retarder sa marche pour faciliter la retraite du capitaine Godovius. Ces renseigne- ments décidèrent le major Boulin g dès le 23 juin à porter son XIe bataillon vers Busirajembo sur le lac Victoria et le XIIIe bataillon vers Bukara plus à l'ouest pour intercepter la retraite de l'ennemi entre le lac Victoria et Biaramulo.

11 usait ainsi de son initiative habituelle ; quelques jours plus tard il eut à soutenir dans cette région un combat dans des circonstances particulièrement difficiles.

Le 25 juin, le commandant de la brigade Xord savait de façon formelle que les forces du capitaine Godovius marchaient vers le Sud, mais il n'avait cependant aucun renseignement précis sur la ligne que suivrait le groupe principal.

Il répartit ses forces entre la Kagera et le lac Victoria, un groupement important occupant Biaromulo. Un bataillon et une batterie Saint Chamond étaient portés à la pointe Sud- Ouest du lac Victoria, position importante aussi.

32

Les 7 bataillons et la batterie dont disposait le colonel Molitor avaient à surveiller, au début, un espace de plus de 150 kilomètres, tâche compliquée. Grâce à la grande énergie qui fut déployée, la retraite de l'ennemi fut interceptée et une notable partie des troupes allemandes fut faite prisonnière ou mise hors de combat.

Le 28 juin une reconnaissance composée de 2 pelotons, sortie de Biaramulo et dirigée vers le Nord-Est, rencontra vers Luampindi un parti de 200 hommes environ avec 3 mitrailleuses, un canon de 3,7 et un canon de 6,5.

Elle attaqua l'ennemi et malgré sa grande infériorité, le força à la retraite.

Le même jour Namirembe, sur le lac, était occupé par les belges, devançant ainsi les troupes anglaises qui débarquèrent en ce point, le 2 juillet.

L'ennemi divisa ses forces en plusieurs petites colonnes, qui vinrent donner sur certains postes de la lre ligne de sur- veillance établie sur la route de Biaramulo à Namirembe ; elles furent repoussées et se dispersèrent; certains partis passèrent la ligne.

Le 3 juillet, vers le milieu de la journée, un camp établi à Kato sur la seconde ligne de surveillance formée par la route de Biaramulo à Busiragembo, fut attaqué par des forces importantes, ayant à leur tête le capitaine Godovius, chef des troupes qui avaient défendu la Basse Kagera.

Il n'y avait à Kato qu'une force de 120 hommes avec 2 mitrailleuses qui furent renforcées par 60 hommes au cours du combat, mais cette troupe avait, à ce moment, à sa tête le commandant du 4e régiment, le major Rouling, chef expéri- menté et d'une grande énergie. Quoique complètement entouré, il tint l'ennemi en échec pendant cinq heures et quand les renforts arrivèrent, celui-ci avait déjà abandonné l'attaque.

Le major Rouling était sérieusement blessé.

Sur 14 gradés européens, 4 avaient été. tués, 5 blessés.

Des défenseurs de Kato, il ne restait que 60 hommes valides. Tous les servants des mitrailleuses avaient été tués.

Les pertes de l'ennemi étaient beaucoup plus grandes. Le capitaine Godovius était prisonnier, 14 européens Allemands étaient tués, 17 étaient prisonniers.

Le 5 juillet, le colonel Molitor ordonnait d'orienter les dis- positions pour amener la colonne de droite (ancienne Rouling

33

devenue Huyghé) vers la région Njatakara- Djobahika et la colonne de gauche (Bataille) sur la ligne Biaramulo-Busi- rajembo. Cette colonne de gauche, renforcée éventuellement par le XIe bataillon, devait être embarquée sur le lac Victoria pour opérer contre Muanza, si le général Anglais demandait ce renfort. Mais ce projet fut abandonné.

A la date du 6 juillet, il ne restait plus aucune force enne- mie au nord de la route Biaramulo-Busirajembo.

Le 7 juillet, une partie des troupes de Wintgens, venues de l'Ouest (400 soldats, 9 européens, 2 mitrailleuses), avait un court engagement, vers Njatakara, à Nyagoba, avec un détachement belge qui refoula l'ennemi vers Maria Hilf .

Le 11 juillet, le colonel Molitor accordait quelques jours de repos aux troupes.

Ses opérations devaient être dirigées de façon à menacer Muanza à revers. Après la chute de cette place, il avait à marcher sur Tabora.

Le 1 3 juillet, le lieutenant-colonel Huyghé apprenant que des forces nombreuses venues de la région de Maria-Hilf se por- taient à sa rencontre, rappela aussitôt vers Djobahika le XIe ba- taillon et la batterie Saint-Chamond qui se trouvaient à Bwanga. Le 1 4 juillet, le XIIe bataillon est arrêté devant une position occupée par des forces très importantes vers Djobahika.

L'ennemi prononce des attaques sur les deux flancs du XIIe bataillon qui s'est déployé. L'avant-garde du XIIIe, puis le XIIIe bataillon lui-même interviennent sur la droite alle- mande.

L'adversaire contraint à la retraite, reprit sa première position et s'y fortifia.

Le commandant de la colonne belge avait de son côté occupé des hauteurs à un kilomètre en arrière de Djobahika pour y attendre le XIe bataillon et la batterie Saint-Chamond. Le lendemain 15, les adversaires restèrent en position pendant la matinée et l'après-midi. Le renfort belge n'était pas encore arrivé quand, à 17 h. 30, une attaque allemande déborda la gauche de la position belge.

Après un engagement très violent, l'ennemi fut contenu. Les troupes avaient brûlé beaucoup de munitions. Le lieutenant - colonel Huyghé jugea prudent de se reporter à 6 kilomètres en arrière pour y attendre ses renforts avant de reprendre l'offensive.

34

Le XIe bataillon n'arriva que le 16. L'ennemi s'était retiré.

Le 4e régiment fut ramené dans la région de Niamasima pour se réapprovisionner en vivres et en munitions.

La deuxième quinzaine de juillet se passa en préparatifs pour l'organisation de la marche sur San-Micliaël.

Les troupes de la brigade Nord étaient fatiguées, après le grand effort qui venait d'être fourni dans des conditions de ravitaillement très précaires.

Elles devaient subsister surtout sur le pays, dans une ré- gion très pauvre, les maigres récoltes étaient loin d'être mûres. Une grande dispersion des cantonnements s'imposait donc pour faciliter la subsistance.

L'établissement d'une nouvelle base à Narnirernbe, en rem- placement de celle de Kamwezi, occasionna aussi des retards^

Pendant la seconde quinzaine de juillet, des dispositions furent prises pour l'occupation des régions conquises.

Le XIVe bataillon occupa l'Ussuwi et la partie est dultuanda. Le XVe bataillon, de nouvelle formation, la partie ouest du Ruanda. Le XVIe bataillon, également de nouvelle formation, occupa l'Urundi.

La remise des services aux troupes de l'arrière compliqua beaucoup la tâche du commandement qui devait assurer simul- tanément les services du front et de l'arrière.

L'échec du capitaine Godovius et le mouvement vers le Sud de la brigade Nord, contribuèrent à l'évacuation par les Alle- mands de la position importante qu'ils avaient à Muanza, sur le lac Victoria. Les Anglais, après s'être emparés de l'île Ukerewe, débarquèrent sur la rive Sud du lac, en des points différents, deux colonnes qui se portèrent sur Muanza ; la posi- tion fut abandonnée après une faible résistance.

Des forces anglaises l'occupèrent le 14 juillet. Leur com- mandant, le général sir Charles Crewe, se mit d'accord avec le colonel Molitor pour la marche sur Tabora.

Autant que possible, les deux mouvements s'effecturaient simultanément.

En suite d'un ordre du général Tombeur, le comraandanc de la brigade Nord ordonna, le 30 juillet, la reprise de la marche vers San-Michaël, en deux colonnes, celle de gauche, 4e régi- ment, par Bujombe et Mrole ;, celle de droite, Se régiment, par Djobahika et Maria-Hilf.

35

Le mouvement commença le 31 juillet.

Le 3e régiment était à Mrole, le 6 août; mais le 4e fit savoir qu'il ne pourrait arriver à Maria-Hilf, à hauteur du 4e, que le 12, son service arrière, faute de porteurs, ralentissant sa marche.

Le commandant de la colonne anglaise, en suite de rensei- gnements sur la marche de l'ennemi, fit apporter au plan du commandant belge une modification qui créa un sérieux retard au mouvement. D'après lui, les forces principales de l'ennemi étaient massées vers le sud-est de Muanza, à Shinyanga, alors qu'il n'y avait, disait-il, qu'un parti peu important à San- Michael.

Il se déclarait dans l'impossibilité avec ses seules troupes de marcher dans ces conditions sur Tabora.

Le 3e régiment fut donc porté vers l'Est pour se relier aux forces du commandant anglais, mais les renseignements de celui-ci furent reconnus inexacts; il fut établi qu'une concen- tration de forces d'infanterie avec des pièces de gros calibre était faite par l'ennemi à Kologwe (Kahama). La marche vers l'Est fut donc arrêtée et le 3e régiment fut dirigé sur San- Michaël il vint s'établir, le 22 août, à l'Est du 4e arrivé la veille.

Le 17 juin, la brigade Sud stationnait entre Kitega et Kas- saku pour reconstituer ses approvisionnements.

Suivant des instructions du général Tombeur, la brigade Sud devait se porter sur Ujiji, puis marcher vers l'Est, ensui- vant le rail pour attirer à elle des forces ennemies et faciliter ainsi la marche de la brigade Nord sur Tabora. Dès le 26 juin, le colonel Olsen était prêt à marcher ; il divisa ses forces en deux colonnes, celle de gauche composée des IIe et IIIe batail- lons commandés, par le major Muller, marchait par le con- fluent de la Lumpungu et de la Malagarassi sur Kassulu, cou- verte sur son flanc gauche par le Ier bataillon qui protégea aussi par un détachement le flanc droit de la colonne.

La colonne de droite (IVe, Ve, VIIe bataillons) marcha sur Nianza (lac Tanganika) en divisant ses forces ; le IVe bataillon seul suivit la voie directe, le Ve et le VIIe furent portés sur Nianza par Rumonge, chemin beaucoup meilleur, qui longe le lac.

La garnison d'Usumbura avait rejoint son bataillon. Kas-

36

sulu était occupé par des forces eunemies. Lès deux colonnes s'orientèrent vers cette place.

Le lieuteuant-colonel Thomas l'enleva le 24 juillet. Le major Muller y arriva le 25.

Par une marche rapide, les deux colonnes se portèrent en avant. Celle de droite sur Ujiji et Kigoma, celle de gauche sur Eutshugi et Gottorp, station très importante du chemin de fer Dar-es-Salam-Kigoma.

Comme nous l'avons vu la prise de Kigoma et d'TJjiji fut grandement facilitée par les aviateurs qui survolaient fréquem- ment le lac et avaient jeté la panique parmi les Allemands.

La maîtrise du lac fut ainsi assurée en son entier à la fin de juillet 1916. Ces opérations avaient été conduites avec décision et font grand honneur au commandant de la brigade, ainsi qu'au lieutenant-colonel Thomas et au major Muller. Relié au Tanganika et maître du rail à mesure qu'il avancerait, le commandant de la brigade Sud avait une ligne de ravitail- lement qui pouvait beaucoup favoriser ses mouvements.

Le grand obstacle en Afrique aux opérations rapides, c'est la difficulté des ravitaillements : même avec des porteurs nombreux, il y a des moments de crise. Les pertes parmi eux, par désertion, maladie, mortalité, sont énormes et bien souvent les combinaisons très habiles des chefs échouent par suite de l'immobilité ils sont condamnés, par le manque de ravitail- lements.

La brigade Nord surtout fut fortement éprouvée, sous ce rapport, à certains moments.

Dans le courant du mois d'août, les forces allemandes qui défendaient Tabora se trouvaient dans une situation prévue depuis longtemps. Elles allaient être attaquées à l'Ouest par une brigade d'infanterie, soutenue par de l'artillerie et des mitrailleuses etauNordpar des forces plus importantes encore, si les Anglais venant du lac Victoria, joignaient leurs efforts à ceux des Belges.

Dans leur marche concentrique sur Tabora, les deux bri- gades belges devaient s'attendre à voir l'adversaire recourir à la manœuvre classique par lignes intérieures consistant à se porter successivement vers chacune d'elles, avec la majeure partie des forces pour les battre séparément. Cette manœuvre était d'autant plus à craindre que l'ennemi disposait d'une

37

voie ferrée de plusieurs centaines de kilomètres vers l'Ouest et d'une autre de 30 kilomètres vers le Nord. La brigade Sud surtout était tenue de se prémunir contre un déplacementrapide de forces ennemies.

Le meilleur moyen pour les deux brigades d'enlever à l'ennemi l'avantage de la ligne intérieure était de bien com- biner leurs mouvements malgré l'extrême difficulté d'assurer leur liaison au début.

Au moment la marche des colonnes sur Tabora allait commencer, la brigade Nord était de nouveau dans les pires conditions en ce qui concernait les transports.

La nouvelle base de Muanza ne donnait pas les résultats espérés.

Les porteurs et les chariots à bœufs promis par les Anglais pour dégorger Muanza ne furent pas fournis par ceux-ci parce qu'ils en avaient eux-mêmes le plus grand besoin, pour la colonne du général Crewe devant opérer à la gauche de la bri- gade Nord.

Le colonel Molitor se vit obligé d'envoyer de San-Michaël presque tous les porteurs à Muanza, distant de 150 kilomètres, ce qui diminua forcément la capacité de mouvement de la bri- gade.

Le général Tombeur estima cependant avec raison qu'il eût été désavantageux de surseoir encore à la marche en avant ; les mouvements des deux brigades devant autant que possible être simultanés.

Le 1er septembre, deux bataillons et une batterie Saint Chamond, qui devaient être suivis le lendemain par deux autres bataillons, se portèrent vers la position de Kologwe, l'ennemi avait été signalé en force. Mais celui-ci ne fit qu'une faible résistance, il n'attendit pas l'assaut, et le gros se retira dans la direction de Tabora.

Cette retraite fit craindre une attaque sur la brigade Sud. Des renseignements signalaient, en effet, que le 1er septembre un combat avait eu lieu à une quarantaine de kilomètres à l'ouest de Tabora.

La brigade Sud pouvait donc être très exposée et il fallait hâter la marche de la brigade Nord. Le gros de celle-ci arriva à Mambali le 9 septembre. Il aurait été utile que le colonel Molitor pût s'arrêter sur cette position pour y attendre le res-

38

tant de ses troupes et services et pour mettre de l'ordre dans ses convois : ceux-ci le suivaient mal, ce qui le mettait dans de mauvaises conditions, malgré les grands efforts qu'il fai- sait depuis longtemps avec énergie pour parer à cette grave situation.

Mais le 1 1 septembre au matin, une canonnade entendue vers le Sud donna la certitude d'un gros engagement dans la région Ouest de Tabora. Le colonel Molitor, dans la nuit même, s'avança jusque Utombogo (étape de 33 kilom.) et continua son mouvement la nuit suivante.

Des reconnaissances signalèrent la présence de l'ennemi sur les monts Itaga et Massagala à 12 kilomètres de Tabora, entre lesquels passe la route vers cette localité.

Le canon de la brigade Sud avait été entendu encore dans la journée du 12, maisle colonel Molitor était sans autre nouvelle de cette brigade. Il donna les ordres pour le combat qui, après une reconnaissance personnelle faite dans la matinée du 13, commença dans la nuit du 13 au 14.

Le 3e régiment (VIIIe, IXe bataillons et Ire compagnie du Xe) attaqua la position de front et sur le flanc gauche. Le 4 e régiment devait tenir en échec la droite de l'ennemi.

La batterie Saint Chamond prit position à 1,000 mètres en arrière de la ligne.

A 5 heures du matin, la colline Itaga était enlevée, mais de nombreux renforts amenés par chemin de fer permirent à l'ennemi d'exécuter vers le milieu de la journée, une contre- attaque précédée d'un violent bombardement par des canons de 105 millimètres et de 77 millimètres. Le régiment ne put maintenir sa position et se replia en bon ordre, grâce au sang- froid et à l'énergie de son commandant, le major Bataille.

L'intervention d'un bataillon du 4e régiment fut tardive. Les troupes restantes de ce régiment qui attaquaient la droite de l'ennemi maintinrent leurs positions. Le 3e régiment qui avait été obligé de céder du terrain restait déployé à hauteur de celles-ci.

Tout le poids de ce dur combat de nuit et de jour pesa sur les troupes du major Bataille. Son recul fut à des renforts que l'ennemi tira des troupes opposées à la brigade Sud Comme nous le verrons plus loin, la brigade Sud avait subi un échec, dans la nuit du 12 au 13, et l'ennemi profitant de sa supériorité envoya par chemin de fer des forces vers le Nord. Ces mouvements furent constatés par des reconnaissances de

39

la brigade Molitor et leur exécution a été confirmée plus tard par des prisonniers qui se trouvaient à Tabora.

Les Allemands avaient ainsi profité dans une certaine mesure de leurs lignes intérieures, mais insuffisamment, puis- qu'ils n'obtinrent de résultat décisif sur aucun des deux adver- saires et que dès le 15 la brigade Sud reprenait son mouvement offensif et réussissait dans ses attaques.

La brigade Nord occupait, le 15, une position en face des collines d'itaga et de Massagala.

Des reconnaissances s'assurèrent que l'ennemi était main- tenu sur cette ligne.

Dans la nuit du 18 au 19, les forces allemandes battaient en retraite. Elles avaient donc été tenues à Itaga du 12 au 18. La brigade Nord allait reprendre sa marche en avant, quand le 19 septembre à 8 heures, un parlementaire se présentait aux avant-postes et annonçait, au nom du Gouverneur, la reddition de Tabora.

Après la prise d'Ujiji, les Allemands battant en retraite devant la brigade Sud avaient laisséun détachement à Kutshugi, pour défendre le pont du chemin de fer, sur la Malagarasi.

Le colonel Olsen prescrivit au major Muller de déloger l'ennemi par une attaque directe en même temps qu'avec le restant de son groupement (2 bataillons, 1 batterie St-Cha- mond et une section de ponton uiers) il passerait sur la rive gauche de la Malagarassi et ferait un mouvement tournant, remonterait vers le Nord et suivrait la voie ferrée à l'Est de la boucle de la Malagarassi.

Le 14 août, le IIIe bataillon, avait pris pied sur la rive gauche de la rivière et, le 16, les deux autres avaient rejoint et occupaient la gare .

Les troupes de Tabora qui disposaient du chemin de fer, constituaient une sérieuse menace pour la brigade Olsen et devaient déterminer son chef à marcher aussi concentré que possible, mais la région à traverser était très pauvre et il fut obligé de prescrire au commandant du 2e régiment de marcher par la région Sud de la voie ferrée. Il avait à se trouver, le 25 août, sur la rive droite de l'Ugala, à Ngombe.

Un renfort arriva à la brigade Sud, le 13 août. Les Alle- mands n'ayant plus aucune force sur le lac Tanganika, le VIe bataillon qui protégeait le port de Lukuga, était devenu

40

disponible, et il débarquait à Karema, sous les ordres du capi- taine c o m mandant Borgerhoff. Il avait à former flanc garde du 2e régiment et à se porter sur le confluent des rivières Ugala et Wal a.

Il arriva à Tabora le 25 septembre.

Le 2e régiment, qui le 24 août se trouvait sur la rive gauche de l'Ugala, crut, par suite d'informations inexactes, que la colonne de gauche dont il protégeait le flanc avait marché plus rapidement que la sienne et poussa en avant son Ve batail- lon qui, dès le 31 août arrivait à Katnndu, à 50 kilomètres de Tabora.

Le commandant de ce bataillon porta un détachement de 50 hommes, sous les ordres du capitaine commandant Svihus, vers Ussoké, sur le chemin de fer. Ce poste mal défendu fut enlevé et de nombreux approvisionnements restèrent sur place.

Le commandant Svihus y résista héroïquement à plusieurs assauts. Le 7 septembre, l'ennemi attaqua le poste avec des forces importantes, mais celui-ci avait été renforcé par un bataillon du 1er régiment et l'attaque fut repoussée.

Le 9, le 1er régiment renforcé par le VIIe bataillon du. 2e régiment, se porta en avant et arriva à Mabama; l'ennemi en force était signalé sur les hauteurs de Lulanguru, comman- dant la route vers Tabora et le chemin de fer.

Le commandant du 1er régiment engagea le combat, le 10 septembre, au point du jour.

Le Ier bataillon à la droite marchait au Sud de la voie ferrée; le IIIe suivait le chemin de fer.

Le IIe bataillon avec la batterie Saint Chamond, plus au Nord, attaquait la droite de l'ennemi. Dans l'après-midi de cette première journée, les positions avancées de l'ennemi, les collines Ouest de la défense, furent enlevées.

Le 11, la progression continua. Le IIe bataillon, protégé par le feu de la batterie Saint Chamond, arriva sur les- hauteurs de la droite ennemie.

La résistance plus acharnée au centre et sur la gauche,, limita pour cette journée, le succès de l'attaque.

La situation était donc bonne quand, vers le soir, des forces- importantes signalées à Katundu, à une quarantaine de kilo- mètres au Sud de Lulaügura, firent croire à un mouvement sur l'arrière de la droite de l'attaque.

Les forces du lieutenant-colonel Thomas devaient protéger

41

le 1er régiment de ce côté ; mais leur arrivée n'était pas encore signalée.

D'autre part, le commandant de la brigade Sud apprenait que la colonne du colonel Molitor, était le 9 à Mambali et devait ainsi, s'il avait continué sa marche, se trouver au moment de l'attaque sur Lulanguru, à une cinquantaine de kilomètres au JSTord de Tabora.

Voulant empêcher l'ennemi de porter des forces vers le Nord, il n'hésita pas à continuer l'attaque le lendemain, 12.

Cette préoccupation dans la situation il était fait honneur au commandant de la brigade Sud

Le 12, le Ier bataillon (droite) fut chargé de la démonstra- tive, tandis que le IIIe bataillon (centre) et le IIe bataillon (gauche) reçurent l'ordre de pousser l'attaque à fond.

Les difficultés du terrain, la quantité réduite des munitions ne permirent pas d'obtenir le résultat entier.

Le IIe bataillon progressa et envoya ses éléments avancés jusque dans la gare de Lulanguru.

Le IIIe progressa aussi et arriva sur la ligne occupée par le Ier.

Mais celui-ci ne put se maintenir sur les positions conquises ce jour-là. Une énergique contre-attaque arrêta l'ennemi.

La menace persistante de forces allemandes sur la droite, l'absence de nouvelles précises du lieutenant-colonel Thomas, la grande fatigue des troupes du Ie' r régiment qui combattaient depuis trois jours, déterminèrent le commandant de la brigade à donner l'ordre au major Muller, dans la nuit du 12 au 13, de ne pas continuer le mouvement offensif.

Le 13, les bataillons avaient repris la position occupée avant l'attaque.

Le combat de Lulanguru avait été mené pendant trois jours par le commandant du 1er régiment avec la plus grande énergie. Les chefs et les troupes y ont fait preuve dune vaillance et d'une endurance que nous aimons à signaler.

Le 13 au matin, l'ennemi attaqua la position prise par le 1er régiment. Il subit un échec complet et fut forcé de se retirer sur les hauteurs de Lulanguru.

La situation de la brigade Sud fut améliorée dès le lendemain; l'ennemi évacua Katundu et ce point fut occupé par le Ve bataillon.

Le 14, le commandant de la brigade Sud recevait des nou-

42

velles du combat dTtaga et voulant exercer une nouvelle pression sur l'ennemi, il reprit, le 15, la marche sur Lulan- guru et, dans la nuit du 15 au 16, il occupait la crête de cetxe position; le 17, il marcha sur Tabora ; le 18, le 1er régiment, après avoir refoulé une force considérable, couronnait les hauteurs Ouest de la localité. Le groupement du lieutenant- colonel Thomas marchait en même temps vers le Sud de Tabora, sur Uruma, des troupes ennemies étaient signalées. Le 19 septembre au matin, des parlementaires se présentaient au commandant de la brigade. Ils étaient porteurs de déclarations, assurant, comme il avait été fait le même jour à Itaga, au nom du Gouverneur, la reddition de Tabora aux troupes belges.

Les deux brigades avaient donc bien manœuvré, puisqu'elles avaient empêché l'ennemi de profiter de la grande supériorité que lui donnaient les lignes intérieures et les voies ferrées qui lui permettaient des déplacements rapides de troupes. Les résistances énergiques qu'il trouva des deux côtés ne lui per- mirent pas de déplacer des forces suffisantes pour lui donner une grande supériorité sur l'une des lignes.

Les Allemands avaient longtemps cru que Tabora par -sa situation et ses moyens de défense tiendrait indéfiniment et ils y avaient envoyé tous leurs prisonniers anglais, belges, hindous, noirs.

De grands approvisionnements y étaient concentrés.

Les missionnaires anglais avec leurs femmes et leurs en- fants avaient aussi été internés à Tabora.

Le général von Lettow-Vorbeck jugeant, d'après les forces qui menaçaient Tabora en septembre 1916, que la résistance sur ce point devait amener un désastre, avait donné l'ordre au général Wahle qui commandait la place, d'évacuer à temps vers le sud le matériel transportable.

Pour ne pas compliquer la retraite, les prisonniers furent laissés à Tabora.

La prise de Tabora libérait 200 prisonniers européens qui avaient grandement souffert, surtout les anglais, de leur longue captivité.

L'Est Africain allemand était conquis, des forces anglaises et belges occupaient à peu près tout le territoire. Le chemin

43

de fer depus Dar-es-Salam jusque Kigoma était au pouvoir des alliés. Les forces restantes de l'ennemi se réunissaient au Sud, poursuivies par des troupes anglaises, dans la direction de l'Est Africain Portugais.

Le général von Lettow ne pouvait plus avoir l'espoir de tenter des opérations qui lui rendraient les points importants du pays.

L'Angleterre décida alors de continuer seule la campagne.

Le général belge Malfeyt était envoyé en qualité de haut commissaire royal à Kigoma pour organiser et gouverner les territoires conquis par nos troupes. 2,000 hommes seulement restaient à sa disposition et dès le mois de janvier 1917, l'éva- cuation des forces vers le Congo belge fut commencée et pour- suivie activement.

Les allemands qui s'étaient retirés devant les forces an- glaises et belges occupaient à 500 kilomètres au sud de Tabora un territoire ayant des dépôts encore bien pourvus d'armes et de munitions.

Ils purent s'y réorganiser suffisamment et rompra l'encer- clement commencé par les forces anglaises.

L'on apprit ainsi brusquement qu'une colonne allemande marchait vers l'Ouest dans la direction du Katanga. Ce retour offensif détermina le gouvernement belge à suspendre le mou- vement de dislocation et des mesures de protection furent prises à l'Est du Tanganika.

Le 21 mars, le commandant supérieur apprenait la marche de la force allemande vers le Nord ; elle semblait alors mena- cer Tabora.

A la demande du Gouvernement anglais, il fut décidé que des troupes belges participeraient à une seconde campagne, jusqu'à Tentière destruction des forces allemandes.

Le commandement des nouvelles forces fut confié au lieute- nant-colonel Huyghé, chef expérimenté, qui avait fait preuve de grandes qualités au cours de la campagne qui venait de finir.

Il apparut par la suite que la marche vers Tabora n'était qu'une feinte. Ce que voulait le général allemand, c'était pro- longer la lutte le plus longtemps possible, espérant que la colonie ne serait pas conquise complètement au moment de la signature de la paix.

L'opération principale de nos troupes fut dirigée vers Mahenge, centre principal des forces allemandes.

44

La coopération des troupes anglaises et belges eut un plein succès; elle obligea l'ennemi à passer en territoire portugais, avec des forces encore importantes.

Le général von Lettow tint la campagne jusqu'au moment de la signature de l'armistice.

11 semblait alors vouloir menacer la Rhodésie et le Sud du Katanga. C'était un chef habile et d'une grande énergie physique et morale.

* * *

La conquête de l'Afrique Orientale allemande a mis en grande évidence la valeur des troupes congolaises.

Chefs et soldats sont dignes d'éloges.

Les campagnes dans nos pays d'Europe sont souvent ren- dues pénibles, non pas tant par les fatigues de la marche et de la bataille que par les privations résultant d'erreurs de l'intendance ou des chefs et de manque de moyens de trans- port.

Mais que l'on songe à ce que furent les privations de toute espèce pendant ces longues étapes dans un pays sans vraies routes, sans véhicules, tous les ravitaillements devaient arriver à dos d'homme. Les opérations avec de petites forces sont faciles ; avec de grosses unités comme celles qui ont été mises en mouvement dans l'Est Africain, elles sont d'une ex- cessive complication.

Les plus belles combinaisons, les ordres les mieux donnés sont souvent inexécutables, en suite des arrêts forcés de troupes qui n'ont plus ni vivres ni munitions.

L'attention a été particulièrement attirée sur les difficultés qu'a éprouvées la brigade Nord pendant la première campagne. Elle a passé par des phases pénibles, expliquant bien la len- teur de certains mouvements, qui auraient pu avoir les consé- quences les plus graves si des chefs très expérimentés n'avaient pas eu la prévoyance et l'énergie que nécessitaient les situa- tions.

Au combat, les événements se succèdent avec des péripéties qui sont vues et récompensées, mais que d'événements péni- bles naissent et perdurent dans les marches et les stationne- ments où le mérite reste latent.

Soyons donc reconnaissants j)our les succès remportés par

45

nos troupes coloniales, en nous rappelant leurs victoires, mais aussi leurs souffrances.

L'entrée triomphale du général Tombeur à Tabora, les éloges que lui, ses officiers et ses troupes ont si bien mérités, nous rappellent les pages glorieuse^ de l'histoire de la création de notre Empire africain, les expéditions vers les frontières pour assurer définitivement les limites de l'Etat; l'occupation si compliquée des territoires duHaut-Oubaughi et du Bomou ; les marches vers le lac Tchad pour y créer des relations avec les Senoussis, étendre dans cette direction l'autorité du Gouverne- ment ; la lutte contre les Mhadistes, l'arrivée au Nil, la prise de Lado après des efforts de plusieurs années ; la conquête de la province Orientale sur les Arabes esclavagistes ; les longues expéditions vers le Katanga pour en assurer la possession fort menacée par les voisins du Sud; les organisations défensives sur les frontières Est à protéger contre les Allemands déjà très agressifs, les expéditions vers le Kwango pour y main- tenir les droits de l'État ; longue série de marches et de luttes de plusieurs années donnant déjà alors à la force publique une réputation qu 'elle a tant accentuée par la campagne qui l'a menée à Tabora, qui donne à la Colonie le Kuanda et l'TJrundi, vaste territoire que l'on classe parmi les plus riches à tant de points de vue, de toute l'Afrique Centrale.

En rendant hommage aux troupes qui ont participé à la con- quête de l'Est Africain Allemand, pensons aussi à celles qui ont tant lutté, et souvent si péniblement lutté, pour la créa- tion et l'affermissement de l'Empire colonial belge.

En Belgique et au Congo, en toutes circonstances, nos troupes bien conduites ont montré la plus grande bravoure; elles inspirent confiance et nos grands voisins le disent tous les jours, en exprimant le désir que nos forces soient dans l'avenir alliées aux leurs.

Cet avenir nous pouvons le considérer sans crainte, si nos dirigeants savent donner à cette âme militaire belge si bien douée, le corps robuste qui la rendra invincible.

Baron Wahis.

46

L'Organisation sociale dans le Bas-Congo.

Sommaire. Préface. Le Mariage. L'Enfant. Le Clan. L'Autorité. L'Esclavage. La Propriété. Le Travail. Con- clusion.

Préface.

Le Congo Belge est surtout occupé, ainsi que la plus grande partie de l'Afrique centrale, par des peuples de langue ban- toue, et en raison de ce lien commun, les mêmes coutumes se retrouvent chez toutes les populations dispersées à travers notre immense colonie.

Cependant sous l'influence du temps et des conditions diverses d'existence, ce fond commun a subi des transforma- tions assez sensibles chez les différentes tribus. Aussi à vou- loir embrasser dans une même étude, tous les peuples qui occupent ce vaste continent, on risque de donner une pein- ture infidèle de chacun d'eux.

Dans cette monographie, je ne m'occupe que de la partie du Bas- Congo, qu'arrosent les deux affluents du grand fleuve : à l'Ouest, le Kwilu, et à l'Est, la Lukunga. Kim- pese est situé plus ou moins au centre du pays ainsi circon- scrit, et ses missionnaires visitent les petites chrétientés échelonnées entre les deux rivières, depuis le Congo portugais au sud jusqu'aux approches du fleuve, au nord.

Pendant plusieurs années, j'ai été chargé de ce ministère et mes fréquents séjours dans les villages de l'intérieur m'ont permis d'examiner et d'étudier de près les coutumes locales. De plus, comme les Congolais profitent volontiers du passage des missionnaires pour leur confier leurs difficultés, j'ai souvent m'occuper de leurs affaires, trancher leurs palabres, et par il m'a été donné de pouvoir pénétrer bien des secrets de la vie indigène.

/

47

Le présent travail n'est que le résultat des observations faites pendant mes années d'apostolat.

Je prie le lecteur de se souvenir que, dans cette étude, je n'ai en vue que le seul pays de Kimpese et lorsqu'au cours de mes notes, j'emploie les mots : Bas-Congo, Congolais, indi- gène, etc., je lui demande de ne les prendre que dans le sens restreint que je viens d'indiquer.

Je me suis proposé avant tout de dépeindre la société con- golaise telle qu'elle s'offre maintenant à notre observation, en décrivant les éléments qui la composent, et en en traçant l'organisation.

J'ai donc laissé de côté les questions qui se rapportent au culte, au fétichisme, etc., qui ne rentrent pas dans le plan de mon travail, et ce n'est qu'en passant que j'y toucherai parfois.

Je n'ai pas la prétention d'aborder un sujet nouveau.

Les différentes questions que je traite, ont été souvent ex- posées dans les livres et les revues, par les missionnaires et les agents colonisateurs. J'ai essayé seulement de les replacer dans le cadre que je connais et d'en faire une monographie de notre pays de Kimpese.

CHAPITRE PREMIER.

Le Mariage.

Peut-on donner le nom de mariage à l'union des Congo- lais ? L'idée qu'ils s'en font est tellement vulgaire, et le con- trat qui les associe est tellement fragile, qu'il n'est pas pos- sible de juger le mariage indigène par analogie avec le ma- riage chrétien, sans commettre de graves erreurs.

La langue congolaise, d'ailleurs, marque bien la différence entre les deux mariages. Dans son réalisme, elle exprime de façon brutale, ce qu'est le mariage indigène. Le mari, dit-on, emprunte sa femme « sompa », et la femme lui est prêtée par ses possesseurs « sompesa » ; ae marier se dit « sompana » c'est-à-dire, être prêté l'un à l'autre.

Par contre, le mot « kazala » qui se rencontre sur la fron- tière de l'Angola, et est le terme noble, est réservé au mariage chrétien, contracté devant le prêtre.

Mais pour qu'on ne puisse me reprocher de calomnier le

48

mariage indigène, je me propose de montrer comment il se contracte, et comment il se brise, et enfin ce que les époux pensent de leur union.

Le lecteur pourra ensuite, à la lumière des faits, juger si mon appréciation est trop sévère.

Mais d'abord, je dois signaler une coutume remarquable. Les indigènes connaissent l'exogamie, ainsi que disent les ethnologues, qui interdit les mariages entre parents.

On peut ramener les empêchements à deux classes. La pre- mière est la parenté par le sang. Si celle-ci s'établit par la branche maternelle, elle est un empêchement à tous les degrés, à l'infini.

Si au contraire, elle s'établit par la ligne paternelle, elle constitue ou non, un empêchement entre cousins, suivant les coutumes locales.

Je donnerai plus tard la raison de cette différence, quand j'examinerai la situation de l'enfant vis-à-vis de son père et de sa mère.

Certains de ces empêchements peuvent être levés, moyen- nant une somme, habituellement de la valeur d'un cochon, à payer aux parents de la femme.

La seconde classe d'empêchements réside dans la parenté par alliance, avec cette particularité que les aînés de la famille ne peuvent épouser les femmes répudiées ou laissées par leurs cadets, tandis que ceux- ci peu vent s'unir aux anciennes épouses de leurs aînés.

La raison assez facile à saisir, en est que ce serait un dés- honneur pour l'aîné, de s'abaisser à prendre pour épouses, des femmes qui ont d'abord été sous le pouvoir de son cadet. Ainsi l'oncle ne peut épouser la femme répudiée par son neveu, mais celui-ci peut, doit même parfois épouser les femmes lais- sées par son oncle ou son frère aîné, défunt.

La femme a très peu à dire dans le choix de son mari. Si celui qu'on lui impose, ne lui plaît pas, et si elle a un peu d'audace, il ne lui restera plus tard qu'une ressource pour s'en débarrasser : chercher des querelles de ménage qui obligeront ses possesseurs à pajrer des amendes au mari lésé, jusqu'à ce qu'enfin, lassés de payer sans cesse, les parents de la querel- leuse, consentent à briser cette union par trop coûteuse pour eux.

Ce sont les possesseurs ou parents (les deux mots sont syno- nymes) de la femme qui traitent l'affaire de son mariage.

49

Quelquefois l'enfant est fiancée dès sa naissance.

Ces fiançailles précoces se font pour les motifs les plus divers.

Il arrive que c'est uniquement pour faire plaisir à un ami, que le possesseur de la petite fille la lui promet en mariage. JLe fiancé, qui' parfois est un vieillard, donne de temps en temps à sa jeune promise, un pagne, un peu de viande, un verre de vin de palme ou « malafu » dans le langage indigène. C'est pour lui, une manière de maintenir et d'attester ses droits sur l'enfant.

Un matin, je trouve à ma porte une enfant de 13 à 14 ans qui vient me dire en pleurant : « Père, je sais venue chercher protection près de vous. A ma naissance, on m'a promise à un vieux qui a déjà une femme. Or, je ne l'aime pas, et je ne veux il aucun prix de ce mariage. Jusque maintenant, je n'ai rien dit, car à qui me serais-je adressée ? Mais aujourd'hui que vous êtes de passage dans le village, vous devez arranger l'af- faire. » J'appelai le vieux et l'obligeai à rompre ce mariage. Je lui fis compter, pour le lui restituer, ce que l'enfant lui avait coûté. En l'espace de 13 à 14 ans, il avait dépensé 20 francs. Ce n'est pas trop, je crois ; le vieux, cependant, prétendait s'être montré généreux, et ne pouvait comprendre en quoi il avait déplu à la jeune fille.

Parfois ce sont des raisons de village qui déterminent ces fiançailles.

Ainsi, un autre jour, je vois à genoux près de moi, une jeune fille qui me supplie de la séparer de son mari, lui aussi un vieux polygame. J'appelle le possesseur de la fille et lui de- mande comment il a pu arranger un tel mariage ? « Notre vil- lage est si petit, me dit-il, que je n'ai pas voulu marier ma fille ailleurs, car une femme en moins chez nous, c'est une grosse affaire. Qui donc entretiendra les plantations, nettoiera les chemins, ira chercher l'eau et le bois, et préparera la nour- riture? Or, dans mon village, je n'avais pas le choix. J'ai donc la réserver pour ce vieux. »

11 arrive aussi que les possesseurs cèdent à la crainte. Le vieux Dongalla de Tambi se glisse un soir dans ma case et me dit : <c Père, je possède une petite fille. Or, il y a ici un homme violent, qui a déjà trois femmes et qui m'a impose son choix. Quand ta fille sera grande, m'a-t-il dit, elle sera ma femme. Je n'ai jamais voulu accepter l'argent qu'il în'of-

50

frait pour me faire ratifier le mariage, mais d'autre part, je n'ai osé protester. Maintenant je viens vous avertir en secret que l'enfant va venir vous trouver, et qu'elle espère que vous la délivrerez de ce fiancé qui lui est odieux. »

Plas souvent, les enfants sont cédées pour de l'argent. Je m'apprêtais à donner le baptême à une gamine, Dianzenza, maintenant Thérèse, quand sa mère m'appelle « Père, je dois vous prévenir que ma fille est fiancée à un polygame d'un village voisin. » « Comment, si petite, et déjà fiancée ? » « Mais oui, il y a quelques années son possesseur se trouvait sans argent au moment de payer l'impôt. Son voisin l'apprit, et vint proposer de lui donner les douze francs nécessaires, à condition qu'il lui réservât ma fille en mariage. Le possesseur accepta et Dianzenza est ainsi fiancée malgré elle et malgré moi.. »

J'ai vu céder une petite fille pour la remise d'une dette de cinq francs que le débiteur ne pouvait acquitter.

Bien plus, les enfants sont parfois promises même avant leur naissance. C'est ainsi qu'un chrétien vint me déclarer, la veille de la proclamation de ses bans de mariage : « Je ne veux pas de ce mariage : le possesseur de ma femme ne me cède celle-ci qu'à la condition qui si nous avons une fille, elle ne sera pas baptisée et lui sera gardée pour ses vieux jours Je préfère abandonner ma fiancée plutôt que de souscrire à une condition aussi immorale. »

Un grand nombre d'enfants sont fiancés dès l'âge de 10 à 11 ans, et naturellement sans qu'on les consulte.

L'affaire s'arrange entre les familles. Les parents du jeune garçon paient aux parents de la fille, une somme, moyennant laquelle, l'enfant ne peut être aliénée en vue d'un autre ma- riage. Le garçon envoie ensuite à sa fiancée, un anneau, par- fois un mouchoir, plus tard un pagne. Puis, le marché conclu, il quittera peut-être le village pendant quelques années, s'ex- patriera même au loin, sans donner de ses nouvelles. Mais quand il le jugera bon, il pourra revenir chez lui, sans les appréhensions du vieil Ulysse au sujet de la fidélité de sa Pénélope. Il sait, en effet, que les parents qu'il a laissés au pajTs, veillent jalousement sur la femme qu'ils lui ont procurée autrefois, et ne permettront jamais qu'elle passe en d'autres mains.

C'est ainsi que la plupart des enfants de notre mission sont déjà fiancés. Et c'est une coutume que nous approuvons, quitte

51

à briser plus tard les fiançailles si les jeunes gens ne s'aiment pas. Mais le coeur compte si peu dans les mariages congolais, et la difficulté de se procurer une jeune épouse est parfois si grande, que la question qui prime toutes les autres pour les jeunes gens est celle-ci : trouver une femme de leur âge. Aussi sommes-nous heureux quand les enfants de la mission viennent nous annoncer leurs fiançailles. Nous sommes ainsi dispensés de nous occuper de leur mariage, ce qui au Congo, comme en Europe, est toujours une tâche ardue et dangereuse.

Il est plus rare qu'on attende que la jeune fille soit nubile pour la fiancer, car aussi longtemps qu'elle n'est pas promise, c'est à ses parents qu'incombe le soin de rhabiller et ils ne tiennent pas à ces dépenses. « Père, me disait un jeune homme avant mon départ pour son pays, ma femme est morte der- nièrement et son enterrement m'a coûté cher. Maintenant, je n'ai plus d'argent et il m'est impossible d'habiller ma sœur. Procurez-lui donc un fiancé qui se chargera de ce soin, et je serai débarrassé d'un fameux souci. »

Mais, même si le mariage est conclu entre jeunes gens, la situation se présente toujours la même : ce sont les posses- seurs, surtout ceux de la femme, qui décident de tout.

Afin de faire mieux saisir la mentalité et les mœurs des Con- golais, il me semble intéressant de décrire comment se traite un mariage d'adultes.

La famille du jeune homme, trouvant que le moment est ar- rivé pour celui-ci de se marier, se met à la recherche de la future. Par les relations fréquentes entre villages, on connait tout ce qui se passe aux environs et on sait bien vite s'adres- ser avec quelque chance de succès. La première démarche est faite par le jeune homme qui risque, par l'intermédiaire d'un parent, l'envoi d'un anneau. La jeune fille, naturellement, en avertit ses parents qui lui permettent de garder le cadeau ou lui ordonnent de le renvoyer. Si l'anneau n'est pas retourné, la famille du jeune homme en conclut qu'on peut faire un pas de plus. Les proches parents de celui-ci viennent alors offrir du malafu à la famille de la femme. Si l'on refuse de boire le malafu, l'affaire est rompue ; si l'on accepte, au contraire, c'est qu'on veut sérieusement entrer en pourparlers. Le jeune homme est autorisé à envoyer un pagne à la jeune fille, et on fixe un jour l'on se réunira pour déterminer le montant de la somme à payer. C'est ici le côté difficile, et c'est sur cotte

52

question que souvent les tentatives de mariage échouent.

Au jour fixé, toute la famille du jeune homme arrive avec dénormes calebasses de malafu. La famille de la jeune fille est en face. Ah ! quelles belles fêtes pour nos Congolais, que ces séances l'on va boire, discuter, et crier, car tout Con- golais naît parleur et aime à plaider ! On s'assied donc en cercle et naturellement on boit d'abord le malafu en parlant de la pluie et du beau temps. Puis vient la première escar- mouche : on présente un verre à la jeune fille. Si elle boit, c'est qu'elle consent au mariage; si elle refuse, c'est qu'elle ne veut pas du jeune homme qu'on lui propose, ce qui d'ail- leurs, est très rare. Auquel cas, ses parents l'appellent à l'écart, lui font la leçon et l'obligent à consentir.

Le malafu vidé, la discussion s'ouvre pour du bon.

Les parents de la jeune fille commencent toujours par demander un j>rix exagéré, par exemple dans ce pays, ils exi- geront cent francs. Aussitôt cris et récriminations de la partie adverse : on discute, on se dispute, parfois même on ne peut s'accorder et l'on se sépare sans avoir rien conclu. Plus sou- vent on finit par tomber d'accord.

La somme, dans le pays de Kimpese, varie de 20 à 50 francs. Parfois même si les deux familles sont amies, on se contente de malafu pour une somme de 5 à 10 francs, avec promesse généralement de la part de la famille du mari, de donner à la prochaine occasion, une femme en mariage à la famille de l'épouse.

Voici, à titre d'information, un exemple de contrat matri- monial : le jeune homme devra payer 15 francs en espèces et une chemise à l'oncle, un veston au frère, une couverture à la mère, et deux épaules de buffle à la famille de sa femme, ce qui fera environ 50 francs.

Si la femme est divorcée ou veuve, la somme peut être plus considérable car les parents de la femme doivent restituer au mari abandonné ou, dans certains cas, aux parents du mari défunt, outre la somme autrefois fixée dans le contrat matri- monial, tout ce que la femme a coûté à son époux, pendant leurs années de mariage. En l'occurence l'adresse des posses- seurs de la fille consistera donc à amener les parents du jeune homme à leur payer une somme équivalente à celle qu'ils doivent restituer : de cette manière, il n'y a pas de perte pour eux. C'est alors qu'on joue partie serrée.

53

Ces contrats sont souvent pour la famille de la femme, une occasion pour exiger réparation des torts que lui a causés la famille du mari, et avant d'aborder tout autre débat, elle ré- clamera d'abord un cochon ou une chèvre pour terminer d'an- ciennes querelles et mettre fin à de vieilles inimitiés.

Et pour juger du degré d'abaissement de la femme congo- laise, il faut savoir que la jeune fille est accroupie avec sa mère et ses amies derrière le groupe des contractants, et qu'elle assiste au débat Ton discute son prix comme l'on discuterait le prix d'une chèvre sur le marché.

Ces débats sont très longs, et peuvent durer deux ou trois jours. Ceux qui connaissent l'amour des Congolais pour les discussions, ne s'en étonneront pas.

L'affaire est terminée, et les deux parties se séparent après quelques grosses plaisanteries.

Quelques jours après, le fiancé vient offrir une dernière cale- basse de vin de palme aux parents de sa fiancée, et leur de- mande la permission de l'emmener chez lui. C'est le dernier acte. Dès que la femme a mis le pied dans la maison de son mari, le mariage est définitivement conclu.

Il n'existe pas ici, comme en d'autres pays, de cérémonial spécial x^our introduire l'épouse dans la demeure de son époux. Un an ou deux après seulement, si le mariage est heureux, la famille de la femme offre une chèvre et un grand festin au mari, pour le remercier des soins dont il entoure leur parente. La conclusion pratique est qu'après cet acte de courtoisie, les parents du mari, à la mort de ce dernier, n'ont droit à aucune restitution, de la part de la femme.

Mais que dire du mariage des femmes plus âgées ?

Elles sont cédées à vil prix, et c'est ici surtout que toute idée du véritable mariage a disparu, ainsi que je le montrerai bientôt.

Voilà le contrat matrimonial chez les Congolais. Mais grâce à Dieu, la lumière commence à se projeter sur ces ténèbres. Les mariages de nos jeunes gens chrétiens ne se traitent plus comme une vente d'arachides ou de poules.

Xous avons respecté les coutumes indigènes dans ce qu'elles ont de bon, ou du moins dans ce qui n'est pas mau- vais. Par exemple, les indigènes considèrent comme un simple concubinage, les unions aucun argent n'a été payé, et le malafu n'a pas été présenté aux parents de la femme. Afin

54

d'éviter à nos chrétiens, la honte d'une union considérée comme illégitime, nous voulons que nos jeunes gens paient la somme exigée par la tradition.

Mais avant que ces questions soient débattues entre les pa- rents, nous réclamons d'abord le consentement des jeunes gens. A eux, avant tout, il appartient de décider de leur ma- riage, et non aux vieux chefs des villages. C'est leur goût que nous consultons, et non ceux de leurs possesseurs, et nous leur disons : « Vous devez choisir vous-mêmes, car le mariage une fois conclu, c'est jusqu'à la mort. » Aussi nos jeunes chré- tiens nous avertissent toujours quand le moment de leur ma- riage est arrivé. Parfois en secret, quelquefois même en public, ils nous font connaître leurs désirs et leurs répugnances, nous demandent de les aider contre l'arbitraire des anciens, et sou- vent nous chargent de faire les premières démarches auprès des parents.

Ainsi peu à peu, c'est le cœur qui décide, et les bons mé- nages se forment préside l'amour conjugal. L'exemple en- traîne et les jeunes gens restés païens viennent insensiblement à nous.

Les vieux païens le savent bien, qui pendant longtemps ont lutté contre notre influence et par conséquent contre le bap- tême. « Les missionnaires consultent trop le goût des jeunes gens, disaient-ils. Nous n'avons plus rien à dire. Aussi si nous voulons rester les maîtres, luttons contre eux. )>

Qu'est le mariage pour les Bakongos ? Le lecteur le devine sans doute déjà par ce que j'ai dit précédemment. Mais pour répondre complètement à cette question, je parlerai d'abord de la part que l'amour a dans ces unions, je montrerai ensuite comment le Congolais apprécie le mariage, et enfin quels avan- tages il en attend, avant tout.

Et d'abord, l'amour conjugal existe-t-il dans les mariages païens ? Sans doute un peu, mais qui peut sonder le coeur du Congolais, et lire ce qui s'y passe ? Ce n'est qu'en suivant de près et en examinant attentivement sa manière de faire que nous pouvons deviner peu à peu l'âme du nègre et les sen- timents qui s'3' agitent.

Un jeune homme entre chez moi, la face épanouie, a LTne bonne nouvelle, me dit-il tout joyeux; il vous faudra proclamer mes bans : j'ai trouvé une femme, et après-midi, je vais offrir le inalafu à sa famille. » « C'est bien, lui répondis-je, mais

- 55

auparavant, je dois interroger la jeune fille, » et Mathias s'en va acheter son rnalafu. Mon catéchiste qui assistait à l'entre- tien nie dit : « Père, il est vu ; je connais l'affaire ; la jeune fille refusera. » De fait celle-ci répond par un non catégorique qui ne laisse pas d'espoir. Je rappelle le jeune homme : « Tâche de revendre ton malafu, si tu ne veux pas en être pour ton argent. La jeune fille ne veut pas de toi, et tu ne peux te présenter chez ses parents. » « Ça ne fait rien, dit-il aus- sitôt en riant ; si c'est ainsi, j'irai boire mon vin avec les amis. » Peiné de ce que je croyais sa déconvenue, je demandai à, mon catéchiste si Mathias ne s'en ferait pas du chagrin. « Vous êtes encore naïf, fit-il avec un sourire, et vous ne nous connaissez pas. Ce n'est pas le refus de la jeune fille qui peut l'ennuyer, mais bien la question de savoir s'il trouvera une autre femme. Si une nouvelle démarche réussit, il aura bien vite oublié Jeanne Nsaka. Quoiqu'il en soit, ne vous inquiétez pas, il n'en pleurera pas. »

L'amour conjugal est si peu de chose chez eux, que l'impôt supplémentaire de 5 francs par an, et par femme, en plus de la première, a suffi à déterminer un bon nombre de polygames à renvoyer une seconde ou une troisième femme à qui ils étaient cependant unis depuis longtemps « 5 francs par an, c'est dur, disent-ils ; mieux vaut se débarrasser de la femme que de payer cet impôt. »

Bien ne nous froisse comme leur conduite lorsque l'un des conjoints est malade. Si la maladie traîne et s'il n'y a pas d'es- poir de guérison, par exemple dans la maladie du sommeil, souvent l'époux malade quitte le foyer et retourne se faire soigner dans sa famille. L'autre conjoint accepte volontiers, et au besoin suggère lui-même la solution, afin d'être délivré de l'ennui de soigner un malade. Nous défendons énergiquemeut à nos chrétiens cette conduite vraiment honteuse. Nous leur enseignons que s'ils ont pris le mariage avec ses joies, ils en ont aussi accepté les peines, et qu'ils ne peuvent confier à d'autres mains, le soin de leur époux malade.

Je pourrais multiplier les exemples, qui prouvent combien est peu profond l'amour qui unit les époux.

Comment considèrent -ils donc leur mariage ?

Je l'indiquais au début de ce chapitre, le mariage, dans le langage indigène est un prêt, l'époux emprunte sa femme, celle- ci lui est prêtée. Partant de cette idée, les possesseurs de la

56

femme ont le droit de faire condamner le mari si celui-ci n'a pas soin de l'objet prêté, en l'occurrence, la femme, s'il la frappe, l'insulte, ne l'habille pas décemment. Par contre le mari qui a payé l'objet prêté, je dirais presque loué, a le droit d'attaquer en justice, les prêteurs, s'il est trompé sur la valeur de l'objet prêté, si la femme est paresseuse, acariâtre, surtout si elle trahit la fidélité conjugale. Lui-même peut se déranger sans que sa femme puisse réclamer, puisqu'elle n'a rien payé. Mais quant à lui, il en est autrement : n'a-t-il pas donné son argent pour que sa femme soit à lui seul. D'où, dans la pra- tique, cette coutume malsaine : si la femme se méconduit et si le mari a connaissance de sa faute, il ne cachera pas la honte de son foyer, et n'ensevelira pas dans le silence, l'infidélité de son épouse, mais il produira l'affaire en public et fera com- paraître devant les chefs, celui qui a violé son foyer, et les possesseurs de sa femme.

Si le crime est prouvé, le violateur sera condamné à une amende, ainsi que les parents de l'infidèle à qui les juges diront : « Vous avez prêté votre fille, contre une somme : à vous de veiller sur sa fidélité, si vous ne voulez pas frustrer l'emprunteur, c'est-à-dire le mari. »

Parfois même les deux époux montent ensemble un scan- dale imaginé de toutes pièces, afin d'extorquer une amende à quelque ennemi. Mais les témoins, direz- vous, vont-ils les chercher en ce cas ? Coutume étrange, dans les procès de cette espèce, point n'est besoin de témoins, la seule déposition de la femme suffit. Et qu'on remarque que dans ces procès scandaleux, il n'y a pas la moindre honte ni pour le mari, et bien peu pour la femme.

Et le cœur de l'époux a-t-il été blessé par cette infidélité ? Peut-être, mais ce qui l'excite à poursuivre si âprement les fautes de sa femme, c'est surtout l'appât d'une amende à obte- nir, à « manger », selon le langage congolais.

Mais dans cette transaction, c est ainsi que j'appellerais, volontiers leur mariage, que recherchent donc les époux ?

Avant tout l'honneur de la paternité.

La honte suprême pour un Congolais, c'est la stérilité.

Quand les jeunes gens sont nubiles, leurs familles les obligent à se marier, coûte que coûte, même s'ils n'en ont pas encore envie. Et lorsque ensuite l'enfant ne paraît pas au foyer, les disputes, voire même les batailles sont continuelles

O /

entre époux. La femme ref'ase de nourrir son mari, celui-ci laisse sa femme courir en haillons. Les familles s'en mêlent, et auraient vite fait de rompre le mariage, s'il n'y avait en même temps des questions d'argent à régler. Le soir, pendant leurs danses à la lune, les gens du village et des environs se moquent, dans leurs chants, des époux stériles. Le mari va même parfois jusqu'à conseiller à son épouse de se mécon- duire, afin d'apporter un enfant au foyer, et de faire ainsi cesser les railleries du village, et les disputes des familles, Mais quand un enfant naît^ la paix est faite, la joie revient, le mari devient généreux, et le jourdu marché, la femme sort revêtue d'un pagne nouveau.

Cette mentalité a été pendant longtemps un des grands ob- stacles à la conversion des filles. Il se rencontrait des villages tous les garçons étaient chrétiens et toutes les filles païennes. Car les vieux païens se disaient qu'une fois bapti- sées, les jeunes filles devraient se marier religieusement. Or, comment pourraient-ils briser le mariage religieux au cas les jeunes époux n'auraient pas d'enfant. Par conséquent afin d'empêcher les mariages chrétiens, ils s'opposaient au bap- tême des filles, et ils conseillaient en secret à nos jeunes gens chrétiens d'épouser des païennes à l'insu des missionnaires. Si l'union était féconde, la femme serait ensuite baptisée et la situation régularisée ; sinon, le mariage païen serait tout simplement rompu.

On voit par là, les difficultés que nous avons rencontrées jusqu'au moment nous avons pu vaincre l'opposition des anciens et leur faire admettre plus ou moins l'enseignement chrétien sur le mariage. Maintenant, grâce à Dieu, les filles ont suivi le mouvement de conversion, et la question est réso- lue, que nous nous posions avec anxiété : Comment pourrons- nous marier nos jeunes gens chrétiens ?

Cependant qu'on ne croie pas que la mentalité indigène soit complètement changée : un pas est fait seulement. Les vieilles idées sont encore vivaces, et la preuve en est que les quelques mauvais ménages chrétiens qui se rencontrent dans nos vil- lages, sont presque tous, des ménages sans enfant.

Cet état d'esprit de nos Congolais me permet d'affirmer san^ crainte ce qui suit.

La population du Bas-Congo a été autrefois décimée par le portage forcé ; la maladie du sommeil y fait maintenant de

58

lamentables ravages. Mais les naissances y sont tellement nom- breuses que malgré tout le pays serait bien vite repeuplé, si la mortalité infantile n'y était si effrayante.

Je crois l'avoir suffisamment montré : c'est la gloire d'avoir des enfants que le Congolais recherche avant tout dans le mariage : plus il aura d'enfants, et plus il jouira de la consi- dération du village. Un mariage fécond est habituellement heureux, tandis que les époux se sépareront tôt ou tard, si la naissance d'un enfant n'est venue resserrer les liens par ailleurs bien fragiles de leur union.

Ce que le Congolais trouve ensuite dans le mariage, c'est son bien-être. Yoici, pris sur le vif, ce qu'il lui apporte. J'étais venu visiter un village complètement païen, je n'ai jamais pu faire un baptême. Le soir, je rencontre deux jeunes gens, braves garçons que je connaissais depuis longtemps. « Eh bien, leur dis-je, vous n'êtes pas encore mariés. Le temps en est déjà passé cependant pour vous. » « Ah, répondent-ils, nous sommes bien malheureux. Chez nous, on n'a pas encore reçu vos leçons, aussi les vieux en font-ils à leur guise. Ils retien- nent toutes les femmes pour eux seuls, et quand une jeune fille a grandi, c'est toujours à eux qu'elle va. Tandis que nous. nous n'avons pas de femme pour aller chercher notre eau et notre bois de chauffage, et pour préparer notre nourriture. »

Je parlerai plus longuement du travail de l'homme et de la femme dans un chapitre suivant. Qu'il me suffise d'indiquer ici sommairement que la femme doit à son mari l'eau, le feu, et la nourriture provenant du sol. Chaque soir, elle vient offrir, à genoux, le repas qu'elle a préparé, à son seigneur et époux. Celui-ci prend la corbeille sans prononcer un mot et va s'in- staller sur la rue en compagnie de ses amis, car jamais les hommes et les femmes ne prennent leur repas ensemble. Et tous les soirs, la même scène recommence.

Au Congo, celui qui a trouvé une femme, a donc son pain cuit. C'est légitime d'ailleurs selon lui : n'a-t-il'pas payé sa femme pour en recevoir ce service. N'importe, c'est, comme il en convient lui-même, de l'argent bien placé et à joli rendement.

On saisit par ceci une des raisons (je ne dis pas l'unique ni la principale) pour lesquelles les chefs qui reçoivent souvent des visites, veulent avoir beaucoup de femmes. Comment, e?i effet, une seule pourrait-elle suffire à préparer la nourriture pour tous les hôtes de passage?

59

Quels avantages la femme rencontre-t-elle à son tour dans le mariage ?

Avant tout, elle recherche la gloire de la maternité : une nombreuse famille est sa couronne.

De plus, le mari doit fournir à son épouse le logement et le vêtement.

En général les païens se montrent peu empressés a vêtir convenablement leurs femmes Sur ce point également, nous avons imposé à nos chrétiens, une autre manière de faire. Nous exigeons que leurs épouses, soient bien vêtues et si parfois quelque femme chrétienne se présente avec des vêtements peu convenables, surtout à la prière, nous nous en prenons publi- quement au mari, et lui faisons la leçon devant tout le village réuni. Singulières occupations pour un missionnaire, dira-t-on. Mais ne faut-il pas se servir de tous les moyens, petits et grands j>our introduire dans les idées et dans les mœurs, le respect de la femme, et la dignité de l'épouse.

C'est ici le lieu de parler de la condition des femmes âgées que la mort de leur époux a laissées sans soutien.

Qui les vêtira? Qui les logera? C'est une charge dont leurs parents ne veulent pas. 11 faut donc leur trouver un mari. Ils s'en rencontrera toujours bien l'un ou l'autre qui acceptera : une femme en plus, fût-elle assez vieille, c'est un peu plus de con- sidération dans le village, et un peu plus de nourriture, le soir, au retour de la chasse ou d'un voyage. Comme la femme n'a presque plus de valeur, sa famille ne se montre pas trop exigeante pour l'argent. En voici un exemple: les habitants de Mpangou étaient venus proposer un marché de ce genre à un jeune homme déjà marié, qui accepta la seconde épouse. Les parents de celle-ci demandèrent, en reconnaissance de leurs droits sur la femme, quoi ? une poule ! Et quelle fut la réponse du jeune homme ?

« Une poule ! mais c'est trop ! Reprenez votre parente, elle ne vaut pas ce prix ! »

Ou bien encore, voici dans quelles conditions on les marie : C'est un jeune homme qui ne trouve pas de parti, et à qui ses parents conseillent, en attendant qu'il rencontre une femme à son choix, d'épouser quelque vieille du village qui lui appor- tera au moins la nourriture, l'eau et le bois.

Ces pauvres femmes savent bien à quel prix on les estime : elles acceptent cependant avec joie : le gîte, le vêtement, c'est

00

tout ce qu'elles attendent de leur mariage. Elles pourront ainsi voir venir sans crainte et les pluies de la saison chaude et les froids de la saison sèche.

Ici encore, le changement s'opère lentement : nous en- seignons à nos jeunes chrétiens que c'est pour eux un devoir de subvenir aux besoins de leurs parentes âgées, et un certain nombre de ces bonnes vieilles, heureuses d'échapper ainsi à un mariage humiliant, se sont fait baptiser et sont devenues de braves chrétiennes.

Fondé sur des bases si peu solides, privé du lien de l'amour conjugal, traité comme un simple prêt, le mariage indigène, on le conçoit, est facilement brisé et les divorces sont fréquents ou plutôt continuels.

Le païen n'a pas plus l'idée de l'indissolubilité du mariage que de son unité. Et de fait, il est assez rare de rencontrer un congolais un peu âgé qui n'a pas divorcé une ou deux fois, au moins.

J'ai dit plus haut qu'il n'y avait pas dans ce pays de céré- monial spécial pour installer l'épouse au foyer conjugal. Cepen- dant quand le contrat ou plutôt le marché matrimonial est con- clu, les parents bénissent les nouveaux mariés en leur disant : « Que Dieu vous donne de nombreux enfants, et qu'il écarte de vous l'opprobre de la stérilité ! » Puis parfois ils leur font la leçon, surtout au mari, et leur rappellent les « mabika » ou rai- sons qui rendent le divorce légitime.

Voici les principales : l'inconduite de la femme, sa paresse pour préparer la nourriture de son mari, les disputes conti- nuelles, le refus du mari d'habiller sa femme, les mauvais trai- tements infligés à celle-ci, les coups, un affront sanglant, par exemple, ne pas accepter la nourriture préparée par la femme, mettre le pied « marcher >> disent les indigènes, sur le corps de son conjoint, et ce qui est plus grave encore, si le mari, dans un mouvement de colère, jette à la porte les corbeilles de sa femme, et ses ustensiles de ménage, ou encore les trois pierres qui forment le foyer, et sur lesquelles on cuit les ali- ments. Mais la grande cause de divorce est la stérilité. Il en existe d'antres encore, mais qui ne s'expriment pas dans les « mabika » et qui ont leur source secrète dans les rivalités et les disputes de familles et de villages,

Une seule considération peut arrêter les divorces, c'est la question d'argent. Voici la coutume sur ce point :

61

Le cas est double. Ou bien c'est le mari qui sans motif plau- sible, veut de son propre mouvement répudier sa femme; et alors il n'a droit â aucune restitution.

Ou bien c'est la femme qui s'en va ou qui par sa conduite amène le mari à réclamer le divorce. En ce cas, celui-ci a le droit d'exiger, outre l'argent qu'il a versé au moment du mariage, tout ce que sa femme lui a coûté, depuis leurs fian- çailles. Que doit-on alors lui restituer? Mais pour répondre à cette question, retraçons une de ces scènes auxquelles j'ai assisté bien des fois.

Les deux parties qui s'étaient rencontrées autrefois lors de la conclusion du mariage, se retrouvent de nouveau en face, pour sa rupture. D'un côté le mari et avec lui sa famille, de l'autre la famille de la femme, et celle-ci assise derrière le groupe .

Après des débuts bruyants, le silence se fait : la parole est au mari. Il pourra parler pendant plusieurs heures, à peine interrompu par quelques exclamations de protestation. Il expose d'abord les motifs qui Tont déterminé à demander le divorce. Puis il se fait apporter une poignée de petits cailloux ou de noix palmistes : ça lui servira à compter. En premier lieu il rappelle ce qu'il a payé, lors de la conclusion du mariage. Ceci est assez facile. Puis il énumère les costumes qu'il a offerts à sa femme. Il indique et à quel prix il a acheté l'étoffe, quel tailleur a confectionné l'habit et ce qui lui a été payé. Le calcul fait, le plaideur met un petit caillou de côté. Second habit, second caillou, et ainsi de suite, et lente- ment il repasse dans le détail, le prix de tous les costumes.

Les Congolais ont une mémoire prodigieuse : leur mariage remonte peut-être à dix ou quinze ans; n'importe, ils n'oublient rien. J'entendis un jour un vieux qui avait fait ce calcul, s'écrier après que nous avions fait l'addition totale : « Mal- heur? j'ai oublié de compter un mouchoir de 50 centimes. »

Le compte des habits terminé, c'est ensuite celui du malafu offert à sa femme et à ses parents : autant de calebasses à 50 centimes, et autant à 1 franc. Puis c'est le tour delà viande : autant de poules à 1 franc ou à fr. 1.50; autant de viande d'antilope ou de buffle achetée dans tel village, à un tel. à l'occasion de telle chasse, et pour tel prix. Ils ne font grâce de rien : tout y passe.

La longue énumération faite, le mari récapitule rapidement

62

et grâce à ses petits cailloux, constate si son compte est exact» Puis ses parents l'aident à faire l'addition globale.

C'est alors le tour de la femme et de sa famille : ils reprennent dans le détail, le compte fait par le mari et inva- riablement en nient une partie, et, rabaissent le prix de ce qu'ils reconnaissent avoir reçu. Il y a aussi à décompter, les poules offertes gracieusement par la femme à son mari, et dont il doit restituer le prix, car la femme était tenue seulement à lui fournir la nourriture provenant des plantations.

Enfin, tout finit par s'arranger, soit de gré à gré, soit plus habituellement par l'intervention du chef. On compte alors sous les yeux de l'assemblée la somme à restituer. Il ne reste plus qu'une formalité à remplir : on fait cadeau d'une poule au mari, qui prend ensuite un morceau de craie et en trace des lignes sur la figure de sa femme. Celle-ci se lève et traverse le village, la face ainsi blanchie. Par il est porté officiellement à la connaissance du public que cette femme est désormais libre, et que qui veut, peut prétendre à sa main.

Ces divorces semblent chose si naturelle que les enfants eux-mêmes assistent à ces scènes se consomment la sépa- ration de leurs parents, sans témoigner plus d'émotion ni d'in- térêt que les étrangers.

Les coutumes congolaises, lors de la mort d'un des époux, sont aussi bien curieuses.

Les funérailles de la femme sont à la charge de ses parents et de son mari. La famille de la défunte fournit la nourriture à la foule des parents et des connaissances qui prennent part aux funérailles, et c'est une charge énorme, car aussi long- temps que le cadavre n'est pas enterré, c'est-à-dire parfois pendant un ou deux mois, des fêtes sont organisées, qui attirent toujours des foules.

Le mari, de son côté, doit acheter les couvertures dans lesquelles on enveloppe le cadavre : trois ou quatre ou cinq couvertures, parfois plus, au point que le cadavre prend l'as- pect d'un véritable ballot. Il partage de plus avec la famille de sa femme, les frais des danses qu'on fait exécuter, et des musiques qu'on fait venir.

Si c'est le mari qui est mort, l'épouse n'intervient pour rien dans les dépenses, mais elle doit, accompagnée des autres femmes du village, veiller le mort, et c'est elle qui dirige le chœur des pleureuses ; or, ce n'est pas peu de chose, si l'enter- rement n'a pas lieu de suite.

63

Puis elle ne pourra plus se faire couper les cheveux sans la permission des parents du mari défaut : une longue chevelure, c'est sa manière de porter le deuil de son époux. Après un temps assez long, environ un an, ses beaux-parents l'apiDellent et lui disent : : « Votre deuil a assez duré; chassez la tristesse de votre coeur, coupez-vous les cheveux et cherchez un autre mari. » Parfois, sans leur permission, la veuve appelle une de ses amies, et au milieu du village, sous les yeux des passants, fait courir les ciseaux dans sa noire chevelure. D'où colère des autres, qui trouvent que la femme injurie la mémoire du défunt. Naturellement l'affaire est portée chez le chef, et non moins naturellement la femme, ou plutôt ses parents, sont condamnés à payer une chèvre ou un cochon pour réparer l'injure. Mais la rusée s'en moque bien : elle avait soupçonné que ses parents voulaient la remarier dans la famille de son mari défunt, afin d'être exemptés de rembourser l'argent reçu autrefois. Et comme elle ne tient pas au prétendant à qui on veut la donner, elle s'est montrée dans le village, la tête rasée sans permission : c'est la rupture publique avec la famille de l'infortuné prétendant.

Je ne donnerai qu'un aperçu général sur la polygamie, car une étude complète sur ce sujet exigerait un volume.

Tandis que dans d'autres pays la première femme seulement est considérée comme la véritable épouse, et les autres ne sont que des concubines, ici toutes les femmes ont le même rang et sont traitées comme épouses légitimes. A la mort de la pre- mière épouse, il n'y a aucune fête pour en installer une autre à sa place.

Les maisons que leur bâtit le mari sont semblables, les habits qu'il leur achète, d'égale valeur, et toutes ont la même part dans les largesses du maître.

La plupart des païens sont polygames; le grand nombre a deux ou trois femmes, il est assez rare de rencontrer un poly- game avec quatre femmes. Il n'y a que les grands chefs qui dépassent ce nombre, et peuvent se payer le luxe de sept à huit femmes. Ordinairement toutes ces femmes sont rassem- blées en un quartier distinct, et leurs maisons sont groupées autour de la maison de leur maître. Parfois elles sont dispo- sées dans les plantations, ou même le mari les laisse dans leur village d'origine, il vient de temps en temps leur rendre visite.

64

Inutile de dire que la polygamie est le grand obstacle à la conversion des adultes. De plus elle empêche l'esprit de famille de pénétrer les mœurs congolaises. Pas de foyer chez les polygames. Les femmes se surveillent l'une l'autre pour savoir qui est la mieux habillée, qui a le moins de travail; elles se jalousent, se querellent. Le mari a bien soin de ne pas intervenir dans ces disputes, il les laisse s'arranger entre elles, et pour rendre les scènes moins fréquentes, il tâche de garder la plus stricte impartialité. Quelle union, quel esprit de famille peut donc régner dans ces milieux ?

Et puis quelle affection, l'enfant peut-il avoir pour son père qu'il voit partager ses soins entre sa mère et d'autres femmes. Entre les deux, son choix est vite fait, et d'instinct il reporte son affection sur sa mère.

A propos de la polygamie, on dit parfois que « la polygamie est plutôt au Congo un phénomène économique que social, elle évoluera avec la conception que le natif se fera de la richesse.» Cette opinion peut être vraie les polygames ont des harems immenses ; elle ne doit cependant pas être trop généra- lisée, et je ne puis l'admettre pour notre pays.

C'est trop simpliste de vouloir faire de la question de la polygamie une pure question économique. Les femmes ne cons- tituent pas ici un élément de richesse. Les économies du noir se placent ailleurs, ainsi que je montrerai plus tard. D'ailleurs nos chrétiens monogames ne sont pas considérés commes des pauvres, par les païens polygames.

Ici la question de la polygamie est une question sociale: le noir grandit en considération s'il possède deux ou trois femmes, etilsemoque volontiers du chrétien qui se contente d'une seule. J'ai encore présentes à la mémoire les paroles d'un chrétien qui avait apostasie pour prendre une seconde épouse et qui me disait : « A mon âge, une seule femme. C'était bon quand j'étais jeune. Mais maintenant! Quel déshonneur ce serait ! on rirait de moi ! »

C'est aussi une question morale, et sans vouloir entrer dans plus de détails, je n'en veux pour preuve que l'habitude lu- brique des vieillards de vouloir accaparer les jeunes filles de 13 à 14 ans.

Ceci n'est pas en contradiction avec ce que j'ai dit tantôt que les chefs voulaient avoir beaucoup de femmes en partie à cause des nombreuses réceptions qu'ils doivent organiser.il ne s'agit

65

que des chefs et l'exception n'infirme pas la règle. J'ai ajouté .aussi qu'ils voulaient en posséder beaucoup, et non simplement deux ou trois, comme le grand nombre.

Et la conclusiou générale sur le mariage congolais, c'est qu'on ne peut espérer le relèvement de la femme sous un tel régime. Pour donner à celle-ci, la place qui lui convient au foyer, il faut faire disparaître la polygamie et le divorce, il faut instaurer l'unité et la stabilité du mariage. Le jour la première épouse sera l'unique épouse, et le mari devra concentrer son affection sur un foyer unique ; le jour aussi ou les conjoints sauront que leur union ne peut plus être brisée, qu'ils ne vivent plus ensemble pour quelques années seulement, ce jour là, la civilisation aura fait un grand pas et alors on pourra parler de la famille congolaise.

C'est le but que poursuivent les missionnaires en introdui- sant le mariage chrétien dans les populations noires. Quelle différence entre l'union païenne et le mariage chrétien les deux époux se sont unis librement et selon leur cœur, ils savent que rien ne peut les séparer et que jusqu'à la mort les peines et les joies seront communes.

Mais aussi quelle vigilance nous devons employer et quels efforts nous devons faire pour maintenir intact dans leur âme, l'idéal du mariage chrétien. Brisant avec tout un passé de paganisme, nos jeunes gens ont, dans la générosité de leur foi et de leur jeunesse, accepté le mariage, tel que nous le leur présentions. Malheureusement ils vivent dans une atmosphère de paganisme ; sans cesse ils ont, sous les yeux, l'exemple mal- sain du mariage païen avec ses facilités : la polygamie et le divorce ; et insensiblement le mauvais esprit parle au fond de leur âme. Ah ! Dieu seul sait nos angoises et nos alarmes quand nous assistons à une de ces crises morales. Mais, grâce à Dieu, les chrétiens qui retournent aux hontes du paganisme sont rares. Malgré tout, le bon exemple l'emporte et une mentalité, c'est-à-dire, une civilisation nouvelle se forme qui dissipe les ombres du paganisme lentement sans doute, mais sûrement.

Chaque conquête du christianisme est une conquête de la civilisation. Beaucoup de fonctionnaires de l'Etat qui ont la charge de civiliser le Congo, le comprennent généralement et nous sont souvent d'un secours précieux dans notre œuvre. Ils ne font d'ailleurs en cela que s'inspirer de l'esprit de la légis- lation qui combat la polygamie par différentes dispositions, par

66

exemple en n'admettant que les monogames aux emplois de la colonie et dans l'armée, en exemptant de tout impôt; les mono- games pères de quatre enfants, en exigeant par contre un impôt supplémentaire, des polygames, etc. On ne peut reprocher à ces mesures d'être trop violentes et de jeter la perturbation dans la vie sociale. Sans être radicales, elles ont cependant l'heureux résultat d'aider à transformer les idées.

Car les indigènes voyant que l'Etat, aussi bien que les mis- sionnaires, désapprouve la pratique de la polygamie, commen- cent à ne plus mettre leur orgueil dans le nombre de leurs femmes. Les rôles sont peu à peu renversés: tandis que le monagame est tout fier de faire connaître sa situation matri- moniale, le polygame n'avoue qu'avec un sentiment de honte, le nombre de ses compagnes.

Toutefois ces mesures n'auront leur pleine efficacité que lorsque les autorités veilleront à leur complète exécution, sur- tout de la part des notables des villages. Ceux-ci, en effet, après avoir obtenu de l'Etat, le poste qu'ils convoitent, retournent parfois trop facilement à leurs vieilles habitudes.

(A suivre.) Au prochain numéro Y Enfant Le Clan L' Autorité.

L. Philippart. Missionnaire Redemptoristen

67

La situation de l'agriculture au Congo-Belge.

Dans cette courte description de la situation actuelle de l'agriculture au Congo Belge, nous traiterons successivement les grandes plantations; l'agriculture indigène; la co- lonisation des régions hautes, à climat tempéré.

I. Les grandes plantations.

La fertilité de l'agriculture coloniale est proverbiale. Et lorsque des Belges manifestent quelque intérêt pour notre Colonie, ce qui, malheureusement, est encore bien rare, ils se représentent l'avenir du Congo et de ses indigènes comme basé principalement sur l'agriculture et sur les grandes plantations tropicales, qui font la richesse des colonies étrangères, les Indes, les Antilles, etc.

Dans leur idée, le Congo, comme toute colonie equatoriale florissante, doit produire en abondance le sucre, le café, le thé, le caoutchouc, les huiles, les tannins, le coton, les épices, les bois précieux, les fibres et résines, en un mot, les matières premières qui sont d'une importance primordiale pour le com- merce et l'industrie de la Belgique et dont nous importions annuellement avant la guerre, une valeur de près d'un milliard de francs (1).

(1) En 4910 nous importions en Belgique des produits coloniaux pour une valeur de 953 millions de francs, et entre autres les marchandises sui- vantes :

Café . .

Cacao. . .

Thé . . .

Riz . . . Sucre de canne

Coton . .

Chanvre . Jute . .

Tabac . .

69,000,000 13,700,000

3,500,000 37,300,000

5,200 000

212,000,000

15,000,000

11,000,000

28,800,000

Graines oléagin Huiles

Caoutchouc . Peaux brutes. Bois tinctoriaux Ivoire . Cires

Vanille . . . Etc.

172.800,000

22.i00.000

185.800,000

159 000.000

3,600,000

8,000.000

2.600.000

1,600.000

68

Ils adoptent d'autant plus facilement cette façon de voir que les publicatons économiques et sociales insistent toutes sur 1 importance de l'agriculture au point de vue tant de l'euro- péen que de l'indigène. Les écrits officiels vantent d'ailleurs à l'envi les énormes ressources agricoles et forestières de la Colonie et les possibilités offertes par celle-ci aux initia- tives de nos jeunes générations. Tous les jours encore les plumes les plus autorisées proclament que le Congo est un champ immense ouvert aux capitaux et à l'initiative des Belges.

Nos compatriotes espèrent donc, pour l'avenir, l'arrivée en Belgique de quantités considérables de matières premières congolaises et supposent qu'il est établi au Congo de magni- fiques plantations, offrant aux Belges de brillantes perspec- tives.

Ils sont persuadés que les fonctionnaires de l'Etat en Afrique appellent de tous leurs vœux la réalisation de cet idéal, font de grands efforts pour la faciliter et accueillent avec le plus vif empressement les compatriotes qui osent risquer leur argent et transporter leur activité dans l'Afrique Belge.

Malheureusement, la réalité ne correspond nullement à ces rêves. Non seulement, le Congo ne compte jusqu'ici presque pas de plantations ni de colons belges, mais de plus l'Adminis- tration coloniale actuelle est de loin d'être aussi enthousiaste de la colonisation belge : elle s'intéresse presque exclusivement à l'agriculture des indigènes, susceptible elle aussi, disons le de suite, d'un développement considérable et dont nous nous occuperons un dans autre article.

L'indifférence de l'Administration à l'égard des planteurs et colons est de nature à nuire aux intérêts belges en Afrique, ainsi qu'au développement des industries en Belgique. Elle dérive d'un engouement irréfléchi pour les théories déplora- bles qui ont dirigé jusqu'ici le mouvement colonial français et empêché l'essor économique des belles colonies de la France. C'est pourquoi nous étudierons avec quelque détail, et dans l'espoir qu'elle se modifiera prochainement, la situation qui est faite au Congo à nos planteurs et colons.

Les conditions naturelles du Congo Belge le rendent émi- nemment propre à l'établissement de plantations : celles-ci

69

peuvent être une source féconde de bien-être et de prospérité pour les indigènes comme pour les colons de race blanche.

Ne possédant qu'une population peu nombreuse et des moyens de communication insuffisants pour sa grande étendue, le Congo belge doit trouver dans les plantations le moyen de produire avec peu de main d'oeuvre des quantités considérables de matières premières d'origine végétale.

Parmi les colonies tropicales anciennes, les plus prospères sont incontestablement celles qui ont développé au plus haut degré les grandes plantations coloniales.

Ce fait est d'autant plus remarquable que la plupart de ces colonies de plantation ont non seulement une surface territo- riale restreinte, mais aussi, comme le Congo Belge, une popula- tion relativement faible. Témoins les colonies suivantes (1911).

Congo :

7,000,000 habitants.

Export.

agricole :

; fr. 1,800,000

Cuba :

2,220,000

»

»

»

708,160,000

Hawaï :

191,000

»

»

»

256,766,000

Ceylan :

3,600,000

»

»

»

273.844,000

Porto Rico :

1,000,000

»

»

»

214 904,000

Les Straits :

1,000,000

»

»

»

123,123,000

Guyane angl.

: 300,000

»

»

»

42,951,000

Costa Rica :

400.000

»

»

»

39,108.000

Ile Maurice :

375,000

»

»

»

66,164,000

L'activité économique de ces riches colonies est basée prin- cipalement sur les grandes plantations, financées et dirigées par des colons blancs. Ceux-ci travaillent soit isolément, soit en sociétés, et appliquent à la culture les procédés les plus perfectionnés.

L'île de Ceylan, par exemple, est 35 fois moins étendue que le Congo Belge et couverte pour plus de la moitié de sa surface, d'une jungle totalement improductive, mais son exportation de récoltes agricoles est cinq fois plus forte que celle de l'im- mense Congo. L'île de Ceylan produit donc à surface égale 350 fois plus que le Congo.

Les îles Hawaï sont 140 fois plus petites que notre Congo, mais elles produisent une récolte dont la valeur est de cinq fois plus grande que l'ensemble du produit des cueillettes congo- laises : à égalité de surface, elles produisent donc 700 fois plus.

L'île Maurice, qui ne comporte que 375,000 habitants sur un territoire 1,275 fois plus petit que le Congo, alimente une exportation de produits agricoles égale à celle de notre grande

70

colonie africaine. Comparativement, sa production par unité de surface territoriale est donc de 1 ,275 fois plus forte.

Ces chiffres font ressortir la haute productivité des planta- tions. Il ne leur faut, pour donner des récoltes abondantes et régulières, que des surfaces minimes et relativement peu de main-d'œuvre. Une plantation de 2000 hectares est déjà très importante : plantée d'hévéas elle donnerait annuellement au moins 700 tonnes de caoutchouc valant 9,800,000 francs (1), c'est-à-dire que quatre plantations de cette superficie produi- raient autant de caoutchouc que le Congo tout entier n'en exporte actuellement !

Dans quelques colonies tropicales, spécialement avantagées au point de vue du nombre de la population, telles que les Indes et Java, des millions d'agriculteurs indigènes viennent apporter un grand appoint à la production agricole. Le résul- tat total des efforts combinés des indigènes et des blancs atteint des chiffres fort élevés.

Ce cas se présente notamment dans l'île de Java, 20 fois plus petite que le Congo Belge, mais habitée par 30,000,000 d'indigènes, auxquels se juxtaposent 70,000 européens. Ces derniers sont occupés pour la plupart à la direction des grandes plantations, usines à sucre, fécule, huile, etc., ainsi qu'au commerce des produits multiples de l'agriculture colo- niale intensive, source de la richesse étonnante de cette admi- rable colonie. Le total des exportations agricoles de Java atteignait en 1912, une valeur de près de 1,000,000,000 de francs, dans laquelle nous signalons.

Sucre de eanne fr. 330,447,000

Amande de cocotier (coprah) 116,136,000

Tabac . . , 194,434,000

Caoutchouc et gutta 65,930,000

Café 48,348 000

Thé 45,457.000

Poivre 21.937,000

Manioc 19,198,000

Quelques chiffres suffiront pour démontrer encore mieux la valeur considérable des grandes cultures coloniales et conse- il) Au prix d'aujourd'hui, soit 14 francs le kilo (20 mai 1920).

71

queminent la faute non moins grande commise par les colonies qui, suivant l'exemple de certaines colonies françaises et du Congo Belge, n'ont pas compris ce qu'elles auraient pu réaliser dans ce domaine spécial.

Prenons d'abord les plantations de caoutchouc de Para, le produit de l'Hévea brasiliensis.

L'histoire économique du monde ne relate aucun développe- ment agricole comparable, par la rapidité de son évolution et l'importance des capitaux engagés, avec le développement récent des plantations de caoutchouc en Extrême-Orient (Ceylan, Malaisie, Sumatra, Java).

Mors qu'en 1900 il n'existait encore que 2,400 hectares plantés d'hévéas, la superficie plantée suivit la progression suivante :

1900 : hectares 2,400 1906 » 32 000

1910 » 160,000

1918 » 764,500 Production annuelle: 380,000 tonnes.

La valeur de ces 380,000 tonnes, calculée à deux shellings la livre, dépasse quatre milliards (exactement 4,180,000.000 francs) (l). Des pays sauvages, couverts de jungles, se sont trans- formés en peu d'années en territoires d'une richesse admirable.

Les plantations les plus anciennes ont remboursé plusieurs fois leur capital. En quatre ans (1910-1912), à l'époque le caoutchouc s'est vendu jusque 35 francs par kilo, les planta- tions suivantes ont donné :

Selangor, fondée en 1899 : 1187 pour 100 de dividende. Pataling, » 1903 : 975 » »

Linggi, » - 738 » »

Vallambrosa, » 655 » »

Batu Caves » 1904 : 660 » »

Bukit Raj ali » 575 » »

Les Anglais possèdent la part prépondérante dans les plan- tations de caoutchouc, parceque 70 p. o. de ces entreprises sont établies dans les colonies anglaises et que les capitalistes anglais sont largement intéressés dans les plantations de Sumatra et de Java.

Sur 380,000 tonnes récoltées en 1920 les sociétés anglaises produiront 281,000 tonnes; les hollandaises 75,000 tonnes; les françaises et belges 15,000 tonnes seulement.

(I) Au change de 50 francs par livre.

72

Les Hollandais ont atteint dans leurs possessions coloniales une prospérité des plus remarquables, due surtout au nombre et à la perfection de leurs plantations.

Si nous examinons le développement agricole des Indes Néerlandaises, nous constatons la présence dans les îles de Java et Sumatra, des plantations suivantes (1914) :

190 plantations, couvrant 160,000 hectares

Canne à sucre

: 190 pi

anta

Caoutchouc :

674

»

Café :

505

»

Quinquina :

114

»

Coca :

73

»

Kapok :

95

»

»

260,800

»

»

170,400

»

»

16,000

))

»

2,300

»

»

5,400

»

Les photographies que nous insérons ci-contre donnent une- idée de la perfection de la culture et de l'outillage employés dans les grandes plantations d'Extrême-Orient.

* *

Au Congo Belge, malheureusement, nous ne voyons jusqu'ici aucun indice d'an développement important de l'agriculture de plantation.

Du reste, la production agricole totale du Congo est encore très faible (l). En effet, les exportations de la Colonie se classent comme suit pour l'année 1917.

Exportations du Congo belge en 1917. I. Produits miniers.

Cuivre: 27,500 tonnes valant fr. 87,937,000

Or: 3,573 kilos » 12,337.000

Diamants: 100,000 carats » 3,440,000

fr.

103,714,000

II. Produits végétaux et

ANIMAUX SPONTANÉS.

Amandes palmistes : 35,000 tonnes

. . . . fr.

23,100,000

Huile de palme : 5,400

»

.

5,940,000

Copal : 6,940

»

.

6,072,000

Caoutchouc sauvage : 2,660

»

....

14,364.000

Ivoire : 182

»

....

3,640,009

fr. 53,116,000

(i) Il s'agit ici de la production de denrées exportables. Le Congo produit de plus les aliments nécessaires à 7 ou 8 millions d'indigènes..

%

o

Wr-Ti*a*~.

73

III. Produits agricoles ou cultivés.

Cacao: 784 tonnes . . . fr. 1,391,600

Caoutchouc de plantations : 50 » ... 240,000

Coton: 35 » ... 113,400

fr. 1,747,000 Valeur totale des exportations : fr. 156,577,000.

D'après ces chiffres, les mines ont fourni, en 1917, environ les deux tiers de la valeur de l'exportation totale. Aux prix d'avant guerre, elles en auraient produit à peu près la moitié.

Quant à l'agriculture, si importante dans tant -d'autres colonies tropicales, elle n'a donné an Congo Belge qu'environ 1 pour cent de la valeur totale des exportations.

C'est bien peu, et d'autant moins que les exportations de pro- duits cultivés n'ont guère augmenté depuis 10 ans : leur augmentation est même si faible, qu'elle est pratiquement négligeable.

Une autre expression de cette stagnation étonnante de la production agricole dans notre colonie, est donnée par le petit nombre de personnes qui s'occupent au Congo de cultures tro- picales capables d'alimenter l'exportation. Ce nombre est des plus faibles.

Le Congo compte, sur une population totale de 6000 blancs, environ 2500 fonctionnaires et employés de l'Etat, environ 1500 employés de Sociétés commerciales ou industrielles et tout au plus 300 Européens s'occupant d'agriculture.

Pour calculer le nombre des personnes pratiquant à titre privé, les grandes cultures coloniales, cacao, caoutchouc, café, il faut défalquer de ce dernier chiffre, 100 colons s'occupant au Katanga de cultiver des grains, des légumes et autres vivres pour les régions minières ; 50 missionnaires veillant aux exploi- tations et élevages de leurs missions ; enfin 40 agents du Service officiel de l'Agriculture.

Tout compte fait, nous voyons qu'il n'y a probablement pas au Congo, dans un territoire 80 fois aussi grand que la Belgique, 50 personnes privées s'occupant d'agriculture tropicale !

* * Aussi, le Congo ne donne-t-il jusqu'ici que des produits

sauvages ou spontanés et d'ailleurs relativement, peu abon- dants. Pas de café ni de quantités appréciables de caoutchouc cultivé; ni poivres, ni vanilles, ni autres épices ; ni coton, ni sisal, ni jute, ni tapioca, ni fécules, ni alcool, ni céréales. Pas même de bois, malgré l'étendue immense et la richesse des forêts en essences d'ébénisterie et de charpente

Cet énorme territoire est réellement encore inexploité au point de vue de l'exportation agricole : les plantations colo- niales, et les colons, surtout les colons belges, y brillent par par leur absence.

Comme d'autre part les gisements miniers sont nombreux et riches, on tend maintenant à considérer surtout les possibi- lités minières et à négliger l'agriculture : c'est une nouvelle erreur.

Cependant, le Congo Belge paraît très favorable à l'agricul- ture. Si nous passons rapidement en revue ses conditions économiques, nous voyons qu'il mesure 2,500,000 kilomètres carrés et renferme donc une étendue énorme de terrains utili- sables par l'agriculture ou la sylviculture Même en limitant l'exploitation aux terres les plus rapprochées des voies navi- gables, par exemple à une bande de 25 kilomètres de large sur chaque rive, on trouvera 50,000 Ö00 d'hectares, susceptibles d'être mis en valeur immédiatement par les cultures ou par l'exploitation forestière.

Un grand réseau de rivières navigables, presque sans rival au monde, sillonne la colonie dans presque toutes ses parties. La longueur totale navigable est d'environ 10,000 kilomètres.

Des lignes de navigation à vapeur opèrent sur ces voies fluviales, et des chemins de fer contournent les biefs inutili- sables. L'équipement et le développement des voies de commu- nication du Congo sont déjà supérieurs à ce qu'on rencontre dans la plupart des colonies nouvelles, et surtout en Afrique centrale (1),

(1) Cependant l'insuffisance du chemin de fer du Bas-Congo oppose un obstacle insurmontable au développement complet de la Colonie. L'amé- lioration de cette voie ferrée est à l'étude depuis des années, mais ne pro- gresse pas sensiblement Un projet français reliant le Stanley Pool à la Côte est, dit-on, à la veille d'être exécuté; il doublerait les possibilités d'exportation du Congo belge et serait donc très favorable aux intérêts

75

L'ordre et la sécurité régnent dans la colonie. Les lois sont justes et bien appliquées. Le régime fiscal est modéré. Toutes les parties du territoire sont organisées administrativement et j udiciairement.

La population indigène est assez nombreuse. Elle est en général plutôt intelligente, vigoureuse, paisible et douce. Le noir est adroit et apprend aisément à se servir des outils et même des machines.

Par suite de l'altitude élevée qui tempère la ciialeur, et de la modération des pluies, l'européen trouve au Congo des condi- tions plus hygiéniques que dans beaucoup d'autres colonies équatoriales. Des territoires d'étendue considérable sont propres à la colonisation européenne, et s'étendent depuis rUelle jusqu'au Katanga, le long des grands lacs africains.

Les divers climats du Congo sont tous favorables à l'une ou l'autre forme d'agriculture. Aucune région aride ne se rencontre dans la colonie; la région la moins favorisée est celle du Bas- Congo, qui est cependant utilisable pour certaines cultures.

Sans avoir les fortes pluies et la végétation exubérante d'autres régions équatoriales, le Haut- Congo reçoit annuelle- ment lm. 50 à 2 mètres d'eau, ce qui suffit à la grande majo- rité des cultures tropicales, alors que la sécheresse sévit dans les pays voisins, au jSTord, à l'Est et au Sud de notre Colonie.

En cultivant rationnellement les terrains du Congo, on peut produire d'excellentes récoltes et maintenir la fertilité. Il en surtout ainsi pour les cultures d'arbres et d'arbustes, peu exi- geantes quant à la fertilité du terrain, et qui constituent préci- sément la majorité des cultures des grandes plantations.

L'étude des conditions agricoles de la colonie est déjà fort avancée. L'Etat entretient des stations expérimentales, des laboratoires et des services de propagande; il a introduit, en variétés nombreuses, les végétaux utiles des colonies étrangères et les distribue presque gratuitement.

L'abondance des produits commerciaux formés spontanément dans les forêts et savanes, attire le commerçant et permet l'établissement de transports réguliers. Elle facilite donc l'ex- pédition des produits cultivés et l'équipement de plantations.

belges. D'autres lignes étrangères emportent nos marchandises congo- laises vers les quatre points cardinaux, le cuivre, l'or, etc. Le chemin de fer français nous rendra grand service.

76

Une influence analogue est exercée par les richesses minières de certains territoires. De plus, ces richesses présagent l'éta- blissement de populations importantes, qui seront des débouchés précieux pour l'agriculture.

Enfin, l'union politique avec la Belgique, qui était avant la guerre une des cinq grandes puissances industrielles et com- merciales, est incontestablement favorable au progrès de l'agri- culture.

Comment les plantations coloniales n'ont-elles pas fleuri et multiplié à la faveur de conditions aussi favorables ? Comment un beaucoup plus grand nombre de Belges ne se sont-ils pas consacrés à la vie captivante et fructueuse du planteur des tropiques ?

Certes la longueur des transports a exercé une influence retardatrice à ce point de vue, mais la cause principale de cette stagnation de l'agriculture est l'attitude peu favorable de l'Ad- ministration congolaise à l'égard des colons et de l'agricul- ture de plantation.

Elle nuit directement et indirectement à la colonisation, empêche le développement des plantations et porte nos colo- niaux à solliciter sans cesse d'énormes concessions qu'ils ne sauraient exploiter convenablement. Au lieu de demander de 1,000 à 5,000 hectares de terres, comme on le fait dans les régions de plantations, on sollicite au Congo des concessions de 50000, 100000, 200000 hectares et plus, qui resteront à l'état de brousse presque improductive.

Certains de nos lecteurs s'étonneront de ce que l'attitude de l'Administration puisse entraver le succès d'une entreprise économique. Ils se disent qu'en Belgique, il importe assez peu au succès d'une forme quelconque d'agriculture ou d'industrie, que l'administration lui soit ou non favorable.

Mais il n'en est pas de même au Congo. Rien de ce que l'Administration ne protège pas ne peut réussir. Dans notre colonie il n'existe pas, à proprement parler, de classe indépen- dante; le haut fonctionnaire est jusqu'ici tout puissant et souvent très autoritaire ; son attitude décide le succès ou l'in- succès de toute entreprise.

Or il s'est fait, malheureusement, que l'ancienne adminis- tration, dont il subsiste encore assez bien de représentants au

Congo, était défavorable aux plantations privées. L'adminis- tration actuelle, dominée par d'anciens éléments, est encore dans les mêmes idées. Ni les plantations, ni la colonisation belge n'ont rencontré les conditions nécessaires à leur dévelop- pement.

L'ancienne administration congolaise se montrait nettement liostile à toute entreprise privée. Le colon indépendant était pour les fonctionnaires un voisin gênant, libre de critiquer, de protester, d'écrire en Belgique, de se plaindre. Aussi les pre- miers essais d'établissement de plantations reçurent-ils un accueil des plus froids. N'avait été l'importance individuelle des personnes qui prenaient ces initiatives, leur insuccès eut été rapide et complet.

Il est vrai que l'État Indépendant ne se désintéressait pas des plantations et voulait bien en établir de très étendues, mais seulement au profit du Trésor Colonial et sous la direction officielle. De les vastes plantations de lianes, de café, de cacao et d'arbres à caoutchouc, exécutées par l'État, et qui comptèrent des millions de plantes. Conduites par un person- nel novice et d'après des conseils fantaisistes, elles ne don- nèrent presque pas de résultats.

Après la reprise du Congo par la Belgique, les plantations d'Etat fureut considérablement réduites et les avantages qu'elles offraient aux fonctionnaires furent supprimés.

Aussi longtemps que ces fonctionnaires touchaient de fortes primes par arbre planté (certains y gagnèrent une fortune), les plantations officielles se développaient avec rapidité, et personne ne songeait à prétendre qu'elles ne convenaient pas à l'Afrique et qu'on ne pouvait y employer les indigènes. On plantait donc avec rage, quitte à ne pas entretenir les peuple- ments sur lesquels les primes avaient été touchées. Les cultures naissaient, rapportaient des primes abondantes et retournaient à la brousse.

Mais les opinions se modifièrent lorsque le Roi fit organiser des inspections et surtout lorsqu'il envoya des contrôleurs forestiers, chargés d'apprécier la valeur réelle des plantations. Ce nouveau système fut très mal reçu.

£*e revirement fut complet le jour la direction des plan- tations de l'Etat fut confiée au Service de l'Agriculture, avec suppression radicale des primes. A ce moment on constait l'échec de ces premières entreprises de plantation.

78

Peu de temps après cette innovation, qui" coïncidait avec la publication du livre de M. Harniand, dont nous parlerons plus loin, les idées hostiles aux plantations apparurent dans les milieux coloniaux d'Afrique ainsi que dans l'Administration de Bruxelles. Elles s'y sont implantées fortement, et de nos j ours encore toute initiative officielle en faveur de la colonisation agricole et de l'établissement de grandes plantations coloniales au Congo, reçoit en Afrique comme à Bruxelles l'accueil le plus réservé.

Ce n'est guère que dans les groupes coloniaux privés qu'on rencontre en Belgique des partisans des grandes plantations, mais ces commerçants avisés se sont soigneusement abstenus jusqu'ici de planter au Congo : ils ont investi leurs énormes capitaux en Malaisie, les Anglais et les Hollandais, plus expérimentés en matière coloniale, savent encourager comme il convient la forme la plus productive de l'agriculture des tro- piques.

On dit qu'il en sera bientôt de même dans les colonies de la France. La guerre aurait, assure-t-on, ouvert les yeux des français et les aurait décidés à favoriser désormais les j>lanta- tions. Mais une modification aussi rationnelle ne s'annonce pas encore pour le Congo belge.

Il faut dire que si notre administration s'intéresse peu jus- qu'ici au développement des plantations, c'est surtout aux écrits des coloniaux français que nous devons cette indiffé- rence

La littérature coloniale française devait nécessairement exercer une influence considérable sur les conceptions écono- miques de l'Administration coloniale belge. Alors que tous nos fonctionnaires coloniaux lisent les publications françaises, un très petit nombre, une demi-douzaine peut-être, lisent les publications des colonies anglaises, allemandes, hollandaises, qui sont précisément les plus avancées et les plus prospères.

De sorte que les neuf dizièmes des progrès des colonies, étrangères échappent presque entièrement à notre monde colonial.

Certes, les écrits des coloniaux français nous furent de grande utilité : les études de Chevalier, Bingelmann, Henry >

79

Preudhoinine, Fauclière, Baillaud, etc., figurent au Congo dans toutes les bibliothèques publiques et privées.

Malheureusement, à côté de ces écrits techniques, conçus dans un sens pratique, il se publie chez nos voisins des théories regrettables qui ont arrêté jusqu'ici l'essor colonial de la France.

Ces théories n'ont pas nui seulement aux colonies françaises : elles ont aussi fait le plus grand tort au Congo Belge, en vulga- risant dans notre Administration cette notion absolument inexacte que l'Afrique equatoriale ne convient pas à l'éta- blissement de plantations coloniales et qu'il faut y faire exclu- sivement de l'agriculture indigène.

Le plus nuisible de ces ouvrages est à l'une des person- nalités du monde diplomatique français, M. Jules Harmand, ambassadeur honoraire. Sous le titre de « Domination et Colo- nisation», il a paru dans la Bibliothèque de Philosophie scien- tifique (Flammarion 1910), et se trouve actuellement dans les mains d'un grand nombre de coloniaux français et belges. Il est jusqu'ici le seul ouvrage en langue française qui expose une doctrine de l'administration coloniale. Il a donc joui d'une grande vogue au moment de sa publication et les théories néfastes qu'il défend se sont répandues en bien des milieux.

La préface de ce livre aurait mettre les lecteurs en garde contre les théories exposées dans le texte, en tant qu'elles s'appliquent aux conditions de l'Afrique. Car M. Harmand, qui habita longtemps en Cochinchine, avoue dans sa préface qu'il ne connaît que les Asiatiques, et n'a des noirs africains qu'une connaissance superficielle. Il n'a d'ailleurs guère de connaissances économiques, et ne semble pas avoir étudié les colonies au point de vue agricole et commercial : c'est un pur théoricien.

Il saute aux yeux qu'il n'avait d'autre part, aucune con- naissance sérieuse des grandes plantations coloniales. Le peu qu'il en dit montre à l'évidence qu'il n a saisi ni l'intérêt de ces organismes, ni les possibilités de la colonisation européenne en Afrique centrale L'Afrique ne comprend, pour lui, que des zones impropres à la colonisation européenne : il ignore l'exis- tence des terres colonisables des régions équatoriales.

Il nous suffira, pour montrer la légèreté avec laquelle M. Harmand traite cette question et les plantations des pays tropicaux, d'extraire quelques passages du chapitre qui se

80

rapporte à la colonisation et dans lequel l'auteur traite à la fois, de la manière la plus confuse, la petite colonisation européenne et les grandes plantations.

Page 141, après avoir essayé de démontrer combien la colonisation est difficile et peu rémunératrice (sic), il ajoute, qu'il ne va pas jusqu'à nier qu'il soit impossible de citer des exemple de colons qui aient réussi dans des entreprises de pure colonisation, mais il trouve ces exemples si rares qu'ils n'infir- ment pas la règle. On verra, dit-il, en les examinant de près, que c'est bien plus comme spéculateurs, industriels ou com- merçants que comme colons qu'ils ont atteint la fortune, et Ton peut dire que, s'ils ont obtenu des succès, ce n'est pas parceque colons, mais quoique colons.

Les chiffres que nous avons donnés plus haut imposent un démenti à ces affirmations stupéfiantes, même lorsqu'il s'agit de territoires peuplés d'indigènes « assez civilisés, et générale- ment agriculteurs », tels que Ceylan et Java. Leur prospérité dérive bien plus des plantations que de l'agriculture indigène.

Et que dire du paragraphe de la page 142? « On peut objec- ter que les plantations étrangères sont aujourd'hui assez [sic) nombreuses dans l'Inde. Elles le sont cependant beaucoup moins qu'on le croit : elles occupent comparativement peu d'espace, surtout dans les plaines, et portent en général sur des végétaux d'acclimatation, café, thé, quinquina, cacao, caoutchouc)).

On se demande comment M. Harmand pouvait ignorer, au moment il écrivait ce livre, l'essor prodigieux des planta- tions des Indes orientales, qui, bien qu'occupant peu d'espace, donnent une production énorme.

Et qu'importe-t-il au point de vue économique et social qu'une culture se fasse en montagne ou en plaine, au moyen de végétaux introduits ou de plantes indigènes? M. Harmand serait-il de l'école de ceux qui voulaient nous faire cultiver en Afrique, avec des résultats malheureux et bien connus, les plantes indigènes, telles que les lianes et et l'ireh? Ne pou- vait-il savoir d'ailleurs qu'en France, et en Belgique aussi, presque tontes les plantes cultivées sont originaires d'autres pays et même d'autres continents : le froment, la pomme de terre, le trèfle, le lucerne, etc., ne sont-ils pas acclimatés ?

En tous cas, si M. Harmand n'ignorait pas l'importance des plantations, il ne l'appréciait guère. « L'île de Java, dit-il,

81

n'est vraiment colonisée à l'européenne que depuis peu, et cette colonisation, aussi, s'effectue surtout par des plantes introduites, et donnant des produits spéciaux ». Il ne dit pas, ^et pour cause, pourquoi ces conditions diminuent à ses yeux la signification d'une grande prospérité résultant des planta- tions coloniales et d'une exportation agricole annuelle valant près d'un milliard de francs.

Bien plus, et c'est une faute impardonnable, dans son livre de 370 pages consacrées aux Colonies et Dominations, il ne donne aucune indication sur la prospérité des colonies de plan- tation, les plus belles et les plus avancées à tous les points de vue de toutes les colonies de la zone equatoriale. Pour les lecteurs qui n'ont lu que M. Harmand (et que de hauts fonc- tionnaires sont dans ce cas), les grandes colonies étrangères, Java, Ceylan, la Malaisie, les Antilles et les Colonies hispano- américaines, n;ont aucune importance et ne méritent pas notre attention.

Est-il bien permis, à un auteur qui prétend éclairer ses lec- teurs sur les grands problèmes de la colonisation, de leur cacher les résultats des plus grandes et plus riches colonies du globe? C'est en tous cas un procédé qui doit fort ébranler notre confiance dans les raisonnements de ce diplomate.

Pour étayer sa thèse si caduque, M. Harmand ne se contente d'ailleurs pas de laisser ignorer à ses lecteurs les plus grandes xichesses du monde tropical. Il recourt encore aux écrits de certains Allemands ; aux doléances de petits colons français ; à l'opinion de M. Duherme qui proclame « qu'en Afrique occi- dentale la colonisation agricole est impossible, qu'il n'y en aura jamais, et qu'il n'y a pas de place là-bas pour le colon proprement dit ». Enfin, il invoque les conclusions d'une enquête du Comité Dupleix. qui, passant en revue toutes les colonies françaises, jugea pour chacune d'elle successi- vement que la colonisation y est impossible. Les Français furent donc fort étonnés de trouver au Cameroun une colo- nisation bien autrement avancée que celle de leurs colonies.

Peut-on s'étonner de l'échec économique de tant de belles colonies françaises, lorsqu'on voit des livres aussi déprimants empoisonner les idées du monde colonial? Aussi combien les résultats des colonies françaises sont inférieurs aux espé- rances.

C'est ce qu'exprimait si bien M. Fauchère, secrétaire du

82

Congrès de l'Union Coloniale française (l). La France deman- dait avant la guerre aux colonies françaises et aux pays- étrangers, les quantités suivantes de produits coloniaux.

Désignation.

Produits achetés par la France

aux colonies françaises.

aux pays étrangers.

Coton

Soie

Café

Coprah

Caoutchouc . . . .

Cacao »

Tabac

Jute

Bananes

Piassava

600,000 1,200 000 3,000,000 8,000,000 19,000,000 1,000 000 1,500,000 »

21,000 50 000

34,371,000

574,500 000

352,800 000

198.200,00,)

112,000,000

8-4,000,000

49 000,000

39,50^,000

73,000.000

12 000,000

10,0'0,000

1,505,000,000

Ces chiffres, concluait M. Fau chère, démontrent qu'au point de vue de la production agricole, la France occupe une des dernières places parmi les peuples colonisateurs. Mais elle possède des colonies d'une superficie de près de 10 millions de kilomètres carrés et 40 millions d'habitants. Elle pent tout entreprendre et tout espérer. Que demain répare l'erreur d'hier. Tel est le vœu patriotique de M. Fauchère et le notre.

Les coloniaux français, dont l'exemple et les écrits ont entraîné trop facilement notre administration congolaise, avouent maintenant qu'ils ont fait fausse route : ils se disposent à imiter les Anglais, les Hollandais, les Américains, les Japonais, les Allemands, qui ont su tirer de leurs colonies

(1) Voir les comptes rendus du Congrès National d'Agriculture des- Colonies françaises, tenu à Paris en mai 1 918, sous la présidence de M. Chauler.

83

un beaucoup meilleur parti. La France, propriétaire de colonies magnifiques, dont la production est restée très inférieure, paraît vouloir enfin rejeter définitivement les doctrines néfastes qui lui firent reléguer au deuxième plan la colonisa- tion européenne.

Une personnalité coloniale française décrivait dernière- ment en ces termes le triste résultat de la politique suivie dans les Colonies françaises de l'Indo-Chine. (1)

« Lorsqu'on parcourt l'Indo- Chine et les possessions étran- gères d'Extrême-Orient, on est frappé par l'extraordinaire différence que présentent notre Colonie et les pays voisins. A Java, à Sumatra, à Ceylan, dans les Etats Fédérés Malais, la colonisation européenne, ou plus exactement la colonisation par les capitaux européens, a pris un essor prodigieux; les grandes plantations de cannes à sucre, d'héveas, de tabac, de thés, se comptent par centaines ; les capitaux investis dans ces entreprises se chiffrent par milliards ; non seulement les Colonies étrangères en Extrême-Orient suffisent à tous les besoins de leur métropole, mais elles ont avec tous les pays du monde et spécialement avec la France, un commerce énorme d'exportation. En Indo-Chine, au contraire, en dehors des plantations d'hévéas, il n'existe aucune entreprise agricole digne d'intérêt.... Les Colonies françaises ont été délaissées par nos propres nationaux. »

« Au lendemain de la guerre, il importe que la France » puisse trouver dans ses Colonies toutes les matières pre- » mières nécessaires à ses besoins : c'est une des conditions » essentielles de son prompt relèvement économique. Tout » cela est possible, à moins que par une étrange aberration, » nous nous attachions à démontrer que toute tentative est )> vaine, et que les colons français ne sauraient trouver dans » les Colonies françaises, la protection légitime dont ils ont » besoin. ))

Ces paroles pourraient s'appliquer mot par mot au Congo Belge, dont elles décriraient très exactement la situation.

Refusant obstinément de voir les milliards qui se gagnent à leur porte par les Anglais et les Hollandais, et même de connaître les capitaux français investis en grand nombre dans les colonies étrangères, M. Harmand et ses adeptes sèment à

(lj Voir Bulletins de l'Institut Colonial de Marseille, 1920.

84

pleines mains le pessimisme et le découragement et posent en principe qu'il n'y a rien à faire pour l'Européen dans les colonies tropicales. Et dire que ces écrits, dignes du moyen âge, ont paru au début du XXe siècle !

Justice est faite d'ailleurs, de toutes ces erreurs, par un mot prononcé, malheureusement, par un ennemi : u L'Angleterre, dit un jour Bismarck, a des colonies et des colons, l'Alle- magne a des colons et pas de colonies ; la France a des colonies et pas de colons ».

Bien que M. Harmand, qui cite ces paroles, ait cru devoir les combattre et ajouter à son exposé défectueux une incon- séquence remarquable, il est malheureusement bien vrai que la France a jusqu'ici des colonies sans colons et que notre administration congolaise actuelle, suivant aveuglément les théories agricoles néfastes de quelques vieux coloniaux voi- sins, de prépare au Congo Belge une situation tout aussi dommageable.

Xous nous demandons par quelle fatalité notre Administra- tion congolaise, si méritante à tant d'autres égards, modela ses théories agricoles précisément sur celles des gouverne- ments coloniaux qui ont jusqu'ici tiré le parti le moins satis- faisant des possibilités agricoles de leurs colonies.

Pourquoi ne suit elle pas plutôt les exemples des peuples qui ont réussi à établir la prospérité dans leurs colonies tropicales ?

*

Une administration qui épouse les idées de M. Harmand est obligée de trouver un moyen autre que les plantations pour utiliser les territoires coloniaux. Il faut alors, sous peine d'exclure tout progrès, encourager et stimuler l'agriculture indigène. On peut même, dans certains cas, se contenter de lui fournir des débouchés, des routes, chemins de fer ou bateaux.

Ce dernier système, très facile pour l'Administration, a pu être adopté dans des pays tels que la Cochinchine et les Tndes anglaises, pays à population abondante et agricole. Et encore n 'arrive- t-on par ce moyen qu'à de faibles résultats, ce dont

85

les Français eux-mêmes paraissent actuellement convaincus.

Mais si la population n'est ni nombreuse ni agricole; si, comme c'est le cas au Congo Belge et Français, elle n'a pas même le désir d'amasser de l'argent ou des biens meubles ou immeubles; si elle est indolente et demi-sauvage, le système du laisser faire n'aboutit à rien. Le sauvage, qu'il soit noir, jaune ou brun, se contente de cultiver assez pour se nourrir et payer l'impôt. Le plus souvent il fait faire le travail par sa femme, et s'occupe de chasse, de pêche et de palabres. Le pays reste à peu près inculte ; sa production est infime.

De sorte que si l'on se rejette sur l'agriculture indigène, il faut l'organiser, trouver un moyen d'obliger les indigènes à travailler et leur donner gratuitement les conseils, les semences, les voies et moyens de transport. Il faut donc dis- poser d'un nombreux personnel et de larges crédits, faute de quoi le développement de l'agriculture sera très beau sur le papier et nul en pratique. Nous avons étudié ailleurs les con- ditions que présente l'agriculture indigène au Congo Belge (l) et les exigences de son amélioration ; nous en reparlerons prochainement.

Il est déplorable de dire aux indigènes : travaillez si vous voulez, vous êtes libres ! Ce système fut suivi dans certaines colonies françaises, dont le retard est devenu manifeste. Il faut au contraire engager les populations au travail, les obliger à produire et à s'enrichir, les mener parla main. Cela coûte beau- coup d'argent et de temps. Et en fin de compte on retombe toujours dans la nécessité de faire diriger la culture par des européens, mais qui sont ici des fonctionnaires de l'Etat au lieu de colons.

C'est ce que préconise M. Harmand : Reconnaissons, dit-il, page 150, « que dans les dominations tropicales, la popula- tion est presque exclusivement agricole (!), le véritable colon c'est l'indigène, et le grand colonisateur, c'est l'Etat ».

Mais, après avoir formulé cette théorie étatiste, il ne dit nul- lement ce qu'il ferait au cas la population ne serait pas agri- cole. On a vu d'ailleurs, pendant la guerre, ce que vaut l'Etat quand il s'agit d'organiser une entreprise d'ordre économique.

Un moyen permet de résoudre le problème : l'imposition

(1) Voir la brochure Le Congo Belge a-t-il un grand avenir agricole? par E. Leplae, Louvain, librairie Uytpruyst, octobre 1919.

8(5

aux noirs d'un travail agricole très modéré, au profit des indi- gènes qui le pratiquent. Ce moyen, qui présente des avantages, élimine les colons et opère rapidement, devait plaire à nos coloniaux, beaucoup plus que le système des plantations.

Le développement de l'agriculture coloniale sans colons ni planteurs, mais par l'imposition de cultures aux indigènes, parut donc la solution idéale ; l'agriculture de plantation devint le moindre des soucis de notre Administration actuelle, ou même une forme d'agriculture dont la constitution ne lui paraissait plus désirable.

Les conséquences de ce raisonnement et des explications et instructions qui furent données au Congo ne se sont guère fait attendre.

Elles vont, dans l'administration, de la simple abstention à l'égard des plantations, jusqu'à une politique ouvertement opposée à la multiplication de ces entreprises.

Dans les sociétés congolaises privées, qui recrutent souvent leur personnel parmi les anciens agents de l'Etat, les mêmes idées ont eu cours jusqu'ici.

Aussi nos sociétés ne pensent elles qu'à demander des con- cessions énormes, de superficies très exagérées et qu'il est im- possible d'exploiter rationnellement. On ne songe d'ailleurs pas à les exploiter, mais seulement à se créer des monopoles. Notre colonie retombe petit à petit dans le régime des grandes concessions, et quelques groupes se partagent notre immense domaine colonial. Comment donc nous étonner que les Belges de Belgique s'intéressent peu à notre colonie ?

Le seul fait que l'Administration se montre indifférente à l'égard du développement et du succès de certaines entreprises, exerce déjà sur celles-ci une influence des plus nuisibles.

En effet, comme nous l'avons dit plus haut, aucune entre- prise ne peut réussir en Afrique equatoriale si l'Administration ne la favorise pas, si elle ne l'ait pas comprendre aux indigènes qu'elle désire qu'ils lui viennent en aide, et si elle n'engage pas les noirs à fournir la main d'œuvre nécessaire.

Le premier effet et le plus dommageable de l'abstention administrative se fait sentir dans la main-d'œuvre : le planteur ne trouve pas les ouvriers qui lui sont absolument indispen-

87

sables. Et, s'il parvient à s'en procurer, son personnel indi- gène est d'une instabilité absolue : à tout instant la plantation -est à court de main-d'œuvre.

Et l'on voit ainsi, dans des régions les indigènes abon- dent, des entreprises qui végètent ou périclitent, faute de trouver quelques douzaines ou centaines d'ouvriers, qu'elle veulent cependant bien payer et bien traiter. Aucune entre- prise minière ou agricole ne peut réussir dans ces conditions, mais les entreprises agricoles sont seules à en souffrir. Car l'État, fortement intéressé dans les mines de cuivre, d'or et de diamant, sait donner en faveur de leurs recrutements l'aide qu'il refuse aux entreprises agricoles. Il y a en cette question deux poids et deux mesures.

Cet effet se manifeste même pour les plantations de l'Etat. L'Administration territoriale,- toute puissante en cette ques- tion de main-d'œuvre, s'est désintéressée de tout ce qui est agriculture de plantation. En conséquence nous ne parvenons même pas à trouver les nommes nécessaires pour exploiter les Hévéas de nos plantations officielles. L'État a déjà perdu de <3e chef plusieurs millions de francs (1). La situation est la même dans les quelques plantations privées qui se voient, rari liantes, dans notre immense colonie.

Non seulement l'administration, qui entoure de sa sollicitude les recrutements pour les mines dont l'État est propriétaire ou actionnaire, ne se préoccupe pas de la main-d'œuvre aux planteurs, mais elle porte aussi fort peu d'intérêt à tout ce qui 2b pour but de favoriser la colonisation et les planteurs belges.

Cette attitude se manifeste clairement en ce qui concerne les stations expérimentales et le service de J 'Agriculture. Au moment l'Angleterre décide d'organiser dans toutes ses colonies des services techniques agricoles, et les dote de per- sonnel et de crédits largement calculés, nous détruisons, dans

(1) La production normale de la plantation de caoutchouc de l'Etat à Yangambi-Gazi pouvait être évaluée en 1918 à envivon 3n0 kilos de caout- chouc par hectare, ce qui devait représenter une valeur de 3,300 francs par hectare et par an ; soit pour 400 hectares d'Hévéas une production annuelle valant en Europe 1,000,000 de francs. Une somme considérable est perdue chaque année, parce que les autorités ne font pas donner à la planta tion la main-d'œuvre dont elle a besoin : depuis qu'elle est dirigée par le Service de l'Agriculture, la haute administration ne veut plus lui prêter assistance; même l'intérêt de l'Etat est entièrement méconnu.

88

notre administration coloniale, tant au Congo qu'à Bruxelles,, les services agricoles que nous avions édifiés à grands frais ; nous perdons des éléments indispensables au développement agricole de la colonie.

Les besoins techniques d'une colonie grande comme la moitié de l'Europe sont souvent étudiés en Afrique, liélas, avec une parcimonie digne d'un petit village et une ignorance sereine des progrès du monde colonial.

D'ailleurs, au Congo Belge, aucune marque de sollicitude sincère de la part de l'Administration, ne vient encourager l'initiative du futur colon. Celui-ci se heurte à des délais et atermoiements interminables, qui font douter de la satisfaction éprouvée par l'Administration lorsqu'il se présente de nouveaux colons ou planteurs.

Tel groupe belge très sérieux, déjà établi au Congo, se montrait désireux d'exploiter des bois. Les énormes richesses forestières du Congo n'ont jusqu'ici pas la moindre utilisation. Or, ce groupe multiplia les démarches pendant un an et demi,, sans aboutir à obtenir une concession minuscule, et ce ne fut finalement que par intervention du Ministre lui-même qu'il fût autorisé à travailler.

Cet exemple et d'autres analogues montrent l'indifférence de l'Administration pour les intérêts du colon belge, et l'absence d'encouragement et d'assistance à l'initiative privée lorsqu'elle est d'ordre agricole ou forestier.

Quelques plantations de l'État furent conservées ou établies en 1910 pour démontrer aux Belges l'avenir des entreprises agricoles coloniales. Elles ont durement subi le contre coup de l'indifférence officielle. Dès qu'il a fallu réduire les dépenses de la Colonie, la main-d'œuvre des plantations fut réduite au minimum, puis supprimée. Des plantations qui avaient coûté fort cher à l'État furent ainsi abandonnées à la brousse, ou vendues à crédit à des étrangers.

A peine réussit-on à sauver du désastre 4 ou 5 planta- tions (l) dans l'espoir d'intéresser les Belges aux cultures coloniales.

Leur maintien exige jusqu'à ce jour une lutte constante contre les préventions de l'Administration : il est impossible

(I) Ce sont les stations de Lula (café), Barunibu (cacao), Yangambi-Gazï (hévea) et Ganda-Sundi (cacao-hévéa) .

89

de leur appliquer un régime rationnel, permettant des résul- tats financiers. Nous avons voulu les organiser rationnel- lement, pour montrer aux Belges que ces cultures peuvent réussir au Congo et qu'on ne doit plus décourager les initia- tives en agitant les spectres des anciennes plantations de lianes, de cacao, de café, d'ireh : une vive opposition se mani- festa aussitôt, et les plantations restèrent aussi mal organi- sées qu'autrefois.

Ceci s'appliqua d'abord aux plantations de caoutchouc, de cacao et de café, commencées il y a une dizaine d'années, Mais l'indifférence est la même au point de vue de la culture de l'Elaeis. Ce fut en vain que nous proposâmes, en 1917, de fonder près d'Eala une plantation d'Elaeis pour l'étude et la comparaison des nombreuses variétés de palmiers à huile. Le terrain était trouvé et disponible; il suffisait d'un mot pour mettre en route une entreprise hautement intéressante, indis- pensable même au point de vue des intérêts des sociétés et particuliers opérant au Congo. Ceux-ci auraient tant de raisons pour planter des Elaeis en plantation méthodique, comme on le fait avec tant de succès en Malaisie : c'est une question vitale pour l'avenir de la Colonie. Mais, depuis trois ans, le mot nécessaire se fait attendre : l'administration n'aime pas ces expériences.

Lorsque la politique agricole de l'Etat doit être appliquée par des agents subalternes, ce qui est évidemment presque toujours inévitable, il se produit des exagérations étonnantes, qui se traduisent parfois par des actes présentant nettement le caractère d'une opposition.

La belle plantation de café de l'Etat à Lula, que tous les visiteurs du Congo admirent, a pour objet de résoudre les nombreux problèmes entravant dans la Colonie une culture du plus grand intérêt. Elle a coûté cher et possède un matériel perfectionné, des peuplements magnifiques. Mais cela n'em- pêcha pas un agent territorial, il y a deux ans, d'obliger les ouvriers de Lula à se livrer à la culture du riz au lieu de tra- vailler dans la plantation, qui fut privée de main-d'œuvre malgré les protestations du directeur. Rien de semblable, faut-il le dire, ne se serait produit si l'on avait en haut lieu témoigné quelque intérêt pour cette entreprise.

Des faits encore plus caractéristiques se sont passés au Katanga, la colonisation belge était non seulement possible

90

mais urgente au point de vue national On vit un fonctionnaire de l'Etat exciter les indigènes contre les meilleurs colons belges et conseiller aux noirs de ne pas s'engager au service de ces agriculteurs. Un haut fonctionnaire habita deux ans en face de la ferme expérimentale et pour bien montrer son indifférence envers tout ce qui peut favoriser la colonisation, eut soin de ne pas visiter cette ferme, sa visite aurait cependant stimulé et récompensé le zèle des agents de l'Agriculture.

On voit à quelles erreurs entraîne la fameuse théorie défen- due par M. Harmand et le tort considérable qu'elle a fait et fait encore à notre colonie comme aux colonies françaises voisines.

Cette situation perdurant, nos capitalistes continueront, comme par le passé, à créer des juantations ailleurs que dans notre colonie, et laisseront le Congo belge aux étrangers. Aussi, ne saurions-nous assez répéter ce que nous avons dit ailleurs :

Si la Belgique veut développer au Congo les entreprises agricoles belges et substituer l'activité et l'initiative féconde des particuliers aux procédés inhabiles d'une administration publique, il faut commencer par convaincre l'administration congolaise actuelle de l'erreur qu'elle commet en se montrant indifférente ou presque hostile à la colonisation par des plan- teurs et fermiers belges.

Il est d'autant plus nécessaire de convertir au plus tôt, à ce point de vue, notre administration, que la guerre a porté la plus grave atteinte à l'industrie belge, que les matières premières coloniales sont indispensables au relèvement de la patrie et que les étrangers commencent à prendre les places laissées inoccu- pées par les Belges dans leur propre colonie : ce fait se produit en ce moment dans le beau pays de Kilo, de si grand avenir.

La guerre nous a ouvert en Afrique centrale des possibilités de colonisation presque illimitées. Depuis le Katanga jusqu'à rUelle s'étendent des régions admirablement salubres et fer- tiles, où s'établiront bientôt des voies de pénétration agricole et industrielle.

91

Il ne faut pas que leur colonisation par les Belges et l'exploitation des richesses agricoles et forestières du Congo équatorial soient entravées par les idées fausses qui ont cours actuellement dans les milieux coloniaux officiels.

(A suivre). Edm. Leplae.

Professeur à V Université de Louvain,

Directeur général de l'Agriculture

au Ministère des Colonies.

92

Het Economisch Leven van den Mongo-neger

NIJ VEEHEID .

Vermits de natuur den Mongo-neger zijn benoodigdheden om te bestaan als het ware in zijn sclioot werpt, zonder dat hij de minste moeite er voor doet, daar hij in hoofdzaak zijn voedsel slechts behoeft te zoeken in 't bosch en als 't ware op te rapen van den groud, met uitzondering van zijn bananen, maniok- wortels en moma (een igname, die, goedbereid, aan aardappelen doet denken) die zijn vrouwen aanplanten, is het geheel natuur- lijk dat men in den Mongo zeer weinig nijverheid vindt en de Mongo-neger zicht de minste moeite niet getroost de reeds van eeuwen herwaarts bestaande nijverheid eenigzinste bevorderen en te vervolmaken

Hij heeft toch te bikken en dit is hoofdzaak voor hem.

Bij een lui, vadsig volk, verwijfd in merg en been, en slechts levend van het werk zijner veelvuldige vrouwen en slavinnen kan de nijverheid niet op hoog peil staan.

Over 't algemeen genomen met uitzondering van de jacht, die nog hoofdzakelijk gedreven wordt door de jonge mannen van het dorp, bekommert de Mongo-neger zich om niets. Eten, slapen en geschillen zoeken en aanhooren, op suikerrietbierver- gaderingen medefuiven, totdat ze door moeder tie vrouw worden meegepakt in beschonken toestand (tooneelen, die men in beschaafd Europa ook wel ziet) ziehier het saaie, eentonige, verslappende leven van den Mongo-neger, éen der laagst staande, doch tevens één der hoogst belang-inboezemende stammen van het Evenaarsdistrict, zoo niet van gansch Kongo-land.

Van werken walgt hij, daar heeft hij minstens een dozijn broertjes aan dood; hij is de aartsluilak in persoon.

Niettegenstaande de verregaande vadsigheid van het Mongo-

93

volk bestaat er tocli nijverheid, noodig voor hun bestaan, ofschoon op laag peil en weinig verspreid. Over 't algemeen beperkt de bestaande nijverheid zich tot 't mannelijke of 't vrouwelijk geslacht en een man zal nooit 't ambt, eigen aan de vrouwen ter hand nemen en omgekeerd. Het werk wordt niet gedaan bij groepen of per familie, doch waar een tak van nijverheid bestaat, is dit het werk van een enkel persoon tenzij meer werkkrachten noodzakelijk verlangd worden om het werk te kunnen uitvoeren.

Verdeeling van het werk is onbekend en een ieder werkt geheel op zich zelven, zonder de hulp van een tusschenpersoon. Werklui zijn niet bekend, laat staan handwerklieden, tenzij een of andere ambachtsman, die een ambacht leerde bij den Staat of op een of anderen Missiepost en terugkeerde naar zijn dorp na zijn contract afgedaan te hebben.

Als regel vinden deze in hun eigen dorpen geen voldoende werk en meestal in bezit zijnde van eenige kisten, kleêren en wat potten en pannen, overgehouden van hun maandelijksch salaris, spelen zij den grooten Mijnheer in hun dorp, totdat al hun hebben en houden opgeteerd en versleten is.

Njolemwa Bosala zegt hij, ik ben het werken zat. Njowu Tompele, il sterf van 't zware, moeilijke werk.

Verscheidenen gaan dan weer naar een of ander middenpunt van de blanken en bieden zich weder als ambachtslieden aan.

Een goed ambachtsman staat nog al hoog aangeschreven onder de inboorlingen en zijn sociale positie is voor een neger zelfs zeer goed te noemen, Hij kan zich geregeld het voedsel voor vrouw en kinderen aanschaffen en steekt zich in de kleêren.

Ofschoon de meeste negers individueel werken, kan dit niet gezegd worden van den smid, die andere werkkrachten ter hulp moet roepen om zijn werk te kunnen verrichten.

Wijl de Mongo-neger geen gedacht beeft van salaris, krij- gen zijn medehelpers een deel der verdiensten, bestaande in mitakos, of een of ander gedeelte van het geleverde werk, het- zij een mes, lans of voet- of armring.

I. . 'T SM1DSVAK.

Van de verschillende takken van nijverheid staat zeker het smidsvak bovenaan. De smid is een der voornaamste personen

94

van liet dorp en met dorpsaangelegenheden, hetzij geschillen, vergaderingen, is hij een der aangewezen personen om zijn stem in de weegschaal te leggen.

De smid is feitelijk de eenigste onder de Mongo-negers, die geregeld door blijft werken en niet op zijn lauweren gaat rus- ten. Door zijn verdiensten heeft hij zich nog al wat vrouwen aan weten te koopen en wordt hij beschouwd als één der dorps- hoofden, die men naar de oogen moet zien.

Wat bij ons de dorpsherberg is waar men de dorpsaange- legenheden van de week luidvoerig bespreekt, is de smidse bij denMongo-neger.In de smidse verzamelen zich de ouderlingen, de jongeren hebben niks in de melk te brokkelen; daar worden de veelvuldige vrouwengeschillen en de aanstaande be lastingen besproken ; onder 't zwelgen van de rook, uit hun reusachtige bamboepijxDen met diepe trekken getrokken, is de smid de eenige, die doorwerkt en zijn kost op nobele wijze verdient.

De smid is de meest tactvolle ambachtsman onder de Mongo.

't Ambacht van den smid is ongeveer 't eenige ambacht dat eigen is aan de familie en van vader tot zoon wordt voort- gezet. Laat de smid geen kinderen na, dan zal zijn jongere broeder de zaak overnemen.

Yan andere ambachten kan dit erfrecht geenszins gezegd worden ; 't ambacht van den smid is erfelijk, terwijl de andere ambachten onwillekeurig door Jan en alleman, die er zijn ge- noegen in vindt, worden opgenomen.

De smidse waarin de smid zijn ambacht uitoefent, is een breede langwerpige donkere hut, (ongeveer 5 m. bij 10 m.) ge- bouwd langs den openbaren weg. Ongelijk aan de overige woon- hutten der negers, waarvan de vloer in den regel een 20 c. m. hooger bgt dan de weg, is de vloer van de smidse een 30, 70 c. m. diep uitgegraven, zoodat men van den weg in de smidse stapt.

Met welk gedachte de vloer der smidse is uitgegraven kan ik niet zeker zeggen, doch hoogstwaarschijnlijk om bij 't op- komen van stormwinden, die bij 't opzetten van een zware tropischen regen de hutten doorvagen, brandgevaar te voorko- men. Door 't uitgraven van den vloer ontstaat een 1/2 m . hooge omheining van aarde rondom de smidse, waardoor de smid buiten den wind zit en zoodoende rustig kan doorwerken.

Niettegenstaande de primitieve inrichting der werktuigen

95

en de primitieve behandeling daarvan, weet de smid van zijn werktuigen tocli gedaan te krijgen, hetwelk hij er van ver- eisclit De smidse (lotiilu) is als volgt opgesteld : Een blok hout, terlengte van ongeveer een 60 cm. ; 40 cm. breed ; 30 cm. hoog, wordt uitgehakt; een 1/2 m. lange, holle buis is daaraan verbonden ; dit alles is gevormd uit één stuk. Door middel van een banaanstronk, waarlangs klei is opgehoogd vormt men een smidbuis. De banaanstronk wordt uit de klei getrokken en de holle klei-buis (boongo) ontstaat. Op 't blok hout worden de twee, ook vier windzakken (njasa) geplaatst. Deze windzakken zijn de gaten overdekt met de gedroogde huid van een of ander wild beest, waarin de bedrij f stokken (biongonga) vastgebon- den zijn. Deze « biongonga » worden door twee mannen ojy en neer gehaald in een vlug tempo ; deze handeling veroorzaakt de win! om het vuurtje gemaakt van houtskool aan te wakkeren .

Voor de « boongo » heeft de smid (bo'uli) een soort loop- graaf gegraven, waar het aan te vlammen houtskool vuurtje ligt. In dit vuurtje worden het ijzererts, Europeesch ijzer en •de koperstaafjes (njele-mitakos) gesmolten.

Botuli atula la lotulo : De smidt smeedt met de smidse.

In vroeger tijden, toen men in de Mongo het Europeesch ijzer niet machtig kon worden werd het ijzererts (bikense bia bokili) uit 't bosch opgegraven en in de smidse tot vloeistof verhit. De onreinheden die boven dreven werden er afgeschept en zoodoende verkreeg de Mongo-neger zijn ijzer. In tegenwoordige tijden, nu de neger zijn ijzer zoo gemakelijk bij de verschillende factorijen kan verkrijgen, verkiest hij 't Europeesch ijzer te bewerken, 't Ingevoerde ijzer geeft betere waar en de neger behoeft geen moeite meer te doen zijn ijzererts te gaan zoeken. Trouwens zou de Mongo-smid lansen gemaakt van ijzererts niet meer kwijt raken, wijl het ingevoerde ijzer veel beter is.

De werktuigen van den smid zijn als volgt :

1. Boengwa : 't kleine stampijzer.

2. Loaka : 't groote stampijzer.

3. Etulaka : 't smeedijzer.

4. Eala : aambeeld.

5. Lingwata : een op een Europeeschen hamer gelijkende hamer, die voor 't zelfde doel dienst doet.

6. Kongwa : een gespleten stok om 't lieete ijzer uit het vuur te halen en vast tehouden onder 't smeden. Een ijzeren

96

ringetje of een stukje liaan wordt om den gespleten stok gelegd e a wordt bij liet vasthouden van 't heete voorwerp dicht- gesclioven, zoodat het te smeden voorwerp beter bevestigd zit.

7. Loseno : beitel.

8. Losio : kleine beitel bevestigd in een stok waarmede men de versieringen op messen, lansen en ringen kerft.

9. Jyoka : de gereedschapskist bestaande uit een mooi afgewerkt kistje met deksel, waarop een Europeesch slot.

De ijzeren voorwerpen door den Mongo-smid vervaardigd zijn als volgt :

Bibui : alles wat ijzer is.

1 . Likula : pijl.

2. Bosuki : pijl voor de varkensjacht en die ook gebruikt wordt om de kopal te steken en visch te spichten.

3. Bongelo : lans.

4. Ifombolo : lans.

5. Mjpokwankoi : lans.

6. Liswa : bijl.

Jokula : messen.

1. Mombi; 2. Boli\ 3. Bolengwa-, 4. Lingonda; 5. Limenga ; 6. Likod\i\ 7. Efamba; 8. Momba; 9. Verders kleine mesjes; 10. Li^angi.

Basongo : steeknaalden.

1. Ingwdla.

2. Lokili : naald om te tatoueeren.

3. Jyolo : kleine steeknaald om de aardvlooien uit de voeten te halen.

4. Efoli : kleine steeknaald.

Ngonga : bellen.

1. Ngonga ea tosisi : bellen 'gedragen door vrouwen en kinderen om de lendenen opdat hun geklingel, veroorzaakt met loopen, de slechte geesten weghoudt.

2. Bongonga : bel verbonden aan de punt van den strijdlans, gelijk de kop van een wandelstok, doch ten onderste boven.

3. Lingwete : rond belletje gedragen door de mannen aan den pols.

4. Elond\a ea itumba : de strijdklok. Een langwerpige buis

97

In den vorm van een langen kelk vastgehecht aan een stok. Men slaat er met een zacht stuk hout tegen en 't geluid ver- spreidt zich verbazend ver.

Deze bellen zijn allen gemaakt van gesmeed ijzer.

De inlandscbe smid bewerkt niet alleen het ijzer, doch ook het koper dat hij op dezelfde manier uit koperen staafjes (Ion- gele : mitako) en oude, versleten, koperen ringen samensmelt.

De koperen staafjes hier een gelds waarde vertegenwoor- digend van 30 voor een frank zijn van Europa afkomstig en kopererts is hier onbekend.

De koperen voorwerpen door den smid vervaardigd zijn :als volgt : Bakonga : alles wat koper is.

1. Bongombwa : nekring, dikwijls ter zwaarte van 10 kilo- gram en daarboven. Waarde 1,000 mitakos.

2. Lokolo : beenring, zwaarte 4-6 kilogram, en daarboven; waarde 200-500 mitakos.

3. Bolongu : armring, niet zwaar.

4. Ingwete : armring, niet zwaar.

5. Bongen^a : beenring, die bij 't loopen rammelt.

6. Bosankere : beenring.

7. Limpala : groote beenringen, spiraal vorinig, gedraaid uit -dik koperdraad en 't gansche onderbeen bedekkend; de veeren uit een matras lijken er veel op. Onder de negers een waarde van 500 'mitakos vertegenwoordigend.

8. Bompulenge : gelijk een kleine limpala, die vroeger door de ouderen van dagen aan de armen wrerden gedragen, doch thans niet meer gemaakt worden en uit de mode zijn.

In de geheele streek is slechts éen smid bekend, een zekere Elumbu van het dorp Lilangi (Basankusu), die koperen bellen weet te maken .

Door ieder Mongo-neger wordt deze zwarte als een groot- heid geroemd.

Volgens zeggen der negers moet er een smid wezen, een zekere Bokedzu uit de buurt van de Ikelembarivier, die van eenige stukkene geweren weder een nieuw in elkander wist te zetten hetwelk goed afging. Volgens de negers pakte deStaats- agent hem echter het geweer af, doch volgens mijn en anderen meening, temeer wijl een neger voor een leugen niet vervaard is, behoort deze zwarte geweerfabrikant tot den tijd der sagen thuis.

98

II. DE HOUTBEWERKING.

De houtbewerking neemt een voorname plaats in het leven van den Mongo-neger in; zoowel zijn primitief huisraad als zijn kano en zijn lokole (de negertelefoon , waarmede hij zijn gedachten van dorp tot dorp bekend maakt) bewerkt hij uit hout.

Het vervaardigen van de kano en de lokole nemen nog al veel werk in beslag.

De kano.

De drie volgende houtsoorten namelijk : 1. Bokeswa-, 2. .Li 'fake ; 3. Bomposo maken een goede kano ; vooral verkiest men de Bokeswa. Deze boom wordt zeer gezocht, wijl uit dit hout de sterke, lichtvarende kano wordt vervaardigd.

De neger, die een kano wil hebben trekt het bosch in, zoekt een mooien, slanken boom uit, haalt zijn bijl voor den dag en hakt op z'n gemak den uitgezochten boom om. Hij hakt de overvloedige takken er af en geeft den ruwen vorm aan de kano. [Aulema watu : hij vormt de kano.)

Hij roept eenigen zijner vrienden bij elkander, die, natuur- lijk tegen betaling (niets voor niets, zegt de neger) den gevallen boom uithollen.

Zijn ze klaar met 't uithollen van den boom, dan roept de eigenaar van de kano, den Wongiwa biatu, den eigenlijken kano- maker, een man van gewicht en nog al in tel bij zijn dorpelin- gen. Deze wongi wa biatu, geeft metzijnbijl den mooien, slanken vorm aan de kano, hakt haar mooi gelijk bij en door middel van de esuwa, een kleine bijl, teekent hij den rand van de kano met scherpe, korte lijntjes gelijk af.

Dikwijls vervaardigen de negers hun kanos op uren afstand van het naastbijzijnde water; om nu de kano te vervoeren wor- den stokken op den grond gelegd, waarover de kano wordt voortgetrokken. Eenige flinke mannen helpen daaraan mede- en verders de geheele spes patriae van het dorp. Zij krijgen een mitako als geschenk en zijn den koning te rijk af.

De kanomaker laat zich goed betalen en de te betalen prijs- hangt van de grootte van de kano af. Eenige honden worden geslacht op kosten van den eigenaar en iedereen, die mede- hielp, krijgt zijn deel naar het werk, hetwelk hij leverde. Dik-

99

wijls wordt er ook een groote suikerrietbierfuif op touw gezet ; walgelijke tooneelen hebben dan dikwijls plaats en beschonken worden ze door hun vrouwen naar hais gebracht. In beschaafd Europa is het soms al niet veel beter.

Men maakt vaartuigen voldoende voor twee man tot zelfs honderd en honderd vijftig man toe; de groote oorlogskano's van den grooten chef Evoloko van Waka en den oud-chef van Eandaka een zekere Isaempoko zijn alombekend. De oorlogs- kano van dezen laatsten wordt gezegd honderd vijftig man te kunnen bevatten en de rand van deze kano reikt tot aan de schouders van een tamelijk grooten neger. Degewoone reiskano van de blanken is in den regel voldoende voor twintig tot der- tig roeiers.

De prijzen der kanos verschillen naar gelang de grootte en sterkte van 200 tot 10,000 mitakos.

De Lokole.

De lokole speelt een zeer voorname rol in het leven van den neger ; zonder de lokole is het leven van den neger niet denk- baar.

De lokole kan niet beter beschreven worden dan te zijn de openbare telefoon, waarmede de neger zijn gedachten van dorp tot dorp aan het publiek bekend maakt.

De lokole is voor den neger wat het siguaal van de trompet voor den soldaat is.

De lokole roept de mannen ter vergadering, ten strijde en ter jacht; de lokole roept de gansche bevolking, klein en groot, ten dans. Gedurende den dans is zij tot diep in den nacht de getrouwe begeleidster ; haar eentonig geluid voert de dansers tot een in halve razernij overslaand enthusiasme.

Op uren afstand telefoneert de vriend naar zijn vrienden en geeft weer wat hij verlangt; zijn twee negers van verschillende of van dezelfde dorpen met elkander in geschil, per /o&o/e wordt hun de huid volgescholden en Jan en alleman wordt op de hoogte gebracht van het hangende geschil. Zij doen hun best elkander voor het volk zoo zwart mogelijk te maken. Is er een doode in het dorp, den gansehen nacht door wordt alom per lokole bekend gemaakt, dat die en die gestorven is. Reeds uren voor diens dood weet men overal dat die en die persoon op sterven ligt en zijn dood nabij is.

100

Indien de fetisch-dokter zijn bedrog aan liet domme neger- volk aan liet opdisschen is, overal in liet rond weet men precies het uur zijner liandeliugen en wat voor onzin hij op 't oogen- blik uitzet.

De blanke kondigt het morgen-en middag-appel en het uur van uitscheiden zijner werklui per lokole aan.

Voooral s'morgens, s'avonds en met nat weerklinkt de lokole ver ; met volle zon dringt de lokole niet ver door.

De lokole is een groote blok hout, waar in het midden een spleet over bijna de gansene lengte wordt gehakt, terwijl het binnenste zorgvuldig wordt uitgestoken. De lokoley ofschoon over het algemeen aan de buitenkanten afgeplat heeft de vorm van een overlangs openstaande, liggende mosselchelp.

Het lokole maken is een ambacht uitgevoerd door een be- paald persoon en sommige negers zijn wijdbekend voor het maken hunner lokole' s .

Slechts vier houtsoorten zijn geschikt voor 't vervaardigen van de lokole namelijk :

1) Bokungu; 2) Likoso ; 3) Bolondo; 4) Isi, het hout bij uitnemendheid, het hout waar de Mongo-neger zijn « ngula » (roodeverfstof) uit vervaardigt, waarmede hij zijn lichaam in- smeert bij de minst gewichtige gebeurtenis, die in het dorp j)laats heeft. Waarschijnlijk is de Isi een soort vermiljoenhout. De Mongo-neger vervaardigt vijf verschillende lokole' s name lijk : 1) Ingonga, klein van vorm; 2) lokole ja losali- middel- soort ; 3) bongungu- groote lokole. Deze drie zijn allen gelijk de boven geteekende. Deze worden geslagen met de stokken (bosulu) van de « momambo » boom (parasol- boorn) ; 4 bonkuka, de groote hoog-opstaande lokole, die geslagen wordt met twee stokken, aan de punt waarvan eenige bollen caoutchouc worden bevestigd. Deze lokole dringt het verste door; 5) Ngomo, de groote langwerpige, recht opstaande dans'-/oA*o/e. Deze lokole is slechts een groot langwerpig stuk hout, gansch uitgehold, een weinig versierd, ongeveer 1,25 m. hoog, van boven afge- dekt met een stuk gedroogd antilopen of luipaardenvel, die geslagen wordt met de vingers en de palm van de hand. Deze lokole is de bekende tam-tam, nog al gebruikt door de negers der stoombooten om hun aankomst in de dorpen langs de rivier aantemelden.

Nu nog iets over de Lokole-t&al.

De slag van de lokole is verschillend en zoodoende verstaan

101

de negers de verschillende woorden ; liet tempo verschilt. De blanke hoort slechts het verschil van tempo, meer niet; de neger verstaat op uren afstand wat er getelefoneerd wordt.

De /oAo/e-taal is hoofdzakelijk beeldspraak en zoodoende voor geen enkelen blanke in gansch Kongoland verstaanbaar. De negers zijn trotsch op hun uitvinding en wat in hun schik, dat de blanke, die anders alles kan, hun lokole toch niet slaan kan.

ledere man heeft zijn eigen naam (nkombo) op de lokole, waarmede hij zich bekend maakt. Wijl zulke naam dikwijls eenige regels schrift beslaat hoofdzakelijk bestaande uit beeld- spraak, feiten uit het publieke leven van den neger weergevend, is het als 't ware een physische onmogelijkheid voor een blanke de lokole taal volledig machtig te kunnen worden, gelijk een neger die kent. Zelfs alle negers verstaan de kunst van de lokole te slaan niet.

De vrouwen hebben een algemeenen naam ; de lokole slaan is speciaal voor de mannen en geen enkele vrouw verstaat die kunst. Als de lokole geslagen wordt, verstaan de vrouwen het wel, doch zelf kunnen ze de lokole niet slaan. Trouwens ze zouden zich schamen een poging te wagen ; dit is geen werk voor een vrouw en ze zouden uitgelachen worden. De lokole naam of nkombo der vrouw is als volgt :

Bali la tolombo basalaki lisala, basalaki tomboloko, tond' al' isusu, befambe eka lisala.

Vrouwen met velen, bewerkten den tuin, maakten veel eten gereed, bestaande uit bananen, eten uit den tuin.

Een blanke, persoonlijk, heeft geen eigen nkombo op de lokole, doch, om de komst van den blanke in een dorp wijd en zijd te verkondigen, wordt het volgende rondgetelefoneerd :

Lolema ja Hf eka f eka, esongo etenaka nkola.

De vleermuis overal heenvliegend, de pin verwondt de nagels der voeten.

Voornamelijk wordt hieronder, « de vleermuis overal heen- vliegend ». de Staatsagent verstaan, die van dorp tot dorp rondtrekt om de belastingen te innen, « de pin verwondt de nagels », beteekent dat, gelijk de negers in den strijd scherp- gepunte, in 't vergift gedoopte pinnen op 't oorlogspad zetten. die den vijand z'n moeten verwonden, zoo is de Staatsagent immer op weg met zijn geweren gereed tot den strijd.

De nkombo van den katholieken missionaris is als volgt :

102

1) Bansele nsele ba nkanga; 2) bofala boki ndaki lisako nda lokombo ; 3) etafe bolo ; 4) benanga bekendaka la mperu.

Bansele nsele ba nkanga, die altijd schreeuwend wordt ver- volgd in 't hooge gras, de sterke tak, de streken gaan met den Priester (Père) mede.

1) De Missionaris wordt hier beschouwd als een fetisch- dokter (bansele nsele ba nkanga is een algemeene /oAro/e-naam van den negerfetisch dokter) die gelijk den neger dokter wordt beschouwd als een dokter en een priester.

2) Bofala boki ndaki lisako nda lokombe ; de Priester, omdat die overal catechumenen ziet aan te werven, wordt vergeleken met een antiloop, die achtervolgd, overal in 't hooge gras rond- vlucht.

3) Etafe bolo. De Missionaris wordt vergeleken met een sterke tak. Hij is sterk door zijn invloed en hooggeacht door de negers.

4) Benanga bekendaka la mperu. De streken gaan alle met den Père (Priester) mede; zij allen volgen zijn instructies.

De nkombo van den Protestantschen Engelschen Zendeling is als volgt :

Bofanga sembola bonanga boso nkenda Vlnglese.

't Vischnet wordt gespannen, het land gaat men den Engelschman mede.

Gelijk 't vischnet de rivier afzet en alles in zich opvangt, zoo gaat het land met den Engelschman mede. Wijl de Protes- tantsche Engelsche Zendeling den Katholieken Missionaris in deze streek vódr was, ging deze nkombo dien tijd op. Door de komst van den Katholieken Missionaris is de toestand gansch veranderd in deze streek.

Deze weinige voorbeelden geven een denbeeld van de moei- lijkheid om de lokole-taal te verstaan.

Verders bewerkt de neger nog eenige stoeltjes, waaronder de voornaamste, de lyeko ia mpaka, de stoel van den ouder- ling een driesprong met twee stutten er onder, uit een stuk uit de parasolboom gekapt, waar hij zich zoo lui mogelijk tus- schen werpt.

Dan hakt hij met zijn inboorlingenbijl nog een klein zit- bankje uit een blok hout, de zoogenaamde ebonga. Deze bewerkt hij netjes met zijn esumwa, kleine steekbeitel en versiert het zitvlak, rondafgezet met pinnekens (punaises) aan een of andere factorij gekocht.

103

Nu en dan ziet men een inboorlingenstoel vervaardigd gelijk hierboven vermeld, doch waaraan een soort leuning uit een stuk is gekapt.

De neger, die met den tijd mee wil, maakt voor zijn huis «en stoel à l'Européenne uit bamboe ; eenige stokken in «len grond gestoken, een mat van gespleten bamboe er over gelegd en Mijnheer kan zijn tijd doorbrengen in dolcefar niente.

Een gelijksoortige tafel (den neger onbekend) maakt het ameublement compleet.

Om een negerbed te vervaardigen behoeft men ook het bus- kruit niet ontdekt te hebben; eenige rechte stokken uit de rnombambo (parasolboom) gekapt; in 't langs en in 't breed over elkander gelegd, aan de kanten een weinig afgeplat, dat 't zaakje eenigszins in elkander past; met wat lianen (gesple- ten) aan elkander gebonden en den neger heeft weer een bed in elkander gezet. Zijn lievelingsameublement is klaar, ver- koopsprijs : 5-10 mitakos.

Het beddenmaken zou men onder een der Mongo-ambachten kunnen rangschikken ; eens zag ik in het binnenland tien dezer bedden, klein en groot, ter verkoop op den weg uitgespreid liggen.

Men verzekerde mij dat de eigenaar de beddenmaker bij uitnemendheid van het dorp was. Ik nam natuurlijk mijn hoed voor zoo'n gewichtig personage af.

De ekoba, het slaapstoeltje, is ook onmisbaar; uit een stuk gemaakt, gevormd naar de vorm van het hoofd neemt deze ekoba 4e plaats in van ons hoofdkussen, al is 't ook wat hard uitge- vallen. Een negerkop is hard en kan er tegen; de kerel slaapt zonder wiegen.

Voor 't gereed maken van zijn eten, heeft hij eenige vijzels en stampers noodig, uit hout vervaardigd Voor dit huisraad gebruikt hij hard hout, waardoor de vijzels bij 't voordurend gestamp, niet gauw verslijten.

Verders bewerkt de Mongo-neger nog zijn roeispaan, zijn pijl en boog ter jacht en de lokombi, een plat, langwerpig uit- gehold blokje hout, waarover eenige pinnen zijn gespannen, waarop hij met zijn vingers tokkelt, hetwelk een eentonig geluid veroorzaakt. Dit zoogenaamde muziekinstrument is voor den jongeling zijn trouwe medegezel op zijn lange tochten door het Evenaarswoud en op 't bezoek bij vrienden en ken- nissen.

104

III. WEVERIJ.

Een eerzaam ambacht, hetwelk nog al veel werk en oplet- tendheid vereischt, is voorzeker het ambacht van den Mongo- wever.

Ofschoon het weven niet meer zoo in zwang is als in vroeger tijden, wijl het jongere volk zich Europeesche stoffen aan- schaft, geeft het weven den wever toch ruimschoots zijn dage- lijksch brood, wijl de ouden van dagen te heidensch zijn om van hun oude, ingewortelde gewoonte, een lendendoek te dragen,, af te wijken.

Het weven is een ambacht dat alleen door de mannen wordt uitgeoefend. Sommigen zijn zeer bedreven in het weven van stoffen en dwingen onze bewondering af. Werkelijk mooi afgewerkte stukken kwam men ons te koop aanbieden en zag ik zienderooge weven.

De wever pakt zijn mes, gaat het bosch in en snijdt de « mpekwa ia lifeke », de vezels van een zeker soort palm- boom, die de wever somtijds in de nabijheid van z'n hut op den openbaren weg geplant heeft. Zoodra hij een bundel vezels, noodig voor het weven van het stuk stof, bij elkander gezameld heeft, gaat hij naar huis en op zijn gemakje schraapt hij met zijn mes de vezels gelijk bij.

Daarna legt hij ze in de zon te drogen; nadat ze voldoende gedroogd zijn, stelt hij in zijn hut of op den openbaren weg op waar hij de vezels aanhangt.

Na de vezels aan den bovensten dwarsstok bevestigd te hebben en den ondersten dwarsstok met zijn voet vasthoudend (de vezels zijn verbonden tusschen den bovensten en ondersten dwarsstok) gaat hij aan den slag.

Dikwijls gebruikt hij vezels verschillend van kleur, wat een werkelijk schoon effect maakt op het stuk stof.

Bofomi ajom eto : de wever weeft stof.

Om aan de vezels de verschillende kleuren te geven, gaat de wever heel eenvoudig te werk.

Uit 't bosch haalt hij een liaan (lo?7goli), die de roode of witte of zwarte kleurstof inhoudt, snijdt die in stukjes, doet ze in een eventjes op 't vuur geschroeid banaanblad, voegt er- water bij en hangt dit alles in een zakje van banaanblad boven het vuur met de vezels er in Nadat de kleurstof goed in de vezels is getrokken, heeft de wever zijn gekleurde vezels,.

105

benoodigd voor zijn stuk stof. Dit mengsel noemt men « bosaka ».

TOUW VERVAARDIGING .

De Mongo-touwruaker (touwslager kan men hem slecht noemen) gaat naar het bosch, haalt de vezels van een zeker soort palmboom, schraapt ze netjes met zijn mes af en legt ze in de zon te drogen.

Heele klossen touw worden zoo vervaardigd, 't Inboorlin- gentouw. aldus vervaardigd, is van een goede, sterke hoedanig - heid. Zijn netten bestemd voor de jacht en de visch vangst worden er mede vervaardigd. Gelijk 't weven is het touw maken een ambacht der mannen eigen.

IV. MANDEN- EN MATTENVLECHTEPvIJ.

Manden en matten vlechten is hoofdzakelijk het werk der vrouwen, vooral het fijne vlechtwerk.

De mannen maken slechts hun groote, ruwafgewerkte man- den, benoodigd voor het transporteeren hunner kopal. Het matten vlechten wordt alleen door de vrouwen uitgeoefend.

Uit het bosch halen zij de twijgen van de Bolongote boom, schrapen die netjes of drogen ze in de zon en vlechten al zit- tend hun manden en matten

De soorten manden zijn velerlei, doch de grondstoffen noodig voor het vlechten zijn de bokombe of likombe van de Bolongote boom.

De matten worden op den vlakken grond gevlochten door één of twee vrouwen te gelijk. Hun namen zijn als volgt':

1) Efonzolo, de ruw afgewerkte mat (waarde vijf mitakos).

2) Nkongöle, de fijn gevlochte mat (waarde een halve frank).

3) Itundô of lofole, 't kleine matje waar het drek van den weg en de asschen van het vuur mede worden weggedragen.

4) Ifefa, 't klein matje, gebruikt om het vuur aan te wak- keren.

A. Th. Gutersohn,

Priester der St José f s Congregatie. (MilhHill).

106

Mélanges

QUESTIONS ECONOMIQUES

La question des Bois.

Dans le Bulletin de la Société Belge d'Études Coloniales (mai-juin 1919, 5-6). M. Mahieu examine les possibilités économiques d'une exploita- tion rationnelle des bois dans la région Mayumbienne.

On n'a pas attendu jusqu'à ce jour, pour se rendre compte que les forêts congolaises contiennent de grandes richesses déjà signalées par M. Fuchs, il y a vingt-cinq ans.

On a essayé, il y a près d'un quart de siècle, d'amener le bois du Nord du Mayumbe en Belqique, mais la tentative ne réussit pas, com- mercialement, à cause du mode défectueux d'exploitation, du manque de main-d'œuvre et de moyens de transports, et par suite de l'état du marché des bois en Europe à cette époque.

M. De Wildeman, directeur du Jardin Botanique de l'État à Bruxelles, rappela la question à l'attention de nos compatriotes en disant, dans son ouvrage. « Sur les plantes tropicales de grande culture » paru en 1902 : « Il y au Congo, pour l'industrie belge, une mine inépuisable de bois pour tpus usages, et il serait à désirer que l'on parvienne, à exploiter régulièrement les forêts du Congo, afin de permettre à nos nationaux de n'être plus tributaires de l'étranger pour le bois d'ébénisterie ». Depuis, le gouvernement de la Colonie envoya dans le Bas-Congo des missions forestières qui toutes conclurent à la possibilité d'une exploitation rému- nératrice des forêts du Mayumbe.

Un an ou deux avant la guerre, deux sociétés du Mayumbe avaient pro- cédé à des envois d'échantillons de bois en Belgique qu'elles se pro- posaient de poursuivre ultérieurement. Quoique de faible importance, les résultats de ces envois n'étaient cependant pas décourageants.

Nos établissements Congolais ont été devancés dans cette voie par ceux des Colonies Françaises voisines qui exploitaient déjà des produits de leurs forêts avant la guerre.

107

En 1906, la Côte d'Ivoire fournissait 20,056 tonnes de bois d'une •valeur de 1,136.000 francs.

Le Gabon qui exportait 3,700 tonnes en 1896, a porté ses envois à 34,000 tonnes en 1906, à 108,000 tonnes, soit environ 200,000 mètres cubes, en 1911. La valeur de ces exportations a passe de 444,000 francs à près de 12 millions de francs.

Elles sont fournies pour la majeure partie par l'okoume, le bois des boites à cigares, puis par le bois corail ou padouk et divers acajous du genre kaya, dont certains peuvent rivaliser avec les plus beaux du Hon- duras et du Cuba.

L'ebène y entre pour environ 300 tonnes par an.

On a pu voir de beaux échantillons de ces bois lors de la dernière exposition de Bruxelles, ils ont figuré et des billes d'acajou de grosseur moyenne ont été vendus de 25,000 à 30,000 francs.

On peut citer à côté de ces prix, celui obtenu à Londres par un acajou expédié de Grand-Bassam, découpé en cinq billes, dont la vente a pro- duit 105,711 francs.

Au Congo Belge, au contraire, les exportations annuelles n'ont atteint, de 1896 à 1900, que 363 mètres cubes; de 1901 à 1905, 6 mètres cubes ; de 1906 à 1910, 4 mètres cubes ; en 191 1, 108 mètres cubes ; en 1912, 3 mètres cubes, d'un prix moyen de 150 francs le mètre cnbe, alors que l'importation annuelle moyenne s'élevait pour ces périodes, respectivement à des valeurs de 187,395 francs, 205,296 francs, 232,126 francs, 994,436 francs, 284,173 francs.

Chose curieuse, la France continue à recevoir, chaque année du Mexique, de Cuba, des Indes Anglaises et Néerlandaises, du Siam et des États-Unis pour pius de 10 millions de francs de bois exotiques, à l'usage de l'ébénisterie, dont près de la moitié en acajou, qu'elle pourrait se procurer dans ses colonies africaines.

C'était surtout l'Allemagne qui enlevait les bois de la Côte d'Ivoire et de l'Afrique equatoriale avant la guerre et qui fournissait en échange, à ces colonies, du bois d'Europe ou d'Amérique, ainsi que de nombreux articles commerciaux.

Les achats de l'Allemagne à la Côte d'Ivoire, qui n'étaient que 2,000 francs en 1909, ont monté à 130,618 francs en 1912 et à 725,214 francs en 1913.

Par contre sur les bois y importés en 1 904 pour 329,686 frans; en 1911 pour 227,638 francs; en 1912 pour 193,395 francs; en 1913 pour 195,180 francs, Sa part atteignit respectivement pour ces mêmes années, 88,245 francs, 182,295 francs, 57,879 francs, 125,592 francs.

Si nous passons à l'Afrique Equatoriale française, nous y verrons qu'en

108

1913, sur un chiffre d'exportation de bois de 154,000 tonnes payées 8,300,008 francs, l'Allemagne entrait, pour 70,000 tonnes valant 3,500,000 francs; l'Angleterre pour 30,000 tonnes valant 2,000,000 de francs; la France pour 22,000 tonnes valant 1,500,000 francs; et la Hol- lande, les États-Unis et l'Espagne, pour 32,000 tonnes payées 1,300,000 francs. Les bois acquis parles Allemands étaient dirigés sur Hambourg et se composaient principalement d'acajou et d'okoumé acheté à raison de 133 francs et 48 francs la tonne.

Ces envois étaient accompagnés de 44 tonnes de faux cotonnier valant 1,980 francs, soit 45 francs la tonne, d'est-à-dire à peu près le même prix que l'okoumé. Le faux cotonnier ou kapoquier, se vendait à Ham- bourg à un prix égal sinon supérieur à l'okoumé. Son bois léger, qui sèche rapidement sans se fendre, le rendant propre à la confection des caisses d'emballage et des intérieurs de meubles. On rencontre l'okoumé dans les forêts du Mayumbe et le faux cotonnier se trouve en abondance dans toutes les parties de notre colonie.

Si nous comparons l'effort à la Côte d'Ivoire, au Gabon et dans le- Mayumbe français, avec ce qui a été fait chez nous, nous constaterons qu'au Congo beige les exportations annuelles n'ont atteint de 1896 à 1900, que 363 mètres cubes; de 190! à 1905, 6 mètres cubes, de 1906 à 191 0, 4 mètres cubes; en 1911, 108 mètres cubes; en 1912 5 mètres cubes, d'un prix moyen de 150 francs le mètre cube, alors que l'impor- tation annuelle moyenne sélevait, pour ces périodes, respectivement à des valeurs de 187,395 francs; 205,296 francs; 232,126 francs; 994,436 francs; 284,173 francs.

Les colonies françaises n'ont pas cessé de développer leurs moyens de- production durant ces dernières années, de manière à intervenir pour une part appréciable dans les approvisionnements de leur Métropole.

Pendant ce temps, on n'a rien fait, ou presque rien, dans ce sens au Congo belge. Trois sociétés commerciales ont établi des scieries, pour les besoins locaux, à Lukolela, à Kikwit et dans l'île Bertha, mais on n'a rien produit pour l'exportation. Bien plus, le rapport annuel de 191 5, du Gouverneur Général nous apprend que le bois a manqué à Borna au point que l'adjudication d'un hangar pour la douane n'a pas abouti. La scierie de Malela a été obligée de débiter des bois, fraîchement abattus. La demande pour les travaux publics était telle qu'on n'est jamais parvenu à créer un stock de bois sec.

Il est donc urgent qu'on se mette à l'œuvre pour tirer parti des res- sources que les forêts de notre colonie possèdent.

*

109

La question des bois continue à préoccuper les écrivains coloniaux. Dans le numéro 20 de Colonies et Marine du J5 janvier 1 920 M A. Ber- tin, inspecteur des Eaux et Forêts, étudie ce problème d'une façon très approfondie. Il attire surtout l'attention sur le déboisement rapide des forêts coloniales. Il est bien prouvé dit-il, qu'actuellement nos riches forêts équatoriales se transforment rapidement en brousse dénuée de valeur.

Comment en serait-il autrement ?

Dans une parcelle contenant 60 gros arbres bien serrés, il existe un seul acajou adulte et fertile; le concessionnaire recherche cet acajou le découvre et l'abat immédiatement. Les grands arbres de toutes espèces l'entourent, étalent immédiatement leurs branches sur son cadavre et tous les jeunes semis d'acajou éclos, de l'unique semencier de cette espèce, sont bien vite étouffés.

Voilà comment l'action de l'homme civilisé qui fait abattre et extraire du peuplement tous les arbres précieux sans se préoccuper de couper au moins quelques arbres voisins d'essence mnins précieuses afin de ménager aux semis de meilleures espèces un peu de place au soleil.

L'indigène agit de son côté sur des surfaces plus grandes encore, car un village de 200 noirs à peine maintient à l'état de brousse sans valeur plusieurs de dizaines de milliers d'hectares par le procédé suivant : pour faire ses cultures vivrières (bananes, manioc, etc.), qui ne restent à la même place que trois ou quatre années consécutives au plus, l'indigène trouve plus simple de défréchir et d'incendier les forêts vierges, plutôt que de nettoyer et de fumer ses anciennes cultures, forcément envahies au bout de trois ou quatre ans par un recru forestier abondant. Ces rejets ligneux provenant du piécédent défrichement ne renferment plus que des essences à croissance rapide dont les bois mous et sans valeur constituent une forêt secondaire. Celle-ci tendrait à se transformer plus tard en forêts à essences riches, si de nouveaux défréchissements par incendie ne venaient encore réduire en brousse sans valeur la forêt en formation.

Ainsi donc, par suite des exploitations exclusives de bois précieux et par suite des cultures mouvantes des indigènes la forêt equatoriale se transforme si vite en brousse sans valeur que, dans moins de dix ans, il deviendra très difficile d'installer dans nos colonies des exploitations possibles.

11 faut donc préserver nos forêts africaines en y abattant ce qui gêne le développement des bonnes espèces, en y conservant au contraire des semenciers et porte graines d'essence de choix.

M. Bertin constate que les industriels français se sont trop souvent

110

désintéressés des recherches forestières d'outre-mer. « Il faut que cela cesse, que d'une part, on fasse connaître en France à nos architectes^ constructeurs et industriels, toute la valeur de nos bois coloniaux, bois d'oeuvre aussi bien que bois précieux. A ce sujet, il serait à souhaiter que la corporation du bois adopte quelques idées nouvelles, dont les suivantes : ne pas considérer nos colonies comme plus éloignées que. le bout du monde; exiger l'inscription sur les cahiers des charges des bois coloniaux; abandonner cette croyance risible que les acajou Cuba, Tabasco, Saint Domingue, ont une valeur exceptionnelle, alors que ce sont la plupart, surtout depuis la guerre, des acajous de notre Côte dlvoire, manœuvres par des bateaux américains et naturalisés pour en hausser le prix de vente; désirer la prospérité de nos Colonies, en les obligeant ainsi à produire; établir enfin le nationalisme commercial. Pour que la corporation reconnaisse aux bois coloniaux le droit de cité, nous aimerions qu'un Service central et unique existât, auprès de qui pourrait se documenter les Chambres syndicales du Bâtiment, du Sciage, d'Architecture, d'Ébénistes, le faubourg Saint-Antoine et tous les intéressés. Ce service, avec les fiches botaniques, forestières commer- ciales et industrielles de chaque bois, fournirait des échantillons, com- muniquerait des référenees et dirigerait la production aux Colonies.

11 faut, d'autre part, que des facilités soient accordées aux colons, afin de constituer des flottes spécialement aménagées pour le transport des bois, voiliers mixtes ou chalands remorqués, ou bien qu'ils fassent un accord avec l'État ou leur colonie, pour qu'il soit établi un service de navigation les reliant à la Métropole, service auquel la colonie accorde- rait une garantie d'intérêt ou une avance permettant la construction des bateaux nécessaires.

Les oléagineux des colonies françaises.

Le tome II du premier volume des travaux du Congrès d'Agriculture Coloniale qui s'est tenu à Paris du 20 au 25 mai 1918, a paru récemment.

Voici le compte rendu qu'en donnent les Annales de géographie 154 du 15 juillet 1919 en :

« Il débute par un rapport général (p. 7-84) à Fr. de Roux et A. Tanti, et est consacré surtout à l'étude des oléagineux des colonies françaises qui sont passés successivement en revue (95-58i). Viennent ensuite une étude du commerce et de l'industrie de la graine et de l'huile aux États Unis (par M. Mulsant; extraits p. 586-600), des statistiques générales des oléagineux s'étendant de 1906 à 1916 (p. 601-650) et une bibliographie des principaux ouvrages sur les graines oléagineuses

111

p. 631-638). D'importants renseignements peuvent être tirés des docu- ments accumulés dans ce volume.

Pour l'arachide, le commerce mondial a porté en 4915, sur 700,000 tonnes, dont 525,000 tonnes à destination de la France et 100.000 tonnes (25,000 provenant du Sénégal) à celle de l'Allemagne. Nos colonies nous ont fourni la moitié de nos importations(262,000 tonnes) dont la produc- tion a été, en 1915, de 230,000 tonnes. La Gambie nous a fourni 43,000 tonnes; l'Inde française, 86,000 tonnes (arachides décortiquées), prove- nant en majeure partie de l'Inde anglaise, qui nous a vendu directement 226,000 tonnes.

Il est fâcheux de constater que nous laissions exporter à l'étranger une partie de ia production de nos colonies, alors que cette production est à peine suffisante pour nos propres besoins.

Cette production pourrait être accrue. Ém. Roubaud a indiqué (p. 153- 159) quelques perfectionnements faciles à apporter à la culture au Séné- gal; une étude sur la station de Palur (Indes anglaises, p. 474-483) lui a permis d'en indiquer quelques autres.

Les cultures expérimentales poursuivies a Palur, de 1906 à 1916 ont mis en évidence la haute valeur comme rendement en poids à l'hectare et comme teneur en huile de nos variétés africaines d'arachidées,il n'y a donc pas lieu de chercher à acclimater en Afrique Occidentale de nou- velles variétés, mais seulement de sélectionner les sortes sénégalaises.

Les cultures irriguées ont toujours donné un meilleur rendement, et cependant à Palur de 1906 à i 9 1 6 , les chutes de pluie ont été comprises entre 750 mm. et 2,000 mm.; ce n'est qu'au sud de Dakar que l'on trouve des précipitations comparables. Les essais ont montré aussi que la culture continue de l'arachide, sans alternance, amène rapidement une diminution très nette dans les rendements. C'est une pratique à con- damner.

Les Hindous ont habituellement une culture mixte; un mois après avoir semé une céréale, ils mettent en terre les graines d'arachide. Cette méthode a été étudiée à Palur; le rendement total est meilleur et, pour l'arachide, le rendement en huile s'accroît légèrement ( 35 à 59 p. c. de l'amande)en même temps que le poids de la coque diminue. Cette méthode de culture serait à essayer en Afrique.

D'autre part une tonne d'arachides non décortiquées contient 700 kilo- grammes d'amandes et une tonne d'amandes occupe le même volume qu'une tonned'arachides; d'où après décorticage une économie de volume de 56 p. c. Cette économie a une grosse importance pour les transports. Cette opération, en somme facile, de décorticage, en diminuant le fret permettrait de rémunérer un peu plus largement le cultivateur indigène

112

«t l'on sait que le rendement des récoltes en Afrique Occidentale est fonction, non du climat, mais des prix payés à la récolte précédente (Van Vollenhoven); elle permettrait aussi d'accroître dans une large mesure les les distances de la côte à partir desquelles l'exportation devient possible.

On a fait quelques objections au décorticage des arachides, qui est pra- tiqué depuis longtemps dans la Nigeria et dans l'Inde; les amandes que la coque ne protège plus, sont exposées davantage aux ravages des insectes, et l'huile rancit plus facilement. À ces deux maux le remède est le même : il suffit d'amener rapidement les amandes à une huilerie.

Le palmier à huile donne, comme on le sait, deux produits l'huile de palme provenant de l'enveloppe pulpeuse du fruit et l'huile de palmiste, extraite de l'amande. Avant 1914, l'exportation annuelle des amandes de palme était d'environ 300,000, dont les cinq sixièmes environ étaient destinés à l'Allemagne; le reste allait presque entièrement en Angleterre; la part de la France était faible (7,000 tonnes en 1913). Pour l'huile de palme (200,000 tonnes en 1913) les trois quarts en Angleterre; le reste était à peu près partagé entre la France et l'Alle- magne. Depuis 1915 l'Angleterre a remplacé l'Allemagne; les importa- tions en France, sont restées à peu près stationnaires. La mainmise de l'Angleterre sur ce commerce s'explique en partie par le fait que la Nigerié est un des gros fournisseurs des produits de l'Elaeis : depuis 1909, elle a toujours exporté annuellement plus de 150,000 tonnes d'amandes (187,000 tonnes en 1912) et plus de 70,000 tonnes d'huile, (84,000 en 1913). 11 y a donc un effort commercial à faire de notre côté.

A un autre point de vue, plus grave peut-être, la production Occi- dentale est menacée par celle des plantations d'Élaeis de Malaisie . Ces plantations sont récentes et ne portent encore que sur quelques milliers d'hectares ; on a pu cependant, constater déjà que des palmiers donnent en Malaisie plus de fruits qu'en Afrique ; la richesse en huile y est plus grande qu'au Dahomey, et les arbres, très précoces commencent à fruc- tifier dès l'âge de trois ans.

En Afrique on a surtout cherchée replanter les palmiers venus un peu au hasard; en aménageant un peu la forêt, on accroît légèrement le rendement, mais la cueillette des régimes poussant sur des arbres à fût élancé et souvent éloignés les uns des autres coûte cher. Dans une concession au Cameroun, on a compté 15,000 palmiers pour 2.000 hec- tares, soit 8 arbres à l'hectare (p. 392), en plantant les palmiers à 7 mètres les uns des autres, on en a 200 à l'hectare et qui n'ont pas de tendance à pousser en hauteur.

113

Il est donc grand temps de chercher à substituer en Afrique les pro- duits de la culture à ceux de la cueillette.

Les données acquises sur l'Elaeis sont déjà nombreuses. L'espèce la plus fréquente E. guineensis présente plusieurs variétés dont la teneur en huile (huile de palme et huile de palmiste réunies) varie de 20 à 38 p. c. ; elle est répandue depuis la Casamance tout le long du Golfe de Guinée et pénètre largement dans l'Afrique Equatoriale. Une espèce nou- vellement découverte au Cameroun (E. Poissoni) présente une variété caractérisée par le peu d'épaisseur de la coque de l'amande (Immum à Immum, 5), et par sa grande richesse en huile, jusqu'à 53 p. c. au labo- ratoire; il y aurait intérêt à la propager.

On sait de plus que l'Elaeis ne pousse bien que dans les sols profonds riches en humus et qu'il lui faut, pour un rendement acceptable 2 mètres de pluie : dansle Bas-Cameroun, les précipitations varient de 3 mètres à 7 mètres, il est particulièrement vigoureux.

Tous les oléagineux même ceux qui ne sont encore qu'un objet d'études, sont ainsi passés en revue.

Parmi les questions générales étudiées dans ce volume, notons d'abord les transports, habituellement si défectueux aux colonies, toutes les huiles rancissant plus ou moins rapidement, il y a grand intérêt à trans- porter le plus vite possible les graines oléagineuses à l'usine : l'huile de palme obtenue par les procédés indigènes contient de 20 à 80 p. c. d'acides gras libres, qui la rendent impropre à la préparation des graisses alimentaires. En traitant les fruits sitôt la récolte, une usine de Came- roun était parvenue à obtenir des huiles ne contenant pas plus de 1,5 p. e, d'acides gras libres de bien plus haute valeur par conséquent.

Malgré cet avantage, l'établissement d'huileries aux colonies est une question encore discutée. Les matières ne sont pas toujours abondantes, d'où les chômages ; même à la bonne saison, les indigènes apportent sans régularité à l'usine ce qu'ils ont récolté. Enfin, les tourteaux, si recherches en Europe pour l'élevage ne trouvent pas encore de débou- chés sur place ; il faut les exporter en même temps que l'huile et l'éco- nomie de fret disparaît,

Il semble cependant que quelques huileries ont déjà donné de bons résultats financiers ; elles permettent aussi de décharger les indigènes de la préparation de l'huile et d'employer mieux leur activité.

En somme, cette question des huileries aux colonies ne paraît pas au point, il convient d'attendre avant de conseiller leur création p. 57-59.

R. Chudeau.

114

M. H. Jumelle, Directeur de l'Institut Colonial de Marseille, étudie dans la superbe revue française Chimie et Induslrie{vo\. II, 10 oct. 1919, p. 1168 etsuiv.) les principales recherches faites de 1914 à 1919 sur les provenances, les modes d'obtention et la composition chimique des fruits et des graines a huiles.

Il attire l'attention sur ceiles de ces études qui en plus de leur intéiêt scientifique, semblent offrir également quelque intéiêt pratique.

Il signale notamment les recherches opérées par M. .1. Piéraerts, chef du laboratoire au Musée Colonial de Tervueren, sur diverses graines congolaises comme le Riçinodendron (sanga-sanga). D'après M. Piéraerts, l'huile de sanga-sanga ne serait pas un réel succédané de 1 huile de lin, mais tout comme l'huile d'abrasin, elle pourrait servir d'enduit imper- méable ou d'huile d'éclairage. Elle conviendrait peut-être pour la préparation du noir de fumée pour encre de Chine. Elle résiste bien au rancissement. Inutilisable en stéarinerie, elle pourrait être employée pour la savonnerie, en mélange avec des matières grasses non siccatives. Elle ne contient pas de riciooéline. Le tourteau des graines est très riche en azote eten acide phosphorique. Ce serait un bon engrais, et, s'ii n'est pas toxique, un bon aliment.

M. Piéraerts analyse encore une autre graine oléagineuse africaine, le sélé ou Gitrullus vulgaris.

a Cette huile jaune d'or, qui constitue une excellente huile de table,, est de saveur douce et agréable. Inutilisable en stéarinerie elle convien- drait en savonnerie. Et les caractères de cette huile de sélé sont, en somme, ceux de l'huile de cocorico que M. Piéraerts signale dans la province Orientale du Congo belge; ce serait encore une variété de Cilrullus vulgaris. L'huile de cocorico est, comme la précédente, jaune d'or, de saveur douce et agréable, avec une odeur rappelant celie des feuilles fraîches de graminées après froissement. Elle a pour indice d'iode 111,7 et pour indice de saporincation 194,2. Elle est alimentaire; son tourteau riche en azote, serait un excellent engrais et bon pour le bétail sauf le cas peu probable, ou il contiendrait quelque substance toxique. Les graines de cocorico renferment 57,50 p. c, de substance grasse, qui rapportée à l'amande sèche, représente 50,46 p. c.

Politique économique et méthodes commerciales.

M. H. Cosnier, sénateur, publie dans Colonies et Marine du 15 fé- vrier 1920 (p. K5 et suiv.) un article intéressant intitulé : Notre Em- pire Ouest- Africain. Ce qu'il peut fournir à la France.

115

Nous en extrayons le passage suivant qui étudie la politique écono. mique et les méthodes commerciales :

L'histoire du commerce en Afrique est antérieure à celle même de l'occupation. Elle est intimement mêlée à la conquête et à la première mise en valeur de ces territoires.

Le commerce a débuté par le troc et s'est poursuivi ensuite, grâce à la concurrence, par l'achat contre espèces. Ardent aux affaires, uni malgré ses rivalités, il est arrivé, grâce à un travail acharné, à son état actuel de prospérité.

Toutefois son activité, sa conception particulière des choses, ses mé- thodes de travail qui lui ont, avec le temps, assuré des gains très élevés, n'ont pas été sans inconvénients pour le producteur, illettré, sans cohé- sion, le plus souvent imprévoyant et tenu à faire de l'argent pour le paiement des impôts, ni sans compromettre certains éléments de la fortune publique.

De ce qu'il se considère comme le pivot de la situation économique, il est enclin à ne tenir compte exclusivement que de ses intérêts immé- diats.

Il en résulte que le cultivateur ne tire pas toujours de ses produits un revenu suffisant et que les pouvoirs locaux, devant ses exigences, ont une situation parfois très difficile.

On a dit avec raison que l'Afrique a vécu son « âge du commerce » et qu'elle doit vivre désormais «< l'âge de l'agriculture >».

Gela signifie l'abandon progressif de la cueillette et l'organisation de la production agricole par la fixation, dans le sol, d'une partie au moins du moins du numéraire qui, jusqu'ici est en totalité retourné entre les mains du commerçant par les achats à la boutique.

C'est l'éducation de l'indigène, la création de l'outillage agricole, l'orga- nisation du crédit, la transformation industrielle des produits du sol.

Le commerce peut et doit participer à cette évolution; il possède des capitaux, il connaît le pays, il en sera le premier bénéficiaire. S'il ne s'y prête pas, d'autres le feront à sa place et contre lui.

Comment son attention ne se porte-t-eile pas sur l'agriculture dont elle traite les produits. Conçoit-on que pendant plus de trente ans il se soit désintéressé de la culture de l'arachide, laissant vendre au cultiva- teur des semences de dernier choix, pour finalement protester contre un mal dont il est en partie auteur; qu'il se désintéresse de la création d'usines d'huile de palme et de plantations rationnelles de palmier à huile ; qu'il n'arrive pas à s'entendre pour l'établissement des mesures efficaces pour combattre les fraudes ?

Pourquoi n'existe-t-il pas dans chaque colonie une Chambre de Coin-

116

merce et d'Agriculture, agissante, qui serait un lien permanent entre le Gouvernement et le commerce et les techniciens, assurés d'une situation stable, pourraient venir exposer en toute liberté d'esprit les conditions de la production et les besoins du producteur ?

Actions et méthodes administratives.

L'autorité française une fois établie, par voie de conquête ou de traite, nous avons organisé l'administration des pays occupés. Cette organisa- tion il a fallu l'ébaucher avec un personnel de fortune, vivant dans une demi -sécurité, tenu de satisfaire à tous les emplois et d'y pourvoir avec de faibles ressources. Officiers et administrateurs ont fait merveille en la circonstance et on peut dire, sans exagération, que le joyau que con- stitue notre empire africain s'est formé des qualités d'énergie et d'initia- tive de notre race.

Avec des budgets naissants et une situation politique incertaine, le Gouvernement des Colonies ne pouvait être assuré que par une concen- tration des fonctions de l'autorité.

Le Gouverneur est devenu dépositaire des pouvoirs du Président de la République, administrateur d'un cercle, percepteur de l'impôt, chef de la police et juge, directeur de tous les services publics.

Cette confusion complète des pouvoirs qui est une pure image de l'autocratie était, je le répète, imposée par les circonstances et il n'est pas dans mon intention d'en faire le procès.

Mais ce qui est certain, c'est que pour beaucoup de territoires, cette période, préface d'une administration normale, a duré beaucoup plus que de raison et que l'évolution nécessaire qui devrait être aujourd'hui accomplie dans la plupart de nos colonies, à été paralysée par l'empreinte vivace laissée par la conception originelle sur les hommes et sur les institutions.

Des détenteurs de l'autorité de cette conception ont fait quelquefois des autocrates, et les services du Gouvernement sont un organisme purement administratif, à esprit bureaucratique. Elle nous a mis sur les yeux un bandeau qui nous empêche de voir les intérêts véritables des indigènes en nous poitant à les juger d'après nos propres penchants. Elle nous a fait méconnaître complètement le rôle de l'éducation du noir dans la transfor- mations de l'agriculture et nous a poussés à l'obtenir par le seul exercice de l'autorité, par l'obligation, appuyées souvent des sanctions prévues par le code pénal. Elle a créé dans les cercles d'une même colonie et dans les colonies du groupe, un particularisme étroit qui a créé des oppositions déterminées au groupement des intérêts communs, financiers, politiques

117

et économiques. Enfin, elle a créé une politique peu libérale à l'égard de l'indigène qui est l'élément essentiel de la richesse, qui n'est représenté nulle part et qui, malgré la bienveillance et l'intérêt réels que nous lui témoignons, n'a nulle part l'impression qu'il est compris et défendu.

L 'organisation technique.

Dans nos pays d'Europe le cultivateur, qu'il soit propriétaire ou fermier, est le principal élément du progrès agricole. Le milieu rural compte éga- lement des ingénieurs et des savants. En Afrique, rien de cela n'existe.

J'ai montré l'état primitif de la culture, de l'industrie agricole, de l'exploitation forestière. Rien ne change; l'indigène reste attaché aux méthodes ancestrales et rien ne changera que par notre action persévé- rante.

Il semble donc que cet état de choses, connu de tous, devrait amener nos gouvernements coloniaux à s'outiller techniquement d'une manière autrement puissante et complète que nous le sommes en France.

Or, si je dois à la vérité de dire que certains Gouverneurs et Gouverneurs généraux ont compris cette nécessité et essayé de créer des organes techniques, il faut bien reconnaître que ces efforts n'ont pas eu de suite durable; que le milieu administratif, opposé à toute organisation de ce genre, en a toujours eu raison et qu'il en sera ainsi tant que l'autorité métropolitaine ne l'aura pas fondée de ses propres mains.

A l'heure actuelle les services de la production agricole sont inexis- tants; leurs chefs n'ont aucune autorité, leurs programmes de travaux changent avec chaque gouverneur ou intérimaire; ils n'ont pas de locaux, pas de collections, quelquefois pas d'archives.

On mesurera tout l'intérêt que l'on porte en Afrique aux questions agricoles quand on saura que le budget général leur consacre 1,1 pour 1,000 de ses ressources et les budgets locaux de 1,3 à 2,2 pour 100 des leurs. Leur personnel reçoit des soldes inférieures à celles des autres ser- vices, techniques ou administratifs.

C'est avec ces ressources ridicules, qui ne dépassent jamais 200,000 francs, que les services techniques doivent satisfaire à tout pour des terri- toires parfois grands comme la France : solde du personnel agricole, stations expérimentales, améliorations agricoles, éducation et enseigne- ment technique, etc.

C'est la misère partout et on conçoit quand on connaît les difficultés que par surcroît on accumule sur leur route, que les services techniques n'aient rien pu faire de sérieux et de durable et que nos colonies ouest- africaines soient restées si loin derrière la plupart des régions tropicales dans l'exploitation du sol.

118

VOIES DE COMMUNICATION

La question des transports.

Sous ce titre sont réunies différentes études sur l'important problème des transports africains. Ces articles sont signés par le lieutenant-colonel Salesse. (Les chemins de fer africains dans leur état actuel.) J. Boisse de Black (Programme de quinze ans des voies ferrées à construire en Afrique française) ; le même (Le programme futur des chemins de fer au Congo Belge). Ed. Leplae (L'organisation des transports agricoles au Congo Belge) ; le même (Note sur V utilisation au Congo Belge des types de vapeurs fluviaux et de barges employés aux États-Unis). A. Smal (Étude sur l'exploitation des deux biefs fluviaux de la Com- pagnie des Grands Lacs). M. Goldschmidt (La navigation sur les fleuves innavigables) ; Je même (Les relations télégraphiques entre la Belgique et le Congo).

Les notes sont précédées d'un rapport au Roi signé par M. le comte R. de Briey.

L'ensemble du volume constitue un plaidoyer chaleureux en faveur d'une grande politique de voies de communication en Afrique, afin d'as- surer aux nations européennes les matières premières dont elles ont besoin après le formidable conflit.

Au lendemain de la guerre, écrit M. de Briey, l'importance des voies de communication en Afrique s'accroîtra dans la même mesure que celle des colonies. Les nations, entièrement dépourvues de matières premières et devant reconstituer tout leur armement économique, dépendront lit- téralement de celles qui possèdent d'abondants greniers, et la Belgique, si elle sait se servir de l'inappréciable instrument formé par sa colonie, •est appelée à jouer, même au point de vue diplomatique, un rôle hors de proportion avec l'exiguïté de ses frontières.

Des économistes ont calculé que l'Allemagne devra, dès le lendemain des hostilités, acheter pour au moins 20 milliards de matières pre- mières, parmi lesquelles, en première ligne, le cuivre, les oléagineux, le caoutchouc, le coton et le cuir.

Toutes ces matières, sauf le cuir, peuvent être obtenues en exception- nelle abondance au Congo, et les trois millions de têtes de gros bétail que la Belgique détient, dans l'Est-Africain allemand, et dont elle pour- rait, dès maintenant, faire passer une notable partie à l'Ouest du lac Kivu, constitue une inépuisable réserve de cuir.

Mais c'est, avant tout, l'industrie belge qu'il faudra ravitailler en ma-

119

tières premières. Seule, une voie nationale permettra d'atteindre ce résultat ; seule, elle laissera dans le pays des bénéfiices réalisés.

D'après un rapport présenté au Parlement français en 1917, le fret des marchandises exportées représente pour un pays un profit de 4 00 p. c. si elles sont chargées sur des navires nationaux, et seulement 5 à 6 p. c. si elles empruntent une voie étrangère.

Enfin, en dehors des points de vue social et économique, est-il néces- saire d'insister sur le rôle capital des chemins de fer au point de vue politique? Admettre bénévolement que la majorité des importations ou des exportations d'une colonie se fasse par des voies étrangères, c'est accepter la main-mise commerciale d'abord, politique ensuite, de ses voisins. On peut hardiment renverser les termes de l'axiome anglo- saxon : Le commerce suit le pavillon, mais le pavillon suit aussi le com- merce. Ouvrir ses frontières aux voies de pénétration d'un État étranger, c'est lui confier la clef de sa maison avec la certitude qu'un jour ou l'autre, il passera la porte.

Un des articles les plus intéressants est celui de M. Salesse : l'état actuel des chemins de fer africains (étude accompagnée d'une excellente carte).

11 se propose de dresser le bilan des progrès de la voie ferrée en Afrique. JNous avons dépassé maintenant la phase côtière ; nous at- teignons le cœur de l'Afrique, et même nous établissons des lignes dia- métrales, axes principaux ou transversales. Voici notamment ce que dit M. Salesse de la voieDar-es-Salam-Kigoma et du chemin de fer de Lobito- Bay : «La jonction de cesdeux voies se fait parla ligne belge de la Lukuga, » par le cours du Lualaba, entre Kabalo et Bukama, et par le réseau du » Katanga, de Bukama à Kambove. Ces lignes belges ont été terminées » pendant la guerre ; on peut donc maintenant se rendre par rail ou » par vapeur du Cap et de Dar-es-Salam, à Banana, et c'est la pre- )> mière grande transversale réalisée en Afrique ; on en aura bientôt » une seconde de Beira à Lobito-Bay, Stanleyville est devenue la » deuxième plaque tournante de l'Afrique, la première étant au Tchad. » (p. 29).

En ce qui concerne le transafricain (projet Berthelot) M. Salesse concède que ce chemin de fer ne pourra sérieusement concurrencer la voie du Cap pour desservir Johannesburg et l'Afrique australe, mais il pense qu'il conserverait des avantages de rapidité vis-à-vis de l'Afrique occidentale, du Tchad et du Congo belge, Katanga compris (p. 109). Des objections du même genre sont faites au projet Berthelot par le lieutenant-colonel €odefroy dans les Annales de Géographie. (XXV III, 15 mai 1919, p. 234).

120

(également, Revue générale des chemins de fer et-tiamivays, octobre- 1919, article de M. Sonleyre, Le Transsaharien, p. 216 et suiv.)

On irait, dit M. Salesse, de Londres à Kambove (centre du Katanga) en 13 jours par le transafricain au lieu de 17jours par l'Océan et la ligne de Lobito-Bay qui sera la plus courte des voies mixtes.

Voici les renseignements de M. Salesse, au sujet du Cap au Caire. « Ses rails vont aujourd'hui du Cap à Bukama (Katanga) sur 4,228 kilo- > mètres sans interruption-, de même on va d'Alexandrie à Gondokoro » par rail et vapeur sur 4,182 kilomètres; entre Gondokoro et Bukama » se trouvent encore deux lacunes, la première de Gondokoro à Nimulé, » 160 kilomètres; la deuxième de Boga à Stanleyville, 900 kilomètres; » total 1,060 kilomètres à construire; ajoutons à ces longueurs 125 » kilomètres et 356 kilomèrres de voies ferrées existantes entre Stanley- » ville et Ponthierville et entre Kindu etKongolo respectivement, ensuite, » 180 kilomètres de Nil navigable entre Nimulé et Boga, enfin 516 » kilomètres et 640 kilomètres de Congo navigable respectivement entre » Ponthierville et Kindu d'une part, Kongolo et Rukama d'autre part ; tel » est l'état d'avancement actuel du grand rêve de Cecil Rhodes. Une fois » terminé, il comprendra une longueur totale de 11,590 kilomètres du » Cap à Alexandrie, dont 8,846 kilomètres par rail et 5,204 kilomètres » par bateau à vapeur; 8,282 kilomètres seront en territoire anglais et » 3,108 dans le Congo belge; la durée du voyage peut être évaluée dès » à présent à trente-trois jours, une fois les lacunes terminées; on aura » onze transbordements, y compris celui de Louqsor.

« Ces chiffres sont arides en apparence, mais ils prennent le plus vif » intérêt quand on considère qu'il s'agit de la conquête et de l'absorp- tion d'un grand continent, hier encore ignoré, que l'Europe se dispute. » L'Afrique peut être, en effet, un complément d'un intérêt capital pour >• l'Europe, en lui fournissant un champ d'action immense et tous les » produits utiles des climats chauds. Réunies, l'Europe et l'Afrique » forment euviron le tiers du globe, et ce groupe est intermédiaire entre » deux autres tiers qui sont l'Asie et le Nouveau-Monde. Si la racealle- » mande avait pu dominer cette vaste zone centrale, elle aurait été admi- » rab'.ement placée pour jouer un rôle mondial, dont l'Empire romain à » son apogée ne peut donner qu'une faible idée; nous ne prétendons pas » à ce rôle; mais il nous appartient de défendre nos droits acquis et de » maintenir autour de nous l'équilibre. »

M. Boisse de Black insiste davantage sur la nécessité de la jonction des réseaux africains.

Il y a actuellement deux centres d'activité commerciale et industrielle en Afrique : l'Afrique du Nord et l'Afrique australe. Déjà le commerce

121

d'une grande partie du Congo belge a son centre bancaire naturel à Johannesburg en raison de Fattractionrésultant de l'établissement du réseau anglais. (Thèse de M. Forthomme!) Un réseau général mettra tous les centres producteurs en contact et déterminera des échanges d'une activité qui dépassera probablement toutes les prévisions (p. 157).

M. Boisse de Black esquisse ensuite les conclusions du Comité national du Rail africain au sujet du Congo belge quîl appelle « la plus splendide » des colonies tropicales, une des bases les plus solides de la richesse de » notre globe. » (p. 353.)

Si l'Afrique française dans les quinze premières années doit construire 30,000 kilomètres de railways dont 40,000 pour le Congo français, l'Afrique belge, plus riche que le Congo français, en doit construire 1 5, 000 pour que la proportion soit gardée.

L'auteur pense que le financement de l'opération est facile et qu'il sera aisé à'un pays de ressources latentes considérables comme le Congo belge, d'emprunter en 15 ans 2 milliards de francs (p. 354). En ce qui concerne les principaux courants commerciaux à prévoir, Léopoldville sera sans doute encore longtemps l'emporium de la plus grande partie du bassin congolais (p. 357). Mais tout concourt à prouver que Stanleyville, carrefour de régions variées et riches au point de vue minier, agricole, forestier, sera le grand emporium centre-africain.

C'est d'ailleurs à Stanley ville que doit aboutir l'artère centrale française venant du Tchad et de l'Afrique occidentale et de l'Afrique du Nord.

Construction du chemin de fer Beira-Zambèze.

La Rivista Coloniale, organe de l'Institut colonial italien, dans son numéro de décembre 1919, publie, à la rubrique des notices et com- mentaires, un rapide exposé sur la construction d'un chemin de fer de Beira-Zambèze, avec l'apppobation du Gouvernement portugais. Cette ligne relierait le port de Beira à Blantyre, chef-lieu du Nyassaland britan- nique et franchirait le Zambèze à-la hauteur de Chindio.

Pour compléter ce réseau oriental de la ligne du Cap au Caire, continue l'article, il serait nécessaire de prolonger la ligue actuelle du Shire jus- qu'à la pointe méridionale du lac Nyassa ; de construire une ligne de rac- cordement entre le lac Nyassa et le Tanganyka et enfin de construire, sur le territoire de l'ancienne Afrique orientale allemande, un embranche- ment de la grande ligne centrale existante de Tabora à Nyanza (sur le lac Victoria Nyanza).

La construction de toutes ces lignes sera entamée pendant la prochaine

- 122

décade et ainsi serait formée une voie mixte fluviale- et ferrée allant du Cap aux ports d'Afrique orientale, Dar-es-Salam et Mombasa.

Plus loin, pour éviter les rapides du Haut-Nil, une dernière section de chemin de fer terminerait la ligne totale du Gap au Caire. Le nombre de transbordements des trains aux bateaux et vîce-versa, entre ces terminus serait de dix.

La ligne Beira-Zamb.èze aura une longueur d'environ 170 milles et elle sera exploitée par la Société du Trans-Zambezian. Le pont sur le Zam- bèze à Chindio, à cause du coût élevé actuel des aciers et autres matières premières, ne sera construit que dans un an ou deux, dans l'es- poir que le prix des matériaux aura baissé et permettra la réalisation de l'entreprise.

Entretemps un transbordeur aérien pour marchandises sera établi pour raccorder le Central African à la ligne Beira-Zambèze.

Il est possible que le port de Beira devienne par la suite une station charbonnière importante, étant donné que le nouveau chemin de fer faci- litera l'exploitation d'un important gisement de houille qui existe comme on sait sur le Zambèze, au point même la ligue ferrée atteindra le fleuve.

De l'emploi des avions pour les recherches d'ordre scientifique.

Dans le Bulletin du Comité d'Études Historiques et Scientifiques de V Afrique Occidentale française, M. Henry Hubert, examine les services que peut rendre l'emploi des avions pour les recherches d'ordre scien- tifique. Au point de vue météorologique, l'aviation sera la première à tirer parti des découvertes faites, puisqu'une connaissance plus com- plète des courants aériens assurera de meilleures conditions de vo!. Ces courants étant fréquemment superposés en Afrique Occidentale, l'appoint qu'un avion peut trouver pour sa route en se déplaçant verticalement est loin d'être négligeable. En ce qui concerne la superposition des courants, les observations récentes faites à Dakar donnent des ren- seignements qu'il aurait été difficile d'obtenir avec d'autres procédés.

Toujours en ce qui concerne l'étude des courants aériens, l'avion pour- rait fournir d'utiles indications soit au déplacements verticaux de ia zone de contact des courants superposés, soit quant aux phénomènes méca- niques dont ces courants sont le siège.

Les avions peuvent encore donner d'intéressants renseignements au sujet de la brume. Au cours des différentes sorties, on a constaté que celle-ci était assez dense au voisinage du sol et qu'à partir de la tranche

123

îa plus chaude de l'harmattan, elle disparaissait et était remplacée par une zone remarquablement limpide. Enfin, au-dessus de mille mètres, on atteint une nouvelle couche de brume, sans cependant qu'on ait l'impression de changer de courant aérien.

Avec les avions on peut encore se proposer d'obtenir des renseigne- ments précis sur l'altitude des zones de nuages. S'il est possible, sinon facile d'obtenir des indications à ce sujet par des mesures faites à terre, on ne peut plus compter sur celles-ci quand il s'agit de nuages super- posés ce qui est souvent le cas.

L'avion serait encore le procédé de choix pour recueillir les pous- sières atmosphériques, poussières au sujet desquelles on est encore mal renseigné en Afrique occidentale.

On peut encore prévoir l'utilisation des avions pour l'étude de la tra- jectoire des orages puisque ces appareils ont une vitesse de déplacement nettement supérieure à celle des météores. Il importera d'ailleurs de rechercher par la suite comment les avions peuvent se garer des .grains orageux au cas leur route les entraînerait à la rencontre de ceux-ci.

Les déplacements des avions pourront fournir dans certains cas des renseignements sur les variations de pression entre deux localités.

Au point de vue topographique, l'emploi des avions est particulière- ment indiqué pour la correction de la planimetrie.

Au lieu de se contenter de vérifier des plans ou des cartes, on peut se proposer d'en lever au moyen d'avions. Ce travail demande évidem- ment plus de soins. Il a l'avantage de donner des résultats avec une rapidité exceptionnelle puisqu'on fait des cheminements avec une vitesse de 100 kilomètres à l'heure. C'est de plus le seul procédé pratique qui convienne en Afrique occidentale pour lever les régions difficilement accessibles. Or, ces dernières sont extrêmement nombreuses : ce sont non seulement les marais, les lacs, les côtes, mais encore les grandes lignes du relief et surtout les fleuves et les rivières, le plus souvent impraticables aux embarcations, car il se développe sur les berges une végétation souvent impénétrable.

Les observations faites en avion présentent un intérêt tout spécial quand on étudie dans une région des variations superficielles à différentes époques de l'année (modification du débit des cours d'eau, variation des zones d'inondation, déboisement, déplacement des dunes, etc., etc.). Dans une région périodiquement inondée, par exemple, une série de photographies prises à des moments différents remplace avantageuse- ment les levers de détail les plus minutieux. Des résultats intéressants ont déjà été obtenus dans cet ordre d'idées aux environs de Dakar.

124

Les observations faites par le lieutenant Leo Walmsley (The aéroplane in African Exploration Geographical Journal, L. IV, 5 nov. 1919, p. 296-297), confirment les résultats obtenus par l'aviateur français surtout au point de vue cartographique.

Pour une flotte coloniale.

M. Robert Piementa, rend compte dans Colonies et Marine (15 jan- vier 1920) du livre intéressant de M. E. du Vivier de Streel. « Il nous faut une flotte coloniale « (Paris, Payot, 1919).

Le développement économique d'un peuple dépend, dit l'auteur, de l'abondance et du bas prix des moyens de transport sur mer aussi bien que sur terre. Une grande nation industrielle doit faire elle-même ses transports et ses bateaux doivent être chargés tout d'abord des mar- chandises produites sur son territoire, c'est-à-dire dans ses colonies. L'industrie des transports étant une industrie d'intérêt général, qui rem- plit un service public, doit être organisée en vue de satisfaire en premier lieu l'intérêt national. L'État peut et doit demander aux armateurs de se sacrifiera la chose publique pour rendre plus facile l'approvisionnement des usines métropolitaines en produits coloniaux, mais M. du Vivier de Streel réclame pour eux, en compensation, certaines garanties et certains avantages, principalement d'ordre financier.

Il préconise la création d'une flotte de trois millions de tonnes qui serait gérée par nos armateurs, en régie intéressée pour le compte de nos diverses colonies.

Cette solution peut se discuter, mais l'objet même de M. du Vivier de Streel, la création d'une flotte nationale, nous paraît répondre aux nécessités les plus pressantes de notre existence économique : les rensei- gnements que ce volume apporte sur la flotte coloniale française avant la guerre, sur le mouvement de la navigation dans nos colonies, sur la flotte coloniale française pendant la guerre, sont autant de faits dont la connaissance importe au problème, si capital, des transports de la France avec ses colonies.

Compagnie du chemin de fer du Bas-Congo au Katanga.

L'exploitation du « Chemin de fer du Katanga » progresse normale- ment. La longueur totale de la ligne exploitée depuis la frontière de Rhodésie jusqu'à Bukama est de 727 kilomètres ; il y a en outre 20 kilo- mètres d'embranchements, desservant diverses exploitations minières et industrielles.

125

Les recettes de l'exploitation n'ont cessé d'augmenter au fur et à •mesure du déveloqpement industriel du Katanga, mais, d'autre part, les dépenses d'exploitation se sont également accrues considérablement par suite de l'augmentation des prix de toutes les matières premières et de l'élévation des appointements et salaires du personnel.

Le tonnage total transporté a passé de 254,000 tonnes à 685,000 tonnes.

Pour terminer et parachever la ligne, il reste à remplacer plusieurs ponts provisoires en bois par des ouvrages définitifs; il faut aussi pro- céder au ballastage définitif de la voie; ces travaux sont en voie d'exécu- tion.

Le point terminus du chemin de fer, Bukama, situé sur le fleuve Lualaba, n'étant pas accessible en toutes saisons par les bateaux à sapeur, il a été décidé, d'accord avec M. le Ministre des Colonies, de prolonger la ligne d'environ 80 kilomètres au Nord de Bukama jusqu'à Kiabo, accessible aux bateaux en tout temps.

La construction d'une première section de la « ligne de jonction Katanga-Benguela » destinée à relier cette partie de notre colonie au port de Lobito-Bay sur l'Atlantique, a été approuvée également par M. le Ministre des Colonies. Cette section de 86 kilomètres environ de longueur, atteindra les mines de Ruwe, l'Union Minière du Haut-Katanga pro- jette l'établissement d'une grande usine pour le traitement électro-chi- mique des minerais de cuivre.

La ligne reliant le chemin de fer du Katanga au point d'arrivée à la frontière du chemin de fer de Benguela aura 600 kilomètres de longueur environ. Elle est d'une grande importance pour le développement du Katanga, car elle réduira considérablement la longueur des transports par chemin de fer et par mer.

La partie du chemin de fer du Benguela, traversant l'Angola portugais, aura une longueur totale de 1,500 kilomètres environ. Par suite des difficultés nées delà guerre, la construction de ce réseau a été suspendue et 520 kilomètres seulement sont construits et exploités. Les recettes d'exploitation de cette section sont en progression constante et permettent de bien augurer de l'avenir.

Il reste donc 800 kilomètres à construire; les travaux seront entamés prochainement.

Les études de la ligne du « Bas-Congo au Katanga » ont être sus- pendues pendant la guerre. Les plans définitifs de la première section d'environ 800 kilomètres, de Bukama à Djoko-Punda, reliant le Lualaba navigable au Kasai navigable, sont entièrement terminés et permettent d'entreprendre la construction de cette section dès que l'approbation du

126

gouvernement de la colonie aura été donnée et aussitôt que les moyens financiers auront été assurés.

Les études de la seconde section de cette ligne Djoko-Punda à Kinshasa, d'une longueur de 1,000 kilomètres environ, sont avancées, mais par suite de la guerre, il n'a pas été possible de les terminer entièrement.

La construction de la ligne du Bas-Congo au Katanga, notamment de la première section Bukama-Djoko-Punda, est indispensable au développe- ment du Kasai sur laquelle l'attentinn se porte tout spécialement actuel- lement pour ses richesses en gisements diamentifères, pour soa sol fertile, propre à la culture du coton, et à l'élevage du bétail, et pour sou abondante population qui donne déjà d'importants contingents de travail- leurs aux diverses industries du Katanga et aux exploitations diamanti- fères.

Grâce au chemin de fer, l'exploitation du sol sera possible et elle permettra d'assurer l'alimentation de toute la région industrielle du Katanga.

, La photographie aérienne et la cartographie»

Le Mouvement géographique 9 du 29 février, dans sa Chronique géographique, reprend au Journal of the Engineer's Ctub of Saint Louis une étude sur l'emploi de la photographie aérienne en cartographie. Elle met au point les services que peut rendre la photographie aérienne au topographe et conclut que le nouveau procédé de reconnaissance d'une région par l'emploi de la photographie aérienne n'est pas destiné à révo- lutionner les méthodes actuellement pratiquées lorsqu'il s'agit de levers très précis. L'étude envisage cependant, à plus d'un point de vue, l'évo- lution future de la science topographique grâce au nouveau procédé.

Le Rail du Cap au Caire

Dans le même numéro, Le Mouvement géographique signale que M. H. Wilson Fox M. P. a fait récemment une intéressante proposition à la Chambre anglaise au sujet de l'utilisation, sur les laesde l'Afrique cen- trale, des ferries semblables à ceux qui sont employés surles grands lacs américains. Cette proposition est faite en vue d'utiliser les grands lacs du centre africain pour le rail du Cap au Caire. Elle permettrait de sup- primer un tronçon important de 1,720 kilomètres de voies ferrées et ferait réaliser une forte économie. Une voie ferrée de cette importance coûterait à l'heure actuelle 5,000,000 de livres sterling alors qu'il serait possible d établir un système de ferries au prix de 1 ,500,000 livres sterling» (Cf. à ce sujet GeographicalJour nul. Lv. 2 février 1920. p. 73-1083.)

127 -

ETHNOGRAPHIE.

Le prof. E. H. L. Schwarz soutient dans un article du Geographicat Journal (vol. LIV, I, juillet 1919) que les Hereros et les Ovambos de l'ancienne colonie allemande du S. 0. Africain sont les descendants des Vandales qui envahirent le Nord de l'Afrique en 428 sous Genséric (The origin of the Hereros and Ovambo, rev. ci., p. 48). Il se base pour cela sur certains caractères somatiques des Hereros et certains détails de la chevelure des femmes.

M. Harry Johnston réfute aisément cette opinion risquée, en montrant que les profils « Hamitiques » ne se bornent pas aux seuls Hereros et Ovambos, mais que ces ressemblances apparaissent également chez d'autres peuplades Bantu. M. Johnston ne nie pas cependant que les langues bantous pourraient s'être formées par un mélange de langages du centre soudanais avec des langues caucasiennes, mais non-aryennes (c.-à-d. langues des Pélasges, des Mycéniens ou Minoens de la Méditer- ranée). M. Johnston reprend ici la thèse chère à M. Frobenius (Und Afrika Sprach). Mais n'est-elle pas aussi fragile que celle de M. Schwarz ?

Des populations du district Kasempa.

The Geographical Journal (vol. LIV, 5, novembre 1919, pp. 277- 287) publie sous la signature de M. F. H. Weiland, un article documenté sur le district Kasempa (Rhodésie du Nord), situé entre l'Angola portu- gais à l'Ouest et le Katanga belge au Nord.

Il est intéressant de noter ce que dit l'auteur des populations du district.

Les habitants de la région, dit-il, sont presque tous des immigrants de date assez récente, à l'exception des survivants d'une tribu naine demeurant sur les bords de la Lufupa et appelée les Bas-Usanga. Us sont une branche des Wa-Twa sous le chef Jimbo, mais ont été refoulés du Nord par les Bakaonde et du Sud par les Mankoga. Les Alunda et les' Indembo sont prédominants à l'Ouest et dans le Nord-Ouest. Dans le Nord il y a aussi quelques Baluba. Dans le Sud-Ouest habitent les Mamb- wera, et sur les frontières du Nord-Est et de l'Est les Balamba. Le cenlre entier est habité par les Bakaonde, qui sont numériquement la tribu principale du pays : ils ont des affinités avec les Basanga et sont une branche de la grande famille Luba qui, venant du Nord-Ouest, se répan- dit sur cette partie de l'Afrique, il y a quelques siècles. La tribu est divisée en trois sections, dont deux semblent être venues du Sud-Ouest et l'autre du Nord.

128

Après avoir étudié brièvement les migrations, l'auteur conclut en disant que presque tous les habitants du district sont pratiquement des familles Lunda et Luba.

GEOGRAPHIE.

La mission Tilho.

Les annales de Géographie (XXVII, 1918, p. 76-78 et XXVIII, 1919 p. 396-399) résument dans deux courtes notes les résultats de cette mis- sion qui a exploré les environs du Tchad.

1 ° L'étude détaillée des « Pays-Bas du Tchad » a amené le Commandant Tilho à conclure que la cuvette du Tchad constitue un bassin fermé sans communication avec celui du Nil. Il a obtenu ce résultat en étudiant le Borkou et toute la zone frontière qui s'étend vers l'Est, jusqu'à 400 kilo- mètres au moins, dans le désert de Lybie, puis en revenant vers le Sud, par une roule jalonnée de déterminations d'altitudes et de positions astronomiques, jusqu'au massif de l'Ennedi, dont la carte complète fut dressée. Ainsi se trouvait achevée la reconnaissance exacte de la circon- vallation du Tchad, et comblée la lacune que signalait, dans son étude de 49 1 3, le capitaine Arnaud. Dans cet itinéraire qui l'amena des lacs d'Ou- niange (Ounyanga) et l'Erdi, district extrême atteint dans le désert de Lybie, jusqu'aux plateaux de l'Ennedi, le commandant Tilho traversa, il est vrai, une dépression de plus de 60 kilomètres de largeur, orientée SW-NE., et qui aurait pu passer pour un prolongement du sillon du Bahr-el-Ghazal, déversoir supposé du Tchad dans les anciennes cuvettes du Djourab et du Toro. Mais les déterminations d'altitudes ruinèrent cette hypothèse en démontrant que le point le plus bas de cette dépres- sion est encore à 300 mètres au moins au-dessus du niveau du Tchad. En somme, le commandant Tilho estime qu'il a existé autrefois, dans le centre de l'Afrique, « une région de lacs et de marais couvrant une » superficie plus grande que la France et dont le lac Tchad au Sud-Ouest » et les lacs d'Ounianga au Nord-Est constituent les derniers témoins. » Entre ces deux extrêmes, l'Engueï, le Toro, le Kourou, le Djourab, le )) Borkou, l'Ouadi, Doun, Yarsa, etc., formaient des lacis de lacs, lagunes, » marais plus ou moins étendus et à des altitudes différentes, dont les » traces sont encore aujourd'hui nombreuses et probantes. » On pouvait se demander si le Nil, avant de se frayer un chemin, coupé de cataractes, vers la Wéditerrannée, n'avait pas â une certaine époque, contribué à alimenter ce bassin qui pourrait s'identifier avec les marais Chélonides

129

des anciens géographes. Le commandant Tilho répond par la négative en se fondant sur les faits observés par lui et par les officiers anglais qui ont exploré les régions désertiques limitant â l'Ouest le bassin du Nil...

En dehors de la solution de ce problème, le commandant Tilho a dressé un tableau géographique entièrement neuf du Tibesti et de la vaste région désertique qui y confine au Sud et au Sud-Est.

Le caractère géologique le plus saillant est la très grande extension d'un complexe de grès horizontaux. Ces grès siluriens supérieurs, de .grain singulièrement fin, de couleur blanche ou bariolée, forment des rochers qu'ensevelit le sable dans les plaines de Borkou ; ils constituent aussi la base des formations sédimentaires dans l'Erdi, l'Ennedi, et presque toute l'étendue du Tibesti. On les a observés en place dans ce dernier massif, jusqu'à 1,100 mètres d'altitude environ, aussi bien sur le versant Nord que sur les flancs Sud et Ouest. En sorte que la circon- vallation septentrionnale et orientale du Tchad est presque entièrement gréseuse, et que l'extension du Silurien se trouve prolongée de près de 1,500 kilomètres vers le Sud-Est. Il se peut que les grès du Ouadaï et du Massalit appartiennent en partie à la même série.

Sur le soubassement gréseux se sont épanchées d'épaisses forma- tions volcaniques qui constituent toutes les parties hautes du massif. Ces formations commencent par d'épaisses nappes de basalte noir ; dans le massif de l'Emi Koussi, on chemine sur le basalte pendant 30 kilomètres avant d'aborder les pentes du cratère. Ainsi se trouve constitué le soubassement du grand massif triangulaire du Tibesti; cette base forme un plateau ininterrompu, mais c'est très accidenté, haut de 1,800 à 2,000 mètres auquel s'applique le nom du général de Tarson. Le massif couvre 100,000 kilomètres, il est d'un cinquième plus étendu que le massif central français et plus de deux fois plus vaste que ne l'avait figuré Nachtigal.

Le soubassement gréso-basaltique est coiffé de grands volcans trachy- iiques s'élevant à des altitudes considérables, qui dépassent notablement les données de Nachtigal : Emi Kousi, 3415 m.; Tierroko, 3200 m.; Yey, 2950 m.; Toussidé, 3250 m.

Le Tibesti se relie sans discontinuité avec l'Erdi, qui constitue un ensemble de plateaux s'élevant à l'Ouest en gradins de 000 mètres à plus de 1000 mètres; il s'étend vers l'Est sur plusieurs centaines de kilomètres dans le désert de Lybie; c'est une région inhabitée se trouvent seule- ment des points d eau et des pâturages temporaires ; elle sert de point de départ aux razzias des Teddas, qui poussent parfois vers l'Est jusqu'à Dongola, près Merga.

130

Ces terrasses et massifs encadrent la zone compliquée de dépressions autrefois lacustres, auxquelles le colonel Tilho a donné le nom de Pays Bas du Tchad. La zone la plus déprimée se trouve dans le Djourab, ou Kirri, par 160 m. d'altitude; c'est qu'aboutit le sillon du Bahr-el- Ghazal, descendant du Lac Tchad (240 m ). Le Kirri correspond donc à l'ancien Bodelé. On peut signaler en passant la singularité de disposition qu'entraîne l'aridité rapidement croissante vers le Nord-Est. Dans la vaste dépression tchadienne, les eaux lacustres n'occupent plus le fond de la dépression, mais se trouvent reléguées au Sud-Ouest, l'évaporisation moins active permet encore l'existence d'un grand lac permanent. Si les eaux du Tchad restent sensiblement douces, c'est grâce aux infiltrations des eaux salines lourdes le long du Bahr-el-Ghazal.

Au pied sud du Tibesti, la dépression ramifiée et confuse de Borkou n'est autre que la zone d épandage des eaux qui descendent du grand massif du Nord. Elle s'étend de l'Est à l'Ouest, d'Ounianga et de Treko, jusqu'au delà d'Aïn Galakka, à des altitudes variant de 200 m. à 350 m.; l'eau y est partout à faible profondeur sous les sables et réapparaît par- fois en sources; aussi les oasis et les jardons sont-ils assez nombreux et permettent-ils l'existence d'une dizaine de milliers d'habitants. On distin- gue trois groupes principaux d oasis : celui d'Aïn Galakka et Elleboy, celui de Faya ; enfin, celui de Bedo, Tigui et Yarda. La population se compose de tribus Teddas dominant une caste de serfs, les Kamadjas, amenés par razzias des territoires soudaniens de l'Ouadaï et du Kanem. A Ounianga (340 m.) se trouvent deux lacs, d'un milliers d'hectares chacun, l'un salé, l'autre d'eau douce et peuplé de poissons de type par- ticulier. Ces lacs sont, avec le Tchad, les derniers témoins du grand com- plexe lacustre qui couvrait autrefois toute cette vaste zone déprimée, allongée du Sud-Ouest vers le Nord-Est.

A quelle époque remonte ce régime plus humide? Il est impossible de le dire avec précision, bien que certains indices prouvent que le chan- gement de climat a être assez récent. Dans le Borkou, des concrétions limonitiques émergent en forme de crêtes au-dessus des sables et des grès sous-jacents; ce sont d'anciennes latérites, que le colonel Tilho rap- proche des revêtements de latérite pisolithique qui recouvrent parfois le granité du Ouadaï, et qui attestent l'existence, autrefois, dans ces régions, d'un régime pluvieux analogue à celui qui a donné naissance aux latérites du Soudan et de la Guinée. Cette observation du colonel Tilho mérite d'être retenue, car elle est en contradiction avec les remarques faites à l'Ouest du Tchad et sur le coude du Niger, ce n'est pas le désert qui gagne sur le Soudan, mais le Soudan qui empiète sur le désert, comme- le prouvent les dunes fossiles aujourd'hui fixées par la végétation sahé- lienne.

131

SCIENCES NATURELLES

Collections zoologiques de Flturi et du Haut-Uelé.

Dans la Revue Zoologique africaine (VII, 2, d octobre 1919) M. le pro- fesseur Schouteden, reproduit une notice publiée par M. Osborn sur les travaux de la mission Lang et Chapin pendant son séjour au Congo (1909- 1915). Cette mission était patronnée par Y American Museum of Natural History de New York.

Voici le pasage le plus intéressant de cette notice : Les collections réunies par l'expédition qui, sous la direction de M. Herbert Lang, aidé de M. James P. Chapin, explora pour compte de Y American National Museum of History, de 1909 à 1915, les régions de l'Ituri et du Haut-Uelé, sont principalement d'ordre zoologique; elles englobent à peu près toutes les branches de l'histoire naturelle de ces régions. Voici un aperçu du nombre de spécimens qui, à la mi-novembre 1915, étaient parvenus à notre musée, malgré les mille difficultés de transport dues notamment à la guerre :

Mammalogie 5,800 spécimens.

Ornithologie ' 6,200 -—

Herpétologie 4,800

Ichthyologie 6,000

Invertébrés plus de . . . 100,000 La paléontologie était représentée simplement pai quelques documents relatifs à 1'ichthyologie.

Au point de vue anthropologique, 3,800 pièces furent ajoutées à la collection congolaise offerte jadis au musée parle roi Léopold II.

De plus l'expédition rapporta une série d'environ 300 aquarelles et dessins à la plume, dus à M. Chapin, ainsi qu'une superbe collection comprenant 9,890 photographies, propriété personnelle de M. Lang, qui toutefois t'a mise en dépôt au musée. Cette collection se répartit comme suit :

L'anthropologie 5,461 photographies.

La mammologie 2J55

L'ornithologie 512

L'herpétologie 565

L'ichthyologie 182

L'ensemble des invertébrés . 294

La botanique 488 photographies.

Sujets divers 438

132

La valeur de la collection formée est considérablement augmentée par l'ensemble des agendas, carnets de notes, observations et mensura- tions prises sur les lieux mêmes. Elle fournit des données de valeur inestimable pour les études tant zoologiques qu'ethnographiques, que nous nous proposons de publier.

Plan de publication.

Les publications projetées se répartiront en quatre séries : J. Travaux scientifiques publiés dans notre Bulletin, sous le titre : « Zoology oflhe Belgian Congo » : 12 volumes sont actuellement prévus dans cette série. Les travaux, publiés d'abord dans le Bulletin, seront ensuite réédités en une édition spéciale tirée à 1 50 exemplaires.

2. Travaux paraissant dans les Mémoires du Musée : le volume traitant de l'Okapi est actuellement en préparation.

3. Albums ethnologiques, dans lesquels seront réunis les princi- paux résultats anthropologiques : 3 volumes.

4. Histoire de l'expédition, en 2 volumes, par Herbert Lang et James Chapin.

Projet d'internationalisation.

En égard au caractère international de l'exploration du Congo et au concours généreux qui nous a été donné par le Gouvernement belge, nous nous proposons de coopérer dans la plus large mesure possible à la dissémination des connaissances relatives à l'histoire naturelle et aux ressources du Congo. Tant au point de vue zoologique que botanique, beaucoup de nos documents seront valeur réelle en ce qui concerne le développement économique futur de cette vaste région de l'Afrique.

L'American Museum commencera par choisir, ainsi qu'il en a été con- venu, une collection des doubles réunis par l'expédition en vue de l'offrir au Musée du Congo, à Tervueren, près Bruxelles.

Cette collection ne comprendra pas seulement certains des animaux (mammifères, oiseaux, reptiles) plus importants, mais également, autant que ce sera possible, des paratypes des nouvelles espèces décrites dans la série de volumes qui feront partie de la série The Zoologie of the Belgian Congo. Le Musée du Congo, à Tervueren, recevra ainsi une aide puis- sante dans l'œuvre si importante qu'il a accomplie depuis 1897, date il fut établi comme centre de recherches sur la zoologie et l'ethnologie du Congo. Le même principe s'appliquera à la reproduction des photo- graphies, observations et notes diverses qui ne seraient éventuellement pas publiées.

133

En d'autres termes, l'Américan Museum s'efforcera, dans la mesure du possible, et pour chaque branche de la science, de faire profiter de ses doubles el de ses documents son institution sœur de Belgique, le Musée du Congo, à Tervueren; en même temps il s'efforcera donc d'aider au développement des connaissances relatives au Congo, en mettant, grâce au Musée du Congo, ces matériaux à la disposition des savants et des chercheurs européens.

ENSEIGNEMENT

École de Médecine Tropicale.

L'École de Médecine Tropicale, établie au ParcDuden, a pu reprendre les cours au 1er avril 1919. L'établissement avec son matériel scientifique et ses collections, n'avait guère souffert durant l'occupation allemande.

Cet Institut d'enseignement supérieur forme avant tout les médecins nécessaires au service de notre Colonie. Après un enseignement spécial comportant au moins quatre mois d'études, nos médecins acquièrent, après examen, le diplôme de médecin colonial.

L'École forme en outre des adjoints du service médical. Elle fait appel dans ce but à des candidats en sciences, des infirmiers diplômés, etc., qui reçoivent un enseignement théorique conéernant l'hygiène et la patho- logie tropicales. Ils sont entraînés en outre aux examens microscopiques indispensables aux Colonies.

Un enseignement identique a été donné à des infirmières, dont la plu- part s'étaient distinguées par un service assidu au front. Quelques-unes d'entre elles sont déjà arrivées dans la Colonie, et il y a lieu de croire que l'essai que l'on a tenté donnera de bons résultats.

Ces adjoints de service médical doivent assister nos médecins et prendre charge d'une grande partie de la besogne matérielle fort absorbante.

Des Missionnaires et des religieuses ont suivi les cours et seront à même d'organiser dans leurs Missions la lutte contre les maladies tropi- cales.

Les laboratoires de l'École de Médecine Tropicale accueillent nos méde- cins coloniaux pendant leur congé en Europe. ÎSos praticiens viennent se mettre au courant des acquisitions scientifiques récentes, et très souvent complètent et achèvent des observations faites dans la Colonie. 11 faut, en effet, que l'École garde un contact étroit avec les laboratoires d'Afrique et les médecins praticiens.

134

Enfin, l'Ecole de Médecine Tropicale est visitée par un grand nomb d'agents coloniaux, qui ont quelque peu souffert du climat tropical. Assurés d'y trouver des spécialistes, ces agents s'y rendent volontiers : malgré les circonstances peu favorables, surtout au début de cette arnée, l'École avait inscrit au 1er décembre 1919 plus de 500 consultations.

Dans le but de développer ce service, on aménage à proximité du Parc Duden, une Clinique Coloniale, qui pourra offrir l'hospitalité à quelques agents, souffrant d'une affection tropicale.

Ecole coloniale supérieure.

Arrêté créant l'École Coloniale superieur à Anvers. ALBERT, Roi des Belges, A tous présents et à venir, Salut.

Vu notre arrêté du 21 septembre 1919 autorisant Notre Ministre des Colonies à accepter les dons faits à la Colonie du Congo Belge pour le perfectionnement de l'enseignement colonial, par M. H. Hoover, agissant au nom de la « Commission for Relief in Belgium » ;

Sur la proposition de Notre Ministre des Colonies,

Nous avons arrêté et arrêtons :

Article premier. 11 est créé une École Coloniale supérieure pour l'enseignement spécial des sciences coloniales, théoriques et appliquées en vue notamment de former les fonctionnaires coloniaux.

Son siège est à Anvers.

Art. 2. Le personnel attaché à l'école se compose du conseil d'admi- nistration, du conseil de perfectionnement, du directeur, des professeurs, chargés de cours, conférenciers, répétiteurs, surveillants et employés subalternes.

Art. 3. Le conseil d'administration comprend six membres nommés par le Ministre des Colonies pour un terme de trois ans et renouvelables par tiers chaque année.

Les membres sortants sont rééligibles.

Un membre est choisi sur proposition du collège des bourgmestre et échevins de la ville d'Anvers.

Un membre est choisi parmi les membres du comité financier créé par arrêté royal du 21 septembre 1919.

Le président est désigné par le Ministre des Colonies.

Le Ministre peut assister aux séances du conseil; il en prend dans ce cas la présidence. Il peut également s'y faire représenter parle secrétaire

135

-général ou un fonctionnaire supérieur de l'administration. Le délégué du Ministre a voix délibérative.

Le directeur de l'école assiste aux réunions avec voix consultative. Il remplit les fonctions de secrétaire du conseil.

Le Ministre des Colonies fixe, s'il y a lieu, les indemnités des membres du conseil d'administration.

Art. 4. Le conseil administre l'école sous la haute autorité du Ministre. Il dresse le projet de budget, vérifie les comptes, prend les mesures nécessaires en vue du bon fonctionnement de l'établissement, surveille l'exécution des règlements. Il soumet au Ministre ses propo- sitions de modifications au programme des cours après «avoir pris l'avis du conseil de perfectionnement, il fait aussi des propositions de nomina- tions pour le personnel scientifique et nomme le personnel subalterne. Il peut déléguer au directeur la nomination de ce personnel.

Il fait rapport chaque année au Ministre des Colonies sur le fonctionne- ment de l'école.

Le conseil peut, quand il le juge à propos, se faire rendre compte par le directeur ou par le conseil de perfectionnement de tout ce qui concerne la gestion journalière, la discipline et les études.

Il peut exigercommunication de tous les documents concernant l'insti- tution et de tous les registres relatifs aux intérêts généraux de l'établis- sement.

Les décisions de principe importantes sont soumises à l'approbation du Ministre. Celui-ci peut modifier les mesures qui lui paraîtraient contraires à l'intérêt de l'école ou à l'intérêt général.

Art. 5. Le conseil de perfectionnement se compose du directeur et de six professeurs de l'école, désignés par le Ministre pour un terme de six ans et renouvelables par sixième chaque année. Les membres sor- tants sont réiligibles.

Le Ministre dsigne le président du conseil de perfectionnement.

Le conseil nomme un secrétaire parmi ses membres.

Art. 6. Le président convoque le conseil de perfectionnement au moins quatre fois l'an et chaque fois que les besoins du service l'exigent ou que trois membres du personnel enseignant lui en ont fait la demande par écrit.

Le conseil délibère sur toutes les questions qui intéressent les études et la discipline du corps professoral.

Il propose au conseil d'administration les modifications qu'il juge utile d'apporter aux programmes, horaires, règlements et dispositions qui régissent les études, les mesures propres à améliorer l'enseignement et le régime éducatif de l'école.

136

Art. 7. Le Directeur est nommé par le Ministre, sur avis du conseib d'administration. Il a la direction de l'établissement suivant les instruc- tions du conseil d'administration. Il exerce ses fonctions en sauvegar- dant le caractère universitaire de l'enseignement.

Art. 8. Les professeurs, chargés de cours, conférenciers, répéti- teurs et surveillants sont nommés par le Ministre des Colonies sur l'avis du conseil d'administration.

Les traitements et indemnités sont fixés par le conseil d'administration, mais soumis à l'approbation du Ministre.

Art. 9. Le Ministre des Colonies détermine chaque année le nombre des élèves-candidats aux fonctions administratives dans la Colonie qui seront admis à suivre les cours.

Les candidats aux fonctions administratives de la Colonie sont placés- sous le régime de Tinternat-mitigé. Ce régime est réglé par le conseil d'administration, le conseil de perfectionnement entendu. Les règle- ments généraux y relatifs sont soumis à l'approbation du Ministre.

Le Ministre fixe les conditions d'admissibilité, la durée et le pro- gramme des études.

Art. 10. Les deux langues nationales sont placées sur le même pied pour l'examen d'entrée.

La langue véhiculaire des cours est fixée d'après les besoins de l'en- seignement. Les cours sont organisés de manière telle que l'exécution de l'article 3 de la loi du 18 octobre 1908 sur le gouvernement du Congo Belge soit pleinement assurée.

L'examen de sortie peut être subi en français ou en flamand. Les réci- piendaires peuvent présenter comme langue principale l'une des deux langues nationales à leur choix et devront présenter l'autre comme langue secondaire.

Art. 11. Notre Ministre des Colonies est chargé de l'exécutioD, du présent arrêté.

Donné à Laeken le 11 janvier 1920.

ALBERT.

Par le Roi : Le Ministre des Colonies,, Louis Franck

École coloniale supérieure.

LE MINISTRE DES COLONIES,

Vu l'arrêté royal du H janvier 1920 organisant l'École coloniale supé- rieure d'Anvers,

137

Arrête :

Article premier. Les durée des études est de trois ans et demi, répartis en sept semestres. Le cinquième semestre est réservé au service militaire. Les semestres commencent respectivement le 1er octobre et le 1er mars.

Art. 2. L'enseignement comprend les branches suivantes :

Première année. 1er et 2e semestres.

1. Histoire de la civilisation européenne; 2. Histoire de la formation des empires coloniaux actuels et spécialement du Congo belge ; 3. Élé- ments d'histoire de la philosophie; 4. Logique et méthodologie; 5. Intro- duction à l'étude du droit; 6. Économie politique et sociale; 7. Géogra- phie physique générale avec application à l'Afrique et au Congo belge; 8. La langue et la littérature françaises ; 9. La langue flamande (exercices pratiques); 10. La langue anglaise (exercices pratiques); 11. Conférences sur dès sujets d'actualité.

Deuxième année. 3e et 4e semestres.

1. Histoire des systèmes de colonisation; 2. Notions de biologie ; 3. Lit- térature flamande ; 4. Notions d'anthropologie, d'ethnologie et de pré- histoire; 5. Mœurs et institutions indigènes du Congo belge; 6. Langues indigènes; 7. Notions de droit public belge, Charte coloniale; 8. Orga- nisation politique et administrative du Congo belge ; 9. Éléments de géologie congolaise; 10. Topographie et éléments de cartographie; 41. Conférences sur des sujets d'actualité.

5e Semestre. Service militaire. En principe au génie.

Troisième année. 6e et 7e semestres.

1. Langues indigènes; 2. Politique indigène; 3. Hygiène tropicale et. médecine usuelle; 4. Droit pénal et notions de droit civil congolais ; 5. Droit public colonial comparé; 6. Éléments de botanique congolaise; agricul- ture et élevage au Congo ; 7. Le génie civil aux colonies ; 8. Le régime écono- mique de la colonie ; 9. Finances coloniales ; 10. Littérature anglaise ; 11. Conférences sur des sujets d'actualité.

Art. 3. L'enseignement comprend en outre les cours suivants : 1. Une langue moderne européenne; 2. La zoologie africaine ; 3. La botanique tro- picale ; 4.La géologie congolaise ; 5. Histoire de l'évangélisation chrétienne ; 6. Conférences sur l'Islam; 7. Technologie des industries indigènes; 8. Le dessin. L'enseignement comporte également la préparation au service militaire.

Art. 4. Pour être admis à l'examen de sortie, il faut avoir suivi deux des cours prévus à l'article 3, parmi lesquels, un des trois suivants : zoolo- gie africaine, botanique tropicale ou géologie congolaise.

Art. 5. Il y a un examen de passage tous les deux semestres. L'examen de sortie porte sur les matières enseignées pendant les deux derniers semestres et sur deux des cours prévus à l'article 3. Il comporte aussi : 1. La rédaction d'un mémoire sur une matière coloniale au choix du réci- piendaire et éventuellement la défense publique de ce mémoire, soit en

138

français, soit en flamand. 2. Une épreuve pratique sur celle des langues nationales qui n'a pas été choisie pour le mémoire ;

Art. 6. Le diplôme de l'école est délivré aux élèves qui ont subi avec succès l'examen de sortie.

Art. 7. Les élèves réguliers prennent l'engagement de remplir des fonctions administratives dans la Colonie. Il peut être admis des élèves libres.

Art. 8. Pour être admis en qualité d'élève régulier, il faut : 1. Être Belge ; 2. Être âgé de 17 ans accomplis au plus tard le 1er janvier écoulé; 3. Avoir subi un examen médical; 4. Avoir subi avec succès répreuve- concours prévu à l'article 9.

Art. 9. L'épreuve-concours comprend : a) Un examen éliminatoire comportant la rédaction d'un compte rendu analytique et critique d'une conférence faite devant les récipiendiaires; b) Un examen oral sur les matières qui sont au programme de la dernière année des humanités classiques, modernes ou scientifiques, au choix des candidats. Pour les candidats porteurs d'un certificat d'études moyennes du degré supérieur, cet examen pourra être remplacé par une épreuve approfondie sur deux(l) branches choisies par eux dans le programme de la dernière année des humanités classiques, modernes ou scientifiques, à leur choix. Le nombre -des candidats qui sont admis à l'examen b ne peut dépasser le double de places à conférer à l'école. L'épreuve-concours doit constater la connais- sance approfondie d'une des deux langues nationales ; l'autre langue nationale doit être présentée a titre secondaire.

Art. 10. La date des épreuves à l'article 9 ainsi que la composition du jury, sont publiées au Moniteur chaque année pendant le mois de juillet.

Art. 11. Les candidats doivent adresser leur demande au directeur de l'École avant le 15 juin. Pour la première année scolaire, les demandes seront adressées au Ministère des Colonies. Dans leur demande, les can- didats doivent spécifier les branches de l'enseignement sur lesquelles ils désirent que les épreuves visées à l'article 9 portent et la langue dans laquelle ils désirent que les épreuves se fassent.

Art. 12. L'examen médical a lieu avant les épreuves prévues à l'ar- ticle 9.

Art. 13. - Des bourses ou des fractions de bourses peuvent être accor- dées aux candidats admis. Les candidats qui désirent obtenir cette faveur doivent adresser leur demande au conseil d'administration qui statue après enquête.

Art. 14. Le conseil d'administration peut admettre des élèves libres, à condition que ceux-ci s'inscrivent pour six cours au moins.

Art. 15. L'enseignement est gratuit pour les élèves réguliers. Le prix <le la pension est fixé à (2) francs. Le conseil fixe les frais d'inscription pour les élèves libres.

Bruxelles, le 2 février 1920.

Louis Franck.

(1) Un arrêté ultérieur a fixé à 4 le nombre de ces branches.

(2) Ce chiffre a été porté à environ 2000 francs.

Renseignements de l'Office Colonial.

ROYAUME DE BELGIQUE,

MINISTÈRE DES COLONIES. 1920. 9e année. Mai,

COMMERCE ET INDUSTRIE.

PROVINCE DU KATANGA.

L'étude sur le commerce d'importation au Katanga publiée dans le dernier numéro des renseignements de l'Office Colonial (1) tendait à démontrer que la région du Katanga offre à l'industrie nationale un vaste débouché pour la vente des articles d'importation, établissait dans quelle proportion la Belgique intervenait dans le commerce d'impor- tation au Congo Belge et signalait aussi combien l'état de guerre avait malheureusement modifié la situation jadis si favorable.

Les industriels et commerçants désireux d'introduire leurs produits au Katanga trouveront dans l'étude complémentaire ci-après des indi- cations sur les besoins des blancs et des indigènes ainsi que des renseignements de caractère pratique dont ils pourront apprécier toute l'utilité.

(I) Trois numéros des Renseignements de V Office Colonial ont paru depuis la reprise des travaux après la guerre. On peut se les procurer chez l'éditeur M. Goemaere, 21, rue de la Limite, à Bruxelles. En voici les Sommaires ;

1. Janvier 1920. Commerce et Industrie : Situation économique du district du Haut-Luapula. Établissements commerciaux et indu- striels de la province du Katanga. Transports : Règlements et tarifs des transports sur la ligne Anvers-Congo et en service public au Congo belge. Transports maritimes. Transports fluviaux du Kas-Cougo. Transports fluviaux du Haut-Congo. Transports sur le lac Kivu. Transports sur le lac Tanganika. Transports sur les chemins de 1er vicinaux du Mayumbe. Transports sur le chemin de fer Matadi- Xiéopoldville. Transports sur les chemins de fer du Cougo Supérieur

140

III. Chaussures.

Importance du Commerce, Tous les genres de chaussures se vendent à Elisabethville : souliers de soirée, chaussures ordinaires pour indigènes, bottines de ville et de chasse appelées « veld boots »..

La chaussure à boutons ne trouve guère d'amateurs. Le modèle pré- féré est la chaussure « genre américain » à bouts carrés ainsi que la chaussure anglaise à bouts ronds. Ces chaussures se vendent en cuir brun et noir.

Les bottines et les souliers blancs en daim ou en toile ne se portent que pour le jeu de tennis et surtout en saison sèche.

Presque toutes les chaussures en vente au Katanga ont une double semelle dont la première est en cuir chromé, qui les rend plus souples.

Le modèle préféré parmi les souliers de luxe est celui dénommé « brogue » avec trépointe cousu à la main, dessins ajourés sur l'em- peigne et le long des coutures.

Les chaussures pour ouvriers blancs et pour tous ceux qui vont

aux Grands Lacs Africains. Transports sur le chemin de fer du Katanga.

Législation : Constitution de sociétés. Tarif douanier du Congo belge. Liste chronologique des dispositions législatives intéressant le commerce. Rapports des marchés coloniaux. Informations. Liste des sociétés belges opérant au Congo. Bibliographie. Avis.

2. Mars 1920. Commerce et Industrie : Situation économique du district du Haut-Luapula . Le commerce d'exportation au Congo Belge. Liste des firmes Belges en mesure d'exporter leurs produits au Congo. Informations. Coupes de bois au Katanga. Adjudications.

Bibliographie.

3. Avril 1920. Statistique du commerce extérieur du Congo Belge pendant l'année 1917. Outillage économique. —Notice analytique.

Produits exportés. Exportations par pays de provenance et de desti- nation. — Comparaison des exportations de l'année 1917 avec celles des années précédentes . Marchandises importées. Importations par pays de provenance. Comparaison des importations de l'année 1917 avec celles des années précédentes. Statistique du commerce extérieur du Katanga pendant l'année 1917. Produits exportés. Exportations par pays de provenance et de destination. Comparaison des exportations de l'année 1917 avec celles des années précédentes. Marchandises im- portées. — Importations par pays de provenance. Comparaison des importations de l'année 1917 avec celles des années précédentes. Mouve- ments des ports du Bas -Congo pendant l'année 1917. Mouvement des transports au Congo Belge : Chemin de Fer du Congo ; Chemin de Fer du Mayumbe. Transports sur le Bas-Fleuve; Transports sur le Haut-Fleuve

Chemins de Fer des Grands Lacs. Chemin de Fer du Katanga.

141

en brousse, sont généralememt du type : « tramp boots » en « cuir sauvage » avec double semelle très forte, dent l'une est tannée au chrome, et à languette à soufflet complètement fermée de façon à empêcher l'introduction de l'eau.

Les bottines préférées par les indigènes sont celles de couleur jaune «lont le cuir fait un bruissement en marchant, ces chaussures de qua- lité ordinaire sont souvent munies de fortes semelles garnies de clous.

Emballage. Les chaussures de ville tels que souliers en peau ou en toile à voile, de même que les bottines de ville sont expédiées par paire dans des boîtes en carton qui, elles-mêmes, sont placées dans des caisses en bois recouvertes à l'intérieur de papier imperméable.

Les chaussures pour la brousse et les chaussures pour noirs sont expédiées simplement dans une toile d'emballage garnie intérieure- ment de papier imperméable.

Ily a lieu de faire remarquer que les fabricants belges qui expé- diaient au Katanga avant la guerre, employaient des matériaux trop lourds pour leurs emballages. Ces précautions qui sont justifiées lorsque la marchandise doit voyager au loin dans l'intérieur ne le sont pas pour la plupart des destinations du Katanga.

Les exportateurs ne doivent pas perdre de vue que le coût de l'em- ballage intervient dans la fixation du prix de revient, et que les embal- lages sont taxés au même prix que les marchandises par les orga- nismes de transport.

Provenance. Les chaussures proviennent en majeure partie de l'Angleterre (Northampton et Leicester). Pendant la guerre, l'Afrique du Sud qui compte quelques grandes fabriques de chaussures s'est assurée un débouché assez important sur les marchés du Katanga.

Les fabricants belges pourraient trouver au Katanga un débouché sérieux pour leurs chaussures qui, tant par la qualité que par le fini, ne le cèdent en rien aux chaussures de provenance étrangère.

Échantillons déposés à l'Office Colonial (1),

Échantillon 1. Soulier de ville en cuir chromé havane. Soulier élégant avec bout moyen anglais rapporté. Doublé mi-cuir, mi-drill : semelles moyennes en croupon. Travail soigné et fini, de très bonne vente. Prix : 75 francs en détail, en gros 54 francs.

Échantillon iV» 2. Bottines de brousse, dite « tramp boots ■» , teinte marron (nuance foncée) cuir graine, tige et empeigne sans doublure et d'une seule pièce, bout carré, double semelle en cuir chromé de très

(I) Les prix de vente indiqués sont ceux de janvier 1920.

142

bonne qualité, cousue et clouée, trépointe demi largeur, languette à soufflet fermée jusqu'à mi-hauteur. Se vend beaucoup pour la brousse et aux ouvriers. Prix : au détail 60 francs, en gros 52 francs.

Échantillon 5. Bottine de brousse, dite « tramp boots » graine noir, tige et empeigne d'une seule pièce sans doublure, contrefort ren- forcé, double semelle dont une en cuir chromé, bout anglo-américain moyen, languette à soufflet complètement fermée. Se vendant égale- ment bien. Prix au détail 60 francs, en gros 52 francs.

Échantillon 4 . Bottine de campagne noire graine, à empeigne entière, forte semelle, en bon croupon, clouée; tige et empeigne sans doublure, languette fermée. Bottine ordinaire pouvant convenir pour la ville et la brousse. Prix : au détail 45 francs.

IV. Autres articles en cuir.

Les ceintures en cuir sont très demandées tant par les blancs que par les noirs.

Les ceintures préférées des Européens sont en cuir de porc à gros grains et formées de trois lanières de cuir réunies entre elles par des anneaux auxquels sont attachés des porte-mousquetons utilisés pour les trousseaux de clefs, etc. Ces ceintures se ferment au moyen d'une boucle en fer nickelé ou recouvert de cuir. La ceinture formée d'une seule bande de cuir fait aussi l'objet d'une bonne demande.

Les ceintures que l'on vend aux noirs sont en cuir ordinaire mat ou légèrement luisant par suite de l'apprêt à la machine. Au lieu que la boucle et les anneaux soient cousus au cuir, ceux-ci sont fixés par de fortes a attaches « en cuivre.

On vend aussi assez bien les guêtres en cuir, « genre anglais «, à courroies, ou guêtres en cuir d'une seule pièce.

On trouve de même des bretelles tout en cuir pour indigènes.

Échantillons déposés à l'Office Colonial (1).

Échantillon iV0 5. Guêtres en cuir jaune d'un seule pièce imi- tant la forme du mollet. Très souple se fermant au moyen d'une « baleine » en fer vernis dans le bas et d'une lanière en cuir dans le haut. Article de très bonne qualité se vendant au détail 37 fr. 50.

Échantillon 6. Ceintures pour noirs en cuir fauve, en trois pièces réunies entre elles par deux anneaux auxquels sont attachés des « porte-mousquetons » pour trousseaux de clefs, etc. Se ferme au moyen d'une boucle en fer étamé. Prix : 4 francs au détail.

(1) Les prix indiqués sont ceux de janvier 1920.

143

V. Quincaillerie.

Importance du commerce. Avant la guerre, la majeure partie des articles de quincaillerie provenait d'Allemagne, qui a été supplantée depuis par les États-Unis et l'Angleterre.

L'approvisionnement duKatanga est actuellement réduit à son strict minimum et ne suffit pas pour les besoins locaux. Les fabricants belges pourraient, avec grand succès, profiter de la pénurie d'articles émaillés au Katanga pour y importer leurs produits.

Après s'être procuré le pagne, la chemise et la couverture, l'indi- gène s'achète un récipient pour y cuire sa nourriture : viande, farine de manioc, etc. Lorsque ses ressources le lui permettent, il acquiert une casserole à long manche fixe, un bassin émaillé et une ou deux tasses émaillées.

Articles demandés. Les indigènes emploient surtout les casseroles en tôle d'acier emboutie, dont l'intérieur est étamé et dont l'extérieur est recouvert d'un vernis noir, de façon à ce qu'on ne remarque pas les traces de fumée. Ces casseroles sont munies d'un couvercle étamé et d'un long manche creux en tôle étamée. Ils emploient de même les poêlons émaillés blanc à l'intérieur et bleu à l'extérieur, munis aussi d'un couvercle en tôle étamée pour garantir les aliments du goût de la fumée.

Les indigènes se servent encore de tasses émaillées (bleu à l'exté- rieur), munies dune anse pour puiser ou boire de l'eau, du malafu (vin de palme) ou du pombe (bière indigène).

Les blancs emploient pour leurs usages courants, les bouilloires en émaillé de provenance américaine, avec fond plat et large. Elles sont munies d'une grande anse mobile avec poignée en bois. . La cafetière émaillée pour personne seule ou petit ménage est égale- ment bien demandée. La cafetière-filtre trouverait un bon débouché.

Les bassins en émaillé de toutes grandeurs sont d'une vente cou- rante, de même que les assiettes.

Les seaux galvanisés sont d'un usage très répandu, de même que les seaux hygiéniques émaillés avec couvercle pour chambre de toilette.

Parmi les articles d'usage industriel, on utilise beaucoup les pelles et les pioches de terrassier ainsi que les pioches à « bourrer » pour les travaux publics, constructions, chemins de fer, mines, etc. C'est par milliers que l'on compte la vente annuelle de ces articles, qui pro- viennent d'Angleterre et des États-Unis.

Les houes, qui remplacent avantageusement la bêche, se vendent

144

en grandes quantités dans tout le Katanga. Elles servent au travail de la terre par les indigènes. Les fabricants belges trouveraient au Katanga un débouché important pour ces articles.

Provenance. La plupart des produits émaillés vendus au Katanga provenaient de l'Afrique du Sud, d'Angleterre et d'Allemagne. Depuis la guerre, les États-Unis se sont introduits de plus en plus et la majo- rité des émaillés « chine » proviennent d'Amérique, tandis que les émaillés blancs sont de fabrication anglaise.

Ces émaillés semblent ne pouvoir concurrencer nos produits belges, au point de vue de la qualité.

Emballage. Les articles émaillés sont entourés de papier bruns empilés les uns sur les autres, et emballés dans des caisses, les inter- stices étant rembourrés par de la paille, du foin ou du papier.

Les seaux, pelles, bêches, pioches arrivent en caisses ou simple- ment entourés d'une toile d'emballage.

Échantillons déposés à l'Office Colonial (1).

Échantillon 1 . Casserole en tôle d'acier emboutie, très épaisse, à bords recourbés, diamètre : 19 cm.; profondeur, 17 cm., poids : 2 kgs. 50 gr.; manche creux en tôle étamée de 28,5 cm. de long; inté- rieur étamé, extérieur vernis noir, couvercle avec poignée en tôle étamée à l'intérieur et à l'extérieur. Article d'une très grande résis- tance au feu, très apprécié par les indigènes. Coût : 57 francs au détail; avant la guerre, 10 à 12 francs.

Echantillon 2. Poêlon émaillé, blanc à l'intérieur, bleu à l'extérieur; profondeur : 95 cm.; diamètre : 16,5 cm.; poids : 0. kg. 450; manche droit émaillé de 14,5 cm. de long; couvercle en fer-blanc. Prix : 10 francs au détail. Avant la guerre : 6 francs.

Echantillon 3. Bouilloire en émail « chine » gris-bleu à l'inté- rieur et à l'extérieur, très large et à fond plat. Diamètre : 23 cm. au fond et 12 cm. à l'ouverture; profondeur : 10 cm. Deux oreilles émaillées auxquelles est attachée une anse mobile en fil de fer galva- nisé muni d'une poignée en bois vernis noir. Poids : 0.850 gr. Prix : au détail, 22 francs. Avant la guerre, 12 francs.

Echantillon 4. Bouilloire, même modèle que le 3, mais plus petite. Diamètre : 18 cm. au fond et 9,5 cm. à l'ouverture; pro- fondeur : 8,5 cm. Poids : 0.625 gr. Prix : au détail 12 francs. Avant la guerre, 7 francs.

Echantillon 5. Petite cafetière en émail blanc, d'un modèle

(1) Les prix indiqués sont ceux de janvier 1920.

145

«élégant. Diamètre : 10, o cm. au fond et 6,5 cm. à l'ouverture. Pro- fondeur : 16,5 cm. Anse courbée et fixe. Couvercle émaillé attaché à la cafetière au moyen d'une petite charnière. Poids ; 0.450 gr. Prix : 12 francs au détail.

Echantillon no 6. Grand bassin en émail blanc pour lavabos, etc., de 45 cm. d'ouverture, 21 cm. de diamètre au fond. Profondeur : 11,5 cm. Poids : 1 kg. 350 gr. Bord émaillé bleu. Prix : 28 francs au détail.

Echantillon 7. Bassin en émail blanc, moyen, même modèle que le 6, de 48 cm. d'ouverture, 21 cm. de diamètre au fond. Profondeur ; 10 cm. Poids : 0.750 gr. Prix : fr. 22.50 au détail.

Echantillon 8. Bassin en émail « chine » gris-bleu, utilisé par les noirs. 28 cm. d'ouverture; 13 cm. de diamètre au fond. Pro- fondeur : 6 cm. Poids : 0.250 gr, Prix : 6 francs au détail.

Echantillon 9. Seau galvanisé, modèle ordinaire, de 29 cm. d'ouverture, de 20 cm. de diamètre au fond et 22 cm. de profon- deur Poids: 1 kg. 300 gr. Prix : 14 francs au détail. Avant la guerre, 8 à 10 francs.

VI. Les boissons (1).

Importance du commerce. Ce commerce est d'une très grande importance tant |)our les vins et les boissons alcoolisées que pour la bière.

A Elisabethville de nombreux hôtels et cafés débitent des boissons diverses. Il y a plusieurs négociants en vins et toutes les grandes ürmes commerciales s'occupent de la vente de ces produits.

Dans l'intérieur, les factoreries sont pourvues d'un assortiment de bières en bouteilles, de vins en dame-jeanne de 10 litres et en bou- teilles et de liqueurs variées.

Genres les plus demandés et provenance, a) Bières. Avant la guerre, on consommait beaucoup la bière allemande « Lager Bier », en bouteilles de forme allongée et fermées par des capsules métal- liques munies d'une rondelle en liège.

Actuellement, on trouve comme bières sud-africaines la « Castle Beer » et la « Ohlson beer » qui se vendaient en novembre 1919 480 francs pour une caisse de quatre douzaines de bouteilles de 5/4 de litre. Sur ce prix il est ristourné au client 10 francs pour les bouteilles %ides rendues et 5 francs pour la caisse. Le prix de la bouteille de

(1) Les prix indiqués sont ceux de janvier 1920.

146

bière, avant la guerre, était de 3 et 4 francs pour la grande bouteille et de fr. t. 85 pour la demi-bouteille.

Des essais de soutirage en bouteilles d'une bière de l'Afrique du Sud appelée « Chandleers » ont été faits sur place, mais les résultats obtenus n'ont guère été satisfaisants. La bière fortement alcoolisée pour pouvoir se maintenir en bon état durant le voyage de Johannes- burg à Élisabethville, fermente trop lorsqu'elle est mise en bouteille. 11 semble que l'adjonction d'un anti ferment et la pasteurisation des bières en tonneau serait de nature à remédier à cet inconvénient.

La bière américaine vendue, sous la dénomination « Very best » à 6 francs la bouteille et 210 francs environ la caisse de 48 bouteilles de 3|4 de litre est très appréciée. Il en est de même de la bière « Schlitt » aussi de fabrication américaine.

On importe encore de Hollande la « Amstel bier » au prix de 220 à 230 francs la caisse de 48 bouteilles. Le Danemark fournit la «> Carls- berg » au même prix.

Le stout se vend également, mais en plus petites quantités. Les marques « Guiness » de Londres et « Gastle » de Johannesburg sont les plus demandées.

L'introduction des bières belges, pouvant supporter les frais de transport serait assurée de succès. Il est recommandé de garnir les bouteilles de capsules en étain.

b) Vins. On consomme, au Katanga, les vins de France, d'Italie et du Cap.

Les vins de France les plus répandus sont les bordeaux rouges en dame Jeanne de 10 litres (ordinaire) et en bouteilles (qualité meilleure) de même que les bourgognes des différents crûs, en bouteilles.

Les vins de bordeaux en dame-jeanne coûtent 60 à 75 francs la dame-jeanne de 10 litres, récipient compris. Les vins de Bourgogne en bouteilles reviennent de fr. 12.50 à 15 francs la bouteille. Une grande concurrence est faite aux vins français par les vins du Cap par suite des tarifs de faveur dont ceux-ci jouissent sur les chemins de fer sud-africains.

Les vins de bordeaux préférés sont le « St-Julien », le « Fronsac et le « Médoc ». Ces vins ne peuvent cependant être comparés à ceux consommés en Europe, le degré alcoolique étant plus élevé, pour leur permettre de supporter le transport et le climat tropical.

Les bourgognes les plus en faveur sont le « Pommard »,le « Cham- bertin », le « Beaune », qui se vendent en bouteilles de 3/4 delitre.

La présence de nombreux Italiens au Katanga y a amené l'introduc-

147

tion des vins d'Italie, tels que le < Chianti », le « Barbaresco », le « Grignolino », le « Nebiolo », etc.

Ces vins se vendaient avant la guerre à raison de fr. 3.50 à 5 francs la bouteille.

Actuellement les prix sont les suivants :

« Chianti » par caisse de 12 bouteilles dei litre 135 francs. « Grignolino » 150

« Freisa » 150

« Barbera » 155

« Nebiolo » 160

« Barbaresco » \ 65

« Barolo » 165

Les vins du Cap sont très demandés. Ils se vendent en dame-jeannes et en bouteilles. Les marques en faveur sont le « claret », léger vin de table fourni en dame-jeanne de 10 litres, au prix de 40 francs, non compris le réci- pient ; F « hermitage » , le « Sauvignon blanc », le « Drakenstein » , qui se vendent généralement en caisses de 12 bouteilles.

Le Cap fournit aussi un « Porto » ressemblant au « Porto » d'origine. Les vins du Cap ne sont pas additionnés d'alcool, mais il sont fabri- qués à l'aide de raisins plus sucrés que les raisins de France.

On importait jadis beaucoup de vins portugais en bouteilles et en fûts, mais depuis la réglementation de la vente des boissons alcooli- ques aux indigènes, la vente de vins portugais a diminué dans des proportions considérables.

c) Champagne et vins mousseux. La consommation de cham- pagne est assez grande. Avant la guerre, on rencontrait surtout les marques « Pommery et Greno », « J. H. Mumm « et » Vve Clicquot ». Les prix variaient alors de 15 à 18 francs la bouteille. Actuellement, ces marques sont presque introuvables et se paient de 35 à 40 francs.

On vendait aussi les champagnes « Mercier » et « Agnard », à 9 francs la bouteille.

Ces champagnes sont remplacés par des vins mousseux italiens, tels que :

« Gancia » extra-dry, la caisse de 12 bouteilles 250 francs. « Gran Spumante Gancia » 240

« Asti Spumante S. V- 1. C. ou Gancia » 230

« Moscato ou Passito Spumante, la bouteille 15

d) Liqueurs. La présence de nombreux anglo-saxons donne lieu à une grande consommation de « Whisky ».

Le whisky se vendait, avant la guerre, fr. 7.50 à fr. 9.50 la bou-

148

teille. Actuellement, il revient à 250 francs par caisse de 12 bouteilles.

Le vermouth italien se vend à raison de 150 à 170 francs la caisse de 12 litres.

Le curaçao, le porto, cointreau, le peppermint, l'oxygénée et le cognac sont comprises parmi les liqueurs les plus demandées. Les prix varient de 15 à 50 francs la bouteille. Elles coûtaient avant la guerre fr. 12.50 la bouteille.

e) Sirops de fruits et eaux minérales et gazeuses. Il se fait une grande consommation de sirops de fabrication anglaise, notamment de « lime juice », de « zétril » et de « lémos ». Ces préparations qui se vendaient, avant la guerre, fr. 5.50 la bouteille, coûtent actuellement 7 et 8 francs.

Deux fabriques de sirops de fruits et d'eaux gazeuses sont établies à Elisabethville. Elles ont une clientèle importante et fabriquent les sirops de grenadine, de framboise, de fraise, de citron, etc., ainsi que les eaux gazeuses « soda ».

Gomme eaux minérales, on ne trouve guère que la « Van Riebeek », importée du Sud; le 1/4 de boutelle se vend 3 francs à l'hôtel.

On consomme encore les eaux gazeuses préparées par les appareils « Sparklet », se chargant à l'aide de capsules d'acide carbonique. Ces capsules coûtaient, avant la guerre, fr. 2.25 la douzaine, et actuelle- ment 9 francs.

Pour la fabrication des sirops sur place, on utilise de grandes quantités d'essences de grenadine et de limonade.

Des firmes de Capetown et de Londres fournissent l'essence de grenadine prise à Capetown à 12 shellings le gallon (4 litres 1/2). Les récipients sont en gré ou en verre. Le gré étant très pesant, la dame- jeanne en verre entourée de jonc est préférable.

L'essence de limonade est fournie à raison de 5 shellings la livre anglaise (453 grammes) en bouteilles d'une livre. Cet emballage est trop coûteux et serait avantageusement remplacé par des touques de 10 livres. L'essence de « ginger-ale » est vendue au prix de 4 shel- lings la bouteille de \ livre anglaise (453 grammes).

Les autres essences de « champagnette », orange, framboise, fraise, etc., reviennent environ à 3 sh. 6 d. la livre pris à Capetown.

Les colorants naturels (sans aniline) pour limonadiers : rouge, jaune, champagne, fraise, framboise, etc., se vendent 3 shellings la livre à Capetown. Les bouteilles sont emballées dans des caisses bour- rées de paille.

L'acide carbonique liquide en bonbonnes de 25 litres fait l'objet d'une consommation importante. Une firme de Johannesburg en est

149

le principal fournisseur. Elle les facture à 35 shellings la bonbonne de 25 litres. La bonbonne coûte 2 shellings qui sont ristournés lors du renvoi des récipients.

L'acide citrique en cristaux dont il y a une grande demande est vendue à 6/6 la livre anglaise (455 gr.) à Capetown. L'acide citrique est principalement fourni par une firme de Bulawayo en sacs de toile ou en sachet double renfermé dans une caisse.

On utilise une grande quantité de bouchons métalliques munis d'une rondelle de liège pour les bières et les eaux gazeuses « sodas ». Ces bouchons coûtent 1 sh. 8 d. la grosse ; ils coûtent 2 shellings la grosse lorsque les bouchons portent une inscription.

Emballage. Ainsi qu'il a été dit plus haut, les bières sont expé- diées en caisses de 48 bouteilles entourées de paillons.

Les vins sont expédiés en cercles mais plus généralement en dame- jeannes de 10 litres et en caisses de 12 bouteilles.

VI. Automobiles, motocyclettes, bicyclettes.

Importance du commerce. Cinq maisons s'occupent actuellement à Elisabethville des articles renseignés sous cette rubrique. Toutes font les réparations.

Le commerce des vélos, de motos et mêmes d'automobiles, a une certaine importance au Katanga, principalement à Elisabethville, Kambove, etc.

Les statistiques pour 4914-15-16-17, renseignent en valeur pour les importations :

Désignation. 1914. 1915. 1916. 1917.

Automobiles . . fr, 34,999 24,974 23,392 171,094 Motocyclettes. ... 8.084 15.659 56,325 75,693

Vélos. , 101,228 59,164 84,389 167,970

A. Bicyclettes. Les marques de bicyclettes en usage au Katanga sont anglaises ou américaines. On rencontre, principalement la « B. S. A. » (trois fusils), la « Raleigh », la » Triumph ». On vend aussi la « Dunlop » et la » Meteor ».

Les bicyclettes en usage au Katanga doivent avoir un cadre et une fourche très solides; un petit développement : 4 à 5 m. au maximum; les pédales assez surélevées pour ne pas accrocher aux branches et aux petites termitières qui parsèment les routes; le guidon droit ; une selle large; double frein sur jantes arrière et avant; roue libre de préfé- rence à déclanchement ; cadre émaillé noir et non pas de couleur : garde-boue en métal émaillé noir.

150

Les bicyclettes qui, en 191 i, coûtaient 375 francs (la » Triumph «) et 4o0 francs (la « Rover»), coûtent maintenant U00 francs pour la marque « Raleigh » et 1,050 francs pour la marque » B. S. A. » (1).

Une autre marque moins connue, la « Dayton », revient à 650 francs.

Les vélos marque <• Legia > et « Fabrique Nationale » se vendent au Katanga, comme aussi la marque italienne « Bianki ».

B. Motocyclettes. Parmi les motocyclettes, on trouve la marque « Indian » à deux cylindres opposés, 2 1/4 HP, trois vitesses, fourche cintrée à ressort, changement de vitesse horizontal; la « B. S. A. », deux cylindres, trois vitesses, graisseur mécanique, allumage par magnéto, fourche à ressort renforcée; la « Harley Davison » de 7 à 9 HP ; la « Humbert » aver radiateur ; et la « Douglas ». On rencontre encore d'autres marques moins connues, notamment 1' « Overland ».

Beaucoup de motocyclettes sont munies de «< side-car ».

Les motocyclettes coûtent 3,500 francs à 4,000 francs, suivant la marque et la force du moteur. Les motos avec side-car reviennent de 4,000 à 6,000 francs.

C. Automobiles. Les principales marques sont : la « Hudson » de 40 HP, qui coûte 50,000 francs ; la « Cadillac » de 40 HP, qui coûte de 45 à 40,000 francs; la « Hupmobile » de 25 HP, à 20,000 francs; la « Buick» 16-18 HP, à 15,000 francs; 1' « Overland » 16-24 HP, à 15,000 francs; la « Ford » 16 HP, à 10,000 francs ; la « Chevrolet » 12-16 HP, à 10,000 francs.

En fait d'autos-camions, une entreprise minière utilise deux camions électriques, spécialement affectés à l'enlèvement des colis à la gare. Cette société possède encore deux camions automobiles utilisés pour les transports entre la voie ferrée et les centres miniers. Ces camions coûtent 40,000 francs pour une charge utile de 2 à 3 tonnes. Pourvus de deux voitures-remorques de 10 tonnes, ils coûtent 50,000 francs. Une autre société se sert aussi de ce genre de camions pour le transport des minerais d'étain. A Elisabethville ce transport est effectué en grande partie par camions automobiles d'une charge utile de 2 1/2 à 5 tonnes.

Une firme de la place a obtenu l'agence de la marque italienne « Fiat » pour les autos et les camions. La voiture « Torpedo » 12-16 HP. coûte en Italie environ 11,000 francs. Ce prix doit être augmenté du prix de transport de l'usine jusqu'à Elisabethville. L'auto-camion « Fiai » de 1 tonne revient à 13,000 francs en Italie.

La carrosserie « Limousine » ne se demande pas. La « Torpedo »

{!) Les prix sont ceux de janvier 19:10.

151

munie d'une capote constitue le genre le plus en vogue. La couleur courante des carrosseries est le bleu foncé moyen.

Les points essentiels à examiner pour la fourniture au Katanga -d'une voiture coloniale pratique et de bel aspect sont les suivants :

L'accessibilité parfaite et complète de toutes les pièces mobiles du moteur;

La caisse doit être unie, sans recoins peuvent s'accumuler l'eau et la poussère;

Une garde assez importante permettant aux voitures d'affronter les chemins défoncés ;

Les ailes « garde-boue » fermées aussi bien à l'avant qu'à l'arrière du côté de la carrosserie ne peuvent toucher aux marche-pieds de façon à permettre l'écoulement des eaux de pluie;

5o II serait utile de placer sous les marche-pieds un décrottoir en métal pour éviter de salir l'intérieur de la voiture en saison des pluies;

Glace courbe à l'avant, en trois panneaux, de toute la largeur de la caisse, pour réduire la résistance à l'avancement, en offrant une surface fuyante;

Capote recouvrant les places arrières et celles de devant ;

Les leviers des vitesses et du frein doivent être à l'intérieur de la caisse, pour éviter de sortir les bras en temps de pluie.

D. Accessoires. Parmi les pneus, on trouve pour vélos et motos les pneus « Dunlop », « B. S. A. », « Triumph », « Pericles ».

Pour les autos, on utilise les marques « Goodyear », « Goodrich », etc.

Une maison de la place compte importer sous peu les pneus « Michelin ».

Les selles de vélos et de motos les plus en vogues sont les aBrooks» et les « Nationale «. Les selles doivent être larges, de façon à ne pas fatiguer le cycliste.

Lorsque les voitures sont livrées avec pneus jumelés il aurait lieu d'utiliser le jumelage par roues métalliques amovibles. Les jantes amo- vibles ont, en effet, le tort de mettre beaucoup de poids à la périphérie de la roue, ce qui donne une mauvaise suspension de la voiture.

Avenir de ce commerce. La région du Haut-Katanga se sillonne petit à petit de larges routes pour automobiles, reliant enire eux les centres européens et miniers. Aussi le commeoce des vélos, motocy- clettes et automobiles a-t-il pris d'ores et déjà un essor considé- rable.

On compte actuellement plus de 1.500 bicyclettes, 101 motos, 56 automobiles et une dizaine de cainions-autoniobiles.

152

Des routes accessibles aux automobiles relient Elisabethville, Kam- bove, Mulungwishi, Fungurume, Kamatanda, Bunkaya, Ishilongo,. Busanga, Kasenga, etc., représentant un réseau routier d'environ 860 kilomètres.

Elisabethville elle-même comprend de larges avenues atteignant un parcours de plusieurs kilomètres.

D'autres routes pour automobiles sont à l'étude ou en construction.

11 s'en suit que ce commerce est appelé à un développement rapide et important et il appartient à nos industriels belges de ne pas laisser conquérir le marché par des marques étrangères.

Une exploitation diamantifère à Tshîkapa.

Tshikapa. Siège de la Direction d'une exploitation de diamants de la Forminière s'élève, rive gauche du Kasai, sur un mamelon domi- nant le confluent de ce dernier et de la Tshikapa; c'est une région très pittoresque.

Eaux basses : août, septembre ; eaux hautes : mars, avril.

Différence: 3m50.

Altitude : 600 mètres. Températures extrêmes : 40 et 14 degrés cen- tigrades Climat très sain ; région fertile.

Passage d'eau. Sur le Kasaï : baleinières ;

Sur la Tshikapa : beau pont suspendu (câbles métalliques, tablier en planches) construit par la Forminière qui se dispose à en jeter un semblable sur le Kasai.

(En face, sur la rive droite du Kasai, va s'élever, sur un plateau fer- tile dominant le site de la rive gauche, Tshikapa chef- lieu du terri- toire des Batshok.

De la direction installée à Tshikapa dépend la sous-direction d'une exploitation analogue en territoire portugais ayant son siège à Tshitatu sur la Longatshimo, à une dizaine de kilomètres de la fron- tière (Companhia de Pesquisas Mineira de Angola) Tshikapa situé sur le territoire du Congo Belge, dirige directement 9 postes d'exploitation dont la distance au siège de la direction varie de (Kisele sur la Tsikapa^ 5 à 81 kilomètres (Kabushi sur la Longatshimo).

Voies de communication. Tshikapa est reliée : au Nord, à Charlesville (Djoko-Punda), nouveau chef-lieu du district du Kasai, par une route carrossable de 150 kilomètres, construite et entretenue

153

par la Forminière ; cette route suit la ligne de faîte de la rive droite du Kasai ;

au Sud, à Tshitatu sur Longatshino (en Angola, à 10 kilomètres de la frontière) par une route carrossable de 140 kilomètres, égale- ment construite et entrenue par la Société; elle suit la ligne de faîte de la rive gauche de la Longatshino.

(De Tshitatu, la Companhia de Pesquisas Mineiras de Angola a construit et entretient une route carrossable jusque Shaibange, à 100 kilomètres au Sud, localité au-delà de laquelle se trouve une partie de son exploitation. Shaibange se relie par une route carrossable de 100 kilomètres, construite par l'autorité angolaise, à Sorimo, chef-lieu du district angolais du Kasai, qui est lui-même relié par une route d'automobiles de 450 kilomètres à Malange, point terminus du chemin de fer de Saint-Paul de Loanda.

aux divers postes d'exploitation par des routes carrossables construites et entretenues par la Forminière.

Transports. La Forminière a résolu la question des transports à pied-d'œuvre de son matériel et de ses marchandises, lesquels passent en totalité y compris ceux destinés à l'exploitation en Angola par le Congo belge, de la manière suivante :

A. De Charlesville, point terminus de la navigation à vapeur sur le Kasai, le transport s'effectue par chariot à bœufs, suivant la route carrossable Charlesville-Tshikapa, jusque Kakambaie, 50 kilomètres (ou Gulungu) 100 kilomètres si les pièces sont trop pondéreuses pour être transportées par baleinières mues à la pagaie.

De Kabambaie à Gulungu, 50 kilomètres, le transport se fait par baleinières mues à la pagaie.

De Gulungu àTshikapa, 50 kilomètres, baleinière remorquée par un bateau à moteur.

Ce système, qui nécessite deux transbordements entre Charlesville et Tshikapa est très onéreux : fr. 0.30 le kilogramme.

Chaque chariot peut transporter quatre tonnes et est tiré par vingt bœufs ; deux équipes de vingt bœufs chacune font présentement ce service. L'ingénieur directeur projette de développer ce mode en y consacrant quatre cents bœufs : vingt équipes de vingt bœufs mar- chant ensemble sous la surveillance d'un blanc. Le voyage Charles- ville-Tshikapa et retour s'effectuant en vingt-quatre jours, on pourra, en donnant six jours de repos aux équipes, transporter 80 tonnes mensuellement sans transbordement, ce qui réduira le prix du transport.

11 semble que tout ce qui est indispensable à l'exploitation en

•- 154

Angola pourra continuer de transiter avantageusement par le Congo belge.

Personnel blanc. 31, dont 7 Belges, 2 Anglais, i Norwégien,

1 Hollandais et 20 Américains. Contrats successifs de deux ans. Personnel noir. 7,140 (novembre 1919) tous Congolais y compris

les artisans.

Tous les artisans de la côte sont successivement congédiés et rem- placés par des Congolais formés dans les ateliers mêmes de la Formi- nière : scieurs, forgerons, mécaniciens, etc.

La direction estimant que les noirs, quels qu'ils soient, doivent tou- jours relever d'un blanc au point de vue technique et contrôle de leur rendement, a préféré des indigènes dès qu'elle en a eu suffisamment formés; ceux-ci en instruisent d'autres. La Société, en constituant ainsi un centre précieux d'éducation pour la Colonie, réalise une très appréciable économie sous le rapport du salaire de ses artisans.

Salaire. Minimum fr. 7.50 par mois plus 1 franc de ration heb- domadaire.

Les travailleurs se procurent aisément des vivres : produits des plantations faites par les villages de travailleurs créés à proximité des postes d'exploitation ; produits des groupements d'agriculteurs s'in- stallant dans la région; produits des cultures de la Forminière elle- même.

Une vaste ferme de la Société, à deux kilomètres de Tshikapa. 350 têtes de gros bétail sain et vigoureux, originaire de l'ancienne ferme de la Miao et de l'Angola. Tout en s'occupant d'un élevage qui réussit admirablement (100 naissances en un an), la ferme cultive de grandes étendues de manioc et de maïs ; ainsi elle parvient à satisfaire aux besoins de son personnel et à régulariser le prix des vivres dans la région : elle sait fournir notamment 24,000 carottes de manioc par semaine à raison de 30 pièces pour 1 franc (5 à 5 carottes fournissent une ration journalière normale).

De plus, chaque poste d'exploitation de diamants possède ses cul- tures, en dehors de celles de ses villages de travailleurs (particulière- ment manioc et maïs), qui tout en approvisionnant le personnel con- stituent des centres de propagande agricole qui instruisent et stimulent les indigènes de la région : le poste d'exploitation de Katioka, par exemple, possède 43 hectares de cultures vivrières qu'il augmente de

2 1/2 hectares par mois grâce à la charrue et aux 8 bœufs dont il dis- pose. Ces grandes cultures des postes d'exploitation utilisent, en général, pour leur main-d'œuvre, les enfants des travailleurs.

155

Tout le Sud de la région est très riche en pâturages et appelle ielève du gros bétail particulièrement.

Travail. Le travail journalier est de 8 heures : de 7 à 15 heures (appel à 6 h, 50') ; dans les mines la tâche étant raisonnablement fixée, le travail se termine généralement avant 15 heures.

L'exploitation des mines de diamants se subdivise en six phases :

Extraction du gravier diamantifère du lit de la rivière désignée par la prospection ; ce travail se fait à la pioche et à la pelle.

Transport du gravier; mis dans des paniers par les pelleteurs, le gravier est porté au « trommel » (cylindre à bras d'hommes ou à la vapeur, servant à éliminer les cailloux de dimensions trop fortes).

Triage par le « trommel » : le gravier de calibre tel qu'il ne peut pas renfermer de diamants est éliminé par ce premier triage.

Concentration par le « pan » , à bras d'hommes ou à la vapeur; à l'aide de la force centrifuge un premier concentré est obtenu : le composé le plus lourd celui se trouvent les pierres précieuses est ainsi concentriquement séparé du restant du gravier.

Concentration par le c Jig », à bras d'hommes ou à la vapeur : ce concentré obtenu par le pan est passé au Jig, dont le mou- vement vertical de va et vient conduit, en superposant par couche les divers éléments de même pesanteur, à un nouveau concentré des éléments les plus pondéreux.

« Pick ». C'est de ce dernier concentré se reconnaissent aisé- ment les diamants que les piqueurs retirent les pièces précieuses.

Rien d'inhumain dans ce travail. La deuxième phase pourtant, transport du gravier au trommel, sans être dure, devra s'humaniser : les paniers, portés sur la tête, laissent ruisseler sur le noir le liquide vaseux qui accompagne le gravier tel qu'il est extrait par les pelle- teurs.

Certains postes d'exploitation ont leurs trommels, jig et pan mus à la vapeur; la guerre n'a pas permis jusqu'ici, à la Société, de généra- liser cette mesure; le matériel est commandé et partiellement expédié d'Europe.

Outre la direction et les diverses installations (scieries et machines- outils à vapeur, charpenterie, magasins, etc..) de Tshikapa même, y compris la ferme, j'ai visité ce qui m'a permis de me rendre un compte exact de la région, de la population et du travail de celle-ci les postes d'exploitation suivants :

Postes d'exploitation de : Mabonda, à 10 kilomètres de Tshikapa (amont) sur la Mabonda, affluent de gauche du Kasai ; 800 travail-

156

leurs ; gravier traité journellement sans machine à vapeur, 125 mètres cubes ; production journalière, 100 carats.

Ramona, à 20 kilomètres de Tshikapa (amont) sur la Ramona, affluent de gauche du Kasai ; 325 travailleurs ; gravier traité journel- leuent avec machine à vapeur, 56 mètres cubes ; production journa- lière, 100 carats.

Katioka, à 25 kilomètres de Tshikapa (amont) sur la Londo, affluent de gauche de la Longatshimo; 630 travailleurs ; gravier traité journel- lement sans machine à vapeur, 80 mètres cubes ; production journa- lière, 120 carats.

Remarque. Le rendement est, pour chaque poste, supérieur aux estimations de la prospection.

Villages de travailleurs. Ces villages sont construits par les tra- vailleurs eux-mêmes à proximité des exploitations suivant les instruc- tions du chef du poste d'exploitation. Ils sont bien conçus, mais les habitations, nonobstant les efforts du blanc, conservent le type par- ticulier à la race qui les occupe ; on y retrouve donc toute la gamme de cases du Kasai allant de la confortable maison des Baluba à la rudimentaire hutte des Lulua ou des Bakete.

Des cultures vivrières créées, comme dit déjà, par les familles des travailleurs s'étendent rapidement autour de ces villages.

Magasins de vente. A Tshikapa et au siège de chaque exploitation se trouve un magasin des principaux articles de traite vendus au per- sonnel aux prix de revient.

Il y a, en outre, à Tshikapa, un magasin pour blancs vendant au personnel des vivres et des vêtements également aux prix de revient.

Blancs : Recrutement. Plusieurs Belges, ingénieurs, prospec- teurs, directeurs de poste et d'exploitation, mécaniciens, comptables, se trouvent actuellement à la Société. On peut en conclure qu'il y a à Tshikapa un vaste champs d'action pour les Belges.

Quant au personnel de couleur, la Forminière n'a guère dû, jus- qu'ici, faire de recrutement proprement dit : les mineurs, qui sont de toutes les races du Kasai et dont de très nombreux déjà, ont 4, 5 et 6 ans de service, font eux-mêmes, parmi leurs congénères, la pro- pagande la plus fructueuse qui soit ; les agriculteurs, attirés par le placement certain et avantageux de leurs produits, viennent progres- sivement créer de grandes cultures sur les terres disponibles de la région qui leur sont indiquées : ce sont des groupements de nos races laborieuses, les Baluba, les Batelela, les Bampende, qui, par surcroît, deviennent des éducateurs et un stimulant pour les élé-

157

ments retardataires et réfractaires comme les Batshok, les Lulua et les Bakete.

Comme on le voit, c'est une complète et heureuse transformation qui s'accomplit dans cette région ; l'industrie et l'agriculture s'y dé- veloppent de pair ce qui traduit la seule possibilité de mettre le pays en rapport d'une façon rationnelle et durable ; c'est non seule- ment satisfaire aux exigences économiques, mais c'est réaliser la mission civilisatrice en Afrique que de coloniser suivant cette for- mule.

Les travailleurs de la Forminière louent leurs services pour 1 mois ; ils peuvent toutefois s'en aller au cours de celui-ci sans subir de dommage.

Production en carats :

1917 1918 1919

40,000 164,000 215,000

Partout la population de la région, mineurs et agriculteurs, est heureuse et bien portante ; elle conquiert le bien-être en pleine liberté dans un pays riche, fertile et salubre.

L'épidémie de grippe, à laquelle un tribut universel a été payé, a fait relativement peu de ravages ici : la mortalité fut de 40 pour 4,500 travailleurs. Au poste d'exploitation de Kabushi sur Longat- shimo, sur 800 travailleurs la mortalité fut nulle (alors qu'elle était de 8 sur 40 habitants au village indigène du même nom soustrait à l'influence de la Forminière) .

Le pays est resté indemne jusqu'ici de la maladie du sommeil.

158

TRANSPORTS.

I. TRANSPORTS MARITIMES.

Le taux des frets de la Compagnie Belge Maritime du Congo publiés dans le numéro des Renseignements de l'Office Colonial de janvier 1920 sont modifiés comme suit :

Taux de fret actuels d'Anvers à Banana, Borna et Matadi.

Désignation des marchandises. Taux.

Charbons, briquettes de charbon fr. 106

Coke 164

Sel en sacs de 90 lbs. et plus, en caisses et touques . . 155

*Sel en sacs de moins de 90 lbs 160

Rails, éclisses et traverses 150

Douves 168

Alcool de traite, rhum, blanc de zinc, couleurs, peintures, huile minérale, huiles végétales, siccatif, vernis, goudron, légumes secs, pots en fer, riz, vin, poissons secs, viande séchée, grains, tôles, f pétrole lampant, poterie, fers (droits, angles, barres), savon en barils, graisse, sacs

vides, faïence 160

Liqueurs, fallu mettes, amidon, armes, meubles, menuiserie, bâches, papeterie, bicyclettes, bière, bois de construction, bougies, cartouches, casques, chapeaux, chaussures, ciment, clouterie, conserves, provisions, cotonnades, tis- sus, coutellerie, couvertures, droguerie et médicaments (sans danger), eaux minérales, instruments agricoles, instru- ments de musique, machettes, maisons démontées en fer ou en bois, malles, pommes de terre et oignons, parfu- merie, quincaillerie, ftérébenthine, émaillés, verrerie, fer- ronnerie, machinerie, tabac, verre à vitres, perles, laines, boulons, écrous, treillage métallique, chaux éteinte, savon, cuirs, cordages, articles de campement, buffleterie et mar- chandises non dénommées au présent tarif 169

-j-Benzine, fessences dangereuses, facides, carbure de cal-

*Le sel en sacs de moins de 20 lbs. ne sera pas accepté à l'embarquement.

fChargé sur le pont aux risques des chargeurs. L'armement se réserve le droit de charger sur le pont du navire aux risques des chargeurs tout colis qui, par suite de sa nature, pourrait par contact ou autre cause endom- mager les autres marchandises.

159

cium, poudre de traite, feux d'artifice 276

Explosifs, dynamite, obus, bombes 372

Minimum 33

Bijouterie, orfèvrerie, espèces 1 1/2 %

ad valorem

Les taux de fret ci-dessus sont nets, et par Tonne, poids et/ou cube, au choix de l'Armement. Ils ne sont applicables que pour autant qu'il s'agit de colis de poids ou dimensions ordinaires.

Les explosifs, inflammables, bateaux démontés et en général toute* les marchandises de pontée, ne seront acceptées que par arrangement spécial.

Pour tout colis ayant une valeur de plus de 500 francs, celle-ci devra être déclarée au moment de l'embarquement et si nécessaire, le fret ad valorem pourra être appliqué.

Pots en fer avec pieds paieront 2 4/4 fois leur poids, sans pieds 11/2 fois leur poids.

Le fret est payable contre remise des connaissements.

Le présent tarif est sujet à tout changement sans aucun préavis.

Taux de fret au retour de Banana, Borna et Matadi à Anvers.

Désignation des marchandises. Taux.

Noix de Panza fr. 266.—- par 1000 kilogr,

Caoutchouc 384. » »

Copal 277.— » »

Noix palmistes 298. » »

Cacao 320.— » »

Huile de palme 384. » »

Café 320.— » »

Minerai de cuivre 320. » »

Minerai d'étain 384 . » »

Cuirs, peaux 682. » »

Piassava 522. » »

Coton 128.— par 40 p. c.

Poivre 416.— par 1000 kilogr

Raphia 640.— » »

Bois 341 . » »

Maniophiton 224.— » »

Ecorce 299.— » »

160

Riz 320.— par 1000 kilogr.

Arachides en coques, en sacs . . . 384. » »

Arachides décortiquées, en sacs . . . 298.— » »

Cire 181. » »

Sisal 533.— » »

Graines de sésame 341. » »

Ivoire 0.85 par kilogr.

Méiaux précieux 1 1/2 p. c. ad valorem

Minimum fr. 33. par série de

connaissements.

Les taux susdits sont nets.

Le fret est payable d'après le poids constaté lors du déchargement de la marchandise à moins d'une convention spéciale. Le fret est payable contre remise des laissez- suivre.

Le présent tarif est sujet à tout changement, sans préavis.

II. TRANSPORTS PAR CHEMINS DE FER.

Modifications apportées au règlement général des transports et tarifs de la Compagnie du Chemin de fer du Congo.

M ATADI-LÉOPOLDVILLE .

Art. 16. Les lettres de voiture sont actuellement portées en «ompte aux clients à raison de fr. 0.15 pièce au lieu d'être mises gra- tuitement à leur disposition.

Chaque transport doit être accompagné d'une lettre de voiture éta- blie en double exemplaire.

Art. 21. Les frais de réception et de mise à bord des marchan- dises sont actuellement de fr. 1.10 par 100 kilogrammes ou fraction de 100 kilogrammes.

* *

Les tarifs de transport de la Compagnie du Chemin de fer du Congo, publiés aux Renseignements de l'Office Colonial de janvier, 4, sont provisoirement modifiés comme suit :

Tarifs de transports des marchandises.

1te classe : fr. 2.70 par tonne kilométrique.

Vins de 15° et plus, liqueurs, poudre et explosifs, parfumeries,

161

médicaments, drogueries, produits chimiques, instruments de musi- que, instruments scientifiques et de précision, appareils photogra phiques, horlogerie, cuivre, laiton, anneaux, croisettes, perles, eau- ries, tissus, couvertures (y compris les couvertures de couchage)*

De MAT ADI à (et inversement) par 10 kilogr. indivisibles

Kengé 1.08

Songololo 2.70

Kimpesé 4.29

Tumba 5.05

Thysville 6.24

In lu si 7.15

Madimba

7.72

Sona Bâta 8.15

Kasangulu 9.32

Kinshasa 10.53

Kinshasa boucle 10.56

Léopoldville 10.80

De Kinshasa boucle à Léopoldville et vice versa, fr. 0.30.

2e classe : 2 francs par tonne kilométrique.

Armes, munitions, lingeries, essuie-mains, chemises, vêtements, chaussures, effets personnels, parapluies, parasols, cannes, miroirs, mercerie, ceintures, tabacs, cigares, articles pour fumeurs, colis postaux, articles de pêche, équipements, buffleteries, billards, cibles, timbres-postes et marchandises non dénommées aux autres classes.

Par 10 kilogr. indivisibles de M AT ADI à (et inversement)

Kengé

Songololo

Kimpesé

Tumba

Thysville

0.80

2.00

5.18

3.74

4.62

înkisi

Madimba

Sona Bâta

Kasangulu

Kinshasa

5.28

5.72

6.04

6.90

7.80

Kinshasa boucle

Léopoldville

7.82

8.00

De Kinshasa boucle et vice versa, fr, 0.22.

3e classe. i franc par tonne kilométrique

Essence de térébenthine, couleurs, vernis, huiles et graisses indus- trielles, huile de lin, verres à vitre, linoleum, campement, émaillés, meubles, lits, literies, ustensiles de ménage, porcelaines, faïences, verreries, livres, goudron, pinceaux, brosses, déchets de coton, quin- caillerie, malles, couteaux, canifs, ciseaux, clous dorés, lampes, lan- ternes, photophores, balances et bascules, fournitures de bureau, four-

162

nitures d'école, allumettes, Lâches, monuments funéraires et cou- ronnes mortuaires, pétrole d'éclairage, ornements d'église, objets du culte, harnachements, cloches, machines à coudre.

Par 10 kilogrammes indivisibles de MATADI à (et inversement)

Kenge

Songololo Kimpese

0.40

1.00 1.59

Tumba

Thysville Inkisi Madimba

1.87

2.31 2.64 2.86

Sona Bâta

Kasangulu Kinshasa

3.02

3.45 3.90

Kinshasa boucle Léopoldville

5.91 4.00

De Kinshasa boucle

à Léopoldville et vice-versa, fr. 0.11.

4-e classe. Fr. 0.60 par tonne kilométrique. Huile de palme, coton, peaux, minerais, cire d'abeille.

Par 10 kilogrammes indivisibles de LÉOPOLDVILLE à (et inversement)

Kinshasa Kinshasa boucle Kasangulu

0.05 0.055 0.27

Sona Bâta Madimba

0.49 0.57

Inkisi Thysville Tumba Kimpesé

0.68 0.85 1.06 1.20

Songololo Kengé Matadi

1.50 1.80 2.00

6me classe : fr. 0.36 par tonne kilométrique.

Trains Renards, autos, pièces et accessoires, essence pour autos, pétrole pour moteur, sacs vides, fûts démontés, fûts en fer, embal- lages, fer, fonte, acier, dock flottant matériel agricole, matériel indus- triel, steamers et pièces de steamers, roues, graines, semences, plantes vivantes, engrais chimiques, matériel télégraphique et télé- phonique, outils, bougies, savons mous, machettes, cadenas, cor- dages, vivres, provisions, légumes secs, biscuits de mer, pommes de

163

terre, oignons, farines, sel, sucre, briquettes de charbon et charbon lavé en doubles sacs, viande, poisson salé et séché, grains, vins de moins de 15°, bière, eaux minérales, constructions et matériel de construction, tôles ondulées et faîlières, toitures, feutres, clous, vis, pointes de Paris, serrures et quincaillerie de construction, planches, chevrons, madriers, chaux, ciment, briques, carreaux céramiques, caoutchouc, noix palmistes, copal, cacao.

De MATADI à (et inversement) par 10 kilogrammes indivisibles.

K(jnge Songololo Kimpese Tumba

0.14 0.35 0.56 0.66

Thysville Inkisi Madimba

0.81 0.95 1.00

Sona Bâta Rasangulu Kinshasa

1.06 1.21 1.37

Kinshasa boucle Léopoldville

1.37 1.40

de Kinshasa boucle à Léopoldville et vice versa fr. 0.04.

6'"° : classe fr. 0.30 par tonne kilométrique.

Café, raphia, pentaclethra, bois, produits africains non spécifiés aux autres classes.

De OPOL VILLE à f et inversement) par lOkilogr. indivisibles.

Kinshasa Kinshasa boucle

Kasangulu

0.03 0.035

0.16

Sona Bâta Madimba

Inkisi

0.29 0.34

0.41

Thysville

Tumba Kimpese Songololo

Kenge

Matadi

0.51

0.64 0.72 0.90

1.08

1.20

7e classe fr. 0.20 par tonne kilométrique.

Arachides, maïs, riz, chickwangues, vivres indigènes, fruits indi- gènes, pommes de terre indigènes, cannes à sucre, nattes, sésame, koma, kola, ricin, bambou, rnadibas, agaves, sisal, carlasegna, piment.

164

De'LÉOPOLD VILLE à (et inversement) par 10 kilogrammes

indivisibles.

Kinshasa 0.002

Kinshasa boucle 0.02

Kasangulu 0.11

Sona Bâta 0.20

Madimba 0.22

lnkisi 0.27

Thysville 0.33

Tumba 0.42

Kimpese 0.48

Songololo 0.60

Kenge 0.72

Tarifs spéciaux.

Matadi 0.80

A. Or. Monnaies d'or, les métaux précieux, et l'ivoire. 5 francs par tonne kilométrique.

Par 10 kilogrammes indivisibles de LÉOPOLD VILLE à

(et inversement).

Kinshasa

0.50

Kinshasa boucle 0.55

Kasangulu 2.75

Sona Bafa 4.90

Madimba 5.70

lnkisi 6.80

Thysville 8.45

Tumba 10.65

Kimpese 12.05

Songololo 15.00

Kenge 18.00

Matadi 20.00

B. Monnaie d'argent. 1 franc par tonne kilométrique (voir tarif prévu pour la 3e classe).

C. Monnaie de cuivre, tarif prévu pour la 4e classe)

fr. O.oO par tonne kilométrique (voir

Ü.

Animaux. Sans changement.

E. Le tarif applicable au matériel et aux matériaux destinés aux chemins de fer du Congo supérieur est fixé à fr. 0.35 par tonne kilo- métrique, (Voir larif prévu pour la 5e classe.)

165

INFORMATIONS,

La Documentation coloniale.

Immédiatement après l'armistice, le Gouvernement britannique institua un Ministère de la Restauration. Celui-ci procéda à des enquêtes variées en vue d'une réorganisation rationnelle, plus conforme à un état de choses nouveau, de divers services publics. D'intéressants rapports furent publiés à cette occasion. Un des plus importants, puis- qu'il touche à la « machine gouvernementale » est au « Machinery of Government Committee ». Il vaudrait qu'on s'y arrêlât plus longue- ment. Nous ne sommes pas qualifiés pour entreprendre semblable étude et nous devons nous borner à signaler la place primordiale que les enquêteurs anglais voulaient voir accorder dans les départements, à « l'acquisition organisée des faits et informations ». Ils estimaient que, dans le passé, il n'avait pas été tenu compte suffisamment du tra- vail intellectuel systématique, préliminaire à l'établissement de toute politique et à l'exécution des mesures qui en découlent. Ils préconisaient la centralisation des documents de toute origine, intéressant les attri- butions ministérielles. Non seulement la Commission d'enquête sur la machine du Gouvernement visait-elle les rapports émanant des ser- vices administratifs, mais aussi les renseignements fournis par la Presse et autres sources.

On sait quels services rendirent à l'Allemagne ses nombreux orga- nismes chargés de recueillir les informations économiques du monde entier. Il suffit de rappeler qu'ils n'ont pas cessé d'exister et que même les principales publications coloniales allemandes continuent à paraître, pour souligner la ténacité avec laquelle l'Allemagne s'efforce d'être au courant de la situation mondiale.

Ce que nos alliés anglais appellent 1' « intelligence work » s'impose comme un rouage indispensable à la vie nationale, tributaire désormais d'une plus vaste atmosphère, du climat international, pourrait-on presque dire.

Il est indéniable l'intérêt que chaque administration d'un pays doit trouver dans les documents intérieurs et étrangers qui l'approvi- sionnent de nouvelles, de suggestions, d'études sur les objets de son ressort. A présent que les colonies préoccupent particulièrement les nations européennes (surtout nos voisines), le Gouvernement colonial.

166

au premier chef, veille à se documenter aussi complètement que possible sur tout ce qui concerne la colonisation. Les questions se rattachant à l'Afrique ne peuvent point lui échapper. Les grands pro- blèmes des transports, de la main-d'œuvre indigène, de l'exploitation agricole, de l'hygiène, du régime foncier ou fiscal, etc., donnent jour- nellement matière à des articles de revues ou de journaux... surtout étrangers. Il importe que les services intéressés en soient immédiate- ment avertis.

Sans doute, nos bibliothèques, certaines institutions particulières concentrent le plus d'informations possibles. Mais, pour les consulter, il faut se déplacer, établir une demande, procéder à des recherches. Faute de temps, on renonce à des formalités toujours trop longues malgré l'obligeance et la courtoisie avec lesquelles ces mesures néces- saires sont appliquées. Les informations sont donc absorbées par les rayons et les casiers, elles risquent fort de demeurer longtemps ignorées.

A cet égard, le système instauré par l'Office Colonial du Ministère des Colonies est, peut-être, un exemple à répandre.

Après dépouillement des publications qui lui parviennent, les cou- pures de presse jointes aux revues, sont envoyées dans chaque direc- tion. Celle-ci les consulte, tient note des articles qui lui paraissent utiles. Des fiches permettent, par la suite, de retrouver la documen- tation recueillie sur les multiples sujets coloniaux, spécialement d'or- dre économique.

Bref, il s'agit d'une véritable documentation « circulaire » qui, à période régulière, chaque quinzaine environ, est déposée à tour de rôle sur le bureau des fonctionnaires des divers services.

Du même coup les cloisons étanches qui, prétend-on, séparent le monde extérieur des rites administratifs sont renversées. Une sorte de courant documentaire afflue et reflue. En effet, les liasses, après la rentrée dans le service chargé de leur conservation, peuvent égale- ment être mises à la disposition du public. Les renseignements qu'elles contiennent peuvent être disséminés par nos quotidiens. La propagande coloniale ne réussit mieux qu'en montrant ce qui se fait ailleurs.

A cet égard, on commence à apprécier le rôle de la Presse. Depuis longtemps on a préconisé... en France, pensons-nous, la création d'hé- mérothèques, c'est-à-dire de bibliothèques de journaux. En vérité, c'est que mille faits précieux s'enregistrent pour l'histoire de la société. Dans les gazettes du jour, d'autre part, le commerçant, l'industriel, l'inventeur, l'ouvrier, le colon, trouvent des indications sur le dernier

167

état d'une question qui les intéresse; cours des marchés, inventions, lignes de navigation, méthodes commerciales, besoins, explora- tions, etc. Récemment encore, on annonçait (dans les journaux évi- demment) l'instauration au cabinet du secrétariat général de l'Algérie, d'un service chargé de recueillir toutes les informations de Presse concernant la situation commerciale, industrielle et économique du pays.

Les agences économiques des colonies, dont le Gouvernement fran- çait vient de définir de façon si claire, les attributions en créant à Paris, par un arrêté publié au Journal officiel le 10 avril dernier, l'Agence économique de l'Afrique Occidentale française, sont, d'ail- leurs, des centres actifs de documentation et de propagande. Ce sont aussi, grâce à leur organisation pratique, d'habiles agents de liaison entre l'administration coloniale et le public métropolitain.

L'Office colonial de notre Ministère des Colonies, par ses organes de documentation, de propagande et d'immigration, s'efforce constam- ment de se développer dans le même sens. Il faut souhaiter seule- ment que nos compatriotes, tournant davantage les regards du côté de notre riche colonie, prennent plus fréquemment contact avec l'Office colonial de la rue de Ruysbroeck. Une collaboration étroite entre tous les éléments du pays est un facteur indispensable au développement de nos ressources coloniales. Et notre domaine africain doit contribuer à la restauration, à la prospérité de la patrie. G.-D. P.

AVIS D'ADJUDICATION

Le 18 juin 1920, à 11 heures, dans les bureaux de la 9e direction du Ministère des Colonies, "20, rue de Namur, à Bruxelles. Adjudica- tion de l'entreprise de la fourniture de lits en fer avec sommier et porte-moustiquaire, crin pour matelas, tulle pour moustiquaire et toile à matelas.

Cahier des charges 719 du 17 mai 1920, à demander directement à l'administration (20, rue de Namur, Bruxelles).

Association pour ie Perfectionnement du Matériel Colonial

La Navigation sur le Haut-Congo

En 1902, la « Royal Geographical Society » à Londres, faisait paraître une carte du Haut-Congo, élaborée par le Révérend Georges Grenfell, d'après des levés faits principale- ment de 1884 a 1889.

Cette carte représente une somme de travaux qui ont été assez difficiles à effectuer, quand on prend en considération l'outillage modeste de l'explorateur et les difficultés des voyages sur le Haut-fleuve à l'époque de la première pénétra- tion dans le continent noir.

M. Grenfell a fait lui-même quelques observations astrono- miques, principalement pour la détermination de la latitude, et a appuyé son levé sur des points dont les coordonnées furent déterminées par les missions spéciales, qui ont parcouru le fleuve avant 1902 (Delporte et Gillis, Foa, Lemaire).

L'échelle de la carte au 1,250,000, la rend évidemment peu utilisable comme carte de navigation, et il y a, depuis l'achè- vement des levés, beaucoup de modifications dans la configura- tion des îles, et surtout des bancs qui doivent leur existence aux sables mobiles. Mais la carte est, somme toute, assez exacte et elle est d'une grande utilité comme reconnaissance générale ou premier croquis pour l'élaboration de la carte topographique et hydrographique du fleuve.

L'auteur donne comme longueur de la route de navigation, entre Léopoldville et Stanle3Tville, 980 milles oui 81 5 kilomètres. En tenant compte des centaines de petits détours, le trajet suivi dépasse probablement 1,900 kilomètres.

170

Les étapes de la navigation sur le Congo en amont de Léopoldville sont marquées par les types des- bateaux.

En 1881, on monte l'« En Avant », baleinière à vapeur, avec des roues à aubes, 12m. 90 de longueur totale sur 2m. 4 0 de largeur; tirant d'eau de 0.28 m ; machine de 6 PH ; et en 1883 1J« A. I. A. » (Association Internationale Africaine), de mêmes dimensions que le précédent, mais à hélice.

L' « A. I. A. » existe encore, quoique le matériel ait proba- blement, sauf quelques cornières, été renouvelé plusieurs fois.

Peu après la mise en marche de l'a A. I. A. », on construit le premier sternwheel a Stanley », de 30 tonnes environ 24 m. de longueur sur 4 m. 80 de largeur avec un pont supérieur à l'avant, ce qui caractérise le type de « Délivrance » actuel.

Un an après, en 1884, arrive le premieur bateau du type des « 35 tonnes », le a Ville de Bruxelles », sternwheel, de la même longueur que le a Stanley » mais un peu plus large.

Ce bateau était en bois (pitch-pin), peu pratique pour le Congo; ce fut d'ailleurs le seul sternwheel en bois construit par le Gouvernement.

Il existait trois modèles :

a) sans ponl supérieur, à hélice ou à roue, et jaugeant 6 à 10 tonnes ;

b) avec un pont à i 'avant , le type « Délivrance », jaugeant 18 à 22 tonnes ;

c) le '< 35 tonnes » à pont supérieur sur toute la longueur. On fit encore l'essai d'un petit bateau à roues latérales,

mais ce modèle fut abandonné.

Tous ces types, qui calent jusqu'à 1 mètre en charge, pou- vaient naturellement passer partout : mais les bateaux à pont supérieur avaient un grave défaut : la stabilité n'était pas suffisante. Ces vapeurs ne supportaient pas de virement brus- que, même à la montée la vitesse à l'heure est de 8 à 10 km. de moins qu'à la descente.

La première période s'étend jusqu'à la mise en exploitation du chemin de fer de Matadi à Léopoldville, en 1898.

Au cours de cette année fut lancé le 4e type de bateau, le « 150 tonnes », qui accuse en charge un tirant d'eau à l'avant de 1 m. 80.

On avait déjà fait faire, par quelques capitaines de steamer, un croquis du Haut-fleuve, servant de carte de navigation,

171

croquis fort bien fait pour reconnaître, à peu près, les chenaux à suivre, mais sans autre échelle que celle d'une o 1/2 heure par page à la montée ».

Comme on ne disposait d'aucun moyen d'évaluer les profondeurs en dehors du port même de Léopoldville, se trouve une échelle d'étiage, on ne pouvait pas, à cette époque, connaître le niveau sur les seuils du Haut- Fleuve à un mètre près.

Les bancs de sable de surface presque horizontale qui sur- gissent subitement par une dénivellation de quelques déci- mètres, donnèrent aux capitaines l'impression de la création spontanée de barrages dans les passes, et les migrations des bancs prirent ainsi, dans l'imagination, une amplitude fantas- tique.

Jusqu'en 1902, Bumba, en aval du confluent de l'Itimbiri, était le point terminus de la navigation sur le Haut-Fleuve.

En 1903, on montait jusqu'à E-omée (l'ancienne plantation), et à partir de 1904 on pousse la navigation régulière jusqu'à Stanley ville, non seulement avec les 150 tonnes, mais aussi avec le 5etype de bateau qui venait d'être créé^ le 500 tonnes, dont le « Kintambo » fut le premier construit pour le compte des chemins de fer des Grands Lacs.

Les inconvénients de l'absence d'échelles limnimétriques se montrèrent aux premières eaux basses. En 1905, on eut des avaries sérieuses dans la passe de l'île Bertin, et l'on fut obligé d'y installer un poste pour le pilotage des bateaux, entre la pointe aval de l'île et Stanleyville.

Ce furent surtout les grandes unités, les 500 tonnes, qui s'échouaient; les 150 tonnes, qui avaient à peu près le même tirant d'eau, passaient facilement parce que, avant d'arriver à l'île Bertin, ils déchargaient en route une partie considérable du cargo, destiné aux districts de l'Equateur, de l'Ubangi, des Bangala, et de l'Aruwimi. Toutefois, les sondages qui servaient de base pour le balisage, faits sans méthode à bord de pirogues, faisaient croire à l'existence d'un seuil continu sur toute la largeur de lapasse. Jusqu'en 1910, le pilote installé à l'île Bertin, prétendait avoir constaté la présence de ce seuil continu, barrant, aux eaux basses, la passe dans toute sa largeur. Aux eaux basses, les grands bateaux déchargaient, à l'île Bertin, parfois plus de la moitié de leur cargo et faisaient plusieurs voyages entre le poste de pilotage et Stanleyville.

172

Ces déchargements étaient fréquents aux eaux basses; pendant le voyage, on les faisait pour passer les seuils à Sandy-Beach, à Goinbe, à Coquilhatville, à Ukatulaka, à Lisala, à Buniba et à Isanghi.

On voit que la navigation sur le grand bief n'était qu'une série de tâtonnements. Les capitaines ne naviguaient pas d'après une carte dans une route balisée et reconnaissable. Ils devaient devenir experts en cette sorte de navigation flu- viale, qui consiste surtout à lire, à la surface de l'eau, la pré- sence de hauts fonds et de snags snag » orthographe adoptée pour les arbres morts, flottants ou ancrés par les racines ; probablement par corruption du mot anglais ce snake » : ser- pent).

Les postes de bois n'étaient pas encore organisés et les vapeurs devaient donc avoir à bord le personnel nécessaire pour couper aux arrêts, pendant la nuit, le bois utilisé comme combustible

Les quelques dépôts de bois ou « postes de bois » qui existaient le long du fleuve ne pouvaient pas fournir les quan- tités de bois nécessaires, et ils n'étaient pas situés de façon à en permettre le chargement pendant la nuit.

De 1907 à 1910, les conditions devinrent meilleures à tous les points de vue. Les postes de bois furent organisés, les roches les plus dangereuses furent marquées par des balises fixes ou flottantes au fur et à mesure qu'on les découvrait; un service de balisage fut également organisé, mais comme on y travaillait sans méthode, sans carte exacte et sans repères fixes, le balisage était plutôt primitif et vite déréglé.

Il est à remarquer que les conditions naturelles ne favo- risent point un balisage par bouées de la route sur le grand bief; les îlots d'herbes flottantes, parfois de dimensions énor- mes, arrachent tout simplement les balises, que celles-ci soient fixes ou flottantes.

Il y avait donc un travail très considérable à faire pour utiliser convenablement le réseau fluvial navigable du Congo, et sa mise en œuvre est due à M. Moulaert, l'énergique vice- gouverneur général du Congo, alors commissaire de district du Moyen Congo.

C'est en 1910 que le Gouvernement décida d'établir un balisage régulier du grand bief.

En attendant l'organisation définitive d'un service hydro-

173

graphique de la Colonie, on créa un service hydrographique pour le Haut- Congo, qui dut d'abord mettre sur carte et baliser les passes dangereuses hauts fonds rocheux) ou difficiles seuils sableux) à l'aide d'un personnel et d'un matériel trouvé sur place.

Le premier balisage fut basé sur des sondages insuffisants; fait exclusivement à l'aide de bouées, il fut vite désorganisé faute de surveillance effective.

On avait essayé d'appliquer au Congo les principes de bali- sage du Bas-Escaut sans tenir compte des conditions locales très spéciales ; ce n'est qu'en 1913 que les travaux et le balisage s'effectuèrent dans de meilleures conditions.

Le balisage d'une route de près de 2,000 km. ne s'improvise pas. Il ne consiste pas simplement à placer des bouées aux aspérités rocheuses ou aux bancs de sable, visibles aux eaux basses, mais de l'établissement préalable du nivellement du fond.

Les obstacles à la navigation ne sont pas seulement ceux qui émergent aux eaux basses, mais et surtout ! ceux qui sont invisibles à deux mètres de profondeur.

La topographie est la base de la carte hydrographique, qui nous donne le relief du fond. Sans un réseau de repères déter- minés topographiquement, on n'aura pas de nivellement hydro- graphique.

A la topographie s'ajoutent les éléments limnimétriques, hy ci roro étriqué s et géodésiques, qui entrent tous dans la cartographie .

M. H. Roussilhe, chef de la « Mission Hydrographique Congo-Oubanghi-Sanga », écrit dans son rapport (tome I, p. 27) :

« Le moment nous paraît venu d'exposer ici quelques idées souvent contestées, même par des marins de métier. La mise en place d'un balisage maritime ou fluvial, nécessite quelques conditions obligatoires :

» Le balisage fixant la position des dangers et des chenaux, impose à la navigation des routes intangibles. Il doit être par conséquent la suite logique d'études hydrographiques de haute précision et non pas les précéder

» 2> Si l'on se trouve dans des régions rocheuses, soit a ia mer, soit dans les biefs fluviaux, à fonds fixes, on pourra ins- taller un balisage de signaux fixes, soit sur les points dange-

174

reux, soit sur les routes, ou encore combiner les deux systèmes.

» Encore convient-il que les ouvrages dont l'emplacement est défini avec précision par les études préliminaires, puissent être construits, entretenus régulièrement et réédifiés, en cas de destruction, par les services locaux.

)j Une mission temporaire, quelle qu'elle soit, commettrait une faute grave en installant un balisage dont la surveillance n'est pas organisée, et en le portant sur des cartes destinées aux marins qui conrpteront aveuglément dans l'avenir sur les renseignements qu'elles donnent.

» Elle commettrait une seconde faute grave en mettant ces cartes en circulation, si elle n'est pas sûre qu'un organe spécial les corrigera et les tiendra à jour.

» Ce sont des questions qui dépendent de l'organisation administrative de la Colonie et aussi, bien entendu, de ses ressources financières.

» Dans le cas de rivières à fonds mobiles, un balisage par bouées semble préférable. Il est alors nécessaire, non seulement de relever fréquemment les bouées, mais encore de suivre méthodiquement la variation des bancs et des chenaux.

» Ce n'est plus seulement l'entretien du matériel, c'est la périodicité des études hydrographiques elles-mêmes qui devient nécessaire.

» Il faut en conclure que la création d'un organe permanent d'études, de surveillance, d'entretien et de manœuvres s'im- pose. »

Il est inutile de discuter ces principes fondamentaux si nettement précisés ; il ne s'agit que de leur application sur le- grand bief du Congo.

Xous examinerons rapidement la physionomie des contrées traversées par le haut fleuve entre Stanleyvilleet Léopoldville.

A Stanley ville, la largeur du fleuve est entre le bastion et le quai du chemin de fer de 650 mètres; un kilomètre plus en aval, sa largeur minimum est de 460 mètres.

La région est nettement rocheuse. Les rives, les roches percent un peu partout, sont formées d'un sol argileux, rous- sâtre à cause des éléments ferrugineux si répandus dans le bassin du Congo.

Sur quelques cinquante kilomètres, le fond du lit est un plateau avec des crevasses, au milieu desquelles s'élèvent les

175

crêtes et les pointes des « macarons », tantôt avec un faîte en « lame de couteau », tantôt avec des poiutes effilées en « aiguille •> et dont la surface est trop petite pour être décou- verte par des sondages ordinaires.

En amont du confluent de la Lindi, le fleuve s'élargit mais est divisé par l'île Bertin (appelée parfois a île Eertlia ») en deux bras dont celui du sud est encore barré par un seuil ou un plateau sans crevasse sur une longueur de quelques kilo- mètres. La profondeur à l'étiage n'est que de 1 mètre, ce chenal n'est donc pas praticable aux eaux basses.

Dans le chenal du nord, le seuil qui passe sous l'île Bertin, présente deux fentes, ou crevasses longitudinales, dont l'une très sinueuse et étroite vers la rive droite, l'autre, d'un fond très désordonné, provenant probablement d'un éboulement, avec une multitude de blocs de pierre jetés en chaos, et des macarons dont la base est le massif. La profondeur minimum est ici de lni.70 à 1 étiage (1913), et la sinuosité est moins prononcée que dans l'autre passe vers la rive droite.

Les deux passes sont séparées par un banc dont quelques aspérités émergent aux eaux basses ; les échantillons que nous avons examinés sont d'une composition schisteuse, pas très dure, qui se laisse facilement broyer à coups de masse.

î^ous n'avons toutefois pas eu l'occasion de constater si cette formation est réellement celle du massif ou seulement une couche sur roc dur.

Entre Stanley ville et l'île Bertin, nous avons trouvé , pour le courant, la vitesse maximum de tout le bief : 9.8 km. à l'heure aux eaux hautes. La moyenne de la vitesse entre l'île Bertin et Léopoldville n'atteint pas 5 kilomètres.

Les dénivellations sont parfois très brusques et assez consi- dérables dans la section StanleyvilJe-Bomée. En 1912, nous avons ainsi observé des différences journalières allant jusqu'à 80 centimètres, mais comme elles se présentent principale- ment aux hautes eaux, elles n'ont pas gêné la navigation.

Le sable emporté par le courant se Repose à la sortie de la passe Belgica. Le courant reste assez fort pour maintenir la route ouverte, mais pas assez pour entraîner le sable jusqu'à l'épanouissement du fleuve en aval de l'île Bertin. Cette cir- constance fait que les profondeurs restent assez stables.

Entre Komée et Isanghi, les rives sont hautes ; le sous- sol rocheux se montre par ci par sous l'argile, mais pas dans le fleuve.

176

Le Lomani rejoiut le Congo à Isanghi, dont il contourne le massif. Les formations sont toujours les mêmes, mais en aval du confluent, une pointe rocheuse se lance à quelques centaines de mètres dans le fleuve avec des aspérités dangereuses aux eaux basses.

Les rives deviennent maintenant plus basses, surtout sur la rive droite mais elles se relèvent de 10 à 30 mètres en amont de Barumbo en face du confluent de l'Aruwimi.

L'Aruwimi contourne le massif de Basoko qui n'est pas très élevé. Ici, comme aux embouchures des affluents de quelque importance, se trouve des massifs rocheux, ce qui est naturel parce que ce sont ces massifs qui ont obligé les rivières à former leur lit définitif.

Entre l'Aruwimi et Tltimbiri, dont le confluent principal se trouve contre le massif de Yambinga, les rives sont en grande partie inondées aux eaux moyennes. Il y a quelques bandes de terre et quelques monticules habitables; mais à l'intérieur on trouve des terrains bas et marécageux.

Les endroits perce l'argile se reconnaissent par la pré- sence de grandes termitières qui entourent parfois des arbres gigantesques, tandis que dans le terrain l'argile se trouve sous le sable ou la vase, les termitières sont de couleur foncée et en forme de champignons d'un demi-mètre de hauteur. Si les termitières se construisent sur les arbres, comme dans les lies et sur les rives basses, on est presque toujours en pré- sence de terres inondées aux eaux hautes.

En aval deYarnbinga, se remarque le massif de Bumba, avec des formations rocheuses assez rares et un hinterland bas, tan- tôt formé de bandes sablonneuses qui font penser à d'anciens cours d'eau comblés de sable et tantôt de marécages comme les rives basses du fleuve.

En face de Bumba, la rive est très basse et boisée.

Entre Bumba et le confluent de laLulonga, s'étend la grande forêt, terre basse et marécageuse, d'un sous-sol d'argile imper- méable. Au milieu des marécages se dressent quelques massifs rocheux, notamment celui de Lisala qui émerge sur une ving- taine de kilomètres à la rive droite et forme un seuil qui traverse le fleuve dans la direction S.-W. vers Gundji et Liringï.

Ce passage est le plus difficile du grand bief, moins par les aspérités rocheuses, qui sont connues, quand elles ne

177

sont pas cachées sous une couche de sable, que par l'insta- bilité des fonds mobiles

Devant Urnangi, les roches forment aux eaux basses de véritables rapides, nous avons trouvé une formation de grès très dur, tandis qu'à la rive gauche, à Gundji, les roches visi- bles forment un aggloméré de sable ferrugineux et de silex, etc.

Un deuxième îlot dans cette grande plaine est celui de Nou- velle-Anvers, tout entouré de marais qui s'étendent du con- fluent de la Mongala à l'embouchure de l'TJbangi II y même une communication directe aux eaux hautes, entre la Giri, affluent de l'TJbangi, et le Congo.

La Lulonga contourne le massif de Monkero, et en face de l'ancien poste, la rivière se jette dans le fieuve, dont un bras (le chenal de Lulonga), était autrefois utilisé à la montée par les petits vapeurs.

Entre la Lulonga et Coquilhatville, situé au confluent de la Tluki, les rives sont basses sur presque tout le parcours.

Le massif de Coquilhatville est assez élevé et s'étend pour ainsi dire sans discontinuité jusqu'à Inkenge sur la rive gauche. La rive droite est plutôt basse.

La fleuve s'élargit et atteint, près d Irebu, le maximum de sa largeur soit plus de 15 kilomètres.

Ici, la rive droite, partiellement formée par les marécages en amont et en aval de l'embouchure de l'Ungangi, ne prend une forme visible que dans le massif de Liranga. Ce massif rocheux forme un seuil à travers le fleuve, mais n'y présente que quelques hauts fonds isolés (les pierres de Gombe).

Entre Liranga- Gombe et Lukolela, le fleuve s'élargit en un vaste pool à rives partiellement élevées ; le sous-sol rocheux perce partout sur la rive gauche, mais les roches ne s'élèvent pas à une hauteur considérable avant la région de Sandy- Beach.

A Lukolela, les rives se rapprochent et forment une gorge de 1,500 m. de largeur, pour s'ouvrir subitement en un épa- nouissement de plus de 10 kilomètres.

La rive droite est ici remplacée par un grand marais qui s'étend entre les rivières Likouala et Alima dont les cours, aux eaux hautes, forment, avec le lac Likuba, une immense nappe d'eau.

En descendant le fleuve, on aperçoit lès parties élevées de l'intérieur A la rive gauche, le plateau de Yumbi forme la

178

hauteur extrême d'une bande de terre, argileuse à sous-sol ro- cheux, communiquant avec les Monts Cristal, dont les crêtes secondaires se dressent à Sandy-Beach.

Sur la rive droite se présentent des monticules isolés, puis des montagnes, qui, par le resserrement des rives, se rap- prochent de celles de la rive gauche, à quelques kilomètres- en amont de Tchumbiri.

Le fleuve, en entrant dans le « Chenal » (ou le« Couloir»), large crevasse dans la partie orientale des Monts Cristal, reçoit, à 40 kilomètres plus en aval, son plus grand affluent : le Kasaï, large de 400 mètres.

Au printemps, lorsque les eaux sont basses ou de niveau moyen dans le Congo, mais hautes dans le Kasaï, le courant de ce dernier est très violent près de son confluent à la hauteur du pylône et sa vitesse y atteint 14 à 15 kilomètres à l'heure.

La crevase formant le lit du fleuve à travers la première- chaîne des Monts Cristal, est large de 1,5 à 3 kilomètres et la profondeur du fleuve y est de 30 mètres Son cours n'est pas très irrégulier, mais les prolongements des montagnes dans le fleuve, rendent la navigation toujours dangereuse le long- des rives.

Aux endroits la crevasse est large, on trouve au milieu du fleuve des bancs de roches, dont quelques-uns forment des îles boisées, tandis que d'autres émergent à peine aux eaux basses. Comme la passe est assez large et les bancs connus, ceux-ci ne constituent pas un danger pour la navigation.

Les rives se dressent en pentes plus ou moins raides, par- fois en falaises à des hauteurs considérables jusqu'à 200 mètres boisées jusqu'au sommet, surtout sur la rive droite, rive française.

En aval de Maluku, les deux rives se séparent et forment une couronne de 35 à 40 kilomètres de diamètre, renfermant le Stanley-Pool.

A la sortie du Chenal, les eaux se heurtent contre de haut* fonds qui divisent le courant en deux parties, l'une côtoie la rive française et l'autre la rive belge.

Le sable pris entre ces deux courants et sans doute arrêté par les hauts fonds dont la présence dans l'île Bamu est carac- térisée par une végétation vigoureuse a très probablement créé toute la partie en amont de Bamu, avec ses criques et ses. bancs secondaires.

179

La rive française, rongée par les eaux, a l'aspect des « Fa- laises de Douvres », dont elle porte le nom.

Le sable blanc, provenant des éboulements, a été déposé le long de la rive droite, notamment dans le « banc desMimosas » et contre l'île Banni.

A la rive gauche rive belge se trouve une vaste plaine basse, celle de Zèlé-Dolo, dont la partie supérieure, couverte de sable jaune, provient des apports du fleuve et peut-être de la rivière Zélé, tandis que la partie en aval, à Dolo, formée de sable blanc de la région de Stanley-Pool, doit être due à des apports provenant de la région entre Pic Mense et Kiinuenza.

A la hauteur de Dolo-Kinshasa, un seuil rocheux traverse le fleuve et passe sous la forêt de Bamu pour rejoindre la rive droite vers M 'Pila.

Ce seuil présente deux fentes assez profondes, l'une dans la passe belge, l'autre dans la passe française.

Les formations de cette partie du Stanley-Pool font sup- poser que la rive fut jadis dans la ligne des îles rocheuses devant « Citas » et vers la pointe de Câlina et que les eaux guidées par le seuil élevé de la pointe Bamu et le banc du milieu, dont les « Hoches des Hirondelles » forment mainte- nantie seul point émergeant des eaux hautes, se sont frayé une route à l'intérieur des roches de la rive gauche, et créé ainsi la passe intérieure de Kinshassa, entre Citas et Câlina.

ÎSTous décrirons plus tard les travaux effectués dans cette passe, qui, depuis quelques années, se caractérise par des changements rapides des fonds mobiles.

A la pointe de Câlina, le fleuve se rétrécit et coule sur une longueur de deux kilomètres environ dans un lit profond assez régulier de 1,200 à 1,500 mètres de largeur.

Entre Citas et Câlina, se trouvent des crêtes rocheuses qui ont probablement formé une partie de l'ancienne rive.

A 2 kilomètres en amont du premier barrage des chutes de Livingstone appelées aujourd'hui les rapides de Léopoldville, la rive gauche se retire et forme une anse creusée par le courant qui à la hauteur de l'épanouissement, est dirigé, aux eaux basses, vers la rive gauche par le grand banc rocheux du milieu du fleuve ; ce courant est lui-même divisé en deux par quelques roches à l'entrée de l'anse, un courant suit la rive, et l'autre est rejeté par le banc de la balise dans la direction de la pointe en aval de Léopoldville.

180

Cette pointe (devant l'hôpital des noirs) qui se lance à quelques centaines de mètres dans la direction vers l'amont, y produit, notamment aux eaux basses, un contre-courant, très sensible le long de la rive de Léopoldville, sur une longueur de plus d un kilomètre.

C'est le grand bief du Congo, qu'il faut baliser.

* *

Les difficultés de la navigation sur le Haut-Fleuve ont sou- vent été l'objet de vives critiques.

Si la navigation est difficile, c'est dû, dit-on, au mauvais balisage. Car comment expliquer que le fleuve Congo qui se trouve à peu près dans les mêmes conditions que le fleuve Amazone, soit moins navigable que celui-ci'?

A première vue, surtout quand on n'a pas devant soi, à la même échelle, les cartes des deux fleuves, il y a une certaine analogie entre eux : ils ont à peu près la même latitude, la même longueur; tous deux ont un bassin très étendu dont celui du Congo semble encore plus favorable que celui de l'Amazone.

Mais si l'on étudie les conditions hydrographiques des deux fleuves et l'orographie des deux bassins, on y trouve précisé- ment la différence qui fait que les profondeurs sur le Haut- Congo ne donnent accès qu'à des bateaux de 1,7 mètres de tirant d'eau, tandis que dans l'Amazone des vapeurs de 3,000 tonnes montent jusqu'à 3,000 kilomètres de l'embouchure.

Le débit n'est d'ailleurs pas le même, puisque le bassin de l'Amazone a plus de 7,000,000 kilomètres carrés, tandis que celui du Congo n'a que 3,700,000 kilomètres carrés.

Une comparaison entre les deux grands biefs au Congo entre Stanley ville et Léopoldville, à l'Amazone entre San Paulos et l'embouchure du fleuve nous montre que le pre- mier a environ 2,000 kilomètres et le dernier 3,000.

Les affluents du Congo sont peu nombreux : la Lindi, l'Aruwimi, l'Itimbiri, la Mongola, l'Ubangi, la Sanga et l'Alima sur la rive droite, et le Lomami, la Lulonga, la Ruki et le Kasaï sur la rive gauche.

Il est facile de se rendre compte que tous les affluents de la rive gauche, loin d'alimenter régulièrement le fleuve sur

181

son cours supérieur, le privent au contraire d'un apport auquel il aurait schématiquement droit.

Le bassin du Lomami est formé d'une longue bande de terre qui, sur 700 kilomètres, suit le fleuve parallèlement, et qui di- minue sur toute cette longueur, le bassin direct du fleuve de cet apport.

La Lulonga est à son cours supérieur la Lopori à une distance de 60-80 kilomètres du fleuve, qu'elle suit parallèle- ment sur 800 kilomètres en privant sur cette distance le grand bief de tout apport, excepté celui d'une bande de terres basses de 30 à 40 kilomètres de largeur, terrain qui, aux eaux basses, absorbe plutôt que d'alimenter.

Le Kasaï-Sankuru, navigable jusqu'à Pania, est ici à 120 kilomètres de la Lomami et à 260 kilomètres seulement de Nyangwe sur le Congo supérieur; mais il ne se réunit au fleuve qu'à 2,600 kilomètres en aval de Nyangwe, en absorbant encore sur son cours inférieur tout le bassin du lac Léopold II, qui est pourtant plus près du fleuve que du Kasaï.

Le grand bief n'est donc point nourri régulièrement sur toute la partie en amont de Coquilhatville par le bassin de la rive gauche.

Sur la rive droite, nous avons, heureusement, la Lindi, l'Aruwimi, l'Itimbiri et la Mongala pour contrebalancer la diminution d'apports du Lualaba et du Lomami.

Mais on voit que même ces affluents n'ont pas leurs bassins schématiques. Une grande partie en est dérobée par l'Ubangi, dont le bassin commence, à hauteur de Stanleyville, à 250 kilo- mètres du Congo, tandis que l'embouchure est à 1,200 kilo- mètres en aval.

Si nous écartons les deux bassins du Kasaï et de l'Ubangi, il ne nous reste comme bassin du grand bief en amont de Coquil- hatville qu'une petite partie du bassin total du fleuve.

Si nous écartons encore le bassin de la Lulonga, nous voyons que sur 800 kilomètres environ, il n'y a, pendant la saison des pluies dans la zone méridionale, aucune alimentation du débit, qui est donc sensiblement le même à Lulanga qu'à Isangi.

Ajoutons à cela le relief défavorable du lit : fond de plaine raviné au hasard, formant aux eaux basses une multi- tude de chenaux secondaires et inutiles.

Toute la configuration hydrographique du Haut-Fleuve, non

182

seulement du bassin, mais du lit même, a pour effet de disperser les forces hydrauliques par un grand nombre de cours d'eaux parallèles, au lieu de les rassembler dans un cours unique qui pouvait se creuser un lit profond.

Au point de vue navigabilité, c'est presque la moitié du bassin total du Congo qui est inefficace parce que les eaux ne rejoignent le fleuve que près du terme aval du bief, ne sont plus nécessaires ces grands apports.

Le cours supérieur de l'Amazone a déjà, avant de sortir des Cordilleras de los Andes, une longueur de plus de 2,000 kilo- mètres.

Xous avons vu que le grand bief du Congo ne compte que dix affluents de quelque importance, et il n'a au total que vingt affluents, même en tenant compte de tous les petits cours d'eau, tels que Zélé, Luffini, Bali, Black-River, Pama-Lukuala, Lac Tumba et Ikelemba.

Or, entre Iquitos et l'embouchure, l'Amazone compte, sur 3,000 kilomètres environ, plus de 200 affluents, dont la plupart sur son cours supérieur.

Si l'on écarte de ce fleuve la partie qui court entre les chaînes parallèles des Andes, en amont d'Iquitos, on aura le grand bief de l'Amazone, bief navigable d'une configuration hydrographique presque idéale.

Les affluents viennent alternativement du sud et du nord, et sur les premiers 1,500 kilomètres se trouvent les affluents les plus importants, les Rio Xégro et Rio Madeira, qui ont, chacun, un débit supérieur à celui du Congo à Stanleyville. Le premier a, comme le Congo, des épanouissements, des « pools de plus de 35 kilomètres de largeur, servant de réservoirs-régulateurs naturels ; le Rio Madeira a une longueur de 4,000 kilomètres environ, mais n'est que peu navigable à cause des chutes et des rapides qui barrent la plupart du parcours.

Le confluent du Rio Xégro est à 1,800 kilomètres de 1 embouchure de l'Amazone, et la profondeur de la route de navigation, sur cette partie du fleuve, varie entre 30 et 100 mètres, dont il faut déduire 16 mètres pour amplitude maréographique. On voit que l'Amazone est une voie navi- gable donnée généreusement par la nature.

Au Congo, on trouve une amplitude maréographique qui varie, pour le grand bief, entre 3 et 6 mètres d'après les sec- tions du fleuve.

183 .

S'il avait une marée semblable à celle de l'Amazone, il n'y aurait plus, au Congo, une seule voie navigable; on n'aurait que quelques chutes ou d'immenses inondations.

A Manaos, ville de 60,000 habitants, située au confluent du Rio Négro, la marée atteint encore 12 mètres, mais les profondeurs permettent le passage, en toute saison, de bateaux de haute mer. Des unités de 3,000 tonnes montent régulière- ment à San Paulos, à 3,000 kilomètres de l'embouchure.

La vitesse moyenne du courant atteint 6.6 kilomètres à l'heure, supérieure à celle du grand bief du Congo, qui n'atteint pas 5 kilomètres.

11 faut reconnaître qu'on ne peut pas comparer ces deux fleuves, leurs conditions de navigabilité étant trop différentes. Nous devons nous contenter du fait brutal, que non seule- ment le grand bief du Congo ne communique pas directement avec la mer, mais que les profondeurs sur les seuils limitent le tirant d'eau des embarcations utiles à 1 m. 50.

Cela n'implique pas que les unités calant 2 mètres ou même 2 m. 20, ne pourront être utilisées; seulement, il faut les charger, à l'époque des eaux basses, de façon à pouvoir les décharger de leur trop plein avant d'arriver aux seuils, en amont de Coquilhatville.

La profondeur minimum de 1 m. 50, semble peut-être médiocre pour un fleuve comme le Congo.

La navigation, les transports fluviaux souffrent, pense-t-on, de toutes ces restrictions : faible profondeur, route irrégulière >et changeante, exclusion d'une navigation nocturne, passes étroites et rocheuses, etc.

Mais les conditions locales sont-elles vraiment si mauvaises comparées à celles auxquelles sont soumises les plus impor- tantes voies fluviales d'Europe, d'Amérique et d'Asie?

Sur le Rhin, on a amélioré le bief, à 12 kil. en amont de Strasbourg et jusqu'à Mannheim - au total 144 kil. par des dragages et par la construction d'épis et de digues longitu- dinales, afin d'obtenir un minimum de 2 mètres de profondeur. Il y a sur ce bief des passes rocheuses qui rappellent bien celles du Haut-Congo et du Kasaï. Ce travail a coûté 17 millions.

Deux mètres de profondeur pour avoir des chalands jusqu'à 1,500 tonnes et avec un mouvement qui, pour le port de Mann-

184

heini et son annexe à Rheinau, atteignait, en 1913, près de 2 millions de tonnes.

A Baie le Stanley ville du Rhin le port est outillé pour la manutention de 5,000 tonnes par jour.

Sur le Haut-Congo, le transport principal se fait encore au moyen de sternwlieel, transport extrêmement onéreux, non seulement à cause du cargo relativement restreint par rapport au poids mort du bateau en charge, mais aussi à cause des difficultés de chargement et du double transbordement, qui pourrait être évité en chargeant directement à bord de cha- lands, notamment pour le cargo en vrac.

Sur le Rhône, on a travaillé depuis 1878 à l'amélioration du bief navigable, très sinueux, très étroit ayant un courant qui atteint une vitesse de 14.4 kilomètres à l'heure.

Les dépenses ont été de 45 millions, et les travaux ont été couronnés de succès : actuellement (en 1913), à l'étiage, la largeur minimum est encore de 50 mètres, et le tirant d'eau au. seuil le plus élevé est de lm.35.

Donc, dans une région la topographie et l'hydrographie avaient déjà été faites minutieusement, l'on possède depuis l'époque de Bourdaloue un nivellement géométrique extrême- ment exact, tout était préparé pour entamer les travaux techniques, et l'on pouvait s'outiller comme on voulait, on a travaillé pendant près de trente ans et dépensé 45 mil- lions pour améliorer un bief de 250 à 300 kilomètres de longueur.

Et l'on considère comme un succès le fait d'avoir obtenu par dérochement, par dragages et par correction du cours d'eau, la profondeur minimum de un mètre et trente-cinq cen- timètres.

Nous citerons encore ce passage de l'ouvrage de l'ingénieur en chef Armand sur la navigabilité du Rhône :

« En 1911, on a eu :

355 jours avec une profondeur de 1 m. 30;

341 1 m. 40;

318 1 m. 70;

291 1 m. 80;

265 2 m, 00.

» Si ce n'était la vitesse excessive du courant, ces conditions

185

mettraient le Rhône an premier rang, des fleuves navigables de l'Europe ».

La vitesse excessive est celle de 14.4 kilomètres à l'heure sur une section de 350 mètres environ et jusqu'à 12 kilomètres à l'heure sur quelques parties du Rhône entre Tournon et Pont-St-Esprit.

A Avignon, le passage est très resserré, et le courant est de 10 kilomètres à l'heure.

Au Congo, entre les chutes de Stanley et les lapides de Léopoldville, sur un bief d'environ 2,000 kilomètres de lon- gueur qui n'a été corrigé ni dragué, on a une profondeur mini- mum de 1 m. 70.

Sur un seul passage, la largeur est un peu inférieure à 50 mètres, mais la vitesse n'y dépasse pas 7 kilomètres à l'heure.

Et pourtant, on désespère parce que quelques bateaux calant plus de 1 m. 70 ne peuvent, jour et nuit, naviguer pendant toute l'année.

Ecartons en quelques mots la question d'une navigation nocturne régulière.

Cette navigation exigerait, en effet, un balisage à lumières.

L'emploi de bouées lumineuses doit être exclu, non seule- ment à cause des dépenses, mais aussi parce qu'un balisage fait exclusivement à l'aide de bouées, est pratiquement impossible sur le Haut-Fleuve.

Parmi les balisages à lumières fixes, on cite celui des sec- teurs dans le Limfjorden,au Danemark, dont le cours avec ses bancs de sable, ses hauts fonds rocheux et ses rives partielle- mentinondées ressemble assezbien à quelques-unes des sections du Haut-Congo. Mais comme ce système de balisage exige une grande visibilité vers l'intérieur des deux rives, il est exclu à priori en dehors des ports et de quelques parties les rives sont élevées sans être montagneuses.

Un autre système est utilisé sur le Missisipi, celui des feux de direction.

Sur le grand fleuve américain, on a un balisage mixte : bouées, feux et repères day-marks »), dont les principes sont très simples.

Le fleuve forme deux des « lighthouse-districts » des Etats- Unis (le Missouri forme un troisième district). Le 13e district

186

comprend le Haut-Mi ssissipi jusqu'à Saint-Louis et le 15e le Bas- Mississipi jusqu'à New- Orléans.

Dans le premier de ces districts il y a, sur une route de 1,200 kilomètres, un total de 680 balises : bouées, feux et repères.

Dans le 15e district, il y a, sur une longueur de 2,300 kilo- mètres, environ 600 feux. Ce sont des lanternes à pétrole, installées sur des constructions en bois avec des voyants qui forment en même temps des repères pour la navigation diurne.

La surveillance des lanternes est confiée aux habitants du pays qui reçoivent une rémunération de 6 à 12 dollars par mois et par feu, ou en moyenne de 100 dollars par an et par feu.

Le service hydrographique du district a son siège à Saint- Louis. Un vapeur est affecté aux travaux hydrographiques et à la surveillance des feux.

L'installation complète d'un feu coûte 125 dollars, ce qui fait pour les 600 feux la somme de 75,000 dollars, ou 375,000 francs.

L'entretien du balisage coûte par an, en comptant seule- ment un renouvellement de 35 phares (6 p. c.\ un total de 456,000 francs.

Au Congo, on ne pourrait pas, niême si on le voulait, faire une installation pareille. Il suffit de comparer la navigation sur le Mississipi avec celle du Haut-Congo pour voir l'impos- sibilité d'un balisage du grand bief à l'aide de phares de cette nature.

De plus, le Mississipi n'est pas un pays sauvage. Ces rives sont habitées ; l'industrie et l'agriculture occupent des millions d'habitants, et le tonnage total des vapeurs et chalands se chiffre également par des millions.

La carte topographique du fleuve existait avant qu'on fit les travaux hydrographiques, du moins pour la plus grande partie.

Au Congo, on aurait besoin de milliers de feux entretenus par des noirs, pour lesquels on ne trouverait pas toujours sur le fleuve des endroits habitables à 20 ou 30 kilomètres de dis- tance des feux.

D'ailleurs, la carte est encore à faire, ce qui représente un travail énorme.

Enfin, et c'est le point principal les bateaux qui

187

naviguent sur le grand bief n'ont pas un tonnage équivalant à celui de quatre à cinq grandes unités qui naviguent sur le Mississipi.

Laissons donc de côté la question d'un balisage pour la navigation nocturne.

On pourra faciliter l'accès de certains ports, après le coucher du soleil, par des feux spéciaux déjà installés à Léopoldville ou par des voyants aux couleurs phosphorescentes.

M. WlLLEMÖES d'ObRY. Hydrographe en chef du Congo belge.

Bibliographie

LES LIVRES.

L. P

YlGNON. Un programme de politique coloniale : les questions indigènes 'aris, Pion Nourrit, 1919, 8°, 15 francs.

Ce volume représente un essai d'ethnographie pratique, c'est-à dire un essai d'adaptation des données de l'ethnologie aux problèmes politiques. M. Vignon présente lui-même son ouvrage aux lecteurs de la Revue heb- domadaire du 20 mars 1920 (p. 357 et suiv.). En analysant brièvement l'esquisse qu'il en donne, nous exposerons le contenu de cet ouvrage, qui a été remarqué, car on en trouve un compte rendu détaillé dans le Corres- jondant du 10 mars, sous la signature de M. Pierre Kharat, collaborateur colonial de la Revue des Deux-Mondes. Tout le monde sait, dit M. Vignon. que trois races vivent sur la terre : Blancs, Noirs et Jaunes; que les Blancs forment deux rameaux principaux : les Argens et les Sémites; que derrière ces premiers groupes, il est des sous-races et des peuples, avec leurs caractères propres; encore, et ceci est essentiel, que le milieu phy sico-chimique a, sur les hommes, une influence considérable; qu'ils s'adaptent à ce milieu, sont façonnés par lui. Pendant la guerre, les Fran- çais ont pu apprécier des notables différences de caractère, de mentalité, de « psychologie », existant entre eux et les Anglais, les Américains, les Italiens. Si des différences se manifestent entre Blancs occidentaux, -appartenant à la même religion chrétienne, unis dans la même œuvre, quelles différences, incompatibilités, oppositions ne sont pas à prévoir entre Blancs chrétiens et Noirs féticheurs ou Arabo-berbères musulmans, ou Jaunes boudhistes-confucianistes, mis en présence les uns des autres par une guerre de conquête ?

M. Vignon s'affirme par polygéniste et adversaire de l'unité de lespèce. « On ne saurait en douter, écrit-il (p. 361 j; il n'y a pas une race; ii y en a plusieurs ; il n'y a pas une humanité ; il y a des humanités.

Plus loin, il raille M. Lutaud, gouverneur général de l'Algérie, qui, dans les débats de la Chambre en 1913-14, expose qu'il « est de ceux qui ont une confiance profonde dans l'unité de la race humaine ». C'est une opinion cela, dit M. Vignon, et en contradiction absolue avec les faits. llaces et peuples sont irréductibles, écrit-il ailleurs (p. 396); une nation politiquement abolie ne meurt point.

Nous regrettons de devoir contester les affirmations que M. Vignon émet avec tant d'assurance. Le débat entre polygénistes et monogéuistes qui faisait rage, il y a un quart de siècle, s'est terminé décidémen en

190

faveur des seconds. Avec l'éniiiient De Quatrefages, nous pouvons décla- rer, d'accord avec la science, - qu'il n'y a qu'une seule espèce d'hommes ». Le gouverneur Lutaud a raison dans cette question de principe. Au sur- plus, il nous semble, en lisant l'introduction de M. Vignon, que sa docu- mentation scientifique retardait quelque peu. Il fait de l'ethnographie pratique, mais la théorie paraît lui faire défaut. Si vraiment il n'existait que des races et des groupes ethniques irréductibles entre eux, nous ne pourrions expliquer l 'éclosion d'une haute civilisation, car c'est précisé- ment le contact des peuples qui a contribué aux progrès de la culture humaine Si la race blanche a conquis une supériorité évidente sur les autres races, ce n'est pas à des qualités intrinsèques, immanentes, qu'elle le doit, mais bien à ses contacts nombreux avec des groupements eth- niques différents. Admettre la doctrine de M. Yignon. c'est du même coup admettre les extravagances pangermanistes sur l'irréductibilité des races et des nationalités. Cependant, on peut excuser l'ardeur légère- ment outrancière de M. Yignon. Il s'adresse à ses compatriotes français qui saisissent aisément et vite, dans l'objet de l'individu considéré, un trait général, un caractère commun. Le Français crée volontiers 1' a homme en soi ». Et puis, il est héritier des Romains assimilateurs. Et il pratique volontiers l'assimilation en matière coloniale.

M. Yignon donne des exemples plaisants de cette tendance invétérée à la recherche du général et de l'absolu, comme cette loi toute récente l'on donne à des indigènes africains le droit de vote afin de « témoigner à nos sujets que nous leur savions gré de s'être battus à nos côtés pendant la guerre » (p. 372). Or, ce droit de vote, les indigènes ne le réclamaient point, ils ne savent pas s'en servir et. ce qui est pire. « il peut, dans quel- ques années, sous l'impulsion des meneurs, dresser indigènes contre colons » p. 373).

Inutile de dire qu'entre les trois formes de politique, les deux extrêmes, le refoulement et l'assimilation, sont rejetées par M. Yignon. Il préconise le protectorat à la manière anglaise qui consiste à conduire les popula- tions par l'intermédiaire de leurs chefs naturels, sans les troubler dans leurs croyances, habitudes familiales, modes de vivre « ceci en se bor- nant à leurs demandes de réformes, leurs coutumes dans ce qu'elles ont de trop contraire à nos idées morales et juridiques » (p. 363).

Un observateur malicieux relèverait peut-être ici une contradiction dans les doctrines de M. Yignon. Si les races sont irréductibles, si elles doivent évoluer dans leur milieu, comment pouvons-nous les contraindre à réformer les coutumes qui choquent nos idées morales et juridiques"? Et quel est le sens précis de l'expression : évoluer dans un milieu? Quel est le but de cette évolution? Il y a dans tout cela bien des choses obscures.

Soiar Th.

P. Salklx. Études africaines, Bruxelles, 1920, XYI-413pp.

C'est un travail dans le genre de celui de M. Yignon {Un programme de politique coloniale, Paris, 1919) que nous présente M. Paul Salkin, Juge au tribunal d'appel à Élisabethville. Il aboutit aux mêmes conclusions que son collègue français : il faut renoncer à l'administration directe, instaurer le régime du protectorat à l'anglaise, faire évoluer les sociétés bantous dans

191

leur cadre propre. M. Salkin se base pour soutenir sa thèse, sur les don- nées de l'ethnographie. A ce propos, nous nous permettons de lui faire remarquer qu'une documentation ethnographique fondée sur les « Sociétés africaines » d'A. de Préville doit manquer de solidité.

Néanmoins, les conclusions de l'auteur sont originales et dignes d'être soulignées. Il demande que les Bantous ne soient pas arrachés violemment à leur vie naturelle, qu'ils ne deviennent pas des déracinés, qu'adonnés à la culture, ils ne soient pas sacrifiés au « Capitalisme libertaire », sui- vant l'énergique expression du sociologue G. de Greef qui a préfacé l'ouvrage .

Cependant, M. Salkin verse dans le même travers que M. Vignon. Nous lisons à la page 165 : Les doctrines de miscogénation (?) et du mépris uti- litaire ne peuvent recevoir d'application pratique. Les thèses d'assimila- tion conduisent au chaos. Le bon sens, la connaissance de l'irréductibilité des données raciques recommandent une autre j)olitique. C'est celle qui laisse les Bantous développer la civilisation qui leur est propre sous la supervision du génie européen. « A certain moment, M. Salkin parle comme Houston Stewart Chamberlain qui qualifie l'empire romain de « chaos de peuples ». Quant à le doctrine de l'irréductiblité absolue des races, elle ne se peut soutenir, ainsi que nous l'avons vu ailleurs. Les Bantous, laissés à eux-mêmes, ne crééraientjfarrcazs de civilisation notable, précisément parce qu'il demeureraient isolés. L'auteur est obligé de con- venir (p. 178) que l'éclosion d'une civilisation chez les Bantous reste incer- taine « car les facultés de leur race sont inconnues ». Il essaye de s'appuyer sur l'histoire en montrant qu'une civilisation autochtone s'est constituée dans le Soudan mais c'est toujours par contact avec une civilisation plus avancée, celle de l'islamisme. Dans le centre Africain, il cite les royaumes noirs, parmi lesquels, celui des Bakuba, mais il ajoute immé- diatement après « ces états indigènes, en proie aux guerres intestines, déchirés par la traite, sans contact avec une civilisation supérieure, man- quaient d'élan (p. 176).

M. Salkin fera bien, croyons-nous, d'abandonner cette idée de l'irréduc- tibilité des groupements ethniques. L'autochtonie ne peut produire que VElementargedanke rudimentaire de Bantous, c'est-à-dire bien peu de chose. C'est par contact que se constituent les hautes civilisations.

Th. Simar.

A. De Bauw. Le Katang-a. Notes sur le Pays, ses ressources et l'avenir de la colonisation belge. Bruxelles, chez Vve Ferd. Larcier et librairie F alk fils.

L'éloge de cet ouvrage n'est plus à faire et le succès qu'il obtient est considérable.

M. Ernest Dubois, Directeur de l'Institut de Commerce d'Anvers et membre du Conseil Colonial, dans la préface qu'il consacre à ce livre, dit» après avoir énuméré tous les titres de l'auteur : « Celui-ci était donc quali- fié pour écrire le livre que nous avons l'honneur et le plaisir de présenter au public belge. Ce n'est pas un travail composé péniblement sur des documents fournis par d'autres. Ce ne sont pas non plus de simples im-

192

pressions superficiellement recueillies au cours d'un voyage hâtif de quelques mois que l'on trouvera dans ces pages, mais une œuvre vécue, des faits soigneusement observés, contrôlés et sobrement exposés, des conclusions prudemment déduites, de la conviction, de la sincérité et la plus entière bonne foi ».

Dans ce livre, M. De Bauw passe successivement en revue le Katanga sous ses aspects physique, historique, économique et administratif. Cer- taines questions de brûlante actualité coloniale telle que celle de l'agri- culture et de l'élevage, des moyens de communication et delà main-d'œuvre indigène font l'objet de chapitres spéciaux. A la fin de l'ouvrage l'auteur parle de la vie au Katanga et des colons.

Une centaine de charmantes photographies judicieusement choisies donnent une impression parfaite de cette vie coloniale que l'auteur défend avec tant de conviction et toute la foi d'un apôtre qui a vécu longuement dans le milieu qu'il décrit. Il est certain que la lecture de ces lignes stimu- lera chez les uns l'intérêt faible encore qu'ils portaient à l'œuvre de coloni- sation congolaise, et l'éveillera chez d'autres qui jusqu'à présent s'y étaient montré complètement indifférents. A ce point de vue on ne pourrrait trop louer le zèle de M. De Bauw à défendre la thèse coloniale et tous les Belges bien avertis doivent le remercier pour ce livre de savante et sincère propagande en faveur de l'expansion coloniale.

L. Javaux.

R. P. Vanden Plas. La vie juridique d'une peuplade congolaise. (Les Azan- ou Xiam-Xiam.) Extrait de YÉgypte contemporaine, t. IX pp. 175- 194. Le Caire. Imprimerie de l'Institut fiançais d'archéologie orientale, 1918.

Cette étude donne un aperçu général sur les mœurs et les coutumes des Azandé.

Les Azandé sont une population immigrée du Xord. Leur langage les distingue des peuplades du Sud et du centre du Congo, qui sont Bantous; elle se classe dans la catégorie des langues soudanaises.

j.1s constituent une population intéressante, plus intelligente que les autres. On rencontre souvent parmi eux le type anthropologique plus fin, qu'on apx^elle communément le type hamitique. Ils furent étudiés par Scheinfurth et Junker, dont les travaux restent nos x>rincipales sources j>our l'étude des populations du nord du Congo.

Les anciens ethnographes classaient les Azandés dans une catégorie spéciale : le groupe Foula-Zande. Les recherches linguistiques ont établi que cette classification qui dut sa vogue à Fr. Muller doit être abandonnée. Les Foula ou Peuls sont de langue hamitique; les Azandé sont de langue soudanaise,

L'invasion Azandé ne date probablement que de deux à trois siècles. Les envahisseurs durent sans doute une grande partie de leur succès à la pos- session d'une arme perfectionnée : le fameux couteau de jet.

Le P. Van den Plas dans sa conférence à la Société Sultaniehdu Caire a se borner à quelques généralités sur l'organisation sociale et politique de ces peuplades conquérantes.

193

Xous savons qu'il prépare en collaboration avec son collègue le P. Lagae une étude détaillée, linguistique et ethnologique sur les Azandé.

La primeur d'un certaiu nombre de ces études sera réservée aux lecteurs de notre Revue,

D. J.

André Pilette. A travers l'Afrique Equatoriale. Bruxelles, Oscar Lamberty, 1919, 20 francs.

Sous ce titre vient de paraître un magnifique volume qui réjouira au plus haut degré ceux qu'intéressent plus spécialement le côté pittoresque de notre Colonie, la faune congolaise. L'auteur chargé d'une mission de chasse en 1912, par M. le Ministre-des Colonies, y relate avec toute l'émo- tion de l'âme d'un chasseur ardent, ses nombreux exploits cynégétiques accomplis au cours de ses longues pérégrinations à travers le territoire du Congo. Il se mêle à ses récits les mille détails, si plein de saveur, communs à tous les voyages en Afrique et à ce point de vue l'ouvrage intéresse tous les coloniaux.

Une carte générale (N° 1) intercalée dans l'ouvrage, indique l'itinéraire général suivi par le chasseur, de Mombasa, sur l'Océan Indien jusqu'à Banana, en passant par la série des Grands Lacs africains pour redes- cendre vers le Bas-Congo en suivant les cours du Lualaba et du Congo. Trois autres cartes donnent des itinéraires partiels plus détaillés des régions explorées.

La caractéristique de l'ouvrage est la profusion et le luxe de photogra- phies de toutes sortes qui dans l'ensemble forment le plus beau tableau de chasse que jamais Nemrod eût pu rêver. Par-ci par-là de belles hélio- gravures viennent rehausser encore par leur composition artistique et romantique l'intérêt déjà si piquant des récits.

Dans l'appendice l'auteur envisage Le côté pratique delà mission. Dans les mutiples conseils qu'il y donne, chasseurs et explorateurs à venir y trouveront de précieux et sûrs renseignements.

Ajoutons que grâce au zèle désintéressé de M. André Pilette le Musée du Congo belge à Tervueren a pu s'enrichir d'une magnifique collection zoologique, produit des chasses qui font l'objet des récits de son livre.

L. Javaux.

194

LES REVUES.

Belgique.

Bulletin Officiel du Congo Belge (15 avril). Ordonnance du 6 décem- bre 1919 concernant la sortie des indigènes du territoire congolais. Rap- port du Conseil Colonial du 12 janvier 1920 sur un projet de décret pro- rogeant certains délais prévus par les conventions conclues respective- ment avec la Société Lever Brothers Ltd et la Société G. et C. Kreglinger. Ordonnance du 26 janvier 1920 réglementant les constructions dans les circonscriptions urbaines. Ordonnance du 30 janvier 1920 visant l'immi- gration. Arrêté royal du 20 février 1920 concernant le statut des fonction- naires et agents de la Colonie : Avancement. Temps passé dans une armée alliée ou en captivité en pays ennemi. Arrangement du Ie mars 1920 con- cernant l'échange des colis postaux entre l'administration des postes du Congo belge et l'administration des chemins de fer de l'Etat belge. Règle- ment du Ie mars 1920 relatif à cet arrangement. Règlement du 1er mars 1920 relatif à cet arrangement. Décret du 4 mars 1920 relatif aux conventions conclues entre la Colonie et la firme Lever Brothers Ltd. et entre la Colonie et la société G. & C. Kreglinger: Prolongation des délais. Loi du 8 mars 1920 accordant la personnification civile à l'Ecole coloniale supé- rieure d'Anvers. Arrêté royal du 8 mars 1920 visant le statut des fonction- naires et agents de la Colonie (Indemnités). Arrêté royal du 8 mars 1920 sur les pensions des fonctionnaires et agents de la Colonie. Arrêté roya^ du 8 mars 1920 approuvant les modifications aux statuts de la société des chemins de fer vicinaux du Mayumbe. Rapport du Conseil Colonial du 13 mars 1920 sur un projet de décret approuvant la convention avec M. Versluys. Arrêté royal du 22 mars 1920 concernant le statut des fonc- tionnaires (Indemnités). Arrêté royal du 22 mars 1920 réglementant la situa- tion des fonctionnaires, militaires et agents engagés pour la durée de la guerre en Afrique.

Annexe au Bulletin Officiel du 15 avril 1920 : Emprunt 4°/0 amortissable (1919); listes officielle des 24 obligations amorties. Avis concernant les dommages de guerre. Situation de la Banque du Congo Belge au 30 sep- tembre 1919. Liste des brevets concédés du 17 novembre 1919 au 30 mars 1920. Liste des marques de fabrique et de commerce déposées du 13 octo- bre 1919 au 24 mars 1920.

Bulletin administratif et commercial du Congo Belge (n° 5. 10 mars 1920). Ordonnance du 31 janvier 1920 créant des offices auxiliaires d'état-civil aux camps de la Xiemba, Kamukisi et Xgule. Avis du 21 février 1920 con- cernant la reprise du service de la marine du Haut-Congo par la Société

195

Nationale des transports fluviaux. Avis au public concernant les commu- nications télégraphiques. Visa des passeports pour l'Angleterre. Vice gou- vernement général de la province du Katanga : Ordonnance du 3 novem- bre 1919 abrogeant l'ordonnance du 22 novembre 1912 concernant les chiens. Ordonnance du 29 décembre 1919 validant à nouveau la prolongation de la convention entre le Comité Spécial du Katanga et MM. Benard, Jarislowsky et consorts. Vice gouvernement de la province orientale : Ordonnance du 1 janvier 1920 modifiant les limites des territoires du district de l'Aruwimi. Ordonnance du 22 janvier 1920 organisant la surveillance des noirs dans l'agglomération de Ponthierville. Décision du 30 janvier fixant les prix maxima des produits indigènes d'alimentation vendus au marché de Stanleyville pour l'année 1920 Décision du 30 janvier fixant les prix maxima des produits indigènes d'alimentation vendus au marché de Yanonghe, pour l'année 1920. Décision du 30 janvier fixant les prix maxima des produits indigènes d'alimentation vendus au marché de Banalia pour l'année 1920. Vice gouvernement général de la province de l'Equateur : Ordonnance du 11 janvier 1920 dénommant et délimitant les territoires du district du lac Léopold II, par suite de la réduction du nombre de ces territoires. Divers.

Journal administratif du vice gouvernement du Katanga. (lr avril 1920). Ordonnance du 27 août 1919 réglant l'application du décret du 7 août 1918 relatif à la culture et au commerce du coton. Ordonnance d'administra- tion générale du 30 août 19J9, créant un office auxiliaire d'état civil au au siège de la mission de Kanzenze. Ordonnance du 10 septembre 1919 rapportant l'ordonnance-loi du 16 septembre 1915 en ce qu'elle interdit les opérations commerciales et financières avec les sujets allemands ou résidents en Allemagne. Ordonnance du 19 novembre 19)9 déterminant dans les provinces Orientale et du Katanga, le rang des localités pour l'application du décret sur l'impôt personnel. Ordonnance du 20 novem- bre 1919 relative au paiement des chefs et des sous chefs indigènes. Ordonnance-loi du 27 février 1920 interdisant provisoirement la cession aux noirs de certains vivres d'importation indispensables à la population européenne Ordonnance-loi du 6 mars 1920 modifiant le décret du 16 avril 1919 sur la recherche et l'exploitation des mines au Katanga. Ordonnance de police du 2 février 1920 réglementant la détention des animaux sau- vages, dangereux ou nuisibles, etc.

Bulletin de l'association des Planteurs de Caoutchouc (mars 1920). Le marché du caoutchouc. Le coton au Congo. La technique de la saignée. Les agaves et leurs fibres. La production et la consommation du caoutchouc. Les consolidations des « rubber companies ». La propagande pour la cul- ture du coton, etc. (avril et mai 19^0). La rénovation de l'enseignement colonial agricole. Coopération en science agricole. Le coton au Congo Belge. Manioc et bananier. Fibres et pâtes à papier. La technique d'une plantation d'hévéa. Les ennemis de l'hévéa, etc.

Bulletin de documentation économique. (N' 109. 31 mars 1920 FRANCE : L'organisation du commerce extérieur; les attachés et agents commer- ciaux. Une exposition coloniale interalliée et un musée colonial à Paris.

196

etc. (N° 112. 21 avril) Belgique : Le contrôle du commerce extérieur en février-mars 1920. Le coton, ses prix, sa production, ses perspectives. Grande Bretagne : Les attributions des commissaires commerciaux, etc.

Le Mouvement Géographique \2 mai) La vie chère et la dépréciation du franc au Congo. Les conventions de St. Germain-en-Laye. Les planta, tions de cacao du Cameroun, etc.

Bulletin du Service Médical du Travail (n° 1, janvier). Origine et déve- loppement du service médical du travail en Belgique. Organisation de la tutelle sanitaire des adolescents au travail. Institution d'une commission médicale temporaire pour l'étude des premiers soins aux blessés du travail. L'influence des bruits industriels (Dr. D. Glibert) Traumatisme de l'oreille par déflagration. Leurs rapports avec les accidents du travail (Dr. G. Galand . Quelques notes sur la peinture des carènes, superstructures et cabines des navires, leur nettoyage et leur entretien (Dr. H. Craen) etc.

Chasse et Pèche (9 mai). Chasses d'Afrique (René Hemeliers).

La Télégraphie sans fil au Congo Belge par MM. R. B. Goldschmidt et R. Braillard (120 pages, 79 gravures, Bruxelles 1920).

Bulletin de la Société Belge de Géographie. (Années 1914-1919. 3e et dernier fascicule). La création d'une union géographique internationale.

Missions d'Afrique des Pères Blancs. (15 mai) Vicariat apostolique du Haut-Congo. Rapport de Ms Huys. Une tournée au Kivu (Me1 Roelens). Le pays des Bashi (P. Colle).

France.

Bulletin de la Direction Générale de V Agriculture, du Commerce (Régence de Tunis . N. 96, avril mai-juin 1919). Tassement du sol par les tracteurs. Actes officiels, etc.

Bulletin des Caoutchoucs de l'Institut colonial de Marseille (n. 1. 1920 - L'amélioration des caoutchoucs de l'Afrique Occidentale (M. G. Van Pelt).

L'Exportateur Français (n. 193. 8 avril).— Entre la France et la Belgique (M. Ajam). La Grande Belgique (G. Ponsot). Nouvelles économiques des colonies. Cours officiels des grands marchés commerciaux, etc, (6 mai). La production du coton. Le timbre monnaie à Madagascar Production d'huile de palme et palmistes dans l'Afrique occidentale française de 1910 à 1919. La crise de la monnaie au Dahomey, etc.

Bulletin de l'Agence Générale des Colonies (février). Essais d'utilisation de la bagasse de canne à sucre en papeterie. Exportations des produits des colonies françaises en Europe orientale. L'alcool moteur et la banane. Afrique Equatoriale française : Un cours d'imprimerie. Les grands travaux au Cameroun. Le pétrole au Cameroun. Les bois coloniaux. Influence de la lumière sur la cicatrisation des plantes a caoutchouc. L'utilisation des bananes. La banane séchée, etc.

197

L'Afrique Française (avril). La flotte coloniale (M. Besson;. Afrique Occidentale Française : Le coton. Possessions Britanniques : Nigeria. Possessions Belges : La situation générale du Congo Belge. L'âge de l'air en Afrique (C.-J. Celhan), etc.

La Gazette Coloniale^ avril). Le mise en valeur de l'Afrique Equato- riale Française, etc.

Journal Officiel de l'Afrique Occidentale Française (10 avril). Arrêté portant création à Paris d'une Agence économique de l'Afrique occidentale française Notice sur l'inspection des Colonies. Situation mensuelle des recettes douanières (mois de janvier 1920), etc.

Journal Officiel de l'Afrique Equatoriale Française (lermarsi. - Arrêté relatif au développement des plantations vivrières indigènes. Arrêté organisant le service des prisons dans la Colonie du Gabon. Avis concer- nant la prophylaxie de la maladie du sommeil, les étrangers, etc. (15 mars). Arrêté interdisant la fabrication et la circulation du vin de palme. Arrêté fixant à 5 °/0 pour 1920 le taux de la redevance sur la valeur des minerais extraits. Arrêté organisant l'exploitation radiotélégra- phique en Afrique Equatoriale française. Arrêté habilitant certains fonc- tionnaires pour constater les infractions commises par les indigènes et se rapportant au service dont ils sont chargés. Arrêté portant modifi- cation aux mercuriales officielles. Circulaire commentant l'arrêté relatif à l'extension des cultures vivrières indigènes, etc.

Annales de l'Institut Colonial de Bordeaux (octobre 1919). Bois colo- niaux : Les bois des Colonies françaises. Utilisation des plantes colo- niales en papeterie. Bibliographie : Mission forestière coloniale du com- mandant Bertin (Sylv. Trébucq), etc.

Revue générale des chemins de fer (décembre 1919). Dispositif pour éviter les déraillements sur les aiguilles des stations.

La Revue Maritime (avril 1920,). L'Allemagne et la côte des Flandres.

Bulletin de la Société entomologique de France (n 3, t920;. Diagnoses de Galerucini nouveaux d'Afrique. (n° 4> 1920). Rhodainomya, genre nouveau d'œstride parasite de l'éléphant.

L'Économiste français (1er mai). Le caoutchouc : sa production, son marché, ses perspectives. Nouvelles d'outre-mer. La Nigeria.

Le Lloyd Commercial (1er mai). La rénovation des méthodes commer" ciales, par M. Lemery (4e article : Le crédit au commerce et à l'expor- tation).

Bulletin Mensuel de l'Office du Gouvernement Tunisien (mars-avril 1920). Conditions de l'existence en Tunisie à l'usage des employés et voyageurs de commerce français (suite). Mouvement des principales importations tunisiennes pendant le 4e trimestre 1909, etc.

Lyon Colonial (février 1920). Leçon d'ouverture au cours d'hygiène coloniale. Une plantation de cocotiers au Mozambique (suite).

198

La Vie Agricole et Rurale (24 avril;.- Un nouvel animal de boucherie : le 1 amen tin.

La Science et la Vie (mai 1920). Les palmiers à l'huile nous donneront ils prochainement du beurre comestible ?

Grande-Bretagne :

Board of Trade Journal (Ie' avril). Protectorat de l'Afrique Sud- Occidentale : Dispositions visant l'importation, la vente, etc., des spiri tueux. .S avril) Relèvement commercial et industriel de la Belgique. Afrique orientale anglaise : Possibilités commerciales et industrielles. (15 avril) Statistiques de l'Empire britannique. Réclamations visant les sujets allemands. (22 avril) Projet d'organisation, par les exploitations minières de l'Afrique Australe, de la vente directe d'articles destinés au personnel des mines. L'Institut colonial hollandais. Côte d'Or : Impor- tation de spiritueux, etc.

African World (17 avril). Le chemin de fer transzambésien. L'histo- rique des mines de Kilo. Lettre de Bruxelles. L'Afrique Orientale anglaise. L'Agriculture dans l'Uganda. Augmentation du fret maritime vers l'Afrique Australe. (24 avril) Lettre de Bruxelles. Les chemins de fer de l'Afrique Australe ; le problème de l'électrification. (lCr mai) Lettre de Bruxelles. Création d'un Comité consultatif pour aider à l'établissement des colons en Rhodésie. Concours en vue d'encourager la culture du coton en Afrique Australe et principalement au Natal, etc.

South Africa (3 avril). Le dilemme de l'industrie minière. Les indi- gènes de l'Afrique orientale anglaise. Tanganyika Territory Le florin est-africain. (10 avril) La préparation technique des prospecteurs. La situation des Indous au Transvaal, etc. (17 avril) Tabora. Tanganyika Territory, etc. (24 avril) Le commerce dans les mines de l'Afrique Aus- trale, etc.

Journal of the African Society (janvier). La brousse et la forêt afri caines i Major C. Christy . Le problème de la reconstruction en Afrique Centrale, etc. (avril) Les moyens de transport en Afrique { Captain F. Shelford). Le rôle futur de Ténériffe (Alex. Johnston). La Grande-Bre- tagne dans l'Ouest africain (W. A. Crabtree). Développement des études relatives aux peuples bantous (J. R. L. Kingon). Bibliographie, etc.

The International Review of Missions (avril). Les jeux païens doivent- ils être conservés dans une communauté chrétienne. Un bantou parle (Henri A. Junod).

Government Gazette (Accra, Gold Coast, West Africa, 3 avril). Ordon- nance executive de la Convention de Saint-Germain en Laye concernant le trafic des armes.

Northern Rhodesia Government Gazette (8 mars). Notice du gouverne- ment concernant la procédure judiciaire. (9 février). Notice du gou- vernement visant l'enregistrement et le contrôle des chiens. (24 janvier).

199

Notice concernant l'enregistrement et le contrôle des chiens. Tarif doua nier : liste supplémentaire dressée alphabétiquement. (2 avril). Procla. mation réglementant l'exportation et la circulation de l'or et de l'argent.

Britisch South Africa Government Gazette (9 avril). Ordonnance modifiant l'ordonnance de 1913 concernant les eaux. (23 avril). Procla- mation en vue de restreindre l'importation de teintures et matières tinctoriales. Ordonnance réglementant l'emploi d'indigènes comme mar- chands de bestiaux.

South Africa (15 mai). Renferme une carte des territoires de l'Afrique australe et centrale en 1920. Dans un long éditorial explicatif, la revue rappelle que notre Congo « le vaste domaine tropical de la Belgique » s'est élargi à l'Est par l'adjonction du Ruanda et de l'Urundi. C'est bien dans une haute pensée d'idéale justice, ajoute « South Africa», qu'une part des compensations revenant à la Belgique pour ses souffrances profondes et imméritées, lui est accordée sous forme d'un morceau de cette Afrique allemande, de ce « Mittel-Afrika Reich » qui devait absorber le Congo, dominer le continent noir, asservir et enrôler comme soldats ses myriades d'indigènes ?

African H'orld(8 mai 1920|. Lettre de Bruxelles : le chemin de fer de l'Afrique equatoriale française. Le développement de l'Afrique equato- riale. Horaire de Capetown à Elisabeth ville. Les richesses du Congo. L'or du Kasaï. Le charbon duKatanga, etc Afrique orientale anglaise : Facilités d'émigration. Afrique occidentale anglaise : Congestion des transports par rail en Nigérie Etablissements de recherches scienti- fiques. Congrès National. Expédition scientifique en Maputoland (sud de la baie de Delagoa) en vue de combattre la propagation de la mouche tse tse. Rhodésie : Les réserves indigènes. Union de l'Afrique du sud : Projet de répartition de fermes aux soldats démobilisés. Le coton de l'Afrique australe.

The Britisch et South African Export Gazette (mai). Tournez les yeux vers le Katanga (Watch the Katanga). Développement du commerce de traite en Rhodésie. Le coton en Afrique australe.

Nature (hebdomadaire anglais, 13 mai). Le conseil national de recherches aux États-Unis, par M. le professeur V. Kellogg. Au pro- gramme des investigations scientifiques organisées par cette importante « coopérative» de savants, l'auteur signale le projet d'une enquête appro- fondie sur la biologie tropicale, y compris la médecine tropicale.

The Garden' s. Bulletin (Singapour, 12 avril). Le palmier à huile (elaeis guineensis).

The South Africa Mining- and Engineering- Journal (17 avril). Mines et minerais du Congo belge. L'avantage de l'électrifi cation des chemins de fer.

200 Italie :

Rioista Coloniale (avril 1920). Dans un intéressant article intitulé : Il faut à la nation une conscience coloniale. M. F. Stroppa signale la propagande organisée en France, en Angleterre, en Italie, en Espagne, aux États-Unis, au Japon, en Belgique, en Allemagne même, en faveur du développement des ressources coloniales. L'auteur mentionne le programme réaliste de M. Franck, Ministre des Colonies ; l'expansion ferroviaire, l'organisation de la culture cotonnière, l'envoi de médecins et d'infirmières pour sauve garder « le capital humain de la colonie » . M.Stroppa cite les monographies de l'Institut de Sociologie, le Journal populaire des sciences géographiques et les Renseignements de notre Office Colonial propageant les informations économiques sur la Colonie. La revue italienne consacre aussi un court exposé à l'arrangement intervenu entre l'Angleterre et la Belgique au sujet des nouveaux territoires du Ruanda et de l'Urundi. Il y est fait allu- sienà la part prise autrefois par nos alliés italiens notamment dans l'or- ganisation du Congo. La Revista coloniale publie également une étude sur les dernières découvertes au sujet delà fièvre jaune; puis des notes il est à nouveau question de l'Angleterre et delà Belgique dans l'ex-colonie allemande de l'Afrique orientale.

Portugal :

Rapport du Gouverneur C. A. de Oliveira MouraBraz sur le district de Huila (Angola). Exercice 1912 (Coïmbre 1918. Imprimerie de l'Université, pour le Ministère des Colonies). Un volume de 373 pages contenant de nombreuses illustrations et des croquis géographiques.

Populaçoes indigenas de Angola, par M. José de Oliveira Ferreira Diniz (Coïmbre 1918). Ce volume de plus de 750 pages, illustré de nombreuses photos et gravures, constitue une importante contribution à l'étude des peuplades de l'Angola, cette colonie portugaise voisine du Congo belge. Plusieurs des tribus visées habitent également notre domaine colonial. Par là, l'ouvrage de M. Ferreira Diniz nous intéresse particulièrement.

G.-D. P

^vWŒ^nxë^^^iïcnsëu^ Colonial.

| MAIS

MAISON BELGE D'EXPORTATION

FONDEE

EN 1899

Henri Kullmann -Thom

Négociant-Commissionnaire

Successeur de KULLMANN-SINGEB, et

68, Rue Joseph II, BRUXELLES téléphone : u-tho-t »58

1 Télégr. : « Kullchamp »

Fournisseur de l'ancien État Indépendant du Congo, du Ministère des Colonies et des principales firmes coloniales

belges et étrangères

Exportations Générales

de tous les articles vers le Congo et l'Afrique

Visitez notre salle d'échantillons

CORIKESFOIXriDAJ^OZE SOLLICITÉE Demandez nos nouveaux catalogues illustrés

Accumulateurs TUDOR ?$$;

Société anonyme

000 francs

79, rue Joseph II, 79, BRUXELLES

Téléphone : Linthout 1410 Télégrammes : TUDOR, BRUXELLES

Accumulateurs stationnaires . transportables.

fiYII Hl ASSAIX1T LKS postes Les moins confortables et les plus

UÀILUL MARÉCAGEUX PAR DE SIMPLES ARROSAGES JOURNALIERS ZZZZ

OXILOL

désinfectant assure le confort et la santé aux Blancs habitant la Colonie.

Doit être demandé par tous les Européens séjournant au Congo belge.

MS, Chaussée de Mous Bruxelles

POUDRERIE ROYALE DE WETTEREN

Fondée en 1778

COOPPAL et C,E

SOCIÉTÉ ANONYME

WETTEREN, près Gand =

nam a wettebbn, cadlille et matagne-la-gbande

Poudres de chasse NOIRES et SANS FUMÉE en tous genres,

Poudres de mine en grains et en cartouches comprimées,

POUDRE DE TRAITE POUR LES COLONIES,

- TONITE

Dynamites Détonateurs Mèches.

CARTOUCHES IDE CHASSE

PRIX SPECIAUX POUR L'EXPORTATION

CONGO avec les Renseignements de l'Office Colonial.

V" P.J.Lefrancq

30, Avenue Fonsny, 30 = BRUXELLES

COMBATTEZ le mal du pays au Congo par une habitation fraî- che et riante en la peignant au

DURESCO

peinture prête à l'emploi, mate, lavable, artistique, hygiénique, spéciale pour PAYS CHAUDS.

En boîtes métalliques hermétiques de 5 kilog.

Votre Boy peut l'appliquer

Fournitures Générales pour la Chirurgie et la Pharmacie

F. BRASSEUR

BRUXELLES =

Installations complètes pour Hôpitaux, Mobilier opératoire, Stérilisation, Lava- bos, Meubles pour malades.

INSTRUMENTS DE CHIRURGIE

Pansements aseptiques et Antiseptiques hygiénica. Accessoires de Pharmacie, Caoutchouc souple et durci, Bas à varices, Bandages, Ceintures, Corsets, etc.

Bureaux et salles d'exposition ;

149, Rue du Midi, 149

(Place Rouppe)

Téléphone : Adresse télégraph. :

Brux. 111.94 Chirurgica Bruxelles

Liebers-Code. A. B. C. 5e édition

Vve THIROUX & Fils 10' Rue des Boiteux> Bruxelles

1 Téléphone : B. 2354

Fournisseurs du Miuistère des Colonies et de nombreuses Sociétés congolaises ARTICLES DE MERCERIE POUR LEXPORTATIOl BOUTONS de corozo, de nacre, de porcelaine, d'os, de métal. Aiguilles, épingles, dés, ciseaux, miroirs, nécessaires de mercerie. - IFIILS .A. COUDRE ET AUTRES _ Etubuns, lacets, galons de coton en couleurs, dentelles

Bretelles, Jarretelles, Ceintures en tissu élastique et en cuir

fiÉSB?

MARQUE DÉPOSÉE

in anuiaclure Coloniale de Tabacs, Cigares, Cigarettes

Articles divers pour Fumeur*. - Spécialité pour colonies

IMPORTATION Gros et demi-gros EXPORTATION

G. VAN MAELE-WEYSEN = iï£&

Fournisseur du Ministère des Colonies, Sociétés Commerciales et Missions

Exposition de Bruxelles 1930, MEDAILLE D'ARGENT

MANUFACTURE DE VÊTEMENTS CONFECTIONNÉS

pour le Congo et les pays tropicaux

107, Boulevard du Midi RRUXEKL.ES

Maison VAN BUGGENHOUDT

Costumes en tous genres pour Européens. Pij amas. Caleçons. Chemises. Costumes de toutes formes en blanc, khaky et bleu. Chemises de flanelle. Tous les vêtements indigènes de toutes formes, tels que burnous, paragias, chemises et surtouts arabes, culottes musulmanes, etc., etc.

Prix sans concurrence EXÉCUTION RAPIDE ET SOIGNEE

Téléphone : B. 2584

•nliom^J?,

CENEX

Société Générale d'Exportation

VAN SANTEN & VAN DEN BROECK

18 et 20, RUE DES RECOLLETS, ANVERS

Téléphone 5246 Adresse télégraphique : GENEX-ANVERS

Bureaux Londres : Great Tower Street. E. C. London

Fournisseurs du Ministère des Colonies.

des Missions Catholiques et Principaux Établissements et Sociétés Coloniaux.

Spécialité d'Articles d'Exportation

vers le Congo et la Côte Occidentale d'Afrique

tl IHI \ I t I IO\ (Monopole «le la Maison Riïtlel «.V Ois. frères de Bordeaux) : Bière, Biscuits de mer, Beurre et Saindoux. Conserves de viandes, légumes et poissons. Conserves de viandes et poissons pour indigènes, Eaux minérales, Farine hongroise spécialement préparée pour les tropiques, Lait condensé et stérilisé, Riz et légumes secs, Sucre etépices, Sardines de traite.

TISSU» DE COTON (Tissus de Manchester de la Mai «on James F. Hut (on *V

I imii. <i) : Couvertures en tous genres, Foulards, mouchoirs et écharpes, Pagnes en tous genres, Tissus imprimés et indiennes. Tissus pour confections, Tulle pour moustiquaire, Velours, toiles à matelas.

habillement a merceries : Bas et chaussettes Bonnets de coton, Boutons, Bretelles, Casques coloniaux. Casquettes et smoking caps, Ceintures en cuir, coton et élastiques. Chapeaux de feutre et paille, Chaussures en cuir, toile à voile en toutes qualités. Chemises en tous genres et Pij;imas, Costumes complets en tous genres. Espadrilles. Fez et chéchias, Fil à coudre. Guêtres, jambières en cuir et étoffe, Maillots et Siriglets, Martin Spring belfs, Parapluies et parasols, Ser- viettes de toiliette et essuie-mains, vieux effets réparés et désinfectés.

oiu< viiMisiK : Aiguilles à coudre, Anneaux en cuivre, laiton, métal blanc, etc , Articles de ménage émaillés et étamés, Assiettes fer-blanc, Cadenas et serrures, Canifs, Chaînettes en laiton et fil de tcheng. Ciseaux, Clairons et instruments de musique, Clous dorés, Couteaux de table, de cuisine, de chasse etc Cuillères et fourchettes. Faïence, assiettes, cuvettes bols, mugs, etc Fers à repasser. Fil de cuivre et de laiton, Hameçons et articles de pêche, Houes, haches, 'hachettes indigènes. Lampes, lanternes et photophores Limes et scies. Machettes en tous genres et toutes dimensions. Machines à coudre. Malles en bois et en fer, Miroirs cadre bois et zinc, Peignes. Pelles et bêches. Rasoirs, Réveils malin et montre, Serpes et faucilles Sonnettes et grelots. Verres à boire.

péri 1 ■:* et fausse bijouterie : Bagues, Bracelets, Boucles d'oreilles, etc. divers : Allumettes, Amidon, Blanc pour casques, Bougies. Cartes à jouer Cauries et coqui- lages Cigares et cigarettes, Cordes, ficelles et cordages, goudron, poix et peinture. Meubles en fer et en bois. Parfumerie, extraits d'<deurs, huiles, pommades, etc Sacs jute fibre de coco, toile, etc. Savon en barres et parfumé, Sel fin. gros, etc., en sacs ou en touques. Tabac en feuilles et en paquets. Pétrole, Pipes en bois, en terre, etc.

IMPORTATION-CONSIGNATION

de tous produits d'Afrique

=^= Marques déposées : GENEX-SGE =^^=

EMBALLAGES

Installation pour emballages SDéciaux pour les transports en Afrique

Envoi en Afrique de prix-courants et échantillons sur demande Prix établis sur demande

Franco bord : Anvers, Liverpool, Hambourg, Rotterdam ou le Havre Coût fret et assurance : Matadi ou Borna v Franco de port rendu : Kinshassa

flYII fil Assure la santé du bétail en écartant les mouches, les moustiques U Al LUL et les tiques et en hâtant la cicatrisation des plaies,

NOTICE

Il paraissait en Belgique avant la guerre de nombreuses revues colo- niales, presque toutes assez spécialisées.

Il en résultait l'obligation, pour qui voulait se tenir au courant du mouvement dans la colonie belge, de s'abonner à plusieurs publications différentes. Bien des fois aussi, celui qui désirait s'initier aux choses du Congo, ne sachant par quelle publication spéciale il valait mieux com- mencer, s'abstenait après quelques tâtonnements et se désintéressait.

De leur côté, les Directeurs de revues se voyaient, depuis l'armistice, très embarrassés par la cherté de la main-d'œuvre et du papier, et ils hésitaient à reprendre la tâche d'avant guerre.

Les promoteurs de la nouvelle revue ont pensé qu'il y aurait grand avan- tage, dans ces conditions, à fusionner les matières et à grouper les efforts en une Publication centrale.

Et ils ont rencontré, pour la réalisation de cette idée, les concours les plus précieux dans toutes les sphères du monde colonial.

Le Ministère des Colonies a donné le meilleur de son assistance en per- mettant que les Renseignements de V Office Colonial, au lieu de paraître en une publication spéciale, soient désormais publiés dans la revue géné- rale de la colonie.

L'Union Coloniale, dont la grande activité se manifeste dans tous les domaines coloniaux, est représentée dans la nouvelle publication par son président, M. le Ministre d'Etat Cooreman, et ses deux secrétaires géné- raux, celui d'hier M. Mahieu, celui d'aujourd'hui, le général Gillain.

Les nombreux coloniaux, fonctionnaires, missionnaires et colons dont les études documentées firent le succès de La Revue Congolaise et de Onze Kongo apportent leur concours à la publication centrale. Ces deux grands périodiques, au lieu de reparaître individuellement, renaissent dans la revue générale de la colonie, qui réalise patriotiquement l'égalité des langues. Deux de leurs rédacteurs, MM. les professeurs Denyn et DeJonghe, deviennent les Directeurs de la nouvelle revue.

Le Matériel Colonial, bulletin très apprécié des techniciens et des pra- ticiens congolais, se fond également dans le nouvel organisme.

Le Bulletin de Colonisation comparée, qui renseignait spécialement le public belge sur le mouvement politique et administratif des«colonies étran- gères, fait de même.

CONGO a donc la légitime ambition de créer un centre d'études et de renseigne- ments, où tous ceux qui s'occupent de notre colonie, tous ceux qui désirent la connaître, tous ceux qui veulent profiter commercialement de ses richesses pourront puiser la documentation de leur choix.

La description et l'étude des civilisations indigènes occupera une des premières places dans la nouvelle publication.

Les principaux événements coloniaux seront commentés ; les problèmes de colonisation seront étudiés ; le mouvement colonial à l'étranger sera soigneusement noté.

La Revue publiera une série d'articles de coloniaux de la première heure, qui ont promis, pour nos lecteurs, de rappeler leurs vieux souvenirs.

Dans le but de documenter pratiquement le monde des affaires sur tout ce qui touche à la vie économique de la colonie. Congo, donnera des infor- mations précises sur l'importance des débouchés offerts par la colonie, la description, le conditionnement et le prix des produits que l'industrie belge pourrait fournir; les conditions de paiement, les usages déplace, les frets et tarifs et conditions de transport, les tarifs douaniers, les règlements d'entrepôt et de transit, les rapports économiques de district, les statistiques commerciales et industrielles, les mercuriales de prix, les adjudications, les analyses de produits coloniaux et, en général toutes les. indications de nature à intéresser les commerçants et industriels. Ces renseignements seront fournis par l'Office colonial du Ministère des Colo- nies et le Service d' information et de propagande de V Union Coloniale.

On trouvera dans les comptes rendus des séances de la Société pour le Perfectionnement du Matériel Colonial, des études et renseignements^ pré- sentant un grand intérêt pour nos industriels et nos colons.

Les promoteurs conçoivent la nouvelle revue comme line œuvre de pro- pagande coloniale. ;.:. :' .

Si le public veut aider à son succès, la Revue Générale, de la Colonie prendra place parmi les revues lesplus importantes et les mieux éditées, car toutes les ressources de la revue seront consacrées à son développement.

Le prix de l'abonnement est fixé à 25 francs par an. La première année va de avril -mai 1920 à mars inclus 1921. La revue. paraîtra tous les mois, sauf en août et septembre. Elle comprendra donc dix livraisons de amt pages pour commencer. Le premier numéro est double.

Dans ses premiers numéros, CONGO publiera :

Les Chemins de fer au Congo, par M. Van Leeuw, Ingénieur principal au Ministère des Colonies.

Un nouveau type de concession foncière au Congo, par M. Heyse, Docteur en droit.

Les Mines du Katanga. . .

Le Tambour -Téléphone chez les indigènes de V Afrique Centrale, par Aug. VERBEKEN, Administrateur territorial à Kanda-Kanda. t

L'Élevage au Congo, par C. Van Damme. Dr de l'École Supérieure d'Agriculture de Gand.

Les Forêts du Congo, par E. Van de Ryst, Missionnaire.

La Flore congolaise, par D. Vermoesen, attaché au Jardin Botanique de Bruxelles.

Le Jardin Botanique d'Eala, par Jean Pynaert, de l'Administration coloniale.

Les Modifications de Y Acte de Berlin, par V. Denyn, Directeur de la Revue.

Le Mouvement des études ethnologiques au Congo, par Ed. De Jonghe. Dr de la Revue.

Les Sociétés secrètes indigènes au Congo, par le même.

Mayombsche sprokkelingen, door L. Bittremieux, Missionnaris.

Sociologie des Bakongo, parP.^ Van WlNG, Missionnaire.

Les Populations Ngombe de l'Equateur, par Ch. Engels, Commissaire de district.

La Mortalité infantile chez les Ababua, par Mme Rolleri accoucheuse diplômée.

De Jacht onder de Mongo, door P. Van der Linden, Missionnaris.

Les Institutions sociales et politiques de Baluba, par Ch. Van der Kercken, Commis- saire de district.

L,e Ngula, fard indigène, par M. Maes, Chef de la section ethnographique du Musée de Tervueren.

Les Métiers indigènes dans le district du Lac Léopold II, par le même.

Notes sur les Bashilele. par M. Verhulsï, Administrateur territorial.

Généalogie des chefs Warumbi, par M. Bernard, Administrateur territorial.

Mœurs et Coutumes des Baniabungu, par Ch. Roy, Missionnaire.

Les Bashi, par F. Colle, Missionnaire.

Études de linguistique et d'ethnographie Azande, par C. Van den Plas, Missionnaire.

Les Mogwandi, par B. Tanghe. Missionnaire.

Les Populations du Ruanda et de l'Urundi, par Th. Simar, Secrétaire de la Revue.

Voyages au Lomami, par le Dr Schwetz, Médecin colonial.

Les Progrès de la Cartographie Congolaise, par le major Maury

Première année N°* 3 et 4.

Juin et Juillet 1920

CONGO

Revue générale de la Colonie belge

Algemeen tijdschrift van de Belgische Kolonie

SOMMAIRE :

\ %***-* k <: A H -eTHNOLOGY Edm. LEPLAE. . . . La situation de l'Agriculture au Congo-Belge

(suite) .... y . ... . . . . p. 201

L. PHILIP PART . . . L'Organisation sociale dans le Bas-Congo,

(suite) p. 231

A. VERBEKEN . . . Le tambour téléphone chez les indigènes de

l'Afrique Centrale . . p. 253

Leo BITTREMIEUX . . Mayomsche Sprokkelingen p 285

VAN LEEUW .... Les Chemins de fer du Congo p. 306

Ed. DE JONGHE . . . Apropos des « Primitifs » p. 514

MÉLANGES : Koloniale staatkunde : Ontwerp van een koloniaal congres, p. 324. Politique Coloniale : Projet de Congrès colonial, p. 325. L'Allemagne et la question coloniale, p. 327. Le discours de M. Albert Sarraut au banquet colonial, p. 334. Le Gouvernement du Congo-Belge, p. 337. L'exposition coloniale d'Anvers, p. 344. Questions économiques : L'exploitation du palmier à huile en Afrique Occidentale, p. 344.

Le Katanga pendant la gaerre, p. 347. Voies de communications : La Belgique coloniale, p. 354. —La Télégraphie sans fil au Congo-Belge, p. 359. Géographie : Randonnée aérienne du Cap au Caire, p. 362.

Questions de politique financière : Rapport sur le budjet des recettes et des dépenses du Congo-Belge pour l'exercice 1920. Sciences Naturelles : La domestication de l'éléphant d'Afrique au Congo-Belge.

ASSOCIATION POUR LE PERFECTIONNEMENT DU MATÉRIEL COLONIAL

Exposé par l'auteur du système détracteur Froidart, p. 378. Navigation sur le Haut- Congo. Balisage du fleuve (suite), par M. Willemoès d'Obry, p. 382.

RENSEIGNEMENTS DE L'OFFICE COLONIAL

DU MINISTÈRE DES COLONIES

Contribution à l'étude du palmier à huile, p. 403. Commerce de la Colonie, statis- tique des importations et exportations de 1914 à 1918, p. 436. - Statistique commer- ciale de l'exercice 1918, p. 446. Relevé des produits exportés du Congo en 1919 et durant le premier semestre 1920, p. 452. Adjudications, p. 453. Informations, p. 455. Actes officiels, p. 459.

BIBLIOGRAPHIE : Les Revues, p. 463.. - Les Livres, p. 469.

Les numéros 3 et 4 réunis : 5 francs

EDITEUR :

GOEMAERE, IMPRIMEUR DU ROI 'Rjie de la Limite, 21, Bruxelles

CONGO

Publication périodique mensuelle dix livraisons, mille pages 25 fr. l'an. Maandelij ksch tijdschrift-tien afleveringen, duizend bladzijden-26fr.perjaar.

Étranger : 30 francs l'an.

Parait chaque mois, sauf en août et septembre.

Verschijnt elke maand, buiten Augustus en September,

Le N°5 paraîtra le 1er octobre et désormais la revue paraîtrarégulièrementle 1"du moii

N' 5 zal op 1*° Octobvr verschijnen en daarna regelmatig den 1%u der maand.

COMITE DE REDACTION Fondateurs de la Revue

Président d'honneur : Cooreman, Ministre d'État, Président de l'Union Coloniale.

Membres : Broden, le Docteur, Directeur de l'Ecole de Médecine tropicale. Cattier, F., Professeur honoraire à l'Université de Bruxelles,

Membre du Conseil Colonial. De Jonghe. Ed., Professeur à l'Ecole Coloniale de l'Université de

Louvain, Directeur au ministère des Colonies. Denyn, V., Professeur à l'Ecole Coloniale de l'Université deLou- vain et à l'Ecole supérieure Coloniale d'Anvers, Conseiller juridique au ministère des Colonies. Gillain, L'-Général, ancien Chef d'Etat Major de l'armée, Pré- sident du Cercle africain, Secrétaire général de l'Union Coloniale. Halewyck, M., Directeur général des affaires politiques et administratives au ministère des Colonies, auditeur du Con- seil Colonial. Leplae, E. , Professeur à l'Université de Louvain, Directeur géné- ral de l'agriculture au ministère des Colonies. Liebrechts, Ch., Conseiller d'État, ancien Secrétaire général du département de l'Intérieur de l'Etat Indépendant du Congo. Mahieu, Inspecteur d'Etat honoraire, Directeur Général de la Société Nationale des Transports fluviaux au Congo, ancien Secrétaire Général de l'Union Coloniale. Mortier, Supérieur général des Missions de Scheut, membre

du Conseil Colonial. Olyff, J. Chef du Cabinet du Ministre des Colonies, Directeur chef du service de l'Industrie et du Commerce (Office Colonial). DIRECTEURS : MM. V. Denyn et Ed. De Jonghe. SECRÉTAIRES : Simar, Th., Bibliothécaire au ministère des Colonies. Janssens, Al., Missionnaire de Scheut (pour les articles flamands). Janssen, Franz., Sous-directeur au ministère des Colonies,

(pour les Renseignements de l'Office Colonial). Tielemans, Colonel retraité (pour l'Association pour le perfectionne- ment du Matériel Colonial}.

ÉDITEUR : J. Goemaere, Imprimeur du Roi.

Pour tout ce qui concerne la RÉDACTION, s'adresser aux Directeurs

M. Denyn, 41, rue de la Pépinière, M. De Jonghe, 10, rue Bréderode,

Pour les Abonnements et pour les Annonces,

s'adressera l'éditeur: 21. rue de la Limite à Bruxelles.

La situation de l'agriculture au Congo belge

(Suite)

II. L'Agriculture indigène.

Si l'on élimine du programme économique d'une colonie tropicale l'agriculture de plantation et la colonisation agricole, il ne reste qu'une seule forme d'agriculture dont on puisse -attendre des résultats : l'agriculture pratiquée par les indi- gènes, aux alentours ou tout au plus à quelques kilomètres (1) de leurs villages.

Kien n'est plus séduisant, pour l'observateur superficiel, que de baser le progrès économique sur l'agriculture indigène. Aucune theorie ne permet de plus beaux rêves de progrès intense, rapide et gratuit.

En effet, la main d'oeuvre dont dispose la population .autochtone est toujours considérable et multiplie par un coef- ficient énorme les moindres efforts de chaque individu.

Dans ces conditions, il semble qu'il soit facile de « galvani- ser » la production agricole et l'exportation des produits cul- tivés : il suffit, en effet, d'obtenir que chaque indigène produise une quantité même très faible de récoltes exportables, pour que le total des exportations atteigne aussitôt un chiffre très important.

Prenons comme exemple le Congo. Sa population exacte n'est pas connue, mais peut être estimée au minimum à 7 mil-

(1) Les cultures d'un village sont parfois situées contre l'agglomération: mais elle sont souvent aussi éloignées de 2 ou 3 kilomètres, parfois même de 8 à 10 kilomètres.

202

lions d'aines. Le territoire est énorme, car il mesure 250 mil- lions d'hectares : les terrains ne manquent donc pas. D'autre part, la chaleur et l'humidité sont telles que les plantes culti- vées se développent avec exhubérance ; il suffit en général de gratter légèrement le sol vierge et d'y enfoncer des semences ou des boutures pour obtenir une végétation vigoureuse.

Admettons que chacun des 5 ou 6 millions d'indigènes adultes et valides produise pour l'exportation 10 kilogrammes de graines d'arachides, il en résulterait pour ce produit spécial, une exportation annuelle de 50 à 60,000 tonnes.

Si nous appliquons un calcul analogue à la production d'une marchandise de haute valeur, demandée par l'industrie belge, nous voyons aussitôt que l'agriculture indigène congolaise pourrait alimenter nos usines et améliorer beaucoup les conditions de notre change.

Si chaque famille d'indigènes congolais produisait ne fut ce que 5 kilos de coton, la Colonie pourrait en exporter 10,000 tonnes environ, c'est-à-dire, le cinquième de la quantité de coton que la Belgique doit acheter annuellement à l'étranger. Au prix normal de 1,200 francs par tonne, ce coton congolais éviterait à la Belgique le paiement à des étrangers de 12 mil- lions de francs.

Or, il faut bien peu de travail pour produire au Congo 5 kilos de coton. Il suffit pour cela d'ensemeneer une minus- cule parcelle de terre : 2 ares 50 centiares, soit un carré d'en- viron 16 mètres de côté ou bien un rectangle de 7 mètres de largeur sur 36 mètres de longueur. Il est bien des jardins de Bruxelles qui mesurent cette superficie. Un ménage de solides agriculteurs indigènes n'aura donc aucune peine, semble-t-il, à cultiver ce lopin de terre pour apporter au développement économique de la Colonie une contribution dont il sera d'ail- leurs bien rémunéré.

Ce moyen ne permet- t-il pas, d'ailleurs, de faire gagner à l'indigèue des sommes assez considérables, qui lui serviront à acquérir des étoffes, des costumes européens, des instru- ments de travail et les mille objets offerts par le commerce?

De plus, n'est-ce pas faire œuvre excellente au point de vue social et moral que de faire connaître au noir la sainte loi du travail ? N'est-ce pas élever l'indigène hors de la barbarie que de lui donner les notions d'économie et d'activité qui lui manquent aujourd'hui ?

203

Il n'est même pas indispensable, pour réaliser le progrès économique, de recourir à des cultures. La récolte des pro- duits spontanés des savanes et des forêts peut donner à peu près les mêmes résultats commerciaux et faire grandir avec une rapidité étonnante l'exportation des produits tropicaux.

L'indigène suffit donc, semble-t-il, à s'enrichir lui-même et à enrichir la Colonie : point n'est besoin d'appeler et de sou- tenir des colons.

Envisagé sous cette forme, le développement économique d'une grande colonie paraît si simple et si peu coûteux, que bien des administrations coloniales ont essayé sa réalisation. Elles ont invité les indigènes à cultiver ou cueillir certains produits propres à l'exportation, L'invitation était accom- pagnée d'une pression plus ou moins forte, pour vaincre la paresse native des populations tropicales.

Deux applications mémorables de cette méthode furent organisées pendant le siècle passé : l'une par les Hollandais à Java (cultures diverses), l'autre par les Belges en Afrique cen- trale (caoutchouc, ivoire).

Dans les deux cas, les résultats matériels répondirent plei- nement à l'attente : les denrées exportables affluèrent, l'abon- dance régna dans les trésors coloniaux et des travaux d'intérêt général de la plus haute utilité purent être exécutés rapide- ment (constructions de voies ferrées, routes, canaux, bateaux à vapeur, etc.).

L'expérience a donc confirmé les espoirs de la théorie : lors- qu'on astreint une population de plusieurs millions d'hommes à fournir par tête une certaine somme, même minime, de mar- chandises ou de travail, on obtient immédiatement de grandes quantités de produits.

Mais cette efficacité est contrebalancée par de sérieux incon- vénients et par de graves dangers.

Dans les deux cas ainsi cités, le système fit faillite au point de vue moral, les indigènes ayant été obligés de travailler dans de mauvaises conditions, et moyennant une rémunération insuffisante.

On a reproché à ces méthodes d'avoir mis à la base de la production agricole ou des cueillettes une obligation, forçant l'indigène à travailler même contre son cjré. L'intensification de la production mène aisément à des abus, surtout si la colo- nie est dépourvue de moyens de transport, de sorte que

204

l'indigène ne doit pas seulement cultiver pu récolter, mais aussi transporter.

D'autre part, si l'indigène est entièrement libre soit de travailler, soit de s'abstenir de tout effort, aucun progrès ma- tériel ni moral n'est réalisable.

Et dès qu'on examine de près tout ce qui est nécessaire pour établir la production agricole par l'indigène, on s'aperçoit que cette réalisation n'est pas aussi facile qu'elle paraissait l'être, et qu'elle exige de sérieuses dépenses de la part de l'Etat.

En fait l'extension de l'agriculture indigène, et d'une façon générale le développement économique d'une colonie à l'aide des indigènes est une entreprise délicate, qui doit être orga- nisée avec beaucoup de prudence. Conçue autrement, elle est dangereuse pour les populations et pour l'avenir de la colonie.

Nous examinerons donc avec quelque détail les conditions dans lesquelles se présente l'agriculture indigène congolaise et ce qui peut être fait pour développer cette agriculture au profit des indigènes eux mêmes et de la Belgique sans encou- rir les inconvénients qui ont signalé autrefois des tentatives similaires.

*

Disons, pour fixer les idées au sujet des possibilités de l'agriculture indigène, que le nombre des habitants capables de participer activement aux travaux agricoles doit être de cinq àsix millions.

Ce nombre comprend les hommes et les femmes adultes, ainsi que les enfants âgés de 7 à 8 ans et plus.

Les divers travaux de l'agriculture sont répartis fort inéga- lement entre ces diverses catégories d'habitants : les femmes en supportent la plus forte part, et c'est un fait dont il faut toujours tenir compte lorsqu'on projette une extension des cultures indigènes.

Donnons d'abord une idée générale de la façon dont l'indi- gène pratique l'agriculture.

Au Congo, comme d'ailleurs dans presque toutes les régions occupées par des peuples primitifs, l'homme prend une part assez faible aux travaux agricoles proprement dits : il se

HHHH^BI

205

réserve les labeurs plus nobles et plus excitants, tels que la chasse et la guerre et certains ouvrages trop fatiguants pour pouvoir être effectués par les femmes : par exemple l'abattage de la forêt en vue du défrichement de nouveaux terrains.

En Afrique, comme en Europe, les femmes et les enfants d'un certain âge prennent une part active au travail des champs. Mais au Congo, la femme est le cultivateur principal. Dans le plus grand nombre des tribus l'homme adulte ne tra- vaille guère aux cultures. Les femmes et les enfants participent largement aussi au portage : la femme est souvent l'esclave et la bête de somme, et mène une vie dure et épuisante.

La plupart des peuplades indigènes pratiquent l'agriculture exclusivement en vue de leur alimentation : elles ne cultivent pas de produits destinés à l'exportation, sauf sur l'ordre de l'Etat, ordre qui se traduit actuellement par l'obligation de payer l'impôt annuel.

Le climat chaud et humide provoquant une végétation active, l'indigène pourrait se procurer très facilement et en abondance, les récoltes nécessaires à son alimentation, mais il ne s'en donne pas toujours la peine.

Un grand nombre de peuplades sont franchement agricoles, cultivent de fortes étendues de terrain et alimentent des marchés importants.

Les rapports des Agronomes de district (1) montrent la grande diversité des cultures de ces indigènes, et les espèces et variétés nombreuses qu'elles utilisent.

Toutefois, l'étendue cultivée par chaque famille est presque toujours faible et souvent inférieure aux besoins. Aussi les disettes sont-elles communes; de vraies famines se produisent quoique beaucoup moins fréquemment qu'autrefois.

Certains indigènes, d'ailleurs, sans appartenir aux peuples chasseurs et pêcheurs proprement dits, méprisent le travail agricole et cultivent à peine de quoi se nourrir pendant quel- ques semaines. Ils passent le reste de l'année dans les bois, à la recherche de fruits, de racines, champignons, insectes, etc., dont ils se nourrissent misérablement.

Le noir pratique quelques petits élevages : volailles, chèvres, moutons, porcs, chiens comestibles. Sur la frontière orientale, il fait aussi de grands élevages de bêtes à cornes.

(1) Voir les monographies insérées dans le Bulletin agricole du Congo belge publié par la Direction de l'Agriculture du Ministère des Colonies.

206

Tl s'habille encore souvent d'écorces ei de peaux, mais adopte de plus en plus les étoffes européennes et recherche les menus objets d'habillement, d'ornement, de quincaillerie, etc., importés d'Europe.

On reproche au noir d'être paresseux C'est injuste.

Son idéal est de mener dans son village, au milieu des siens, l'existence indolente qu'adorent tous les habitants des pays chauds, qu'ils soient blancs ou noirs. Cet idéal est bien naturel, et n'est qu'une conséquence inévitable du climat. Nous en reparlerons plus loin.

Dès qu'il a ramassé la somme nécessaire au paiement de l'impôt, l'indigène reprend sa vie ordinaire.

Il n'est pas, comme l'agriculteur européen, désireux d'accu- muler de l'argent, des meubles ou d'autres biens; l'appât du gain n'existe pas pour lui; l'économie et le souci de la richesse lui sont inconnus; il se contente de vivre. Plus il gagne par journée de travail, plus vite aussi il se repose.

Aussi ne suffit-il nullement, pour introduire une culture nouvelle ou faire étendre des plantations, d'exposer à Tindi- gèue le bénéfice que ces travaux lui procureront.

Cette démonstration pourra tout au plus convaincre quelques individus plus intelligents que la masse, mais celle-ci ne sui- vra pas. Bien plus, l'expérience acquise en cette matière au Congo et dans les autres colonies africaines, montre que les indigènes, même lorsqu'ils ont pris les meilleures résolutions et fait les promesses les plus formelles, négligent vite et aban- donnent le plus souvent les nouvelles cultures, surtout s'il ne s'agit pas de cultures vivrières.

Bien que certains progrès soient réalisés chez les noirs qui vivent près des centres de population européenne et chez les soldats licenciés, la grande masse des indigènes vit et travaille encore de la façon que nous venons de décrire.

* *

I L'agriculture pratiquée actuellement par les indigènes repose

, sur deux groupes de spéculations agricoles :

i a) Les cultures d'alimentation familiale ou cultures vivrières,

(et quelques petits élevages) faites en vue de l'alimentation de

l'indigène, de sa famille et subsidiairement de ses voisins

(manioc, bananes, maïs, haricots, sorgho, patates, arachides,

ASHafli!

H

207

«te). De grands élevages de bétail indigène ne se rencontrent que sur la frontière orientale et dans le Ruanda-TJrundi.

b) Les cultures de rapport, de vente ou d'exportation, dont les produits sont vendus à l'Etat, au commerce ou dans les marchés des agglomérations européennes et des mines. Elles comprennent des cultures viurières (manioc, bananes, céréales, etc.) et depuis quelque temps, des cultures dites d'exportation, qui sont ordinairement des cultures industrielles (coton, pal- miers, sésame, arachides, etc.).

De ces deux groupes, le premier, formé des cultures alimen- taires, est encore de beaucoup le plus important comme quan- tités et comme valeurs.

Un indigène adulte consomme par jour environ un kilo de farineux ou son équivalent. Ajoutons environ 1/2 kilo par tête et par jour d'autres produits cultivés, arachides, haricots, etc. (1). La production totale des cultures vivrières congo- laises doit donc atteindre au moins 10,000 tonnesde farineux par jour, soit en chiffres ronds, 4,000,000 de tonnes de fari- neux par année.

Cette production importante n'apparaît pas dans les sta- tistiques, mais il doit en être tenu compte lorsqu'on étudie l'activité agricole et la capacité productrice des indigènes de la -Colonie.

Il y a lieu, du reste, de l'augmenter, car un assez grand nombre de tribus indigènes ne cultivent pas suffisamment pour s'alimenter de façon normale.

En tous cas, il ne peut être pris de mesures qui diminuent cette production vivrière : les travaux économiques, le por- tage, les cultures d'exportation, doivent donc être organisés avec toute la modération voulue pour qu'ils ne puissent con- trarier la culture des plantes alimentaires.

Quant aux cultures de rapport ou d'exportation plantées par les indigènes, leur importance est encore très faible. Elles ne comprennent guère que des cultures de riz, de coton et de palmiers.

A la suite des expériences pratiques faites par l'Etat pen-

(I ) Ce chiffre est basé sur une population d'environ 7 millions d'habitants. En l'absence d'un recensement conrplet de la population, tous les calculs Reproduction et de consommation ne peuvent être qu'approximatifs.

2Û8 -

dant la guerre, la production du riz fut développée en 1917 et 1918 dans une partie de la Province Orientale.

Un essai de plantation de coton, organisé par l'Etat chez le& indigènes du Maniéma et des régions voisines de Lusambo (Sankuru-Kasai), donna également des résultats intéressants.

Pour favoriser la culture du riz et de coton, sans exagérer le travail imposé aux indigènes, l'Etat construisit à Stanley- ville et Kindu, en 1917-18 et 19, deux moulins à vapeur pour la décor ticat ion du riz. (Ils ont été repris récemment par une société privée). En 1918 et 1919, il acquit aux Etats-Unis plusieurs égreneuses à bras et deux usines à vapeur pour l'égre- nage du coton; ces usines sont en cours de montage; elles seront dans la suite cédées à des particuliers.

D'autres cultures de rapport, d'une certaine importance, ont été faites par les indigènes en diverses régions de la Colonie : palmiers, ricin, froment, pommes de terre, légumes d'Europe, etc. Les quantités récoltées sont faibles jusqu'ici et n'ont inté- ressé que les marchés locaux, mais certaines cultures, celle du palmier Elaeïs par exemple, se développent assez rapidement.

Toutes ces extensions de cultures ont été réalisées pendant la guerre sous la pression de l'impôt et par ordre de l'Etat, mais les récoltes furent vendues par les indigènes à leur pro- fit. L'Etat réquisitionna les produits, établit des prix minima et décida de consacrer le bénéfice réalisé pendant la guerre, à des travaux utiles à l'indigène (voies de communication, outil- lage). Depuis l'armistice le commerce de ces récoltes est libre.

Ces expériences d'extension des cultures indigènes ont donné des renseignements précieux.

Ayant ainsi une idée générale de l'agriculture indigène congolaise, voyons les conditions qui entravent ou retardent son développement, comparativement aux progrès agricoles des populations indigènes d'autres pays.

Cette étude aura son utilité, car nous voyons fréquemment, dans les écrits et discours relatifs à la Colonie, méconnaître entièrement les conditions respectives des populations afri- caines que l'on met en comparaison.

L'agriculteur congolais opère dans des conditions peu favo- rables, provenant de ce qu'il est un sauvage, rendu plus indo-

209

lent que d'autres par la grande chaleur ; qu'il habite un pays fortement boisé, de nature généralement sablonneuse; qu'il manque d'outils et de bétail; qu'il est obligé d'effectuer à dos d'homme un portage exténuant et d'accomplir bien des travaux autres que la culture proprement dite.

Nous examinerons avec quelques détails chacun de ses désavantages,

Un premier point qu'il ne faut jamais perdre de vue, c'est que le nègre congolais est encore un sauvage, un bon et brave sauvage si l'on veut, mais dont les parents étaient encore, il y a quelques années, plongés dans la barbarie la plus carac- térisée. Le congolais ne peut donc être comparé aux popula- tions indigènes beaucoup plus anciennement civilisées, ou ayant subi depuis des siècles l'influence de races supérieures au point de vue économique telles que les races européennes et les races arabes, hindoues, etc.

La plupart des tribus congolaises étaient, il y a cinquante ans, composées de féroces cannibales, passant leur temps à guerroyer contre les villages et tribus voisines, pour capturer des esclaves, des femmes ... et des prisonniers destinés à la boucherie. Le cannibalisme était presque général et pratiqué en toute innocence ; les premiers explorateurs nous racontent comment les chefs nègres les recevaient cordialement dans leurs habitations, tandis que leurs femmes faisaient soigneu- sement rôtir au foyer domestique de gros morceaux de chair humaine.

Je ne rappelle ce détail que pour insister sur le fait qu'on ne peut pas attendre de ces populations centre-africaines une évolution morale et économique rapide et complète.

En conséquence, lorsqu'on étudie ce qu'il y a lieu de faire au Congo, on ne peut s'appuyer trop sur ce qu'on réalise chez les Sénégalais, les Marocains, les Tonkinois, les nègres de la Côte d'ivoire, les Arabisés de la Nigérie ou les nègres déjà plus ou moins civilisés du Brésil ou des États-Unis.

Ces comparaisons seraient presque toujours défectueuses. Le nègre du Congo est encore, au fond, un pur sauvage, ayant les qualités et les défauts d'un être très primitif et devant être traité en conséquence.

Les résultats obtenus par l'Administration belge sont fort

210

remarquables déjà, puisque le cannibalisme et les guerres et luttes intestines ont disparu, et que Tordre et la sécurité régnent normalement dans toute l'étendue de la Colonie.

Comme tous les sauvages, le nègre congolais n'aime pas les travaux soutenus et fatiguants, qu'il abandonne volontiers à sa femme.

Ceci m'amène à parler de l'indolence ou paresse du noir. C'est un défaut que certains Européens lui reprochent amère- ment, et souvent très injustement. En fait ce défaut existe, mais s'il se voit chez le nègre congolais, il se constate aussi chez tous les habitants des pays chauds.

L'indolence est un effet naturel et inévitable des hautes tem- pératures. Elle se manifeste aussi bien chez les blancs que chez les hommes de couleur. Il est notoire par exemple que les populations du pays du Midi sont en général moins actives que celles du Nord; qu'aux Etats-Unis la plus grande initia- tive et l'activité maxima sont l'apanage des Etats septentrio- naux ; que tous les peuples de race blanche établis sous des climats tropicaux doivent travailler plus lentement et moins activement que dans nos climats plus froids et plus favorables aux dépenses d'énergie.

Le nèore est donc bien excusable s'il se montre indolent, voire même paresseux. Mais son défaut d'activité naturelle et de besoins n'en est pas moins un gros obstacle aux progrès de toutes les formes d'agriculture, de commerce et d'in- dustrie, d'autant plus qu'il se double d'une réelle indifférence pour l'accumulation d'argent ou de richesses mobilières ou im- mobilières.

En fait, s'il n'était obligé de gagner assez d'argent pour payer l'impôt annuel, le nègre se contenterait de faire cultiver par sa femme les aliments indispensables, et ne s'occuperait guère que de chasse, de pêche et de palabres. C'est ce qu'il fait d'ailleurs dans les régions reculées, dont les populations ne sont pas encore assez dociles pour que l'État puisse leur imposer le paiement d'un impôt suffisant.

C'est à peine si le noir, livré à lui-même, veut cultiver assez de terrain pour nourrir sa famille : en bien des cas, il se con- tente de cultures réduites, et souffre volontiers la disette plutôt que d'augmenter l'étendue annuelle de ses défriche- ments.

Lorsqu'on lui recommande de cultiver des produits expor-

211

tables, qu'il pourra vendre avec grand bénéfice, il les essaie sans enthousiasme, et seulement pour obéir au Commissaire du district : il n'a pas le souci d'amasser des économies. Privé de surveillance et de stimulant, il néglige bientôt les cultures nouvelles.

On signale bien quelques endroits le noir paraît heureux de trouver du travail dans les mines ou pour le portage ; mais dans la plupart des cas, il s'agit de régions l'indigène trouvait jusqu'ici très difficilement le moyen de gagner un peu de monnaie européenne pour s'acquitter de l'impôt. Aussitôt qu'il a réuni l'argent nécessaire à ce paiement, il retombe dans son indolence naturelle. Les illusions que l'on s'est faites à ce point de vue sont aujourd'hui abandonnées.

11 est vrai que nous constatons au Congo que la perception de l'impôt indigène est chaque année plus considérable. Mais <îe n'est pas la conséquence d'un progrès économique : au con- traire, les progrès économiques et notamment les progrès agricoles sont les résultats de la perception de l'impôt, et cette perception elle-même est le fruit de la contrainte, sans laquelle le noir ne paierait et ne travaillerait pas. La situation est la même dans les autres colonies centre-africaines.

L'impôt indigène, facteur principal et presque unique du progrès en Afrique centrale, a donc vaincu en partie l'indo- lence native des populations congolaises. Mais le résultat est encore incomplet, et n'influe guère, jusqu'ici, sur le développe- ment de l'agriculture, l'indigène se procurant de l'argent sans devoir faire des cultures.

En effet, le nègre trouve dans les forêts et savanes les aman- des de palme, l'huile de palme, le caoutchouc, le copal, l'ivoire, le gibier, le poisson, dont la vente lui procure l'ar- gent nécessaire au paiement de l'impôt ; il y ajoute le produit de portages, de quelques cultures d'arachides, manioc, bana- nes ; de la vente de quelques chèvres, moutons ou volailles. Exceptionnellement il va travailler quelques mois dans une entreprise minière ou dans un chantier de construction.

Et dès qu'il a reçu de quoi payer l'impôt, il se repose, et refuse de travailler soit pour le blanc, soit pour lui-même.

Un deuxième point à considérer, c'est que le nègre congo-

212

lais n'est pas placé, au point de vue des travaux de l'agricul- ture, dans une situation aussi avantageuse que beaucoup d'au- tres indigènes d'Afrique ou d'autres continents.

S'il est vrai qu'il jouit d'un climat très favorable à la végé- tation, par suite de l'abondance des pluies, il souffre par con- tre de la prédominance de la forêt, de la nature généralement sablonneuse du sol et de la fréquence des mouches tsé-tsés, trois circonstances qui lui opposent au point de vue agricole de sérieuses difficultés.

La grande étendue des forêts oblige notre indigène à se livrer à des travaux très durs. Pour défricher les terrains qu'il veut cultiver, il doit abattre une forêt comparable ou supérieure en densité à nos plus forts peuplements forestiers européens. Et ce travail doit être exécuté au moyen d'instru- ments rudimentaires : une petite hachette au fer étroit cons- titue tout l'outillage du défricheur.

De sorte que lorsqu'on demande aux noirs d'augmenter l'étendue de leurs défrichements, on leur impose en fait un travail considérable, devant lequel tous les Européens recu- leraient.

Et ce travail est d'autant plus important qu'il doit être renouvelé presque chaque année, par suite de la nature des terrains. s

La grande majorité des sols congolais, et, notamment pres- que tous les sols du Haut-Congo, sont de nature sablonneuse ou latéritique. et formés le plus souvent de grains d'assez fortes dimensions. Ce sont souvent des sables grossiers.

Lorsque ces terrains sont défrichés et labourés, ils deviennent extrêmement perméables à l'air et aux eaux de pluie. L'humus qu'ils renferment et qui provient de la décom- position des débris de la forêt ou de la brousse, se détruit d'autant plus rapidement qu'il fait très chaud et que l'aération intense donne beaucoup d'activité aux milliards de microbes qui peuplent le sol. Les éléments solubilisés par ces phéno- mènes sont entraînés par les pluies. Les eaux filtrent rapide- ment à travers des terres aussi perméables les soumettent à des lavages répétés et les épuisent en peu de temps. Ce phé- nomène n'est pas spécial aux terres du Congo : il se constate dans tous les terrains formés de sables à gros grains.

Les terres sablonneuses ont au Congo les mêmes qualités et les mêmes défauts qu'en Belgique. Les sables se travaillent

213

facilement et peuvent donner par la fumure de très fortes récoltes, ce qui est prouvé par les belles cultures des Flandres belges. Toutefois ils s'épuisent aussi fort rapidement si le culti- vateur ne prend soin d'entretenir leur fertilité par l'application régulière de fumures. Dans les terres légères des Flandres la fumure est répétée tous les deux ou trois ans et même plus souvent.

Mais l'indigène de l'Afrique centrale, un sauvage, ne donne à ses terrains aucune fumure et les épuise en deux ans. Il se voit donc obligé de défricher sans cesse de nouvelles terres, riches en humus, qui donneront de bonnes récoltes pendant deux ou trois ans, et seront alors abandonnées à la brousse et à la forêt. Cette façon d'utiliser la fertilité naturelle du sol est ce que l'on appelle l'agriculture de rapine (roofbouw). Elle carac- térise l'agriculture de tous les peuples primitifs, et fut égale- ment pratiquée en Belgique, il y a des siècles.

Pour le planteur européen, cet appauvrissement rapide des sols congolais n'offre guère d'inconvénients : il sait comment entretenir la fertilité par la rotation, l'emploi de plantes amé- liorantes, de fumures organiques et d'engrais chimiques. Il comprend vite la nécessité de maintenir à la surface du sol une végétation protectrice ou tout au moins une couche de débris végétaux.

Il n'en est pas de même pour l'indigène, qui ne connaît pas la fumure, épuise vite ses défrichements et s'astreint par le fait même à défricher sans cesse.

Il s'impose donc involontairement un dur travail, et malgré ce déploiement d'énergie, il n'arrive jamais à cultiver une sur- face suffisante pour retirer de sa culture une aisance analogue à celle du plus petit cultivateur européen. Il est même semi- nomade, ses cultures et son habitation devant être déplacées périodiquement, pour être établies sur de nouveaux terrains, récemment défrichés, et donc fertiles.

De une difficulté sérieuse pour l'extension de l'agricul- ture. Il ne suffit pas que l'indigène fasse une fois pour toutes, comme l'a fait l'Européen (1), un grand défrichement : le résultat

(1) La Belgique était autrefois, elle aussi, couverte de forets qui furent défrichées petit à petit. Les terrains agricoles ainsi obtenus furent con- servés en état de culture par l'emploi périodique de fumures diverses. Privés de fumures ils s'épuiseraient rapidement et devraient être aban- donnés à la brousse et finalement à la forêt comme les terres du Congo.

214

estpassager. La surface cultivée tombe, aprèsdeux ou trois ans, à ce quelle était auparavant. A moins toutefois que l'indigène ne soit amené ou obligé à faire chaque année un défrichement de très grande superficie, travail épuisant, dont il se lasserait bientôt.

A ces difficultés s'ajoute le gros obstacle résultant de la fréquence des tsétsés et entrainant l'impossibilité d'entretenir du bétail et de travailler au moyen d'attelages.

Tous les travaux de culture proprement dits et les trans- ports de récoltes seraient relativement faciles si l'indigène pouvait employer des animaux de trait, labourer à la charrue, battre au moyen d'attelages, transporter sur des traineaux ou charrettes ou encore au moyen d'animaux de bât.

Mais la grande fréquence des mouches tsétsés dans presque tout le territoire rend ordinairement impossible l'emploi éco- nomique d'animaux de trait pour la culture des champs et les transports sur route.

Alors que dans toutes lés colonies d'Amérique et d'Asie, et même dans l'Afrique du Sud, la Ehodésie et le Soudan, les indigènes et les blancs labourent, et transportent les récoltes, au moyen de bœufs, de buffles, de chevaux, d'ânes et de mules, dont le travail revient à très bon marché, le nègre du Congo se voit privé de ces puissants facteurs de production agricole et de transport économique.

Le défaut de bétail n'entraîne pas seulement des difficultés de transport : il limite aussi les cultures indigènes, élève le coût des travaux, et empêche d'entretenir la fertilité du sol par l'emploi de fumures normales.

Les tsétsés sont aussi extrêmement nuisibles à l'agriculture par les hétacombes qu'elles exercent dans les villages; par le& dangers qu'elles causent dans l'exploitation des terres de vallée, qui sont toujours les plus fertiles ; enfin par les entraves qu'elles apportent à la navigation des pirogues dans les petits cours d'eau et même sur le fleuve.

De multiples recherches ont été faites pour protéger le noir et le bétail contre les effets nocifs des piqûres. Elles n'ont donné jusqu'ici aucun résultat pratique. Il nous reste l'espoir que le remède sera trouvé quelque jour, mais cet espoir est bien faible encore.

■IHB

215

"Nous devons donc admettre, provisoirement, que le mal est sans remède. Le nègre doit effectuer les transports, cultiver les terres, et entretenir leur fertilité, sans pouvoir recourir, comme on le fait presque partout ailleurs, à l'emploi des ani- maux domestiques. Cette condition constitue un fort sérieux obstacle au développement de l'agriculture .

* * *

L'agriculteur indigène n'a donc pour cultiver la terre que la force de ses bras. Il ne possède ni charrue, ni herse. Tout le travail du sol doit être fait au moyen de houes de petite dimension, de fabrication indigène ou européenne.

Et cet outil indispensable, de même que les hachettes, ne se trouvent chez l'indigène qu'en nombre absolument insuf- fisant : l'outillage le plus élémentaire fait souvent défaut.

Dans toute la Colonie, mais surtout dans la partie centrale, privée de mines de fer, les indigènes ne possèdent pas les instruments (houes, haches, machettes) nécessaires au travail agricole, ou n'en ont, dans chaque village, qu'un petit nombre d'exemplaires. Les instruments vendus par le commerce sont non seulement très coûteux, mais le plus souvent aussi de mauvaise qualité.

On signale des districts cotonniers les indigènes n'ont pour retourner la terre que des débris de couteaux et de houes. Dans d'autres districts il n'y a que deux ou trois houes par village et encore sontce de vieilles houes usées, provenant des anciennes plantations de l'Etat et possédées par le chef. Pour nettoyer les routes, certains indigènes n'ont que des cou- teaux, et doivent parfois gratter le sol avec leurs mains. Ail- leurs des commerçants vendent, 3 à 7 francs des machettes en fer, qui se plient ou se brisent au moindre choc.

Il faudrait que l'Etat, pour remédier à la pénurie d'instru- ments agricoles, introduise au Congo un nombre considérable de houes et de hachettes de bonne qualité, les vende à prix coûtant, et en distribue aussi un bon nombre en guise de primes aux indigènes qui soignent le mieux leurs cultures.

On peut estimer à 20,000 environ le nombre des houes et des haches qu'il faudrait importer dans chaque district, ce qui représente déjà pour l'ensemble de la colonie une assez forte somme.

216

* *

Mais lorsque le nègre et sa ou ses femmes ont solutionné les difficultés signalées ci-dessus, qu'ils se sont armés de haches et de hoaes, qu'ils ont défriché leur terrain et cultivé leurs champs, ils se trouveut en présence d'une difficulté nou- velle, plus redoutable que les autres : ils doivent transporter la récolte jusqu'au lieu de livraison, éloigné souvent de plu- sieurs journées de marche.

Une augmentation considérable du portage résulte néces- sairement du développement des cultures et cueillettes d'ex- portation.

Un cultivateur européen ne doit livrer ses récoltes qu'à petite distance de la ferme, et dispose de chariots et d'animaux de trait qui rendent les transports faciles, économiques et rapides. Les petits agriculteurs et maraichers d'Europe em- ploient à cet effet le chien, l'âne, le poney, la vache ou le bœuf. Le grand fermier, qui récolte sur 100 hectares environ 1,200,000 kilogr. de produits, attelle des chevaux et des bœufs, trainant sans grand effort des charges de plusieurs milliers de kilogr.

Tout autre est la condition de l'agriculteur congolais. Il ne possède ni instruments de transport ni attelages : il doit por- ter sa récolte sur sa tête. Et de plus il doit la livrer à grande distance, souvent à 50, 100, 150, même 200 kilomètres. Il est courant pour lui de devoir porter ses récoltes aussi loin que de Bruxelles à Ostende ; parfois même il doit franchir uue dis- tance égale à celle qui séj>are Ostende de Liège. Et chaque fois il ne peut porter que 25 à 30 kilogr.

Ce portage, exécuté par une température de 25 à 35 degrés, exige une dépense de forces et des fatigues dont nous pouvons difficilement nous faire une idée en Belgique. Les chiffres suivants la feront bien comprendre.

Supposons un indigène habitant à 3 jours de marche ou 75 kilomètres du fleuve ou du chemin de fer il doit livrer sa récolte : pour le Congo c'est une distance moyenne. Supposons qu'il ait ensemencé un demi hectare de riz et récolté 500 kilogr. de riz brut ou paddy. Il devra diviser cette récolte en 20 charges de 25 kilos, et pour chacune faire trois jours de marche à l'aller, et deux jours pour le retour sans charge; donc cinq jours par charge et cent jours pour la récolte

o

C/2 f-i

PQ 2 2 S

£$

c3 S

-M

i '— >

" x flT-,2

II

^ -o

•X «

ci o

-m '53

x .

"h O

ci

O c3

'S 13

^*

> ci

I o*

217

entière. Le nombre d'heures démarche effective par jour varie de quatre à six heures.

Il aura donc, pour livrer son produit, voyagé sans arrêt pen- dant plus de trois mois ! S'il portait pour le compte d'un négociant il aurait reçu au minimum 50 centimes par jour de portage. Mais comme la récolte lui appartient il ne touchera que le prix de vente, qui sera au plus de 10 centimes par kilogramme, soit 50 francs.

De sorte que son dur travail de portage et six mois de tra- vaux agricoles, au total neuf mois, ne lui auront rapporté que 40 à 50 francs.

Il aura été absent de son village pendant plus de trois mois. S'il se fait aider par sa femme, ce qui est souvent le cas, le portage aura duré moins de temps, mais la famille aura été désorganisée pendant deux mois, et la recette ne sera pas plus forte.

Mais combien d'indigènes vivent à quatre, cinq, et même sept à huit jours de marche des lieux de livraison ? Ils devraient porter pendant cinq à six mois et même plus, ou se résoudre à vendre leur récolte sur place, à moitié prix. On conçoit qu'ils ne soient guère disposés à faire de grandes plantations, qui doubleraient leurs fatigues.

Un tel régime est incompatible avec la forte et rapide extension que Ton voudrait donner à l'agriculture indigène. Il oblige soit à ne développer les cultures nouvelles que dans les villages situés à proximité des voies de communication, soit à fournir un moyen de transport autre que le portage, permettant à l'indigène d'étendre ses cultures, et à la Colonie d'accroître rapidement ses exportations. Mais il faudra consacrer à l'établissement de transports sur route et à l'équipement des rivières, des capitaux considérables.

Jusqu'ici les moyens de transport font défaut dans la Colo- nie ; aussi les quantités livrées sont elles peu importantes. Qu'est-ce qu'une exportation de 35,000 tonnes de palmistes ? c'est à peine le poids des récoltes que produisent en Belgique une vingtaine de fermes de 100 hectares. C'est au plus la récolte produite par une seule commune de Belgique.

Pour faire produire par le Congo des récoltes exportables quelque peu proportionnées à sa superficie, il faudra donc organiser partout des moyens de transport d'une capacité con- forme à la productivité de chaque région. On pourra plus tard

218

avoir recours à des animaux domestiques, au buffle notam- ment ; mais c'est un progrès qui demande quelques dizaine d'années pour devenir pratique.

Il est vrai que le Congo est sillonné par de nombreux cours d'eau, navigables par des pirogues soit sur toute leur étendue, soit tout au moins sur des parcours considérables. Les iüdi- gènes utilisent énormément ces voies navigables ; la plupart des hommes et des femmes sont des pagayeurs et navigateurs émérites. Les charpentiers indigènes excellent à transformer des troncs d'arbre en pirogues spacieuses, dont quelques unes portent 5 à 10 tonnes de marchandises. La majorité de ces esquifs ne portent que quelques centaines de kilos, mais n'en sont pas moins capable de supprimer beaucoup de portage.

Malheureusement la navigation de nombreuses rivières est rendue dangereuse pour le noir par l'abondance de la mouche tsé-tsé Palpalis. Voyager fréquemment en pirogue, c'est s'ex- poser, s'offrir en quelque sorte à la maladie du sommeil, si le fléau est commun dans la région. La Palpalis se tient, en effet, au bord des cours d'eau et des marais, sous l'ombrage des buissons. Elle attaque les voyageurs dont l'embarcation se rapproche des rives, ou circule dans les marécages. Un noir peut être piqué des milliers de fois sans qu'il en résulte aucun danger, si les mouches qui l'ont assailli ne sont pas contami- nées. Par contre une seule piqûre d'une tsé-tsé abritant les germes de la maladie, suffit pour implanter dans l'organisme un mal que la science n'a pu guérir jusqu'ici.

Beaucoup de rivières sont d'ailleurs encombrées de troncs d'arbres, abattus par les tornades ou par l'érosion des rives.

Enfin nombre de trajets s'écartent forcément du parcours des rivières, sur des distances considérables, et doivent néces- sairement être franchies par portage.

De sorte qu'au total l'admirable réseau de rivières qui sil- lonne le Congo Belge, est loin de solutionner pour l'indigène la question des transports. S'il veut produire beaucoup, le nègre doit s'astreindre à faire aussi beaucoup de portage, et cela indépendamment des multiples travaux qui lui sont de- mandés ou qu'il ne peut supprimer : construction et répara- tion des habitations, chasse et pêche, etc.

Ces explications sur les travaux nécessaires à l'établisse- ment et à l'augmentation des cultures, sur les moyens et outils imparfaits qui sont à la disposition de l'indigène, et sur l'ef-

219

fort considérable exigé pour le portage, feront comprendre au lecteur que le développement de l'agriculture indigène n'est pas aussi facile qu'on se le figure à première vue et qu'il eu- traîne pour le noir un surcroît de fatigue dont il n'est natu- rellement guère enthousiaste.

*

On s'est fait illusion au sujet des dépenses et du travail qui incombent aux gouvernements coloniaux lorsqu'ils veulent développer l'agriculture indigène dans un territoire d'étendue considérable. Pour développer cette agriculture ilfaut du per- sonnel, du matériel, des moyens de transport, en proportion de la superficie territoriale. Dans une colonie aussi énorme que le Congo, le développement de l'agriculture indigène exige donc de larges crédits.

Prenons comme exemple les dépenses nécessaires pour organiser une propagande agricole au moyen d'agronomes de district. Cette organisation, pour être sérieuse, nécessitera un nombreux personnel.

En effet, le Congo mesure 80 fois la superficie de la Bel- gique. Il est divisé en 22 districts, comprenant 200 terri- toires. Chaque district est en moyenne quatre fois aussi grand que la Belgique entière, et sa surface, couverte en grande partie de forêts, est dépourvue de moyens de communication rapide. Les villages indigènes sont éparpillés dans cette im- mensité, et les cultures de chaque village sont souvent situées à une assez grande distance de l'agglomération.

Or, pour agir efficacement au point de vue du développement de l'agriculture indigène, l'agronome chargé de la propagande et de la surveillance des cultures nouvelles devrait pouvoir visiter celles-ci au moins deux ou trois fois par an, ou même une fois par mois,

Il doit, en effet, commencer par expliquer aux indigènes la façon de cultiver les nouvelles récoltes, leur distribuer des graines, et parfois indiquer les terres convenant à cette cul- ture. Sous peine d'échec, il doit visiter la région une deuxième fois à l'époque les cultures doivent être nettoyées, ou dé- mariées, ou débarrassées de maladies ou d'insectes nuisibles. Une troisième visite est ordinairement indispensable et tou- jours fort utile, au moment commencera la récolte.

220

Faute de ces trois passages annuels, .l'agronome n'obtient qu'un résultat bien inférieur aux espérances, et constate, mais trop tard, que beaucoup d'indigènes ont planté en mau- vais terrain, ou négligé de remplacer les plantes disparues, ou de détruire les mauvaises herbes, ou de récolter au moment voulu.

En fait, il est facile d'exécuter un semblant de propagande agricole, qui donnera peu de chose; mais pour faire une pro- pagande efficace et obtenir de résultats sérieux, il faut de nombreuses visites dans les villages, et une surveillance constante.

La nécessité et l'effet de ces visites répétées est affirmée par la plupart des Commissaires de district et montrée bien clairement dans les essais d'introduction de la culture du coton. Partout l'agronome a passé plusieurs fois par an, la récolte est excellente. Elle est défectueuse, parfois nulle, dans les régions l'agronome n'a pu passer qu'une fois.

Mais c'est un bien grand travail que de visiter deux ou trois fois par an les villages d'un district. L'unique agronome attaché actuellement à chacun des districts congolais ne saurait suffire à cette tâche : il faudrait au moins quatre ou cinq agro- nomes par district, et mieux encore un agronome par terri- toire, et pour l'aider une vingtaine de moniteurs indigènes.

La dépense nécessaire pour placer un agronome dans chaque territoire serait amplement payée par l'augmentation rapide de la production agricole et des perceptions d'impôt, mais elle atteindrait environ 25,000 francs par agronome. Car au traitement de cet agent s'ajoutent les frais de voyage, et de portage, le matériel de campement et de démonstration (l).

De sorte que pour donner cinq agronomes par district la dépense serait de 125,000 francs par district, et de 2 millions 750,000 francs pour toute la Colonie. Pour donner un agro- nome ou agronome adjoint par territoire, il faudrait une somme à peu près double; chaque agronome aurait encore à desservir une surface grande à peu près comme trois à quatre provinces belges.

Il suffit de ce dernier détail, pour qui connaît le travail d'un agronome en Belgique, pour être persuadé qu'on ne fera jamais rien de bien sérieux en agriculture indigène congo-

\\) Les indemnités viennent d'être augmentées.

221

laise aussi longtemps qu'on ne pourra nommer un agronome par territoire.

Cela ne veut pas dire qu'on doive les nommer tous à la fois : il est, en effet, bien des régions trop reculées et sans commu- nications, dans lesquelles il serait prématuré de commencer une action agricole intense. Mais dans les parties desservies par des rivières navigables et des chemins de fer, il faudrait sans tarder désigner un agronome pour chaque territoire.

Nous sommes encore bien loin toutefois de posséder le per- sonnel agricole voulu : il y a jusqu'ici un unique agronome par district. Ces fonctionnaires travaillent activement sous le contrôle des chefs territoriaux, mais ils sont dans l'impossibi- lité absolue de desservir utilement leurs énormes circonscrip- tions, et n'en voient qu'une fraction.

Pour rendre de réels services, l'agronome doit être bien préparé à sa mission. Il doit donc posséder une instruction agricole générale et avoir étudié spécialement l'agriculture tropicale. Il doit de plus connaître à fond son territoire, la langue, l'agriculture et les habitudes des indigènes qui l'ha- bitent. Ce serait courir à un nouvel échec que de confier la propagande agricole à des agents incompétents.

De plus la propagande doit être continue, et ne peut être interrompue pendant les congés ou les absences de l'agro- nome; celui-ci devrait donc avoir un adjoint, capable de le remplacer temporairement. Pour ne pas exagérer la dépense, l'agronome et son adjoint pourraient être chargés ensemble du service de deux territoires.

La nécessité d'un personnel agricole nombreux n'est plus mise en doute dans les districts l'on a essayé l'extension du riz et du coton : les autorités territoriales sont au con- traire unanimes à demander de l'aide, le développement de l'agriculture ayant ajouté à leur mission déjà surchargée, des besognes nouvelles et d'une amplitude considérable.

Des spécialistes très compétents devront étudier les mala- dies des plantes et les insectes nuisibles et indiquer aux agro- nomes des districts et territoires les mesures à prendre pour combattre ces fléaux. Nous avons aujourd'hui pour toute la Colonie un entomologiste et un mycologiste ; il est indispen- sable de disposer de ce personnel dans chaque province : il faudrait donc en quadrupler le nombre pour faire oeuvre réel- lement utile. Il en résultera une dépense nouvelle.

222

Additionnons les dépenses que nous venons d'indiquer : constructions de routes, achats d'appareils de transport, de bateaux et de tracteurs, construction de voies ferrées : outil- lage des indigènes; engagement d'agronomes Nous arrive- rons à prévoir une dépense annuelle de bien des millions de francs .

Il faudrait ajouter à cela des écoles pratiques d'agriculture, au moins une par district, pour former des moniteurs indi- gènes.

Le développement de l'agriculture indigène est donc une entreprise coûteuse, très coûteuse même, contrairement à ce qu'on s'est imaginé jusqu'ici.

Malgré toutes ces difficultés, la population congolaise, par suite de son nombre, est capable de produire, même par un travail des plus modérés, une quantité importante de produits agricoles d'exportation.

Mais le chiffre de la population mérite une attention parti- culière : il est, en effet, non seulement relativement peu élevé, mais encore exposé à une sérieuse diminution. Voilà des années que l'on parle de la dépopulation du Congo par suite surtout de la faible natalité et de la maladie du sommeil : cette dépopulation non seulement est réelle, mais menace de se pré- cipiter par suite de l'intensification exagérée de la production.

Le mal est si prononcé et si menaçant qu'il importe de s'y arrêter quelques instants, surtout lorsqu'il s'agit du dévelop- pement agricole.

La dépopulatibn de la Colonie vient de faire l'objet d'une publication officielle (l). Aux termes même du rapport au Roi de la Commission pour la protection des indigènes, cette dépo- pulation est réelle, rapide et alarmante; elle se manifeste dans tout le Centre Africain.

D'après le Rapport, la cause principale de la dépopulation dans le bassin du Congo est la maladie du sommeil, qui n'exis- tait autrefois que le long de la côte, et s'est introduite à

(i) Bulletin Officiel du Congo Belge, 5, 15 mai, 1920.

223

l'intérieur du continent à la faveur des voies de communica- tion et mouvements de population créés par les Européens. Le fléau a dépeuplé des régions entières ; il continue ses ra- lages de façon épidémique dans' les régions peuplées qu'il en- vahit actuellement, de façon sournoise dans les contrées dont la population est déjà clairsemée.

La maladie du sommeil dépeuple doublement l'Afrique equatoriale. D'un côté, elle tue les adultes, et de l'autre elle augmente la mortalité infantile et influe directement sur la natalité par la j>roportion considérable des avortements qu'elle détermine (1).

D'autres causes de dépopulation sont certaines maladies meurtrières que les nègres ont toujours connues, (les affec- tions pulmonaires aiguës et les dyssenteries) et des maladies nouvelles, inconnues autrefois du noir centre-africain : la tuberculose, la méningite cérébro-spinale, les fièvres typhoïdes et la grippe ou influenza. Toutes ont fait ou font encore de grands ravages parmi la population de diverses régions. Enfin, la syphilis enraie le repeuplement.

Le Rapport nous dit que le tableau est plus sombre encore. L'occupation européenne et le commerce ont modifié les con- ditions de vie des indigènes, ont diminué leur vitalité et les ont rendus réceptifs à toutes les maladies. Aussi la mortalité est- elle grande parmi les nombreux indigènes qui sont dépaysés par le recrutement de l'armée, l'exécution de routes et che- mins de fer, les travaux organisés par le commerce et l'in- dustrie.

Mais il n'y a pas seulement augmentation de la mortalité : il y a aussi ralentissement de repeuplement, et à ce point de vue aussi les chiffres cités dans le Rapport sont très inquié- tants. Sur une population recensée de 6,000,000 d'indigènes, il n'y a qu'un enfant par femme. Cela est à la maladie du sommeil, à la syphilis et à la vie anormale qu'entraîne la ré- colte trop intensive de certains produits.

Ce résumé de l'exposé de la Commission vient apporter une confirmation remarquable à ce que nous avions écrit l'an passé dans une étude sur l'avenir agricole de la Colonie (2).

(1) Rev. P. Greggio, cité dans le Rapport de la Commission.

(2) Le Congo Belge a-t-il un grand avenir agricole. Louvain, Uystpruvt . Conférence donnée à Bruxelles, le 13 juillet 1919.

224

» Deux circonstances spéciales se rapportant à la pénurie de

main-d'œuvre agricole doivent être signalées, disions-nous, car

elles auront un e influence évidente sur l'avenir de l'agriculture.

» La première est la diminution de population résultant de

maladies.

» En plusieurs régions de la Colonie, la maladie du sommeil a pris une extension inquiétante. Les efforts de l'Etat pour la combattre restent sans effet suffisant. L'accumulation d'un grand nombre d'indigènes en certains points et dans quelques cas la nature des travaux, semblent favoriser la contamina- tion. Telles sont les récoltes, cultures et constructions, entre- prises dans les terres basses, vallées et terrains marécageux, les tsét-sés sont nombreuses, et qu'affectionnent souvent le palmier élaeïs, les lianes, le copalier.

» La trypanosomiase ne fut pas seule à décimer les popula- tions : la grippe espagnole a prélevé dernièrement un tribut terrible dans toute l'Afrique méridionale et centrale, et enlevé des centaines de milliers d'indigènes. Succédant à la guerre africaine, dont le portage fut meurtrier dans toutes les colo- nies de l'Afrique centrale, cette épidémie a frappé cruellement une population déjà peu nombreuse, et dont la natalité est très faible.

» Une deuxième circonstance, à laquelle il est urgent de veiller, est Y extension des recrutements miniers, qui s'at- taquent aujourd'hui aux quelques fortes populations agricoles du centre de la Colonie. Bien des noirs, recrutés pour le tra- vail des mines, ne rentrent plus dans leurs villages, soit qu'ils succombent à la mortalité plus élevée des exploitations mi- nières, soit qu'ils se fixent dans d'autres villages ou dans les centres populeux.

» Il serait souhaitable que des populations déjà si éprouvées, vivant sous un climat débilitant, jouissent plutôt du repos et de la vie de famille que leur assurerait le travail agricole.

» Il faut qu'en cette question l'avenir ne soit pas sacrifié au présent, que l'on introduise le plus possible dans les mines une main-d'œuvre étrangère, et qu'on remplace le travail humain, dans une beaucoup plus large mesure, par le travail des ma- chines, comme on le fait couramment aux Etats-Unis.

Ces détails sur les maladies et la chute de la natalité ont

225

une importance extrême au point de vue de l'agriculture indi- gène et de l'avenir agricole et commercial de la Colonie.

Les indigènes du Congo, éprouvés par des causes multiples de dépopulation, doivent être les objets de très grandes pré- cautions. Toutes les causes qui produisent le dépeuplement doivent être combattues non pas seulement en paroles, mais en fait.

Nous n'en sommes pas encore arrivés là. Au contraire, une fièvre d'exploitation intensive s'est déchaînée dans toute la Colonie depuis la guerre, et produit déjà les effets signalés dans le rapport de la Commission.

Dès le retour de la paix il s'est dessiné un mouvement vigoureux vers l'intensification de l'exploitation des richesses coloniales. Des mots ont été lancés et répétés dans la presse qui ont fait impression : les journaux ont réclamé 1' « indus- trialisation » de l'exploitation coloniale ; on a cherché des hommes capables de « galvaniser » la production. La percep- tion d'un impôt élevé a été organisée avec soin dans toute les régions de la Colonie.

Cette industrialisation dépasse ce qu'il est prudent de faire dans une colonie en voie de dépopulation.

Si l'intensification ne portait que sur la production agricole des indigènes, le mal ne se produirait pas. De l'avis de tous les coloniaux, le travail à domicile est celui qui offre pour le nègre le moins de daugers et le plus d'avantages.

Stimuler la production agricole dans les villages ou dans des plantations à proximité des villages était donc un inoyen excellent à tous points de vue pour augmenter la richesse des populations et développer le commerce de la Colonie.

Mais la situation créée actuellement est tout autre. Loin de créer des plantations ou des cultures indigènes, l'effort se porte vers l'exploitation intensive des produits spontanés (caoutchouc sylvestre, huile et amandes de palme, copal) et des produits miniers (cuivre, or, étain, diamants), exploita- tions qui éloignent les indigènes de leurs villages. Les conclu- sions de la Commission montrent les résultats de cet excès d'activité coloniale.

Une multiplicité de travaux sont demandés aux populations indigènes, celles-ci doivent fournir des porteurs, produire des vivres pour les postes et les mines, frayer des sentiers ou pistes commerciales et les entretenir; construire des ponts

226

sur les rivières, et de longs viaducs pour la traversée des ma- récages ; bâtir des magasins, habitations et prisons ; fabriquer des pirogues et fournir les pagayeurs ; débrousser les pas- sages d'eau contre les tsé-tsés; chasser l'éléphant et le gibier; prendre du poisson ; récolter les fruits du palmier, le caout- chouc, le copal ; enfin, fournir des travailleurs pour les postes de l'Etat, pour les mines et pour le commerce.

Tous ces travaux et toutes ces récoltes sont d'une utilité incontestable, mais leur simple énumération montre qu'il est indispensable d'agir avec prudence et modération dans le développement de la Colonie, et qu'il est matériellement im- possible de réaliser par les moyens actuels les développements énormes et soudains que d'aucuns sousentendent lorsqu'ils parlent de « galvaniser » la production agricole et minière de la Colonie. En voulant aller trop vite, on s'expose à des acci- dents et même à des désastres.

Toutes les occasions devraient être saisies pour introduire de la main-d'œuvre étrangère et « aider » les Congolais dans l'exploitation de leurs richesses. Croirait-on que l'on suit une politique absolument contraire et que nos mines de cuivre s'efforcent de ne recruter qu'au Congo belge, alors qu'elles peuvent trouver des bras ailleurs?

Le résultat global d'une généralisation excessive des récoltes de produits spontanés et de la production intensive est que les indigènes sont enlevés de leur contrée d'origine pour de longues périodes : les recrutements de travailleurs pour l'Etat et les mines, de porteurs et récolteurs pour les exploitations com- merciales, arrachent les indigènes à leurs villages et à leurs cultures et les exposent de plus en plus à la dépopulation.

Aussi la Commission pour la protection des indigènes s'ex- prime-t-elle à ces points de vue, de la façon suivante :

« Considérant que la flagrante opposition existant entre la nécessité de protéger la vie normale (de l'indigène) et l'allure imprimée à l'exploitation du pays, allure carac- térisée par une production intense et immédiate, par l'éten- due comme par la multiplicité des entreprises nouvelles.

» Considérant que cet état de choses est de nature à accentuer en de fortes proportions la décroissance de la population, soit en exigeant d'elle par une certaine con- trainte des travaux pénibles et malsains, soit en provo-

227

quant l'abandon du milieu familial qui est le village, de la part des travailleurs sollicités en nombre toujours crois- sant, ce qui, d'après l'expérience acquise augmente la mortalité, occasionne la constitution de mariages stériles et favorise la propagation des maladies.

» Considérant que le Gouvernement, fidèle au programme tracé par la Charte coloniale et solennellement rappelé par Sa Majesté dans le discours du Trône du 22 octobre 1908, est résolu à s'imposer le sacrifice nécessaire pour la pro- tection et le bien-être moral des indigènes, et à repousser les sollicitations de convoitises immodérées, réclamant des recrutements excessifs en vue de se procurer une main-d'œuvre disproportionnée avec les capacités de la population.

» Elle adjure le Gouvernement...

))

» De diriger davantage l'effort de la colonisation vers le développement de l'agriculture et des industries indigènes entreprises par les natifs aux environs de leurs foyers.

»

» De faire présider un esprit de modération et de sage circonspection à la mise en valeur du domaine colo- nial et dans l'appui à donner aux grandes entreprises. »

Ces conclusions de la Commission nous ramènent par une voie qui peut paraître détournée, mais est en réalité bien directe, au développement de l'agriculture sous toutes ses formes et spécialement de l'agriculture indigène.

Les explications que nous venons de donner auront suffi- samment exposé les conditions spéciales du développement de l'agriculture indigène pour faire admettre comine justifiées les conclusions suivantes, résumant les conditions de progrès de l'agriculture indigène :

1. Le but de la politique indigène doit être de favoriser et stimuler la production agricole par les indigènes dans leurs villages ou à proximité de leurs villages. Il faut éviter autant

228

que possible la multiplication d'entreprises qui obligent l'indi- gène à quitter sa région, à séjourner ou vo5rager pendant de longues périodes à grande distance de son village, et à négliger ses cultures. Il faut surtout éviter celles qui arrachent la femme au travail familial et à la culture de son champ.

Ce desideratum peut être atteint soit que l'indigène mâle travaille à l'agriculture dans son village soit qu'il travaille dans une plantation située à proximité de son village.

2. Il est absolument contraire au progrès de l'agriculture et au maintien de la population déjà si faible de la Colonie, d'in- tensifier le portage, d'effectuer des recrutements miniers intenses et jusqu'à grande distance des mines, ou de générali- ser par un impôt trop élevé des travaux de cueillette, amenant de nombreux indigènes, pour de longues périodes, dans des terres humides, proches des eaux ou marécageuses, générale- ment infestées des tsé tsés qui communiquent la maladie du sommeil.

D'ailleurs ces cueillettes ont un rendement des plus mé- diocres. Elles absorbent une main-d'œuvre énorme pour arri- ver à des résultats dérisoires. Nous avons déjà dit que quatre grandes plantations de caoutchouc, qui pourraient être pour- vues de tous les services hygiéniques (services médicaux, hôpitaux, habitations salubres, etc.), pourraient produire autant de caoutchouc que les dizaines de milliers de noirs qui errent actuellement dans les forêts à la recherche de caout- chouc sauvage.

De même 50 plantations de palmiers Elaeis de 3,000 hec- tares chacune produiraient à elles seules les 50,000 tonnes de coconottes ou amandes palmistes exportées actuellement, et de plus ces 50 plantations produiraient chaque année 100,000 à 150,000 tonnes d'huile de palme, alors que nous n'en expor- tons actuellement que 5 à 6,000 tonnes.

Nous avons au Congo fort peu de main-d'œuvre. C'est une raison de ne pas la gaspiller, par l'accentuation de la récolte des produits spontanés.

3. Pour développer l'agriculture chez les indigènes, il est indispensable d'organiser l'enseignement agricole pratique, dans les villages, au moyen d'un nombre adéquat d'agro- nomes et de moniteurs indigènes. Pour former les moniteurs,

229

il faudra créer de sérieuses écoles d'agriculture, au nombre d'une au moins par district (1).

La population doit être instruite dans l'exercice d'une agri- culture simple, mais assez perfectionnée cependant pour sup- primer graduellement la répétition annuelle des lourds travaux de défrichement.

Afin de réaliser cette instruction pratique, il faudra disposer d'un nombre d'agrouomes de beaucoup supérieur au nombre actuel. Ce personnel entraînera une forte dépense. Mais faut-il toujours se préoccuper exclusivement de nouer le Budget ? N'importe-t-il pas de faire les sacrifices voulus pour développer sérieusement en vue de l'avenir les ressources naturelles de la Colonie ?

4) Une condition absolue pour le développement de l'agri- culture indigène est la diminution du portage par l'aménage- ment de voies de transport.

Il faudra donc établir dans la Colonie, et tout au moins dans les régions susceptibles d'une mise en valeur immédiate, un réseau complet de voies de transport par terre et par eau, réduisant à deux ou trois jours au plus le portage à faire par les indigènes, et permettant aux produits agricoles des parties centrales de notre Colonie de concurrencer sur les marchés d'Europe et spécialement sur le marché Belge, les produits des colonies étrangères.

Ce réseau, composé des rivières, des chemins de fer, des routes, devra recevoir l'équipement mécanique nécessaire à son utilisation et présentant le maximum d'efficacité écono- mique Il doit pouvoir transporter sur de longues distances, mais à très bas prix, des produits de valeur relativement faible.

La réalisation de ce réseau et de cet équipement est la nécessité la plus urgente au point de vue agricole, et c'est pour ce motif que nous ne cessons d'y insister (2).

(t) L'organisation de ces écoles fut proposée à diverses reprises, sans résultats.

(2) Ceux de nos lecteurs qui s'intéressent spécialement aux questions africaines consulteront l'ouvrage publié aux frais du Fonds Spécial du Roi. par le Comte R. de Briey. et traitant les Transport en Afrique. 11 renferme la reproduction d'une étude sur les transports coloniaux que nous avons publiée en 1918 dans la Tribune Congolaise, ainsi qu'une note rédigée en 1919 à la suite d'un séjour aux États-Unis, ex-

230

L'aménagement de ce réseau ne pourra évidemment être réalisé qu'en plusieurs années, en débutant par les voies sur lesquelles le portage est le plus intense.

Ce travail présente au point de vue économique et humani- taire beaucoup plus d'urgence que la construction de certains chemins de fer dont la nécessité serait contestable. Si les crédits sont limités, ce qui semble bien être le cas, c'est aux travaux réellement urgents qu'ils seront logiquement appliqués.

5) Dans le développement de l'agriculture indigène, il faut tenir rigoureusement compte de la somme totale de travaux imposés aux indigènes et notamment du portage. Le dévelop- pement doit donc suivre l'extension des moyens de transport et non la précéder.

La culture des récoltes d'exportation ne peut être développées qu'avec prudence et seulement dans les régions des moyens d'évacuation autres que le portage auront été aménagés pour toute distance supérieure à deux ou trois jours de marche.

'A suivre^.

Edm. Leplae.

posant les systèmes de vapeurs et de barges employés en Amérique pour les transports de produits pondéreux et agricoles et fort interes, sants au point de vue des transports de produits agricoles et forestiers au Congo belge. Ces notes sont accompagnées de nombreuses illus- trai ïnric

trations.

231

L'Organisation sociale dans le Bas-Congo.

(Suite.)

CHAPITRE II. L'Enfant.

Le mariage païen heurte complètement nos idées, mais c'est surtout en étudiant la situation de l'enfant, que nous rencon- trerons des coutumes qui vont à rencontre de notre conception de la famille.

Avant d'exposer la position juridique que la coutume donne à l'enfant dans l'organisation familiale, il nous faut d'abord pour traiter complètement ce chapitre, essayer de pénétrer l'âme du Congolais pour voir quelle place l'enfant occupe dans son cœur, puis encore nous devrons parler de l'éducation que l'enfant reçoit au sein de sa famille.

Le Congolais aime-t-il son enfant? Question étrange, sans doute, mais si souvent posée dans les articles de revues, que je ne puis la passer sous silence. Certainement oui, le père, et surtout la mère aiment profondément leur enfant. Il suffit d'assister le soir au retour du père, et de voir avec quelle joie il serre son enfant dans ses bras, le fait jouer, le promène dans le village, avec quel orgueil il le fait admirer des voisins, et le montre aux étrangers en disant : « C'est mon enfant ». Si le petit est indisposé, le père fera des voyages de deux ou trois jours pour lui procurer des remèdes, et pour le sauver il paiera tout ce qu'exigera le féticheur

Mais, tandis que l'amour du père diminue lentement avec le temps, et nous en verrons la cause dans la suite du chapitre, l'amour de la mère restera toujours aussi fort.

Que de soins elle a pour lui, soins sans doute souvent inintel-

232

ligents, mais assurément toujours tendres. Que de nuits elle passe sans sommeil, et que de fatigues Bile s'impose! Les caprices de l'enfant sont pour elle des ordres qu'elle veut satisfaire tous. Ce n'est pas à elle que viendra jamais l'idée de confier son enfant à des mains étrangères. Jusqu'à ce que l'enfant ait atteint l'âge de deux ans à deux ans et demi, elle ne fait pas un seul pas sans lui Qui n'a vu ces photographies de négresses portant leur enfant sur le dos, au moyen d'une longue bande d'étoffe. Rien n est drôle comme de voir le petit dormant à poings fermés dans cette position peu commode, et balançant violemment la tête à chaque mouvement de sa mère qui pile la farine de manioc ou houe ses champs.

Et si la mort, comme c'est hélas trop fréquent, vient lui ravir son cher petit, on ne peut voir de spectacle plus poignant que celui de la pauvre mère accroupie sur une natte, tenant sur ses genoux le petit cadavre, et criant sa douleur tantôt en des plaintes qui remplissent tout le village, tantôt en des chants funèbres d'une monotonie fort mélancolique.

L'enfant d'ailleurs rend à ses parents, et principalement à sa mère, l'affection qu'il reçoit d'eux. S'en va-t-il chercher fortune au loin, un jour la nostalgie le prendra et il voudra venir voir sa mère. La maladie le surprend-elle en pays étran- ger. Il n'aura qu'un désir : retourner chez sa mère et mourir près d'elle. Il y en a qui quittent à jamais le village est morte leur mère, afin de ne plus revoir les lieux qui leur rap- pellent ce triste souvenir. L'injure la plus blessante qui puisse être faite à un Congolais, c'est une injure à l'adresse de sa mère. Par respect pour elle, il ne l'appelle jamais par son nom propre, mais par le mot « yaya » ou « marna ». Si vous demandez à un Congolais le nom de sa mère, il ne répondra pas ou dira simplement « je ne sais pas ». C'est sans doute pour ce motif que beaucoup d'entre eux, ignorent le nom de leurs grands parents morts avant leur naissance ; ils ne l'ont jamais entendu dans la bouche de leurs parents.

L'amour de l'enfant et de la mère est, je crois, ce qu'il y a encore de meilleur et de plus noble dans l'âme des Congolais.

Deux ou trois mois après la naissance de l'enfant, ses parents lui donnent un nom, car l'enfant ne porte pas le nom de son père. Ce nom est habituellement ou le premier mot d'un proverbe dont on a trouvé une application heureuse lors de la naissance de l'enfant, ou bien encore ce nom rappelle quelque

233

circonstance de sa naissance, quelque événement qui s'est passé dans le village à ce moment. L'enfant sera appelé « terre étrangère » < l'étranger », s'il est dans un village qui n'est 3>as celui de sa famille; « terre du blauc » si un blanc était de passage dans le pays, à sa naissance ; « la pitié » « les larmes » s'il est pendant un deuil, « la joie » si c'est pendant une fête, « nous sommes séparés ■> si les parents se querellent, « nous nous aimons » dans le cas contraire, « fils de honte » « fils de péché » si l'enfant est illégitime. Dans tout le pays, mais surtout plus on se rapproche de San Salvador, on retrouve encore des traces nombreuses de l'évangélisation portugaise du XVIe siècle. C'est ainsi que les Congolais possèdent tous un second nom, le nom de saint, disent-ils, et qui est le nom noble. J'en cite quelques uns dans lesquels le lecteur retrou- vera facilement les noms de notre calendrier. Pour les hommes : Petelo (Pierre), Upaoulou (Paul) , Ndualou (Edouard), Minguiedi (Michel), Daniel, don Fonso (Alphonse), do Galîa (Gai), do Loniingou (Dominique); pour les femmes : Dona Maria, JSTgudi a mpasi (mère des douleurs), Zabela (Isabelle), Souzana (Su- zanne), etc.

Quand le Congolais s'expatrie, et surtout quand il va tra- vailler dans les centres des blancs, il tait soigneusement et son village d'origine et son propre nom. Et il y a toute une série de noms de convention sous lesquels les Congolais se cachent lorsqu'ils sont hors de leur milieu. Le noir reste toujours une énigme et il n'aime pas à mettre les Européens au courant de ses affaires. Il pourra rester au service du même maître pendant plusieurs années, sans que celui-ci sache même -son pays d'origine, son nom et à plus forte raison celui de ses parents .

La première sortie de la mère portant son nouveau-né dans «es bras, est un acte solennel, ne se fait pas sans crainte et est souvent accompagnée de rites superstitieux pour écarter les maléfices et de la mère et de l'enfant.

Puis celui-ci grandit aux côtés de sa mère. Il ne faut pas croire les récits qui affirment que les enfants sont mal nourris et que pour calmer leur faim, ils sont parfois réduits à manger <les insectes répugnants et même de la terre. L'enfant est bien nourri ; il reçoit peut-être même trop de nourriture, et la mère avant de s'occuper d'elle-même, pensera d'abord à son enfant.

234

Mais il est une coutume, contre laquelle nous luttons vio- lemment, sans pouvoir la déraciner. Exception faite pour no& chrétiens, que nous privons même des sacrements quand ils se montrent coupables de négligence, les Congolais n'habillent pas leurs enfants avant qu'ils n'aient atteint l'âge de cinq, six, et même sept ans.

On comprend de combien ces pauvres petits souffrent, surtout pendant la saison sèche qui est la saison froide. J'en ai vus dormant sans pagne, sans couverture et sans natte, sur la dure humide. D'où vient que la mortalité infantile est effrayante. J'estime que près d'un tiers des petits enfants meurt de pneumonie. Nous donnons pourtant des leçons d'hy- giène, et la mère aime son enfant, mais la routine l'emporte sur tout.

Vers l'âge de sept ans, la petite fille commence à aider sa mère dans ses différents travaux. Dans les plantations, elle veille sur ses frères et ses sœurs plus jeunes, ou bien déjà manie la houe. Le soir, elle va à la rivière, une calebasse sur la tête, chercher l'eau ; elle s'exerce à préparer la farine de manioc et le repas de la famille.

Le petit garçon, de son côté, commence à exercer ses jambes à la marche, et sa tête à porter les fardeaux. Si un de ses parents s'en va au village voisin, il le suit avec les vivres et les couvertures serrés dans un paquet. Combien de fois, nous avons vu passer ces groupes qui nous exaspèrent : en tête un homme dans la force de l'âge, son fusil sur l'épaule ou un bâton à la main, et derrière lui, tout en nage sous leurs charges, un ou deux enfants qui agitent leurs petites jambes pour suivre leur chef qui les précède d'un pas allègre et sans se soucier de leurs peines.

Si la femme congolaise mène une vie sédentaire et quitte rarement son village, l'homme au contraire aime les voyages, et, dès l'âge de dix à onze ans, il connaît tous les environs et sa mémoire fidèle retrouve tous les sentiers qui s'entrecroisent dans la brousse.

L'enfant peut s'en aller pour un voyage de 8 à 15 jours, et on ne s'en inquiète pas. Il m'est parfois arrivé d'emmener avec moi, dans mes voyages, à titre de récompense, des enfants qui s'étaieht montrés particulièrement sages. Je disais « Eh bien, toi, mon petit, tu vas venir visiter les villages avec moi; tu porteras mon fusil ». « Merci, Père, que je suis content ».

_

235

L'enfant prenait le fusil et, sans même retourner chez lui, se mettait en tête de la caravane. Pas un sou en poche ; il n'a d'ailleurs pas de poche. Et la nourriture? il n'y pense même pas, il en trouvera toujours en route. Et le paquet avec ses habits? mais il ne possède que ce qu'il a sur le corps. Et le logis dans ces villages étrangers? Il saura bien, le soir, se faufiler parmi les porteurs et trouver une petite place au milieu d'eux. Et sa natte pour la nuit? Mais le sac dans lequel on roule le lit du Père pendant la route, fera son affaire, il s'y enfoncera et dormira délicieusement. Quand ses parents rentreront le soir au village, ils s'informeront est leur fils. « Il est parti avec le Père ». Cela leur suffit; ils ne deman- dent pas même combien de temps durera son absence. Un mois ou un mois et demi après, l'enfant réapparaît au village aussi naturellement qu'un écolier qui revient de la classe, et c'est tout.

Il suffit que je promette aux enfants un petit cadeau, serait-ce simplement un couteau, s'ils veulent venir le chercher à mon retour à la mission. Ils se mettent résolument en route, et quelque jour ils apparaissent sur ma porte en disant : « Père, donnez- moi mon couteau ». Ils voyageront ainsi, une semaine peut-être, pour un bibelot de cinquante centimes.

Si l'enfant cependant se montre par trop vagabond, voici un moyen peu banal, et auquel les noirs seuls peuvent penser, pour refréner son humeur voyageuse : on lui confie la garde d'un cochon dont il a la responsabilité. C'est lui qui doit le conduire le matin dans la brousse ou la forêt, lui qui doit le faire rentrer le soir. Si le cochon va ravager les plantations ou mange un poussin, tout retombe sur lui. Nécessairement l'enfant et son cochon deviennent des inséparables. Et avec des occupations si absorbantes, comment l'enfant pourrait-il encore songer à courir le monde?

La vie de l'enfant congolais est donc la vie vraiment sau- vage, sans entraves, avec la forêt, la rivière, la brousse, la chasse, la pêche, les voyages. Aussi quel changement pour ces petits bonshommes quand ils arrivent à la mission! Aller au travail et en classe à heure fixe, observer le silence pendant les leçons, ce sont toutes choses nouvelles, qu'ils ne soupçon- naient même pas, et qui les désorientent complètement. Ah! certes, ils ne sont pas disciplinés en un jour.

Aussi quelle joie, le jour ils partent en vacances, et s' eu vont revivre quelque temps la vie libre d'autrefois.

236

Ce n'est pas le train qui les emporte comme nos collégiens, mais le matin, après un joyeux « au revoir," Père », ils se dis- persent par groupes dans tontes les directions, portant sur la tête leur petit paquet au fond duquel ils n'ont pas oublié de cacher un petit cadeau pour leur mère : un fichu, un mor- ceau de savon, enfin que sais-je.

Les deux premiers défauts qui se révèlent chez le Congolais, c'est l'inconstance et le mensonge : on dirait des défauts de race.

Il semble incapable d'effort soutenu et de volonté tenace. S'appuyer sur le noir, c'est s'appuyer sur un soutien bien fragile. Que de déboires l'inconstance de nos négrillons nous cause continuellement ! Un jour ils arrivent à la mission, feu et flamme pour s'instruire. Puis, après quelque temps, cette belle ardeur s'éteint ; c'est le village qu'il leur faut, et la classe est devenue un fardeau. Voici un enfant qui donnait de belles espérances. Il est resté un an ou deux chez nous, et a fait des progrès remarquables dans l'écriture et la lecture. On croit que celui-là du moins persévérera, et subitement quelque jour il arrive et dit « Je ne veux plus suivre les leçons, je veux aller m'engager comme domestique daus une ville. » Deman- dez lui la raison de ce changement ; vous n'aurez que cette réponse désespérante : « C'est mon cœur qui est ainsi. »

Il arrive donc assez souvent que des enfants qui sont venus se présenter librement dans nos écoles, et ont suivi les classes pendant un certain temps, nous quittent ensuite sans raison. C'est notre argent qui a été dépensé inutilement, c'est le fruit de notre travail perdu.

Les Congolais sont, en outre, menteurs. Ils naissent tels, croirait-on. Nous avons beau leur répéter sur tous les tons, que le mensonge est contraire aux lois de la morale et de l'honneur, on dirait qu'ils ne nous entendent pas ou ne nous comprennent pas. Pour les exciter à la sincérité, nous évitons souvent de punir les fautes qu'ils nous avouent spontanément. Rien n'y fait : l'habitude l'emporte. Si vous traitez un noir de menteur, il ne s'en trouve pas offensé. Je crois que pour eux savoir tromper son monde, est la preuve d'un grand esprit, principalement quand ce monde est celui des blancs. Qu'on juge par ce que valent leurs dépositions au tribunal, sur- tout quand ils sont parties intéressées, et les erreurs que peut commettre la justice quand elle s'en rapporte uniquement à leurs dires.

237

Le défaut du mensouge uni à une imagination folle donne au noir un talent de conteur incomparable. Les détails vivants, les traits qui animent le sujet, tels que les dialogues, ne lui font jamais défaut : tout sort de sa tête sans effort. Les auditeurs savent qu'il ment, ou du moins exagère fortement ; ils l'écoutent cependant avec attention, car qui saurait résister au charme d'une histoire bien contée? « Si Peau d'âne m'était contée, j'y trouverais plaisir extrême » disait déjà La Fon- taine. Voici un exemple, entre mille, de leur genre.

Un nègre civilisé et instruit qui avait séjourné longtemps en Europe, avait passé par la mission. Il y avait été reçu avec déférence à la grande joie de nos Congolais qui voyaient un des leurs traité avec beaucoup d'honneur et admis à notre table. Peu après, en voyage, j'entendis un enfant qui m'accompagnait, soutenir, devant mes porteurs, que les Congolais se jalousaient trop entre eux pour se rendre mutuellement les égards qu'ils témoignent aux blancs. Et voici comment à l'appui de sa thèse, le petit menteur, qui avait assisté à la réception de son com- patriote, la décrivait à ses auditeurs : « Les Pères devaient circuler dans nos rangs pour empêcher les enfants de lui rire au nez; à table les domestiques, après avoir servi les Pères, refusaient de lui présenter les plats. Quand il fallut porter ses bagages à la gare, tous les enfants avaient disparu. De Kim- pese, le noir se rendit à son village d'origine. Là, on lui offrit la nourriture indigène; comme il la refusait, les gens de lui dire « mais es-tu donc né, toi? » On lui donna alors une chèvre. Il réclama un gamin pour la ramener à Matadi. On lui répondit : « prends une corde, et tire toi-même ta chèvre derrière toi » etc. Rien de tout cela n'était vrai, naturellement.

Combien de fois nous ont-ils attrapés avec leurs mensonges, et combien souvent il nous arrive de dire « Ça c'est trop fort ».

A côté de ses défauts, l'enfant a cependant des qualités qui le rendent aimable.

Ainsi, il est excessivement rare de rencontrer dans nos missions etdans nos villages de l'intérieur, des enfants adonnés au vice contre nature et une affaire de mœurs à charge d'un enfant, est toujours une chose exceptionnelle. Nos négrillons, sur ce point, l'emportent sur bien des enfants d'Europe. Les passions ne s'éveillent que plus tard dans leur âme, vers l'âge de 16 à 17 ans, et sous leur peau noire, ils cachent très souvent un cœur bien pur.

238

Qu'on n'exagère cependant pas et qu'on ne pense pas trouver chez eux, la candeur des enfants élevés dans nos familles chré- tiennes. Dès leur tendre enfance, ils connaissent tous les secrets de la vie humaine, car le congolais n'a qu'une idée très vague de la pudeur dans le langage, et il tient les propos les plus réalistes, sans s'inquiéter des enfants qui l'écoutent. Ceux-ci, d'ailleurs, y sont si habitués que leur imagination semble n'en être plus frappée.

Le vol est une véritable manie chez les noirs qui vivent dans les villes. Mais ce n'est pas par ces déracinés qui vont apprendre tous les vices dans les centres, qu'il faut juger le noir de l'intérieur. Ici, il est rare qu'on entende parler de vol. On peut s'absenter 2 ou 3 jours sans fermer sa porte, personne n'ira dévaliser la maison. Les lois indigènes sont d'autre part sévères contre les voleurs : j'ai vu condamner à la prison et à l'amende d'un cochon, un homme qui avait volé un œuf.

L'enfant est aussi formé à un obéissance rigoureuse envers ses parents. Qu'il entende son nom, il quitte de suite ses jeux pour venir demander ce qu'on veut de lui. Le noir frappe rare- ment son enfant, mais en revanche il sait crier et malheur à l'enfant qui fait la sourde oreille et n'accourt pas de suite. Mais selon le dicton indigène ces hurlements et cette colère sont dans la bouche plutôt que dans le cœur.

Ce qui est également remarquable parmi ces populations sauvages, c'est le respect que l'enfant témoigne aux anciens. Jamais il ne se tiendra debout pour leur parler, mais il prendra la position respectueuse : c'est-à-dire qu'il restera accroupi, les jambes croisées. Quelqu'un survient-il, l'enfant quitte son siège, le lui offre et s'assied lui-même par terre. Présente-t-il un verre de malafu ou simplement la braise avec laquelle les noirs allument leur pipe, il ne le fait qu'en pliant un genou, et en frappant des mains. Doit-il passer devant une personne plus âgée, c'est en se courbant, en traînant les pieds, et les mains étendues sur les genoux.

Disons ici en passant que les Bakongo sont très à l'étiquette entre eux, à leur manière naturellement Ils possèdent un code de politesse assez compliqué et très solennel, auquel on ne peut manquer sous peine d'être rappelé durement à l'ordre. Les grossièretés, en effet, sont considérées plutôt comme des mar- ques d'orgueil que comme des manquements au savoir-vivre.

239

Mais grâce à la discrétion du noir en présence des étrangers, «es marques de déférence passent habituellement inaperçues des blancs.

En résumé, le bien et le mal se rencontrent dans l'âme du nègre. JSTotre tâche d'éducateurs est donc de développer les éléments bons et de combattre le mal dès qu'il apparaît. Et dans ce travail, bien vite nous oublions que leur peau est noire, et nous ne voyons plus que les âmes, et nos négrillons nous deviennent aussi chers que les enfants de chez nous. Et ne faut-il pas les aimer pour pouvoir parler à leur cœur, les toucher, et les convaincre?

Ceci dit sur l'éducation de l'enfant, voyons quelle est sa lituation dans la famille, et c'est ici, comme je l'ai annoncé, [ue nous allons rencontrer des choses surprenantes.

Le mot « possesseur » est revenu fréquemment dans les pages précédentes, mais il eût été difficile d'en donner plus tôt le sens complet.

Le Congolais distingue entre la parenté en général et la

famille. Tous ceux qui lui sont unis de quelque manière par

le sang, soit du côté paternel, soit du côté maternel, sont des

parents, mais tous ses parents ne sont pas de sa famille. Sa

famille, c'est uniquement celle de sa mère. Interrogez-le sur sa

famille, il ne désignera jamais celle de son père, mais bien celle

de sa mère. Or le Congolais appartient à sa famille seulement,

)t non à ses autres parents C'est de ce principe étrange que

[écoule toute la situation de l'enfant. 11 appartient donc non

à son père, mais à sa mère, ou plutôt à la famille de celle-ci.

5e principe combiné avec celui du droit d'aînesse fait que la

première autorité est celle de l'aîné des oncles maternels ; à

défaut d'oncle, celle du frère adulte de la même mère; à

défaut de frère, celle des cousins par la ligne maternelle. Et

si toute la famille est éteinte, si la mère reste seule avec ses

petits enfants, c'est elle-même qui les possède, jusqu'à ce que

l'aîné de ses fils soit en âge d'exercer l'autorité.

D'ailleurs cette autorité, tout en ayant ainsi ses degrés et sa ùérarchie, s'exerce habituellement en commun par toute la famille de la mère.

L'État, dans son style officiel, emploie pour les désigner, le mot : Auteur. Mais ce mot est inexact et de plus inconnu dans la langue congolaise qui dit tout crûment: bavuidi, c'est-à-dire. Les possesseurs de l'enfant, comme elle dit : le possesseur d'une maison ou d'une chèvre.

240

Pour se faire une idée exacte de cette situation de l'en- fant, il faut le suivre dans les détails de sa vie, qui ne sont que des conclusions pratiques du principe que j'ai énoncé : l'enfant appartient à la famille de sa mère et avant tout à ses oncles maternels et nullement à son père.

La famille de celui-ci lui est complètement étrangère. Ainsi si un polygame a des enfants de deux ou trois femmes, ces en- fants issus du même père, sont cependant de familles diffé- rentes. Qui ne serait pas averti ne pourrait deviner que le même sang coule dans leurs veines, et avec l'âge, cette sépa- ration va sans cesse en augmentant.

Au contraire, si une femme a des enfants de plusieurs lits, ces enfants sont de la même famille, bien qu'issus de pères différents. C'est en partie pour ce motif, que les enfants con- sidèrent avec indifférence, le divorce de leurs parents, puisque la chose n'a aucune importance au point de vue de leur situa- tion familiale.

Cette séparation va si loin qu'en certains pays, la parenté par la ligne paternelle n'est pas un empêchement de ma- riage, et que même les cousins germains peuvent s'unir légi- timent.

Tandis que la fille reste avec sa mère jusqu'à son mariage, le garçon, vers l'âge de dix à onze ans, quitte la maison pater- nelle et s'en va habiter chez ses possesseurs. Parfois en pas- sant par quelque petit village, l'on ne rencontre presque pas d'enfants, on est porté à conclure que dans quelques années ce village disparaîtra de la carte du pays. Mais ce n'est pas toujours vrai car il se peut que les habitants du village pos- sèdent un certain nombre de femmes mariées dans le voisi- nage. Quand leurs enfants seront en âge, ils reviendront chez leurs possesseurs, et ce village, que vous croyiez devoir bientôt s'éteindre, redevient, au bout de cinq à six ans, d'une certaine importance.

L'enfant va donc se fixer chez ses possesseurs. Si ceux-ci sont établis au loin, il ne revient que d'espace en espace saluer son père et les relations entre eux deviennent rares. Le sentiment de la paternité par le sang s'affaiblit lentement et une paternité nouvelle s'établit du possesseur à l'enfant, qui supplante la première. Leurs intérêts deviennent communs et si quelque jour l'oncle entre en conflit avec le père, c'est le parti de celui-là que l'enfant embrassera et défendra avec toute l'ardeur de son âme.

241

D'où les plaintes de nos chrétiens qui nous disent : « N'est- il pas pénible de penser que nos enfants, à nous chrétiens, qui ont été baptisés dans notre Eglise, retourneront peut-être quelque jour chez leurs parents païens ou protestants, et là, sous nos yeux, risqueront de perdre la foi dans laquelle ils ont été élevés ? »

Ils constatent l'abus, il ne leur viendra pas cependant à l'idée de secouer cette autorité étrangère, tant la coutume est ancrée dans leur vie.

Un vieux chrétien me dit un jour : « Vous connaissez un tel. C'est un ©nfant que ma femme a eu d'un premier mariage, lorsqu'elle était encore païenne. L'enfant veut à tout prix devenir chrétien. Il va sans doute venir en cachette vous demander le baptême. Mais ses possesseurs sont des protes- tants et ont mis leur veto à sa conversion. De grâce, ne le baptisez pas ; sinon, ça va me donner des ennuis sans fin. Ils viendront gâter mon ménage. »

La coutume ruine donc l'autorité du père sur ses enfants. Elle se rend cependant compte de l'immoralité d'une telle situation et elle veille à ce que le sentiment de la paternité ne disparaisse pas complètement. C'est xdoui- cela qu'elle oblige le fils à certains égards envers son père ; par exemple, lorsqu'il tue du gibier, le fils doit lui offrir, le coeur de la bête qu'il a abattue : c'est la partie noble. Mais les mesures qu'elle prend, ne sont que des correctifs insignifiants et laissent subsister les abus.

La situation de la mère est meilleure : à la mort de son mari, si elle est libre et sauf dispositions contraires de ses posses- seurs qui voudraient la remarier dans la famille du défunt, elle rentre de droit dans sa propre famille et y retrouve ses enfants.

Aussi longtemps que l'enfant n'a pas quitté le toit familial , son père lui offre de temps en temps un morceau de viande, mais rarement il lui vient à l'esprit de dépenser son argent pour le vêtir. C'est là, l'affaire de ses possesseurs et de sa mère.

Dans une affaire de divorce, j'entendis cette discussion : (( Autrefois, j'ai donné au mari de ma sœur, dix francs pour habiller ses enfants. Mais maintenant qu'ils se séparent, le mari doit-il me restituer mon argent? » « Comment, s'écria le père, mais qui possède ces enfants, toi leur oncle ou moi leur père? Toi, je crois. Et les dix francs pour qui les ai-je donc

242

dépensés? Pour des enfants qui sont à toi et non à moi. Par con- séquent, je n'ai rien à restituer ». Toute l'assemblée d'approu- ver, et même celui qui réclamait la restitution des dix francs, qui, convaincu, conclut le débat en disant. « C'est vrai, car après tout, ces trois enfants viennent grossir ma famille, et j'en dois bien quelque reconnaissance à leur père. »

J'ai déjà dit que nous obligeons nos chrétiens à vêtir leurs enfants, pour combattre la mortalité infantile. Nous l'exigeons aussi pour leur montrer que le premier maître et possesseur de l'enfant, c'est son père, et que c'est à lui, avant tout autre, qu'incombe le soin de celui, à qui il a donné la vie. Et n'est-ce pas un moyeu de lui rappeler sa paternité et ses charges ?

Continuons à suivre l'enfant dans le cours de son existence. Plus tard, quand il est en âge de se marier, ce sont ses j>osses- seurs, et non son père qu'il consulte, et ce sont eux qui lui cherchent une épouse.

J'avais appris dans un village j'étais de passage qu'on voulait y marier une jeune fille, de force. Sa mère étant absente, je fis venir son père qui me répondit. « Mais pourquoi m'appe- lez-vous pour cette affaire? C'est ma fille, c'est vrai, mais je ne la possède pas et je n'ai rien à voir dans son mariage. C'est sa mère et sa famille qu'il faut appeler; c'est avec eux qu'il faut vous arranger. »

Le mariage conclu, c'est la famille de la mère qui paie l'argent s'il s'agit d'un garçon, ou qui le reçoit s'il s'agit d'une fille. Bien plus, j'ai vu ce cas vraiment typique : le père pos- sédait une fille que son propre fils voulait épouser. Eh bien, le fils dut débattre avec son père, l'argent à payer et lui verser la somme tranchée.

L'enfant ne coûte donc pas un sou à son père. En revanche, il n'en reçoit rien, non plus. Quand l'enfant pourra travailler et porter une charge, ce sera pour aider son possesseur. S'il s'en va faire le commerce au loin, ou s'il va s'engager chez les blancs, l'argent qu'il gagnera, c'est à celui-ci qu'il l'enverra. Quand il reviendra au village, c'est avec celui-ci qu'il dépen- sera ses petites économies.

Tout est donc commun entre eux. Et à la mort de son possesseur, c'est le jeune homme qui héritera de son argent, de ses couvertures, de ses tissus, de ses arbres fruitiers, de ses viviers, et de ses femmes esclaves, que même, dans certains coins, il doit épouser pour ne pas les laisser passer dans une autre famille.

243

Les mariages stériles, ai-je dit, sont toujours des mariages instables, car la stérilité est une honte pour les époux. Ils sont aussi une calamité pour les possesseurs de la femme qui ne peuvent admettre qu'une fille qui leur appartient, ne leur apporte pas d'enfants. Une famille nombreuse, c'est une force et une gloire pour ses chefs. C'est un moyen d'imposer leurs volontés dans le village, sous menace de scission de tout le groupe ; c'est une occasion d'intervenir dans toutes les affai- res, surtout celles de mariage, de recevoir de l'argent, de boire du malafu, de plaider ; et n'est-ce pas la joie suprême du Congolais ? Aussi, si après un an ou deux, le mariage n'est pas fécond, il faut s'attendre à ce que la famille reprenne sa fille, et la passe à un nouveau maître.

Toujours en vertu du même principe, c'est la condition de la mère, sans égard à celle du père, qui détermine la condition de l'enfant. Si la mère est une femme libre, l'enfant est libre ; si la mère est esclave, l'enfant est également esclave. Par consé- quent si un grand chef compte parmi ses femmes, une esclave, les enfants qu'il aura de celle-ci seront esclaves. Si une femme libre, au contraire, épouse un esclave, ses enfants seront libres, malgré la condition servile du père.

Voici le cas que j'ai rencontré : une femme libre, assez riche, avait, de ses économies, acheté un esclave. Elle avait deux filles ; et comme l'esclave s'était toujours montré docile, elle lui donna, comme récompense, sa fille aînée en mariage. La plus jeune fut mariée au chef d'un grand village. Or, quelle est maintenant la situation? Les deux mères étant libres, leurs enfants sont libres aussi ; et de plus, en vertu du droit d'aînesse, le fils de l'esclave possède les enfants du chef.

Le même principe se retrouve en ce qui concerne l'autorité. Celle-ci reste toujours dans la même famille. Or, le fils du chef n'est pas de sa famille, peut même être un esclave, comme je viens de le dire. A la mort du chef, son autorité passera donc au fils de sa sœur, ou, à son défaut, à quelque cousin par la ligne maternelle. Et comme un bon chef doit connaître toutes les coutumes du pays, pour bien trancher les palabres, c'est le neveu et non le fils du chef médaillé qui s'assiéra à ses pieds, dans les réunions publiques, pour s'initier à Tart de gouverner et à la politique indigène.

Aussi, je dois dire que je ne comprends pas bien ce que seraient les « écoles pour fils de chefs » qu'on instituerait dans

244

ce pays, puisque ces fils ne sont plus appelés à gouverner et ne jouissent d'aucun privilège. Qu'on en juge par le fait suivant.

Un chef médaillé était mort, et une discussion violente par- tageait le pays, parce que le médaillé défunt était d'une autre famille que son prédécesseur : deux familles avaient donc ainsi xeçu successivement la médaille. Laquelle des deux l'empor- terait maintenant? L'autorité territoriale leur signifia que pour mettre fin aux rivalités, elle allait fixer la médaille dans la famille du dernier chef et appela, dans ce but, le propre fils de celui-ci. Colère dans le pays. « Mais, disait-on, si l'on donne la médaille à ce jeune homme, on augmentera l'imbroglio. Celui-ci est bien le fils du défunt, mais il n'est pas de safamille. Le véritable successeur est le neveu. Si les autorités main- tiennent leur point de vue, la dispute sera non plus entre deux familles, mais entre trois ».

Je crois avoir suffisamment renseigné le lecteur sur ce qui se rattache à l'enfant congolais : son éducation et sa situation dans la famille.

Sous peine de me répéter, je dois le dire ici encore, pour réformer la société congolaise, on doit d'abord réformer la famille. Je l'ai dit à propos du mariage, et la même conclusion s'impose par rapport à l'enfant. Il est antinaturel que le père ne soit pas le maître de ses enfants, et que sous ses yeux, un autre dispose de ceux à qui il a donné l'existence.

Il faut donc briser cette autorité des possesseurs et donner au père la place qui lui revient de droit. Ce sera une œuvre difficile; peut-être dira-t-on que je me trompe, mais je crois cette réforme plus difficile même que celle du mariage, car par là, les coutumes seront bien plus profondément atteintes que par la suppression de la polygamie et du divorce. Les chrétiens qui ont admis assez facilement nos enseignements sur l'unité et l'indissolubilité du mariage, ne peuvent par contre se faire à l'idée que ce soit le père qui possède les enfants, et non l'oncle ou les cousins. En entendant l'exposé de nos idées, ils rient, s'étonnent et s'écrient : « Est-ce possible que telle soit la situation des enfants chez vous? Comme ça doit être drôle en Europe! »

Tout le monde, je pense, admettra la conclusion que je viens de donner, que pour la réorganisation de la famille, le père doit en devenir et le centre et le chef.

245

Nous nous employons de toutes nos forces à cette réforme, ^lais à côté de notre travail de persuasion, l'oeuvre du légis- lateur peut être des plus précieuse.

Il faudrait, nous semble-t-il, que dans tous les cas qui lui sont soumis, la loi ignorât la situation privilégiée de l'oncle maternel, et ne reconnût que l'autorité du père de famille.

Ainsi s'il s'agit d'un mariage, pourquoi ne pas faire verser la dot au père de la fille? S'il s'agit de tutelle, pourquoi ne pas faire rendre au père lorsqu'il les réclame, les enfants que l'oncle veut amener chez lui? S'il s'agit d'héritage, ne pour- rait-on reconnaître les droits des enfants sur les biens de leur frère, à l'exclusion des neveux et cousins? Sans doute, il suffit ,u noir de se marier devant un officier de l'état civil, pour faire reconnaître ses droits. Mais le Congolais, principalement •de l'intérieur, éprouve une telle répugnance pour ce mariage- civil, qu'en dehors des centres, ils sont rares ceux qui con- sentent à s'y soumettre. Le mariage indigène et religieux ne pourraient ils donc jouir des mêmes privilèges que le mariage civil?

On objectera peut-être qu'une telle mesure serait de nature à jeter le trouble dans la société, dont l'organisation, ainsi que je l'ai dit moi-même, repose en grande partie, sur la recon- naissance de l'autorité de l'oncle maternel. Je ne le crois pas, car l'Etat n'interviendrait que lorsqu'il y serait invité, et ces cas, pendant longtemps, resteraient assez rares. Mais du moins on obtiendrait l'heureux résultat de changer lentement les idées et ne faut-il pas d'abord réformer les idées, pour réformer ensuite une société?

CHAPITRE III. Le clan.

En commençant ce chapitre, je rappelle le cadre de mon travail : je ne m'occupe ici que du pays dont j'ai donné les limites, dans la préface, c'est-à-dire du pays de Kimpese. Je ne veux donc pas faire incursion sur un terrain que je ne connais pas, car ce qui est vrai ici, pourra être inexact ailleurs.

Une tradition qui subsiste encore vaguement dans certaines parties du Bas- Congo, mais qui est complètement disparue dans la région de Kimpese, rattache tous les Bakongo à neuf

246

grandes tribus dont les chefs seraient neuf fils d'un ancien roi de San-Salvador, du nom de Nekongo. Ces légendes devraient faire l'objet d'une étude spéciale; elle sont assez poétiques pour tenter un écrivain et assez nombreuses pour former un gros volume. Ces récits, quelque nom qu'on leur donne : légendes ou traditions, n ont laissé aucune trace dans la légis- lation du pays, et n'ont aucune influence sur la constitution de la société, par conséquent il n'ont pas place dans la pré- sente étude.

Le gouvernement a rattaché les populations de Kimpese à deux groupes : au sud, les Bandibu qui occupent le pays s'éten- dant jusqu'au Congo portugais ; au nord les Manianga qui vont jusqu'au fleuve Congo dont ils occupent les rives. Kimpese se trouve plus ou moins au centre sur la ligne séx>arant les deux tribus.

La délimitation est assez exacte au point de vue linguistique. Tous parlent le kikongo, mais les dialectes sont suffisamment différents pour qu'on reconnaisse immédiatement à son lan- gage, le Congolais du sud, de celui du nord de Kimpese. Malgré cela, il est difficile d'établir exactement des limites ethnographiques, car les deux tribus se sont mêlées et on retrouve au nord et au sud des familles se rattachant au même clan. Doit-on même considérer les deux groupes comme deux tribus distinctes, et ne faut-il pas les regarder plutôt comme deux branches issues d'une même souche? Cette hypo- thèse est plus probable; leurs coutumes et leurs préjugés, en effet, sont les mêmes; et il ne peut être question de traiter en des études séparées, les peuplades du nord et celles du sud.

De plus il existe une tradition bien vivante encore et qu'on retrouve partout presque uniforme. Les populations de ce pays croient que leur berceau est le pays de San-Salvador, la ville des grands rois congolais, d'où leurs ancêtres remontèrent lentement vers le nord A quel moment se produisit ce mou- vement? A une époque reculée certainement, mais dont les noirs n'ont aucune idée. Certains récits prétendent même que le pays formait jadis un lac immense, et qu'au fur et à mesure que le lac se dessécha, les populations de San-Salvador remon- tèrent vers le nord, jusqu'au moment où, aux approches du fleuve Congo, elles rencontrèrent une autre race qui, venant du Congo français actuel, avait traversé le fleuve, et se dirigeait vers le sud.

HHHHI

247

Cette tradition sur leur origine est tellement générale, qu'elle ne peut se comprendre si elle ne s'appuie sur un fond historique. Ce qui rend encore cette hypothèse plas plausible , c'est qu'on retrouve exactement les mêmes coutumes ici qu'au Congo portugais Et enfin cette tradition se rattache intime- ment à l'explication des clans, tels qu'ils se rencontrent encore maintenant. C'est pour ce dernier motif que je la signale.

Je réserve le nom de famille au groupement de ceux qui vivent sous l'autorité de l'oncle maternel ou de son héritier, et j'ai cru pouvoir traduire par le mot « clan », le mot indigène

kanda » ou « luvila » qui est la réunion de plusieurs familles ou groupes de familles, prétendant à une origine commune, et portant habituellement le même nom. Dois-je encore, après les notes précédentes, rappeler que le clan, comme la famille, est constitué par la ligne maternelle, et que l'enfant, de même qu'il appartient à la famille de sa mère, fait partie du clan de celle-ci ?

Pour expliquer comment se sont constitués les clans, je prends l'exemple d'un des plus importants du pays, celui des Kinsakou. L'histoire des autres n'est que la répétition de celle-ci. Voici son origine, selon le récit populaire.

Un jour la famille Kinsakou se trouva à l'étroit dans le pays de San Salvador, une population trop dense l'empê- chait d'étendre ses plantations. Elle quitta le pays et remonta vers le nord, à la recherche d'un emplacement nouveau. Ayant trouvé une terre fertile et inoccupée, elle s'y installa. Peu à peu elle y prospéra, s'y multiplia et devint une agglo- mération importante. Les difficultés de la vie qui avaient déterminé un premier déplacement se présentèrent de nouveau et une partie des Kinsakou décida de continuer sa migration vers le nord. Ce mouvement ainsi imprimé se continua pendant une longue série d'années.

Parfois, c'étaient des querelles entre deux branches du même clan ou entre deux chefs de familles importantes qui amenaient la séparation.

Enfin, la troisième cause et peut-être la plus importante, qui les poussait à se morceler en petits groupes, c'est l'hor- reur du Congolais pour le tumulte des grands centres et son amour de la solitude. Maintenant encore, malgré les efforts de l'Etat pour former des agglomérations, le noir aime a établir sa hutte solitaire en dehors du village au milieu de ses champs ou au fond d'une forêt.

248

Toutes ces causes réunies firent que lentement les Kinsakou essaimèrent à travers tout le pays non occupé et se trouvèrent répandus dans tout le Bas-Congo.

Avec le temps et par suite des distances, une partie d'entre eux perdirent même leur nom primitif et les Kinsakou établis plus au nord y prirent le nom de Nevounda.

Grâce à l'importance qu'ils acquirent, les Nevounda se con- sidérèrent comme la branche aînée, tandis que les Kinsakou passèrent au 2me rang. Cette X3réséance subsiste encore main- tenant, et c'est pour cela que dans les assemblées solennelles, un Kinsakou ne peut venir s'asseoir sur la peau de léopard a pris place un Nevounda.

Mais à travers tous ces déplacements et dans tous ces mor- cellements, tous ont gardé le souvenir vivace de leur origine commune, et malgré la diversité de leurs noms, les Kinsakou et les Nevounda savent qu'ils forment les deux branches d'un même tronc.

Les Kinsakou avaient leurs amis au pays des ancêtres, et les mêmes causes agissant, d'autres familles les suivirent dans leurs migrations, vinrent s'établir à côté d'eux, et constituèrent avec eux les villages nouveaux. Chaque village est donc formé ordinairement de la réunion de groupes appartenant à des clans différents.

Telle est, selon la tradition congolaise, l'origine des clans.

Le clan est un des éléments de la société et il est nécessaire d'en connaître la constitution pour comprendre bien des côtés de la vie indigène. En traitant de l'autorité chez les Bakongo, je montrerai comment elle repose sur l'existence du clan.

Mais ce n'est pas tout. En raison de leur origine commune, tous les membres d'un même clan se considèrent comme des frères, des « mpangi », et ce titre de frères établit entre eux des relations spéciales que je dois détailler.

D'abord ils se doivent une hospitalité plus généreuse. Un Congolais qui s'arrête dans un village étranger, y reçoit tou- jours gratuitement le gîte. Mais pour des « mpangi », l'hospi- talité comporte d'autres devoirs. Lorsque le noir voyage au loin pour ses affaires ou son commerce, et arrive dans le village il doit passer la nuit, le soir on l'invite à prendre place dans le cercle formé autour du feu qu'on entretient au milieu du village et l'on vient faire la causette. Naturellement on lui demande qui il est et d'où il vient. C'est pour lui l'occasion de

249

faire connaître le nom de sa « kanda ». Et si dans le village, il se trouve des gens appartenant au même clan, grande est la joie de lui apprendre qu'il a ici des frères. Ceux-ci se présen- tent, on fait connaissance, on demande des nouvelles des parents établis au loin et qu'on n'a peut-être jamais vus. On prépare un petit banquet au frère que la bonne fortune a amené ; on lui offre une maison et un bon lit ; et le lendemain, quand il se remettra en route, il trouvera son paquet rempli de provisions, -car sans doute il ne rencontrera pas des frères dans tous les villages il s'arrêtera.

Cette hospitalité que les noirs exercent joyeusement entre membres d'un même clan, facilite beaucoup les communica- tions. En effet le Congolais partant pour un long voyage, a toujours soin, pour fixer ses étapes, de s'informer il pourra rencontrer des parents à qui il s'adressera sans crainte de refus.

Bien plus, si à la suite de querelles, il trouve la vie trop dure dans son village, il peut aller chercher refuge ailleurs, dans un autre groupe de son clan. Et les parents chez qui il vient s'établir doivent fournir du terrain, des moyens de sub- sistance et lui procurer une femme. C'est un devoir auquel ils ne manqueront jamais. Le frère venu de loin sera toujours le bien venu, et jamais on ne lui lancera l'épithète injurieuse d'étranger, qui mange le bien d'autrui sur une terre qui n'est pas à lui.

Non seulement les individus, mais des villages entiers >euvent ainsi émigrer et aller s'établir à côté d'un groupe de leur famille sans qu'on se plaigne de leur arrivée. Le Congo est si grand, et le territoire de chaque village si vaste, qu'il y a toujours de la place pour les nouveaux venus. « Si nous devons encore entretenir autant de chemins, me disait un chef de village, nous quitterons le pays et irons nous installer chez nos frères, de l'autre côté du Kuilu ». Un jour j'étais allé avec les notables d'une de nos chrétientés, choisir un emplacement pour un groupe d'une centaine de personnes, qui ayant aban- donné définitivement leur pays, voulaient fonder un nouveau village. L'endroit fixé, le chef se tournant vers les fugitifs conclut solennellement dans la belle et sonore langue du Bas-Congo : « Vous êtes nos frères, vous êtes donc chez vous. Ces champs sont vôtres, ces palmiers sont vôtres, cette forêt -est vôtre, cette rivière est vôtre ». Cet accueil, est celui que le Congolais recevra partout dans son clan.

250

Une autre conséquence découlant du fait de l'origine com- mune concerne le mariage. Etant frères, les membres d'un même clan ne peuvent contracter mariage entre eux. La défense est sévère. Pour les groupes établis dans le même rayon, l'empêchement n'est jamais levé, et il est inouï que de semblables mariages aient été permis. Si parfois deux parents ont des relations criminelles, leur faute est considérée comme un véritable inceste, et est toujours frappée d'amendes énormes.

Il arrive que des mariages soient contractés entre des parents appartenant à deux groupes situés à de grandes distan- ces l'un de l'autre. Mais ces unions restent toujours de rares exceptions, sont mal reçues par les populations, et ne sont autorisées qu'après que les fiancés ont payé une amende aux chefs, afin, dit-on, de laver l'affront fait au clan.

Au point de vue social, cet empêchement a le résultat heu- reux, qu'il oblige les différents groupes formant un village à se fusionner, à avoir des intérêts communs, et il contribue à établir la stabilité des villages. Car il ne suffit pas de dire : « J'ai des parents dans les environs, je vais m 'installer chez eux. » Mais la famille voisine qui a fourni les femmes consen- tira-t-elle a les laisser partir et n'empêchera-t-elle pas aussi le déplacement projeté?

Qui ne connaît les fameux « tabous » autour desquels les anthropologistes ont fait tant de bruit? Les tabous ou « konko » dans la langue du Bas-Congo, sont les choses interdites, dont on ne peut user.

Je ne les signale que pour autant qu'ils sont une manifes- tation de la communauté d'idées et de préjugés qui existent entre les membres d'un même clan.

Chacun a ses tabous particuliers que son expérience person- nelle lui fait connaître. Dans un village, l'on offrait à mes porteurs des rats de champs fumés, mets de fête pour les Congolais, j'entendis un de mes hommes dire en soupirant: « Moi, je n'y touche pas. Le rat est pour moi konko, interdit. Chaque fois que j'ai essayé d'en manger dans ma jeunesse, j'ai été malade. »

Outre ces tabous particuliers, il y en a qui sont communs à tous les membres d'une même famille : les choses interdites au père ou à la mère, le sont également aux enfants.

Mais les plus nombreux sont ceux qui atteignent tous les

251

dont on ne peut manger ou des choses qu'on ne peut toucher. Dans ce clan- ci, il est défendu de manger de la viande d'an- tilope ; dans tel autre la poule est interdite aux femmes ; ailleurs c'est la perdrix ; ailleurs encore c'est tel fruit, etc. Parfois c'est tel animal qu'on ne peut pas même toucher.

Quoiqu'il en soit de l'origine des tabous, nos Congolais n'y attachent actuellement aucune idée de religion ou de supersti- tion, et après leur conversion, ils les observent encore sans aucun scrupule. Ils prétendent que ces tabous sont de pures mesures d'hygiène, et qu'à vouloir les enfreindre, ils con- tractent différentes maladies, surtout de la peau. Ces mala- dies cutanées attribuées au mépris d'un tabou portent le nom générique de « Wazi ». Je connais un chef atteint de la lèpre et qui prétend avoir gagné cette maladie au lendemain d'une séance il s'était assis sur une peau de léopard. Or, le léopard est tabou dans son clan. C'est là, d'ailleurs, un des interdits le plus répandus dans le Bas-Congo.

Parfois, devant un plat appétissant, la gourmandise l'em- porte, et ils tâchent de se débarrasser de ces interdits gênants; dans certains cas, cela leur réussit et i!s mangent, san s en éprou- ver le mal, une nourriture qu'on leur disait défendue ; et voilà un tabou de moins. Mais il arrive aussi qu'ils sont punis de leur audace, et j'en ai vu un cas étrange. Mon domestique risqua un jour de manger de l'antiloiDe, viande interdite pour lui. Or, le lendemain, il me montra son corps tout couvert de petites pustules. «Vous voyez, me dit-il (et je traduis littérale- ment ses paroles), dans notre clan, notre corps n'aime pas la viande d'antilope. » Explique le phénomène qui veut.

J'ai développé jusqu'ici l'ensemble des rapports qui unissent les membres du même clan.

Mais supposons un de nos noirs appartenant par exemple au clan des Kitona par sa mère, et dont le père est un Kinsa- kou. Quelle est îa situation de ce Kitona vis-à-vis des Kinsa- kou ? Ces derniers, donc ses ascendants paternels ne l'appellent pas du nom noble de frère, « mpangi », mais de celui de « tékélo » descendant, ou issu de leur famille, et à ce titre ils ont droit de sa part, aux témoignages d'honneur qu'un cadet doit à ses aînés.

Ainsi ce Kitona devra offrir un siège au Kinsakou qui sur- vient dans un cercle, ne pourra lui répondre dans une discus-

252

sion qu'avec sa permission et après les excuses d'usage, devra lui présenter l'eau et la nourriture en fléchissant le genou. Si pendant une séance on boit du malafu, il ne prendra qu'une petite partie du premier verre qu'on lui offrira, et fera hom- mage du reste au Kinsakou présent. En retour, celui-ci lais- sera un fond dans le verre qu'il a reçu et en fera cadeau au Kitona.

Ensuite, tous les Kinsakou peuvent également appeler le Kitona leur enfant « muana » et celui-ci doit donner à tous les Kinsakou, même aux femmes le nom de père « tata ». Il en résulte des cas qui nous paraissent risibles. L'Etat a institué des cantons administratifs sous l'autorité de grands chefs que nous appelons chefs médaillés. Supposons que le chef médaillé soit ce Kitona, dont le père est un Kinsakou. Il devra saluer du titre honorifique de « tata », la plus petite fille Kinsakou qui, si bon lui semble, pourra traiter son vieux chef à cheveux blancs de a muana » mon enfant.

Il est arrivé pendant mes voyages à l'intérieur, que les habi- tants d'un village je logais, me disaient : « Père, tel de vos porteurs est notre enfant ». « Mais c'est impossible, hier vous ne vous connaissiez pas, il n'est jamais venu ici ». « Peu importe, mais il nous a raconté que son père est de notre clan, il est donc notre enfant » .

On le voit, ces relations avec les parents du père, sont simplement de courtoisie et de politesse, bien différentes en cela des liens de solidarité qui unissent le clan.

Ceci confirme ce que j'ai dit ailleurs en parlant de la situa- tion de l'enfant vis-à-vis de ses parents : c'est sur la mère que se fonde la famille ; c'est sur elle également que repose le clan. Il n'est pas paradoxal d'affirmer que chez les Bakongo la femme jouit de plus d'égards et même est tout dans la société.

Cette étude sur le clan est beaucoup plus courte que l'étude sur la famille, parce que dans le fonctionnement de la société, le clan a une importance beaucoup moins grande que la famille; les questions qui s'y rapportent sont beaucoup moins compli- quées. Les éternelles querelles qui divisent les Congolais, ont presque toujours pour objet, en dehors des questions d'argent, les affaires de famille : la femme et les enfants.

(A suiv?-e.) L. Philippart,

MlSSIONNAIRE-RÉDEMPTORISTE .

253

Le tambour-téléphone chez les indigènes de l'Afrique Centrale

ETUDE DOCUMENTAIRE

La Téléphonie au moyen d'un tambour spécial, fréquemment

employée par les Noirs pour se transmettre des messages d'un

rillage à l'autre parfois à plus de dix kilomètres de distance

est un fait qui a vivement frappé les Européens en Afrique.

On trouve ce moyen de communication dans presque toutes les régions du Congo.

Hinde écrit : « Ici Lusambo), comme partout ailleurs en Afrique, les indigènes ont un système de télégraphie (1) si par- fait, au moyen de leur tambour, qu'ils sont capables de faire n'importe quelle communication aussi loin qu'un tambour peut être entendu, c'est-à-dire souvent à plusieurs milles. Comme Tinformation est ordinairement répétée par tous les joueurs de tambour qui l'entendent, une région entière counaît un événement en très peu de minutes ou d'heures, après qu'elle a été émise. Ce système de télégraphie est des plus intéres- sant » (2).

Comment est-il possible aux Noirs de communiquer au moyen d'un tambour?

La question a toujours été fort discutée, et jusqu'à présent elle n'avait pas encore été complètement résolue.

M. Engels, dans son Étude sur les Wangata (3), avait

vl) Téléphonie paraît plus adéquat, car il s'agit de transmission du son et non de l'écriture. C'est pourquoi nous dénommons l'appareil tambour- téléphone et non tambour-télégraphe comme on l'a toujours appelé jusqu'ici.

(2) Hinde, The F all of the Congo Arabs.

(3) La Revue Congolaise 1912, p. 207.

254

trouvé la clef du système, sans en rechercher l'application. C'est à l'étude complète de ce système que nous nous sommes attaché.

Les observations et les expériences dont nous soumettons ici les résultats, ont été faites par nous chez diverses tribus des Baluba du Kasai et chez les Bena Kanioka.

II.

L'instrument.

Le tambour dont se servent les indigènes se compose d'un tronc d'arbre évidé qui constitue la caisse de résonance (fig. 1

Fig. 1

Fig. 2.

et 2). Sa dimension varie; plus le tronc est gros, plus la caisse de résonance est grande, et plus le son émis est fort.

Il mesure habituellement 0m,60 de longueur, et son diamètre est d'environ 0m,35. Il atteint parfois une longueur de 1 mètre à 1"\50, et 0m,75 de diamètre.

Les deux lèvres de l'instrument sont taillées différemment, de façon à donner deux sons distincts : la plus grosse donne l'aigu, la plus mince le grave (voir fig. 1).

255

Deux oreilles situées aux extrémités permettent de suspendre le tambour.

Les baguettes avec lesquelles on le bat sont en bois doux, terminées par une boule garnie de peau ou mieux de latex, de manière à former des mailloches comme celles qui servent à battre la grosse caisse (fig. 3).

Pour battre, le joueur étant assis à terre pose le tambour par le milieu sur une cuisse, tandis que de l'autre jambe, passée par-dessus l'instrument, il le maintient dans une position favo- rable.

Lorsque les dimensions dépassent celles d'un tambour por- table, il est suspendu ou repose sur deux traverses de bois doux.

Pour permettre de jouer pendant la marche, un bois flexi- ble, courbé en forme d'arc, maintient le tambour à bonne dis- tance du batteur qui se suspend le tambour au cou.

III.

Système de transmission,

Il n'est pas douteux, que l'hypothèse de communication par transmission de lettres ou de syllabes doit être écartée, car, comme le dit très bien M. Engels à propos des Wan gâta « let- tres et syllabes sont des éléments non du langage mais de l'écriture » et le Noir ne possède pas d'alphabet.

D'ailleurs, l'élément essentiel de la syllabe étant la voyelle, pour représenter phonétiquement les syllabes, le Noir devrait disposer d'une échelle de sons, c'est-à-dire qu'il devrait pou- voir rendre au moyen de son tambour au moins autant de sons qu'il existe de voyelles et je ne parle pas encore des combinai- sons des voyelles avec les consonnes. Or, le tambour-téléphone ne donne que deux sons en hauteur. La façon dont il est fabri- qué le prouve déjà et l'indigène lui-même le confirme en appe- lant « petite voix » la touche donnant le son aigu, et « grosse voix » celle donnant le son grave.

De plus, ce système supposerait chez le nègre une faculté d'invention qu'il n'a pas. S'il avait été capable de créer des signes phonétiques, il aurait aussi bien découvert un système •de signes graphiques.

Enfin, en supposant que le Congolais ait un système de signes

256

phonétiques, il aurait avantage à se servir d'un instrument qui donne plusieurs sons, instrument que plusieurs peuplades possèdent déjà les Baluba par exemple et qui sert pour accompagner les danses : le xylophone (1).

Quel est donc le système de transmission employé?

Si vous demandez à un joueur de tambour-téléphone de battre tel mot usuel de la langue indigène, il vous répond qu'il ne sait pas. Dites-lui alors de battre par exemple que le chef demande l'objet désigné par le mot donné par vous d'abord isolément. Immédiatement, les maillotins vont battre, et vous serez surpris du nombre de coups frappés, alors que la phrase donnée ne comporte que six ou sept syllabes; vous remarque- rez aussi, que tout en battant, l'opérateur récite ce qu'il bat (2) et que chaque syllabe est scandée d'un coup de baguette.

C'est que, pour transmettre la phrase donnée le batteur se sert d'une périphrase convenue que les initiés reconnaissent à l'air joué, si je puis dire. Il ne transmet pas les mots de la phrase, mais l'idée seule qu'elle traduit. Cette idée est con- tenue dans une sentence qui fait partie de la poésie tradition- nelle de la tribu.

Voilà pourquoi tous les indigènes ne connaissent pas le lan- gage du tambour-téléphone. Il faut être membre de la tribu ou avoir séjourné longtemps au milieu des populations pour parvenir à le comprendre. Car, comme le batteur qui la joue, l'indigène qui entend la sentence la récite ; de cette façon, les enfants ou ceux qui écoutent la retiennent et s'habituent l'oreille à sa cadence particulière.

Quelle est cette cadence?... Nous croyons pouvoir affirmer qu'elle ne repose sur aucune règle. C'est une cadence au rythme naturel, instinctif, et par conséquent libre, du langage indigène. Il n'est limité par aucune loi de mesure comme l'est le rythme poétique.

Le batteur tient la méthode qu'il pratique de son prédéces- seur dont il était le parent ou l'ami. Sa fantaisie seule et son sentiment, lui dictent les paroles nouvelles qu'il met en

1 1 Le xylophone des Baluba est un instrument composé de plaques de bois d'égale grandeur, placées au-dessus de calebasses évidées de diffé- rentes grosseurs. Ils donnent jusqu'à dix sons distincts.

(2) Certains joueurs sont tellement habitués, qu'il ne leur est plus néces- saire de soutenir leur attention en récitant ce qu'ils battent, tout comme un pianiste parvient à connaître par cœur les morceaux qu'il joue souvent

257

« musique » suivant son goût particulier. Il répand ensuite l'air et le couplet chez les habitués du chef qui les feront con- naître chacun dans son entourage.

Il nous semble qu'on ne saurait mieux comparer le langage du tambour-téléphone qu'aux sonneries militaires du clairon, avec cette différence que nos soldats adaptent des paroles sur la musique afin de retenir l'air, tandis que le Noir joue l'air pour rappeler les paroles (1).

On pourra s'assurer de l'absence de règles rythmiques, en comparant entre elles les phrases chantées. Nous en avons représenté la cadence en désignant par plus (+) les syllabes rendues par le son aigu et par moins ( ) celles rendues par le son grave.

Nous avons personnellement expérimenté cette méthode et nous avons pu ainsi, après un peu de pratique, faire com- prendre aux indigènes les phrases que nous avions apprises : nouvelle preuve de l'exactitude du système décrit.

IV. Code de transmission.

Le système de téléphonie au moyen du tambour comporte donc un code de sentences conventionnelles.

Comme nous le disions plus haut, ces sentences font partie

<i) Je crois utile de rappeler ici que M. de Calonne a étudié la transmis- sion des nouvelles par gong chez les Ababua (Mouvement sociologique international, juin 1909, p. 366). Il a reconnu que « Chaque chef, chaque homme libre étaient désignés par une batterie de gong spéciale. Et, vu le grand nombre de ces batteries à retenir, l'indigène les désignait par une phrase conventionnelle, dont le rythme était à peu près identique et qui servait uniquement de moyen mnémonique. »

Pour M. de Calonne, le système du tambour-téléphone ne se distingue donc guère des sonneries militaires. La phrase : « Ne mangez pas trop d'huile de graine de courge » sert simplement à rappeler la batterie signi- fiant : « Pas de discussions, l'affaire est importante. »

Pour M. Verbeken, au contraire, le rythme de la batterie est dicté par la phrase imagée : « Ne mangez pas trop d'huile de graine de courge. » Et ce langage imagé est interprêté : « Pas de discussions, l'affaire est impor- tante » . Il s'agit donc ici d'un langage poétique populaire.

Il semble bien que le système de langage par tambour soit le même dans tout le Congo. Mais les formules diffèrent d'un groupe à l'autre parce que chaque groupe a son langage propre, ses métaphores, ses expressions poé- tiques etc.

(Note de E. De Jonghe.)

258

de la poésie de la tribu, transmise par la tradition orale. Elles prennent souvent la forme de proverbes, expression de l'esprit et de l'expérience populaires.

Au même titre que les légendes, elles reflètent la mentalité indigène, révèlent leurs idées sur ce qui les entoure et nous éclairent sur la façon dont ils regardent certaines choses. On y découvre tout une vie insoupçonnée, traduite par l'ima- gination vive et colorée.

Comme dans les contes, les règles de la grammaire indigène sont très souvent délaissées. Elles cèdent le pas au caprice, à la vivacité et surtout à la cadence. Celle-ci exige des élisions, des allongements dans la phrase afin de la rendre plus harmo- nieuse et plus compréhensible.

La traduction que nous avons faite des versets est quasi lit- térale : elle ne saurait rendre la fraîcheur et la gracieuse con- cision de ce style exotique.

Nous verrons comment ce code de conventions relativement restreint peut s'appliquer à un très grand nombre de choses au moyen de combinaisons appropriées.

Possédant le code de convention du tambour-téléphone, nous nous sommes efforcé à en comprendre le langage... Kous n'y sommes parvenu que pour quelques phrases très courtes que nous connaissions parfaitement. Le reste nous est inintelligible.

La phrase jouée au « tshiondo » se déroule sans ponctuation entre les mots ; un seul temps bref la sépare de la suivante à laquelle elle se relie. C'est comme si, en écriture, nous ne lais- sions pas d'espace entre les mots ; cela nous dérouterait et il faudrait avoir acquis une grande habitude, pour arriver à une lecture courante.

L'heure la plus propice pour les transmissions est celle de la nuit, alors que tous les bruits sont dissipés et que la nature est calme. A ce moment, la voix du « tshiondo » est vraiment impressionnante. Elle semble être la voix de la nature même, de la nature primitive et sauvage. Et parfois, elle se confond avec le souffle de la nuit mystérieuse et devient comme l'écho des siècles passés...

Cependant, il ne faut pas exiger du « tambour-téléphone » une précision minutieuse qu'il ne peut pas donner. Son langage n'est employé qu'en certaines circonstances données de la vie sociale des indigènes. Ce n'est pas la voix d'un seul homme, mais celle de la communauté représentée par son chef.

259

* *

Chez les Baluba,le tambour-téléphone est appelé « tshiondo » pour le distinguer des autres tambours (goma).

Le joueur de « tshiondo » fait partie de la cour du chef. Sa fonction est de transmettre les ordres du chef aux gens du village et des villages voisins. Si ceux-ci ont un batteur, il répète la communication pour la transmettre plus loin. Chaque sous-chef ayant un nom spécial nom de son titre ou de sa terre il est facile de savoir si le message ne s'adresse qu'à un seul groupe.

Les événements survenus à l'intérieur de la chefferie sont portés à la connaissance du chef également par la voix du « tshiondo ».

Lorsque le batteur désire faire une communication, il bat plusieurs coups dont un certain nombre avec le bout nu de la mailloche. Ce signal pourrait se traduire par : « Attention. Ecoutez ! » Immédiatement après, vient le nom de celui à qui s'adresse la communication, puis le message proprement dit. Pour faciliter la compréhension, le joueur en bat deux fois de suite chaque partie, et enfin, après transmission complète, il répète toute la communication.

On remarquera que les sentences ont ordinairement une forme très concise. C'est qu'il y a, je le répète, beaucoup de mots sous entendus. D'autre part, les redoublements de syl- labes sont fréquents.

Le Noir a un appareil auditif très développé, très délicat, et il surprend les moindres nuances. Il explique lui-même des différences entre la phrase parlée et la phrase chantée, en disant ; « Cela fait bien à l'oreille ».

A la façon de battre le « tshiondo » l'indigène reconnaît le joueur habituel.

260 CODE DES BENA KANIOKA

A. Noms des chefs.

4. Nom du chef Mozembe (1) :

Kabwa mukulu a banza bute Grand parmi les aînés (a).

Muasa bamunene

Qui investit les notables (3).

Mukalenge wa munjira nganda mua Tshiowa

Maître du chemin de la tribu de Tshiowa.

Kanangata mulundu

Qui ne peut la montagne (4).

2. Nom de Tshipama a Tshibanda :

Muangambibi kakasambàna ditu

L'aigle ne se soucie pas de la forêt.

5. Nom de Muamba a Binene, dit Kayeye, décédé en janvier 1918:

Tshiamanyangala mukadi kalombwela hanji (5) Le scolopendre ne réclame pas le seuil.

4. Nom de Kanda-Kanda :

Kanda-Kanda mfumu ne bakalenge (6)

+ + + + ++

Kanda-Kanda, chef de par les conquérants,

Tshishikanga

+ +

Qui effraye.

(1) Mozembe est le surnom d'un grand chef Kanioka tué, vers 1895 II fit la guerre à l'Etat qu'il ne voulait pas reconnaître.

(2) Premier nom de Mozembe.

(3) En leur donnant un titre .

(4) Le Mulundu est la montagne sacrée des Kanioka. Elle est l'habitat, disent-ils, des esprits des ancêtres de la tribu. Leurs descendants, les chefs, ne peuvent la gravir, sous peine d'être maudits: ils mourraient. Aussi, s'ils doivent se rendre de l'autre côté de la montagne, ils la con- tournent. C'est ce que rappelle cette sentence qui peut s'appliquer au nom de tous les chefs Kanioka.

(o) Certaines expressions sont assez difficiles à traduire ; souvent le mot à mot ne rend pas l'idée exprimée. (6) Bakalenge veut dire les chefs. Ce mot sert à désigner les Européens.

261

Wakulela tshizanga-zanga mukulu a kuisoka (1)

+ + + + + + + +

L'a enfanté Tshizanga, l'ancien qui se vêtit.

Variante du nom de Kanda-Kanda :

Kanda-Kanda mulund'a bakalenge

Kanda-Kanda, l'ami des Européens.

Tshishikanga

Wakulela tshizanga-zanga mukulu a munsasa

Cette variante se joue de la même façon que la première version, le nombre de syllabes étant le même. Cette remarque prouve que c'est bien « l'air qui fait la chanson » . L'air ne change pas parce que les mots changent, mais l'idée reste la même.

5. Il est une expression que l'on ajoute toujours à la suite du nom du chef :

Watshifuku (2) tshia bana ba mukalenge De la souche des enfants du seigneur.

B. Noms des dignitaires.

6. Nom du Kalula (vice-chef) :

Mukulu mutengula bianza hashi

L'ancien qu'on salue les mains à terre.

Walela mfumu ugikula buhika (5)

En enfantant le chef, il s'est libéré de l'esclavage.

7. Nom du Tshikala (lieutenant) :

Tshikala shiala mu tshioto

Le lieutenant reste près du foyer.

Udi mutamba bwina tshiashi kwa Mawej'a nangila (4)

Il demeure derrière chez Dieu.

(1) Cette expression peut/me semble-t-il, avoir deux sens ; ou bien elle se rapporte à tissu traduction du mot tshizanga. et alors elle signifie la chose première qui servit à voiler la nudité de l'homme, ou bien elle se rapporte à l'homme qui portait ce nom et qui vêtit pour la première fois une étoffe.

(2) De Kufuka - créer, fonder

(3) Le Kalula est ordinairement l'oncle maternel du chef. Les indigènes considèrent leur oncle comme leur second 'père, et l'oncle du chef est presque l'égal de celui-ci, c'est ce qui est marqué par cette expression.

(4) Le tshikala est l'officier d'ordonnance du chef; il veille à tout, et aux réunions chez le chef il sort le dernier. L'endroit lui assigné par la coutume pour y bâtir sa demeure, se trouve derrière la cour du chef. Le chef est fréquemment appelé par ses sujets du nom de l'Être suprème.

262

8. Nom du Shinga hemba (maître des cérémonies du culte des ancêtres).

Tengelela hemba habiala ya mukishi ne hunienga mpala (1)

+ + + + + + + + +

Celui qui honore avec la terre blanche écrasée l'esprit des ancêtres.

9. Nom du Wakutuma (messager) :

Kalume kamukendji ne mukendji ntumanga

+ + + + + +

L'homme envoyé et l'envoyé envoyeur.

10. Nom du Mwadi a musenge (interprête) :

Muasa bamunena [%) wa tshifuku tshia bena ngoma Celui qui investit les anciens de la souche des gens du tambour» Ce titre est celui du batteur du tambour-téléphone.

11. Le joueur de Uhiondo possède un autre nom ; c'est une combi- naison composée du nom donné au messager du chef et de l'appella- tion servant à désigner le bois sec.

L'idée suggérée est donc celle-ci : celui qui reçoit et qui^envoie les ordres du chef au moyen du bois (5).

Kalume kamukendji ne mukendji ntumanga (n°9)

+ + + H ++

Wa mitondo niengabela mwitu

+++ +++ + +

Par le bois séché dans la forêt.

12. Nom du Kazadi :

Kazadi mwine lubangula kakatshibwa bikole Kazadi le fou, ne peut être pris de force (4).

13. Nom du Batoke :

Mulala hanshi kabula ditoke

+ + + + +— +

Qui se couche dehors, porte des marques blanches (5).

(1 Pour saluer leur chef, les Kanioka écrasent de la terre blanche entre leurs doigts, et s'en frottent le visage, la poitrine et les bras. Le Shinga Hemba fait de même pour honorer les mânes du chef.

(2) Voir la même expression au l. Le tshiondo est obligatoire lors de l'installation d'un sous-chef.

(3) On voit que les Noirs connaissent la synecdoque.

(5) Le Kazadi est un dignitaire subalterne, dont le chef se sert pour divers ouvrages et qui dispose d'un petit groupe d'hommes. Les indigènes ne savent pas pourquoi Kazadi est appelé le fou.

(5) Le Batoke est aussi un assistant du chef. La traduction du mot Batoke est blancs. 11 est probable que le premier Xoir qui a porté ce titre était pâle

263

14. Nom du Mfumu a nsende (maître forgeron) : Mulume nsende fula malungu

L'homme forgeron travaille le minerai de fer.

15. Nom de la Mukalenge mwaài (première femme du chef) :

Kamanda nzolongo ! tshimunge kala sambo

Tatouée ! qui règle les palabres (des autres femmes du chef).

Tshinemunemu muan'a bamfumu

(Titre) fille des chefs.

Udi mutamba bwina tshashi kwa Mawej'a nangila (1)

Qui demeure derrière, chez Dieu.

16. L'expression kamanda nzolongo qui commence cette sentence sert toujours à désigner la femme. Ainsi l'appel des femmes du chef est :

Kamanda nzolongo! kamanda bishabile !

Les tatouées ! qui faites tout (tout les travaux). Itabay' miho (bis).

+ +

Répondez-moi.

17. Le nom de la Tshikala mwadi (deuxième femme du chef) se joue de la même façon que le nom du Tshikala (n° 7), mais on fait pré- céder l'expression servant à désigner la femme : Kamanda nzolongo. Ainsi la confusion est impossible.

C. Noms de fiefs.

Le chef n'ayant affaire qu'avec le chef d'une terre pouvant com- prendre plusieurs villages, chaque vassal possède son nom qui est plutôt le nom de la terre elle-même ; car, même si le sous-chef change, le nom ne varie pas.

18. Voici, par exemple, le nom de la terre Tshilundu, située vers la rivière Bushimai :

de peau, d'où son surnom qui est encore donné actuellement aux indigènes ayant la peau brune. La fonction qu'il remplissait auprès du chef a fait de ce surnom un titre qui a passé à sou successeur. L'attention sur ce nom est attirée parce que c'est la sentence qui le désigne qui a été donnée à l'Européen, au Blanc. Voici le sens de cette phrase : A l'intérieur de sa hutte l'indigène dort toujours sur une natte, tandis qu'à l'extérieur il s'étend volontiers sur la terre nue; dans ce cas, la poussière lui fait sur la peau de grandes marques blanches, attestant qu'il s'est couché dehors. [1) Voir même expression n" 7.

264

Mukalenge wa munjila ngandam wa Bakete katongola ngaji.

Maître du chemin des Bakete récolteurs des noix de palme (1).

L'expression Munjil'a nganda wa Bakete katongola ngaji est à noter ; nous Ia retrouverons dans d'autres sentences, toujours pour désigner l'Ouest, direction dans laquelle se trouve la région des Bakete par rapport à celle des Kanioka.

19. Nom de la terre Luaba, sur laquelle est bâti le village de Kanda- Kanda :

Kampalamba (2) mwana mutela hashi! (Nom spécial de la terre.) Luaba luapwa makasa. Luaba use les pieds (3). Après avoir appelé le dignitaire par son nom, le batteur fait suivre l'ordre du chef.

20. Si le chef l'appelle, on entendra :

Itaba webe mfumu webe maweja nangila. Réponds à ton chef à ton Dieu.

21. S'il tarde à venir, le tambour le rappellera en ajoutant :

Tshilangalanga katshidia kulengela. L'hésitation (l'oubli) n'est pas bonne. Witabe lubilu-lubilu bwababo-kayebe ! Réponds vite-vite, sinon c'est affaire à toi seul.

D. Appels pouk les hommes du chef.

a) Appels de guerre.

22. Bana balume (bis). + +— +

Les hommes! Bualu bua mvita (bis).

+ +

C'est pour la guerre. Kasanga tshiku (bis).

4- +

Rassemblez- vous (comme pour le marché).

(11 La terre Tshihindu que désigne cette sentence touche au pays des Bakete duquel la rivière Bushimai la sépare. Ce pays est couvert de palme- raies d'où les Bakete retirent de grandes quantités d'huile de palme.

(2) A remarquer la sonorité naturelle de ce mot (qui se prononce Kamm- pa-lamm-ba). Il semble en le prononçant qu'on entend battre le tambour.

(3) Allusion à la dureté du sol rocailleux et accidenté du pays.

265

Kayi muntu ashale (bis)

+ + + +

Que pas un homme ne reste (chez soi).

23. Le troisième membre de ce verset, constitue L'appel pour le marché (tshiku) :

Kasanga tshiku (bis) + + +

24. Rassemblement des guerriers :

Kambimbi katoya (bis) L'hirondelle fait éclore (ses œufs) (1 ).

Muntu kadia mamvwa (bis) Que personne ne mange du sorgho (2).

25. Debout et en avant !

Nuimanekene kuyulu

Restez debout.

Tuye milongo milongo

Partons en longues files.

26. Les armes :

Le fusil : Kafwa kahia kahikihikija soka bantu Feu qui tue, souffle qui brûle les hommes. L'arc et les flèches :

Tshilonda tshiafula makala tshinakulala mu yanzo La pointe forgée dansles braises, se trouve dans l'abri du forgeron.

27. L'ennemi est en vue :

Kinda-kinda ! babamonangana babamonangana Attention, on se voit les uns les autres.

28. Poursuite :

Badi mutana a kasuku a memba

Il y en a dans la brousse (qui se cachent).

Kwatai bantu babaye

Prenez ceux qui s'enfuyent.

Bamukamakama bamweka

Qu'on les recherche jusqu'à ce qu'on les trouve.

(1) C'est-à-dire : Ainsi que l'hirondelle fait éclore ses œufs, le chef fait rassembler ses hommes.

(2) C'est-à-dire : que personne ne prenne le temps pour manger le pain de de sorgho, plat préféré. En voyage et surtout en guerre, le Kanioka ne se nourrit que de manioc cru.

266

29. Pour encourager au combat :

Tufwe tufwe tuambakaneudiku

Les morts s'entassent (chez l'ennemi).

Bahona tandabala

Ils tombent raide morts.

Bafwile bafua ne ngabo

Ceux (des nôtres) qui sont morts, sont morts malgré le bouclier (1)

30. Pour reprendre le combat :

Fulayi mata hashi (2). Enlevez les fusils de terre (ramassez les fusils). Jama jama muyulu? Enterre-t-on en l'air? (5). Wimane kaswa kuenda ha kabundja buikalu Il (le chef) attend, il ne veut pas rentrer au village. L'expression ha kabundja buikalu désigne le village, l'endroit l'on demeure.

b) Appels de chasse.

31. Pour incendier la brousse :

Ntanda kagele (bis).

+ +

La brousse est en feu.

Batshilwe muine kabwa (bis).

Que ceux qui ont un chien l'amènent.

Tubayi mu ntand'a kasuku a memba

Partons en brousse.

L'expression ntand'a kasuku a memba, est toujours employée pour

désigner la brousse.

32. Pour allumer l'incendie :

Kadilu kamue kamue (bis) Un seul feu, un seul (4).

(1) C'est à-dire :les tués ne cherchaient pas à se protéger de leur bouclier : donc, pas de lâcheté!

(2) Cette sentence se joue aussi lorsque les indigènes sont au travail aux champs ; elle traduit alors l'idée : « reprenez vos houes que vous avez dé- posées à terre pour vous reposer, et au travail ! »

(3) Les indigènes emploient cette expression pour marquer qu'une chose est inconvenable.

(4) C'est-à-dire : que le feu soit continu. Ceci rappelle aux chasseurs que la ligne de feu doit être continue. Cette prescription est très importante

267

53, Chants de chasse pour exciter les chasseurs :

Kaniam'a mvundakena boya

La bêle aux poils en touffes.

Ka mu ntanda kasuku a memba

De la brousse.

Tuikalala bua mukuata bine ne kumwelakana

INous sommes venus pour la prendre et nous la désirons.

Mukana muahebwa kudia La bouche doit recevoir à manger.

Muikala nienie ntalala Si elle reste vide, elle est froide (1).

Munjil'a ngand'a kabelo

Dans le chemin de la petite ouverture,

Muijidila tshidimba wa tshitumbalele

Fermée par les lèvres, dans la tête.

Muine nsuki

Qui porte les cheveux (2).

34. Kaniam'a nvundakena boya,

traduit toujours au tshiondo l'idée de l'animal. Ainsi pour désigner la foudre que le noir croit être une « bête du ciel », le joueur de tambour dira :

Kaniam'a nvundakena boya

Bête. Ka muyulu (5) mua nshimba Du fond du ciel. Cette dernière expression, qui indique le firmament, remplace ici celle désignant la brousse.

pour la chasse au feu, car ainsi le gibier, enfermé dans la partie circon- scrite par le feu doit traverser l'incendie, qu'il sorte, ce qui facilite la prise.

(1) C'est-à-dire : Lorsque la bouche est vide elle est mouillée; on a l'eau à la bouche.

(2) C'est-à-dire : Il faut quelque chose dans le gosier, chemin qu'ouvre la bouche, ouverture bordée par les lèvres, faite dans la tête sur laquelle pousse la chevelure.

(3) Muyulu, au-dessus. Le Kanioka appelle le bleu du ciel tout haut : Mua Nshimba=chez Nshimba. Nshimba et Memba sontdes êtres imaginai- res qui personnifient le ciel et la brousse.

268

c) Appels divers.

35. Pour appeler les buveurs quand le chef boit (1) :

Malwa kasangisha nyeta (bis)

+ —+++— + La bière raffermit le corps.

Nuanga nuanga (bis)

4- +

Buvez, buvez.

Bwalu bwa nzala

+ + +

C'est pour la faim.

Wikalakala watala hashi watala mulu

Asseyez-vous. Regardez à terre. Regardez en l'air (2).

36. Pour appeler les hommes du chef quand il se met en voyage :

Kongokanayi - Kongokanayi

+ + + + ++ Rassemblez-vous, rassemblez-vous.

Itabayi wenu mfumu wenu Mawej'a nangila

Répondez à votre chef, à votre Dieu.

Bena munda mwa mfumu

Ceux de chez le chef.

Tshifuku tshia bana tshia mukalenge

Tribu des enfants du chef.

37. Pour annoncer l'arrivée prochaine du chef dans un village :

Komba hashi hafikila mwenyi

+ + + + +

Ralaie a terre, arrive le propriétaire.

38. Pour annoncer que le chef arrive :

Wendenda wafika

Il est en route, il arrive.

Ubafika ha kabundji bwikalu henunu

Il arrive au village chez vous.

39. Pour annoncer le départ du chef et lui souhaiter bon voyage : Le nom du chef suivi de :

(1) Lorsque le chef a fait fabriquer de la bière, il invite les hommes de sa suite à venir partager ses libations.

2) Ces mots décrivent les gestes du buveur regardant à terre pour pren_ dre la calebasse de bière lui servant de verre, tandis qu'il regarde en l'air lorsqu'il lève la tête pour boire.

269

Tubaye mwebe (bis) Tambuluka (bis)

Nous allons avec toi, va.

Wenda bilengele (bis)

Va heureusement.

40. Pour que les femmes du chef apportent de la nourriture :

Bakamanda nzolongo

Les tatouées.

Bamilowo ya kuisamba

Celles qui nous tiennent compagnie pour converser.

Tshitandatanda tshia mukulu a nseke tshia kudja

La préparation du manger (est leur affaire).

41. Pour renvoyer les gens du chef chez eux :

Katalayi kuenu (bis) Allez voir chez vous.

42. Réveil (I) du chef :

TshishiKanga, buka ! shikama ! (Surnom du chef), lève-toi ! assieds-toi ! Angata luzangazanga : vuala Prends une étoffe : habille-toi. Ne lukayakaya : swika Et une ceinture : lie-la. Bubatshi La nuit est finie. Kabuidibuidi mukulu a mindima Voilà l'aurore maîtresse de l'obscurité. Bufuku bubatshi... bubongoloko La nuit est finie... Elle s'enfuit... Bubayi mu njil'a nganda mua Bakete katongola ngaji Elle s'en va par le chemin des Bakete (Ouest). Bufuku bubayi kutala kwabo kubaila bakulu kwa kuikalanga La nuit s'en va voir sont allés les ancêtres, chez qui elle demeure. Ku bamwena buloba ba ku mpala Chez les gardiens de la terre de jadis. La phrase « Kabuidibuidi mukulu a mindima » désigne le moment le jour qui se lève est semblable à la nuit qui tombe. Nous retrou- vons dans ce morceau la sentence qui désigne l'ouest (voir 18) direc- tion dans laquelle semble s'enfuir la nuit.

(1) Cette sentence est certainement un des meilleurs morceaux de la poésie indigène. Le respect des ancêtres s'y affirme.

270

43. Coucher du chef (1).

Kabuidibuidi, mukulu a mindima Voilà le crépuscule maître de la nuit. Ubafike kutala nzubu a kakumbu a luibaku Va voir la maison que tu as construite (la tienne). Bufuku bubile... La nuit vient. Kunangidi milowo ya kuisamba Ne désire plus converser (au dehors). Katala mulunda nebe mukashi Retourne chez ton amie. Kumba madib'a kamanda bishabile... Le pagne des femmes s'agite... (2). Mulunda nebe ubamana kuibija mudilu Ton amie a fini d'attiser le feu... I kimutala ku kasongo wa luikalu (3) wa muntu mutwale muntu wende Et elle pense à la faim que ressent chaque homme qui est avec

sa compagne ..

Ya umutale kuhandahanda ya matako ya mulunda nende

Et videt crura disjuncta amicae suae.

Bamonangani munda nkulu ya bufuku..

Ils restent vis-à-vis l'un de l'autre jusqu'au milieu de la nuit...

44. Autre appel pour le coucher :

Jamajama muyulu ?

Enterre-t-on en l'air? (4).

Kunangidi milowo ya kuisamba

Ne désire plus converser.

Bufuku buaswila, buïtudia

La nuit nous couvre, nous mange.

Bu ngulungu wahinga mu yombo, twela muebe mu

kabunja buikalu Homme l'antilope retourne au gîte, rentre chez toi au village.

(1) Nous avons traduit ce morceau sans forcer l'expression, donnant les mots tels quels. Le rapprochement des sexes est considéré par les Noirs comme un besoin naturel.

(2) Pendant la marche, par suite du déhanchement de la femme.

(3) Kasongo, est le surnom de la faim. C'est par le même mot que l'indi- gène traduit le désir.

(4j Voir 30.

271

45. Prière pour se rendre les mânes favorables : Mukishi ne kunienga mpala !

Esprit au front plissé ! (1). Tekela tshikama hashi meso tadile kudiako Mets une main à terre que mes yeux te voient ('2). Nkupe malwa ne bidiashi ne mbuji ne nzubu ha kutekela-

bidiashi Je te donnerai de la bière et du pain et de la chèvre et une maison pour y mettre la nourriture (3).

Hatuka mu nzubu katula hebe haikalanga

Sors de ma maison (4) va chez toi tu résides. L'expression « Mukishi ne kunienga mpala » est toujours employée pour désigner un esprit.

46. Prière pour apaiser les mânes :

Mukishi ne kunienga mpala

bidiashi nabakuakisha malwa nabakuakisha

De la nourriture je t'en ai donnée, de la bière je t'en ai donnée.

Ke muana kabidi udi ubeleye

Et l'enfant encore est souffrant.

Mbunganyi

que je suis triste !

We mukishi ne kunienga mpala

Toi esprit au front plissé.

Nabatendakana

Je pleure et crie.

Ndekele muan'anyi akase

Laisse-moi mon enfant, qu'il guérisse.

Nabamona malo.. nabatendakana

Je sens mes intestins (5j... Je pleure et crie.

d). Noms d'animaux.

47. Pour désigner les gros animaux en général :

(1) C'est-à-dire : Qui peut se fâcher. Kuuienga mpala=plisser le front étant fâché.

(2)îC'est-à-dire : Manifeste ta présence (en me favorisant). li (3) Rite du culte des ancêtres.

(4) Les esprits sont censés donner les maladies.

(5) C'est-à-dire : Je souffre intérieurement.

272

Kapola kadia mitshi kadia mebele (1) Gros être qui mange les arbres, qui mange les plantations. Si le gros animal est sauvage, comme l'éléphant, on ajoutera la sentencs désignant la brousse :

Ka mu ntanda kasuku

+

Si le gros animal est domestiqué, comme le bœuf par exemple, on fera suivre de la phrase du village :

Wa muetu mu kabunji a buikalu Le « tshiondo » ne saurait désigner telle espèce d'animal déterminée, mais l'indigène ne s'y trompe pas connaissant celle qui existe dans ses parages.

48. Les fauves :

Kaniama ka meso makata mabakwabo matshiotshio

+ + + + + +

Bêle aux gros yeux, et avec d'antres yeux très petits (w2) et on ajoutera « de la brousse : ka mu ntand'a kasuku ».

49. Pour le gibier, nous avons vu la phrase conventionnelle dans les appels de chasse (n° 33).

50. Pour désigner les petits animaux de la brousse, comme l'écu- reuil qui en est le type et qni est, pour les indigènes, ce que le lièvre est pour nous :

Kabundi a makele ngenze

L'écureuil, premier de tous les petits animaux (?)

Tshibelo tshimwe tshiule nyingu, tshikwabo tshiabuke Luilu

Une cuisse remplit un pot, l'autre saute la Luilu (3).

51. La chèvre :

Kambuji bula mahembu

+ + + +

La chèvre exhale l'odeur du bouc.

(1) L'indigène qui aime beaucoup les comparaisons, recourt volontiers à cette sentence pour désigner le chef-lui-inême, être très important qui accapare tout ce dont il a besoin...

(2) Cette sentence s'applique particulièrement au léopard, qui abonde dans le pays. Les taches de sa peau, disent les indigènes, sont comme autant de petits yeux.

(3; Cette sentence est hyperbolique. Elle montre combien la chair de l'écureuil est appréciée et combien son agilité est grande. La Luilu est une rivière large de 60 à 80 mètres.

273

52. Le chien :

Mutombe, muina lubangula, mudia bantu Le révolté, le fou, qui mange les hommes (1).

53. Le chien de chasse :

Kabwa ne tshidibu kalupwila kuta Chien au grelot lancé à la chasse (2).

54. Le coq :

Tshitala mwena mwalala

Coq qui porte une crête.

55. Pour la poule, on ajoute :

Tekela diyi ku mikonzo

+ + + + +

Qui pond l'œuf au fond de la hutte.

56. Le sanglier :

Ngulube kulu kwitu kwitu

Le porc longe la forêt.

57. La perdrix :

Konyi jila mayi

++ +

L'oiseau qui délaisse ses œufs. e) Noms divers.

58. L'eau :

Kaluila hita hashi wa ditu Qui coule et passe sous (au bord de) la forêt (5).

59. Pour une rivière, on ajoute :

Kalababila Qu'on ne traverse pas à pied.

60. La pluie :

Kuminamina muyulu kavundakanianga Qui gronde là-haut et pétrit la terre.

(1) Cette expression désigne le chien indigène qui erre partout cherchant de quoi manger, fuyant quand on l'appelle et dévorant les cadavres humains en décomposition.

(2) Ces grelots, faits des fruits évidés du borassus, sont serrés sous le ventre du chien ; agités lorsque le chien poursuit une bète, ils révèlent au chasseur la direction à prendre.

(3) Au pays Kanioka, les rives des cours d'eau sont boisées .

274

61. L'arc-en-ciel :

Kalombo a nioka ne maulu mwanza kongolo (1) (nom d'un serpent de couleur pâle) vient des nuages (que crache)

le serpent deau.

Lukumba mvula

Arrête la pluie.

62. Le soleil :

Kadiba mutende a kuishete Soleil qui disparaît en se laissant glisser sur l'horizon. Ubakamona mwa Bakete katongola ngaji Il va voir chez les Bakete l'Ouest) (n° 18).

63. La lune :

Nsuingi ubala ufwa

La lune paraît et meurt. Kambimbi kamutshimba diulu L'hirondelle va et vient dans le ciel.

64. Les étoiles :

Kabalabala muyulu Petites choses qui brillent là-haut. Wa muyulu wa nshimba (voir 34) Tout au fond du ciel.

65. Le feu :

Kadilu ka bafwe

Le feu des morts (des ancêtres).

66. Le bois à brûler :

Mitondo niengabela muitu

Les arbres desséchés de la forêt.

Ditu bila ka bila

La forêt aux ressources inépuisables.

67. L'herbe à couvrir les toits :

Kateta mu kulu katenga nsala L'herbe dessus (les toits) se lie en plumets.

68. Pour couvrir :

Bakwetu bambala (bis)

+ + +

Concitoyens liez. Tshitwa! Tshitwa! (bis) + -f

Finissons! Finissons!

(1) Mwanza kongolo est le nom indigène de l'arc en ciel.

69. Les lianes :

70. Les roseaux

275

Mioji a mulambalamba

Cordes qui rampent.

Malenga madiadia huku

Roseaux que ronge le rat

Malale basonge matale muyulu

Ils penchent leurs pointes, mais regardent en haut.

71. Le palmier :

Kabanza katebwa ne mikono Flèche coupée parles pieds (1).

72. L'huile de palme :

Tonga kalengeshia ka makasa

Régime de noix rend les pieds luisants (2).

Wa muyulu a nshimba

Du sommet (voir 34).

"Wa kabanza katebwa ne mikono

Du palmier (voir 71).

75. La bière :

Malwa kasangisha nyeta

La bière affermit le corps (voir 35).

Muan'a diamfwa sengula

+ + +

Enfant du maïs tamisé.

74. Pour le vin de palme, au lieu de muaria diamfwa sengula, on dira le nom du palmier : wa kabanza katebwa ne mikono,

75. La faim :

Kasongo lukala munda vuma

(Surnom de la faim), fait gargouiller l'estomac (voir 43).

76. Le batteur annonce qu'il cesse de communiquer :

Kulebaleba nabaleka

Parler, je cesse.

Nabaya hanyi ha kabundji buikalu hanikalanga

Je m'en vais chez moi au village j'habite.

(1) Le palmier est comparé ici à une flèche. Pour faciliter l'ascension du palmier dans le but de cueillir les noix, les indigènes font des entail- les dans le stipe.

(2) Lorsqu'un Noir veut se rendre propre, après s'être lavé, il s'enduit le corps d'huile de palme.

276

Nikalakala milowo ya kuisamba

J'étais resté pour converser.

Kudi wanyi mfumu wanyi Mawej'a nangila

Chez mon chef, mon Dieu.

CODE DES BALUBA (1)

d. INom du chef Dibwe (Mutombo Katshi) des Bakwa Kaloshi :

Dibwe kaikuambula wa mukeudi nshimba

Pierre qu'on ne peut soulever, de (nom de l'ancêtre).

Mfumuabo mutekela malobo wa mukendi nshimba

Chef de ceux qui habitent les terres de Mukendi Nshimba.

Mfumuabo wakubambila mua kupita

Chef qui leur dit de passer.

Mukalenge udiadia nshima ne mudilo

Le chef mange la nourriture chaude.

Ta talala ikale ya bamene bende

Refroidie, elle est pour ses notables.

Comme il a déjà été dit, le noir aime à déguiser sa pensée ; il emploie

de préférence la comparaison. Celle-ci est toujours frappée au coin de

l'observation la plus parfaite. Ainsi, par exemple, voici encore quelques

sentences qui servent à désigner le chef :

2. Mutengatenga mutenga, indi ngapatuka penuapa bana ba

nyama (Surnom de gros animal), si je sors parmi des jeunes bêtes.

Ke baniema lubilu bakaditwa ne muitu Voilà qu'elles s'enfuient vite et vont se cacher dans la forêt.

5. Tshiminyi muikile mu nsanga

L'aigle se repose sur les nsanga (2).

Bana ba niuniu bikile pashi Les jeunes oiseaux se reposent à terre.

4. Lusanga lua ditamba dimwe

Le lusanga à branche unique.

5. Tshibondobondo njikila bintu Grand panier qui engloutit toutes choses.

(1) Baluba du Sankuru-Lubilashi.

(2) Le lusanga (pluriel- nsanga) est un des plus grands arbres du pavs. Son tronc est tout droit. C'est le Chlorophora excelsa ou chêne d'Afrique (faux teck).

277

6. Tshilundu udiadia nzubu ya bakwende Termitière qui mange (recouvre) les maisons de ses voisins.

7. Munanga tshibula nkasu La terre sèche brise les houes.

S. Mfumu'etu tshitebwa mukana tshia Bakwa Kaloshi Notre chef connu de bouche (1) des Bakwa Kaloshi.

9. Tshipanda mukwate nzubu ya Kaloshi a Mpunge Colonne (support) qui soutient la maison de Kaloshi a Mpunge.

Kaloshi a Mpunge est le nom du fondateur de la tribu. C'est ce nom qui sert de cri de ralliement.

Nous n'avons pas reproduit certaines sentences qui ont peu de sens pour l'Européen, car pour les comprendre, il faudrait connaître toute l'histoire de ces populations.

Ces sortes de litanies rappellent souvent des événements survenus lors de la fondation de la tribu; On y retrouve également la trace des affinités entre les différentes tribus.

Appels ;

10. Pour la guerre :

Muluba muikadila katapangana

Le Muluba n'existe que pour tuer,

Muluba wamana nkole

Le Muluba reste chef.

Kaloshi kadiadia mpasu ne masala

Kaloshi mange la sauterelle avec les ailes,

Tshitondelo ke kutapa

La colère le fait tuer.

Kaloshi kabobo kandanda bakuende nkonyi

Kaloshi (gros poisson), frappe ses voisins.

Mukalenge wamania tshibau tshia kubanga nyengile.

Le chef connaît ce qui est défendu (tabou).

Mu ditunga muikale niuniu, bana ne bakashi :*

Au village que restent les oiseaux, les enfants et les femmes :

Balengele banaya !

Qu'ils se réjouissent !

Kanumuangaladi ! nuikale tshilundu wakufinga nzubu

Ne vous dispersez pas! Soyez la termitière qui recouvre la maison.

(1) « Son nom est dans toutes les bouches.

278

Kanuikadi mbulubulu wamba muende

Ne soyez pas l'abeille qui dit à sa façon.

Kajiji wamba muende

La mouche qui dit à sa façon.

Mukalenge bulobo buebe ke bua muntu

Maître, ta terre est celle d'un seul homme.

Tshibi katshinzuluka kaloshi a mpunge atshiunzulule

Si la porte n'est pas ouverte, Kaloshi l'ouvrira.

11. Le chef invite ses gens à manger et boire :

Fuakunayi ! numono nzaba a malwa ma ntembo

Venez tous ! vous aurez des pots de bière (1).

Munda mua lubanza lua ilunga mbidi

Dans la cour du chef.

Ne kamba ka mfwanka kalenga

Avec un peu de bon chanvre-tabac.

Ne bilambila bianda mpelo

Avec ce qui est cuit, produit par la pierre meulière (bouillie de maïs),

Ne vuadivuadi kadila mulambo

Avec des légumes (feuilles de manioc séchées) qui aident à avaler.

Ne tshitala mukwa manda nzolo

Avec de la poule.

12. Pour le marché :

Bangenda mushinga bendenda

Les vendeurs vont en route.

Kabaluidiangani

Et ne se battent pas.

15. Pour le tribut :

Bulobo kalambula mvula

La terre ne paie pas tribut à la pluie.

Mvula wakalambula bulobo

La pluie paie tribut à la terre.

14. Ou:

Balumiana (2) Katembwe ! Lukugile ! Ohé les hommes î Rassemblez-vous !

(1) Ntembo est une espèce d'abeille d'Afrique, qui pend un nid d'alvéoles sous le toit des huttes. Ce nid ressemble à une éponge conique, toute blanche et le Noir lui compare la mousse qui sort du pot à goulot con- tenant la bière en fermentation.

(2) Balumiana est l'appel fait pour attirer l'attention d'hommes dont on ignore les noms ou que l'on ne veut pas désigner spécialement.

279

Nuikale tshilundu wakufinga nzubu

Soyez la termitière qui recouvre la maison.

Tukalambule mfumu'etu tshitebwa mukana

Payons le tribut à notre chef connu de tous.

Muena kungulu wa dikeji, wava nendo

Celui qui a une jeune chèvre, qu'il l'apporte.

Muena tshitala mukwa mande nzolo, wava natshio

Celui qui a une poule, qu'il l'apporte.

Muena kabwa mukoyi, wava nako

Qui a un chien, l'apporte.

Muena tshitenge dimina tshia matala, wava natshio

Celui qui a du maïs, qu'il l'apporte.

Muena tshombe wa munyengayi, wava natshio

Celui qui a du manioc, qu'il l'apporte.

15. Quand le chef part en voyage :

Balumiana katembwe ! Fwakunayi, tulayanganayi Ohé les hommes ! Venez ici, dire au revoir.

16. Quand le chef veut rentrer au village :

Luendo lubimani ! Luendo lubahi lua kuya kwetu En voyage ! Pour rentrer chez nous.

17. Pour rappeler des gens :

Balumiana katembwe ! Tshipinga mwinyima !

+ + + +

Ohé les hommes ! Revenez en arrière !

Fwakunayi kunoku !

+ ++ + +

Venez ici !

18. Pour prévenir d'un danger :

Wikala ntala wadimuka

Si tu es (sauterelle qui fait de grands bondsï, fais attention.

Wikala tshimunge bakutola nsala

Si tu es (sauterelle qui fait de petits bonds), on t'arrachera les ailes.

19 Pour appeler les femmes :

Bamikoko ya bimpanga, bakashi, fwakunayi !

Brebis des béliers, femmes venez ici!

Twalayi kapia ne mudilo

Apportez le feu et la lumière.

Kamudilo nzala munda yamana mutshima

La faim commence à me unir le cœur.

I

280

Munda mubafiki fitutu Mon intérieur devient noir.

20. Pour annoncer que le chef reçoit :

Mukalenge belangana. Muloho Mawej'a nangila ubimanakana

Le chef reçoit. Dieu est debout.

Tshitshimba munda mwa mbelo

Il va et vient devant la porte.

21. Pour appeler les joueurs de tambour : Bamuvual© muena ngoma, bakafitshi yabo nshima

Ceux du tambour sont avares de leur nourriture (1).

22. Pour tenir conseil :

Fwakunayi ! Mfumu'enu wakunuambila, ubanubikidi Venez ici ! Votre chef veut vous parler, il vous appelle.

Noms divers :

23. Le palmier :

Tshitende wa muinshi mukorna

Le jeune palmier (se trouve) sous le grand.

Tshiambwe tshidi ne manyi makunze-kunze

Le régime donne de l'huile très rouge.

24. Le manioc :

Tshiombe muniengayi wa munienge Le manioc doit être malaxé fortement (quand on le cuit).

25. Les patates douces :

Tshilunga-senga tshia bulambalamba La patate douce qui s'étend, s'étend.

26. La nourriture en général :

Kanumonayi tshima ne mintuntu... ujinga nkala ■Quand on a de la bouillie et des insectes... on désire des crabes (2).

27. Le millet :

Mponde, kabongo a malobo

Millet (surnom) de la terre.

Mponde, bobaku lukasa

Millet, mûris vite.

Bana bafu ne nshima ya tshiombe

Les enfants meurent avec la bouillie de manioc (3).

(1) Parce que, dit-on ils reçoivent toujours mais ne donnent jamais à manger.

(2) C'est-à-dire : On désire toujours autre chose que ce qu'en mange habituellement.

(3) La bouillie de manioc est très lourde et les enfants la digèrent mal.

281

28. L'éloffe dont on se vêt : Tshilamba bwanga bwa luendo

L'éloffe est le remède du voyage. Upange tshilamba luendo luapumba Qui perd sou étoffe, doit retarder son voyage, ou encore :

Tshilamba tshia mbwija katshibwedi nkusu L'étoffe pour habit ne laisse pas pénétrer les poux.

29. Les perles : Mbusanga kalengeja nshingu

Les perles embellissent le cou.

30. La houe : Twalayi ngandu ulele muilobo, wa lukasu

Apportez le crocodile étendu sur la rive, de la houe (1).

51. Le chien : Eabwa mukoyi mudingila mambu

Le chien fausse les procès. Bamana badia bamudingila mambu

Quand on a mangé quelque chose, on le fait mentir dans les procès (2).

52. La chèvre :

Kungulu wa dikeji junguluka wa mikuna La jeune chèvre à la peau lâchée cabriole sur les montagnes.

33. L'antilope :

Ngulungu akabala kapanda kinda

L'antilope tend les pâlies et brise le piège.

34. Les oiseaux :

Bana baniuniu balen gela nsala Les jeunes oiseaux ont de belles plumes.

55. Pour chasser les oiseaux des plantations :

Babunda bunda kabanji kudia

Les cultivateurs n'ont pas encore mangé.

Kakalaja kadia kambotoka

Le moineau mange à satiété.

Ha ! kelekelele ! (bis)

(Cri pour chasser les oiseaux.)

(1) Le fer de houe indigène, lorsqu'il est posé à terre, sa face convexe au-dessus, fait pensera la tête d'un crocodile étendu sur la rive.

(2) Le cliien est le bouc émissaire des indigènes : Si l'on vole un peu de viande, c'est le chien qu'on accuse. Souvent à cause de lui on ne peut débrouiller une palabre.

282

S 6. Le porc :

Ngulub'a kayombo, wa diulu pashi

Porc (surnom), au nez toujours à terre.

Ubamani bilung'a senga bia bulambalamba

Il ravage les patates douces,

37. Le chat sauvage :

Mukenge ubamani bantu nzolo (Sorte de chat sauvage), extermine les poules des gens»

38. Grosse bête en général :

Kampundu mulum'a nyama mbowa

(Surnom) mâle des buffles. Ubamani tshitenge dimina mebele Qui ravage toutes les plantations. <"9. Le lion :

Kampimpi nyama mupite nyama yonso La bête trapue surpasse tous les animaux.

Kasangidi ne nyama

Ne se rencontre pas avec les autres bêtes.

Tambwe kimani mu njila

Le lion ne s'arrête pas sur le chemin.

40. Le soleil :

Diba katangila tshishiki Soleil qu'on ne peut regarder fixement.

Wakutangila waoshia usese Qui te regarde est brûlé par tes rayons.

41. La lune :

Muenji katengela wabala

La lune éclaire (quand) elle apparaît.

Muenji mutekela mpata

La lune fait douter (1)

42. La pluie :

Kasongo mvula wa mudimbadimba Pluie qui gronde. Mvula wa mayi malanda nkala Pluie qui donne de l'eau remplie de crabes (2).

(1) Les indigènes disent que la lune fait douter parce que le jour de son apparition est toujours discuté. Ceux d'entr'eux qui se réveillent après le lever du soleil ne savent dire exactement le premier jour de la lune, car ils n'en connaissent pas le dernier.

(2' C'est-à-dire : Il y aura beaucoup d'eau, le crabe ne se montrant qu'alors.

283

43. L'Européen : Kabukebuke kabahatuka kudi bamfumuetu

Revenant (1) venu de chez nos chefs. Tshitebwa mukana, ba kuinshi kwa mayi malanda nkala

Connu de tous (2) de l'aval de l'eau remplie de crabes.

44. Pour annoncer qu'un voleur circule dans le village : Muena mutshima wa bwivi

Il y a quelqu'un qui a le cœur d'un voleur

Benu kungulu wa dikeji kanuikadi, balala

Que ceux qui ont des chèvres, ne restent pas à dormir.

Tandabala mu lubambalu bwa nzubu

Sans bouger devant chez eux.

Muena mutshima wa bwivi, kebabu

Celui qui a un cœur de voleur est là.

Conclusion.

Pour conclure, il me reste à montrer comment il est possible à l'indigène, avec le code à sa disposition, de communiquer immédiatement un événement fortuit.

On a déjà pu remarquer, à la lecture des sentences, le jeu de quelques combinaisons. Ce jeu est très simple, et il suffit de bien connaître toutes les phrases conventionnelles pour en multiplier les applications.

Prenons un exemple. Je disais au 47 (kanioka) que le tshiondo ne saurait préciser telle espèce de gros animal parce [u'il n'existe qu'un nom pour désigner toute la catégorie des >achy dermes. Mais il est évident qu'il peut, au moyen d'une seconde sentence, marquer l'idée qui fait distinguer telle espèce de telle autre. Supposons qu'il s'agisse d'un hippopotame. Le joueur donnera d'abord le nom générique :

Kapola kadia mitshi, kadia mebele (n° 47)

et fera suivre de (n° 58 et 59) :

Wa kaluila hita hashi wa ditu, kalabala.

Ainsi, le doute n'est pas possible; il s'agit du gros animal qui vit dans la rivière.

(1) Allusion à notre peau blanche.

(2) C'est-à-dire : dont le nom est dans toutes les bouches

284 -

Le Noir sait adapter rapidement ses phrases aux circon- stances.

Le cas qui se présenta lors de l'occupation du pays par l'Européen nous en donne un exemple. Il ne fut même pas nécessaire de composer une convention spéciale pour le dési- gner : il s'en trouvait une dans le code (voir 13)

Actuellement, lorsque le Blanc arrive dans un village, on lui attribue toutes les batteries de tambour qui concernent le chef.

Quand nous arrivions dans un village Kanioka, nous enten- dions très bieu ceci :

Mulala hanji kabula ditoke (n° 13)

--++ +4-4- —H

Ubafika ha kabunji bwikalu henunu (n" 38)

Kasanga tshiku. Kasanga tshiku (n° 22)

+ 4-— +4-—

Kayi muntu ashale

+ T+-

Kongokanayi ! Kongokanayi !

+ + 4-— 4- + + Itabayi wenu mfumu, wenu Mawej' a nangila

4- 4-4- 4- 4-— 4 4-— +

Nous connaissions très bien cette combinaison et nous l'avons jouée dans certains villages, alors que le batteur était absent, pour rassembler les habitants. Ceux-ci comprenaient parfaite- ment. Ils remarquaient cependant que ce n'était pas le joueur habituel qui les appelait. Ils venaient chez le chef et quand ils apprenaient que c'était nous-même qui les avions appelés ils refusaient d'y croire, et nous devions recommencer devant eux pour leur en donner la preuve. Aussitôt, ils manifestaient la plus grande surprise et s'écriaient : « Jamais un Blanc n'avait joué du tshiondo! Répondrons nous encore à sa voix, mainte- nant qu'il en a le secret?... »

Ce secret, cette étude l'a révélé.

Kanda-Kanda, janvier 1919.

A. Verbeken, Administrateur territorial.

285

MAYOMBSCHE SPROKKELINGEN

Mat'andu, de Regent van den ouden tijd (*)

Plaatsen wij ons, eenige jaren terug, in 't volkrijke dorp van wijlen... Kinani (bij .. Dinge), in 't hartje van Mayombe.

De hoofdman, Manani (..Dinge) ligt in lijke. Op de heele streek is verbod gelegd : niet stelen, niet vechten... en dies meer. De vermoedelijke opvolger heeft nog niet den draagstok opgelicht (2). Wie zal er intusschen 't bestuur waarnemen? Mat'andu, het hoofd der tusschenregeering.

T'andu wil zeggen : 't grasland, het blakke (elders : de hoogte) (3). Matandu ; de heer van 't grasland, of beter : de gepatenteerde baanstrooper.

De hoofden van't binnenland in en ten Westen van Kangu plachten een slaaf (muana mbongo) te kiezen tot Mat'andu : Ndoko biekabu kit'andu! gahet Matanduschap aanvaarden (4).

Nanguna mbele lulendo mufuidi ntinu.., men neemt het hoofdmanszwaard op (waarover in de Geheime Sekte der Bak- himbas) daar de koning overleden is. Men plant het in den grond, en zombuka, hij springt erover. Men strijkt hem, even- als een dorpshoofd, pêzo kitandu, de witte aarde van zijne waardigheid, doch enkel op ééne wang, en maar eene streep op

(1) Matandu. : naam en titel van een soort regent en erkenden dwinge- land uit den ouden tijd. Vormen als lia, lila... zijn meer Kividi of Woyo.

De meeste der ouderwetsche zimvila van het kitandu (regentschap^ heb ik gehoord van een kleinzoon van een zekeren Mat'andu.

(2) Zie al deze bijzonderheden in onze Mayombsche Namen bl. 43.

(3) Tandu, Grasland is ook een kimba-naam.

(■4) Vgl. Dennett. At the back of the Black Mans mind, bl. 27. Na den dood van Maluango is Mamboma beheerder van 't land; gedurende het tusschenrijk. Hij is altijd een slaaf... Hij neemt de plaats in van 't hoi' van wijlen Maluango, schoon geestelijkerwijze onderworpen aan den Ntawtela.

286

de slapen eu op de borst, en éenen ring als een armband. Men geeft hem eene ngonge of tweebel in de eene hand en het vree- selijk mes in de andere. Hij heeft een tsabi kitandu, een kof- fertje ad hoc, om er dit koninklijk wapen in te verbergen.

Verders is hij heelemaal aangestooten als een dorpshoofd : zijn pu of gevlochten hoofdman spet ; zijn reepje blauwe stof (tata dibundi) om het hoofd; zijn nsinga ponda of hoofdmans- singel : zijn kikanda of pelsen voorschootje met bellekens (bipambulu) bezet.

Desniettegenstaande, uyika vnlu, moet hij dom doen. Tina nlangu,.. kadi dia, hij schuwt het water, wascht zich niet meer, en hij eet niet. Dit alles op straf van boete. Hij vast dus (leka nzala), ja, maar eiken morgen heeft hij recht op een heel verken.

Bambandila miianzu ukâ didila wedi mvumbi, men slaat hem eene schuilhut op, waar hij, op zijne manier, den over- ledene beweent. Daar ook slaapt hij... totdat het hem belieft het teeken te geven van op te staan. Wie op is vóór meneer.., mambu, palaber. Hij heeft het voorrecht alleman wakker te bellen, 's morgens in de vroegte, (kotuia va mené mené mu ngonge) :

Do ne ne ne ne ne ! ! L»o ne ne ne ne ne !

Do ne! Minu Mat'andu mbê totuk' e : Basukanu kuenu e ! Ka buisi bumê kia !

Tingelingelingelingeling ! Ik Matandu ben al op : Komt eruit gijiie e! Want de dag is reeds aangebroken ! En als hij ertoe lust heeft, dan gaat hij weer wat slapen.

Zijn eetlied, bij het verorberen van zijn verken, is 't vol- gende :

A tal' e, ndiekilf e ! Muf ua tat' e, Ndi bobu ko e ! Tekele lila tal' e

Va ndiekili1

e !

Do ne ne ne ! do ne !

287

A vader, ik ga eten!

Nu dat vader overleden is,

Ben ik zoo alleen toch !

Ik wil eerst vader beweenen,

En dan eten

Tingeliugelingeling !

MaVandu is een dwingeland, en hij is ervoor bekend. Zijne waarschuwing (zindong i zi Mat'andu) of vermaning (zikeko) luidt :

Mufua tala,

Ndiekikoluka!...

Woso ukambu matu e,

Wenda kudi Nzau e,

Kavana matu e,

Mosi kanila bene mambu moso ikoluk' e !

M ba mené ti Matandu

Weka mutu mbiuibi e,

Ma zimbala sos' e

Mufua ntinu e!

Mukambu meso e,

Wenda kudi Lumvind' e

Kamvana meso e,

Mosi kamuenina ma moso kamvanganga !

Luteka matu !

Luteka udimbikila !

Nu vader dood is,

Voer ik het woord !

Alwie geene ooren heeft,

Ga naar den Olifant

(die met zijne groote ooren alles hoort),

Dat die hem ooren geve,

Opdat hij alzoo hoore alles wat ik zeg !

Morgen ochtend dan Matându

Die is een slechte kerel,

Hij kan niet meer spreken

Nu de koning dood is !

Wanneer iemand geene oogen heeft,

Hij ga naar den Grooten Eekhoorn

(met uitpuilende oogen).

288 -

Dat die hem oogen geve

Opdat hij alzoo zie alles wat hij doende is !

Geef gehoor !

Luister naar de vermaning

(En niemand lache achter mijnen rug !)

En nu trekt hij er op af. Om meer ontzag in te boezemen, wrijft hij zich mvilu, roet, op de linkere wang.

Alle zijwegen zijn verboden op zware boete. Hij gaat ze af spannen met een palmblad \kaka lulembe).

Basi kiandi betakiinsiinga, zijne dorpsgenooten en be- kenden zitten, ergens achter de struiken, hem af te spieden.

Hij roept :

O mufua ntinu e, Muvioka mutu p'amba ko !

Fita ! O nu de koning gestorven is, Kome hier geen mensch door voor niets !

Betalen !

(een deel van den palmwijn, een paar kruikjes genever, eet- waren . . . )

Wanneer hij belachen of niet aanhoord wordt, wanneer ze weerstand bieden :

O mufua ntinu e, Lukuza sevil' e ? O nu de koning dood is. Gaat gijlie mij belachen ?

En betalen ze niet gauw genoeg, dan klaagt hij, een- toonig :

Ndieka bonduk' e !

Ndieka bonduk' e !

Ndieka bonduk' e !

Mam' e ! pfuili e !

Mam' e ! pfuili e !

Bayaya uguanu e ! (1).

(d. w. z ludi zimbangi ziame !)

(1) Dit kan ik niet woord voor woord vertalen.

289

Ik val omver ! ik val omver !...

Ach ! moeder ! ik slerf !...

Als er dan palaber is, gijlie zijl getuigen !

Hij zoekt palaber. Het is hem immers te doen om de betaling : biteva, matjes, flesschen, enz Daarom dreigt hij met zijnen val, want als hij valt, zullen ze 't duur ontgel- den : vita tobukele, een casus belli, en de oneer hem aan- gedaan moet hersteld door 't gevecht, ja door den dood der weersj)annigen. Dan wordt hij, Mat'andu, bestreken met hun bloed...

Buende vendele : vondoio, een hond komt hem likken : hij moet eraan !

Nge ndiandi mntii, kadi kala yandi, gij zijn medemensch, muogt niet samen zijn met hem, of hij schreeuwt :

O tsumukini mimi Mat'andu e ! Minu mbê kala ayi utumbuk va mosi e !

Yeka fita ! Kafiti ko, muna yeka bonduk' e ! O ik ben ontheiligd ik Mat'andu I Ik ben samen geweest met een vermetele (?)

op éene plaats, 't Is te betalen !

Betaalt hij niet, dan is 't omvervallen I

O. bika, muene, smeekt de overtreder, tsibakako bu fitila ! O laat het zoo, o heer, ik heb niets om te betalen.

Mets te doen. Hij verdient de doodstraf.

Ma'tandu neemt hem gevangen (tsimbi), weka mutu u vonda, u keda mu mbele lulendo, hij moet ter dood gebracht worden en over de kling gejaagd.

Intusschen is hij een Vukudu, een gedoemde. Kasiele mutu ko,... kasiele luma ko, hij is geen mensch meer, hij heeft zijne eer verbeurd. Bapfumu ba boso bakuza diatila va busu, alle de hoofdlui komen hem op het wezen trappen. Op den dag der begraving wordt hij met een e nsinga mu laka, eene koord aan den hals, achter den lijkwagen van wijlen den hoofdman gesleurd.

Op zoowat eene boogscheut of drie van het bidila, h«\t dorpshoofdenkerkhof, op de plaats (te Kangu) P'indu ge- naamd (Pindu : draai ; vindubuka : omdraaien,... achter den

290

boom om slingeren) hakt MaVandu hem kop en ooren af. Hij doorboort de ooren (dovula matu), en hangt ze [dengi- dika), aku dikutu, te slingeren langs weerskanten van zijn met hanepluimen versierde hoofdmanshoedje. Daarna wordt de kop gewasschen in het water (te Kangu) Kip' indup' indu genaamd, en als een tropee op het zwaard der wraak gespeet (soma mu mbele lulendo). De romp mag daar blijven rotten in 't slijk.

De lijkstoet trekt voort naar het Bidila. Het stoffelijk overschot van het dorpshoofd wordt er ter aarde besteld. Na de uitvaart, kermis en danspartij (sakananga\ . . en MaVandu gaat 'n bad nemen : zijn rijk is uit.

Miela (1). Mayombsche Zegen.

Miela is een meervoudig naamwoord, dat beteekent : zegen, heilwenschen, wel te verstaan op z'n heidensch en op z'n Mayombsch (2).

De gewone vorm van miela is de volgende. . Ik wensch u... voorspoed met uwe geiten..., of met uwe vruchten, of dat ge moget erlangen wat ge begeert. Dan legt gij uwe opene han- den, met den rug omlaag gekeerd, in de mijne, en zoo hef ik ze omhoog al zeggende :

O... hubl

Gij antwoordt : Yobo yobo !

Deze uitroepingen zijn eigen aan den heilwensch. Daarmee is 't afgeloopen.

Er valt echter te onderscheiden tusschen : miela mi nana,

(1) Op zich zelf genomen geeft dit uittreksel eene kortbondige doch volledige beschrijving van al wat steller over dit eigenaardig gebruik kon verzamelen. De formulen en gebeden die erin voorkomen, gelijk do meeste « zimvila », moeten van vorm en inhoud zeer oud zijn.

(-2) Miela : i en e gesplitst fr. iè.

291

mi vutu, mi bikasa of mibedila, mi builu en miela die gegeven worden wegens mavemba ma dise den vadervloek.

De miela mi nana, de zegen van niets, waarbij nl. noch geesten noch fetischnianaen te stade komen, gebeurt zooals hierboven beschreven.

De miela mi mvutu, om zieke, half ontzielde menschen terug te brengen (vutula) en te genezen, hebben geene eigene zimuila, geen bijzouderen ritus. De nganga, van K'ita, b. v., teka kuiluka, komt eerst in begeestering, en doet dan drie- maal met den zieke :

O... hubl

Yobol

Miela mi bikasa, d. w . z. mibedila, van 't ziek zijn... Ge zij t uw woord, uwe belofte van ergens niet meer te komen,... van zekere spijs, zekeren drank niet meer te nutten..., ontrouw geweest : udidi kasa, ge hebt woordbreuk gepleegd, en daar- om zijt ge ziek geworden. Hoort ge nu bij de basemuka, die den grooten aardgeest zijn toegewijd : wele lobo, ge laat u van uwe verplichting ontheffen en ge krijgt de miela. Zijt ge niet den geesten toegewijd : tumbn varia, een ander mensch (een priester?) schenkt u zoo maar den zegen en de vergif- fenis.

Ti mutu fuidi, bikidi mnarC artdi u bakala..., wanneer iemand gestorven is, nalatende een mannelijk kind, dan gaat deze weleens het graf van wijlen zijn vader bezoeken.

Nete malavu ma P'utu, ayi ma tsamba, ayi nlangu, hij draagt genever mee, en palmwijn, en (te Kangu) ook wat water. Hij boort een putje in het graf en giet er den drank in, zeg- gende :

0 tata !

Ndiedi lenibo kibanga

Mu mambu e :

Ndikalub'aka zimbongo e.

Ndiedi katoza mab' e :

Ndikatub'aka malavu e.

Ndiedi kakuna zimbongo e :

Ndikatub'aka bidi' e.

Buabu inbê kuiz' e Î Up'ana miei' e ! Muingi ndibaka bi

292

O vader ! Ik ben vergeefs op reis gegaan Voor palabers (om schulden te innen.. )? En ik krijg mijne sloffen niet. Ik wou palmboomen snijden : En ik heb geen palmwijn. Ik wou vruchten planten : En ik win geen eten. ...Heden ben ik gekomen ! Geef mij den zegen ! Opdat ik (dat alles) verkrijge...

Met zijn groot mes (dikuwa) kuisclit liij rond het graf [sola vadi dibumbi), veegt liet vuil op, en gaat heen.

Een volgenden nacht zal hij droomen van zijn overleden vader en dezes miela mi builu, of nachtelijken zegen ontvan- gen, net als onder levenden, hub ! en yobo ! Voortaan heeft hij kans van beter te slagen in zijne ondernemingen.

Mavemba ma badise, of ...ma bamasa. Er weegt een vloek op u : geen kinderen, geen palmwijn, geen wild, geen stof- fen..., wonden en zeeren... Ge wendt u tot den nganga van Lemba. Hij zal u den Lemba, fetisch doen instellen en bezwe- ringen over u uitspreken (tanda zimvila) van

Lemba di Tsundi, Lemba di Vidi. Lemba di Yombe...

Lemba bibulu mu nsitu, bika mutii udi moyo! enz. De Lemba-geest van Tsundi, (1) De Lemba van Vili, De Lemba van Mayombe, Ontkracht de dieren in t' bosch en laat den mensch die

[leeft! enz.

Ofwel ge richt u tot den waarzegger.

't Antwoord luidt : Mavemba (bikandu bi seaku) ! de ma- vemba of de vervloekingen vanwege uw vader... zijn de oor- zaak uwer kwaal !

(1) Tsundi, Vidi (in 't Luangusch Vili), Yombe zijn streeknainen. Hier ook vinden we den oorsprong van den Leinba-naam : Matsundi.

293

Dan droomt ge 's nachts, uloto seaku wele sasi zingazi, beau yandi, dat ge met uw vader mee gaat palmbezen hakken ; of nog, ge droomt, ulotolo seaku di nketo.., van uwe vader- lijke moei, of van uwen oom.

Stel das niet uit en vraag vergiffenis en zegen [miela). Bata seaku, ga naar uw vader, ...naar uw vaderlijken oom, volgens 't geval, en bid hem :

A tata! Nge mbele loto ndoze, nge mbakidi ! Nzekil' e diyamba-yamba... Ndiedi kuenda mu suku : Mavemba ma baseaku ! ... Iïuau ndizidi e ! Ndiedi kabaka bulu : kifuidi e ! Ndiedi kabaka k'onibo : itumbama ko e ! Ndiedi kabaka ngulu : itumbama ko e ! Tsusu mavunya i nkua p'aka : itumbama ko e ! Ndiedi kabaka zimbongo : zitumbama ko e ! Ndiedi kuenda mu mambu : bap'ani ko zimbongo e ! Ndidi tamba mintambu mu nsitu :

bakana minkongidika-bonga ! Ndiedi maka malavu : bitseko kungela! Ndiedi kavata mbongo : ib' e ko e ! ... Buambê kuiza kudi nge tata :

mbê dia tata, mbê lata ! Wen da p'ana miela,

unzikila diyamba-yamba inua !

Ach ! Vader!

Van u heb ik een droom gedroomd en ik zag u !

Pers mij yamba-yamba kruiden...

Ik ging om wicbelaarsraad :

('t Antwoord was :) vervloeking van uw vaders kant !

Nu ben ik hier gekomen !

Ik had er een beest, doch 't stierf !

Ik had er eene geit, doch ze is niet opgegroeid !

Ik had er een verken, doch bet is niet opgegroeid !

Een geweldig kuiken met omgekeerde veren,

doch 't is niet groot geworden ! Ik wou stoffen winnen, doch ze wilden niet mee !

294

ïk wou uitgaan op palaber, doch men betaalt mij niet !

Ik wou strikken zetten in 't bosch, doch (niets te vangen dan)

[groote dissen ! Ik wou palmwijn trekken, doch de wandluizen (zalen) in den

[bloemsteel ! !k wou mijn veld bewerken, doch (de vruchten) tierden er

[niet ! ... Nu kom ik tot u, vader :

ik heb berouw, het rouwt me !

Ga mij uwen zegen schenken,

en pers mij yamba-yamba kruiden, dat ik drinke ! (en voortaan gelukkiger moge wezen !)

De vader, of de oom.., laat zich bewegen. Hij perst niosa dilemba-lemba-blaren en minkiilu hatende uit, mu dilonga, in een bord, en spreekt, eentonig.

O ndimê zabangana,

Minu wu seaku.

Minu ivanda Lemba di Vidi,

Minu ivanda Lemba di Yombe,

Minu nganga Lemba...

Bua mbê kuzikila diyamba-yamba bene diadi...

Uleka kipfumu, ukatumuka kinganga !

Wenda baki mavua, ubaka mavuandangana !

Kioso umbaka kiza molo molo, masadi masadi !

... Minu seaku ibuta !

O ik weet het nu allemaal. Ik die uw vader ben,

Ik die den Lemba-fetisch van Vidi heb ingesteld, Ik die den Dilemba van Mayombe heb ingesteld, ïk priester van Dilemba...

Nu heb ik u deze gewijde kruiden uitgeperst... Slaap als hoofdman, ontwaak als priester! Ga en heb schatten, win geld en goed ! Alwat gij wint, het kome u traagjes en duurzaam ! .. Ik uw vader die u gebaard heb!

Daarop geeft hij den rouwmoedigen zoon (of neef) driemaal de miela.

295

a) De rechtere onder zijne linkere hand houdende : Ub ! (opwaarts/)

Yobo ! (Amen!)

6) De linkere onder zijnerechtere hand houdende : Ub !

Yobo!

c) Beide handen uitgereikt onder die van den boetvaardige :

Ub! ~~ Yobo!

MUr mitombukele kuyilu, zoo wordt de zegening ten hemel geheven .

Vervolgens wrijft (uala) de jongere met de opene handen over de armen van zijn vader (of zijn oom), over den rug en de schouders, en over het hoofd.

De zegen heeft de vervloeking weggenomen.

Mayombsche Liedjes.

ï.

te Kangu. Ik ga mijn vrouw opzoeken; Mijn vrouw die hare patatten uitgraaft; Hare patatten, zeg ik : geef mij een grooten ; Een grooten smijt ik naar buiten ; Naar buiten waar het donker weer is; Donker weder, geef me mijn water; Water om te drinken, dat ik naar Londo (1) ga ; Naar Londo waar begraven ligt een overleden dorpshoofd Een overleden dorpshoofd dat was net als een albino; Als een albino die zijn slaarlen is afgehakt, Gelijk kappe !

Ndiê bata nkieto ame ; Nkieto ame unkabanga zimbala ziandi; Zimbala ziandi, ti : p'anika inene;

1) Naar de faktorijeii op de Lubuzi.

29ö

Inene ndintingika ku mbazi ; Ku mbazi kunsianga ftiba-fuba; Fuba-fuba, up'ana nkoko ame ; JNkok' u nua, ndiendila ku Londo; Ku Londo kunziama mvumbi pfumu ; Mvumbi pfumu ubele buna bu ndundu ; Bu ndundu ulabika nkila miandi, Ena duà!

11.

Wat heb ik gelachen,

Ik de Verstrooier

Die hel dorp verstrooi :

Een kieken wou twisl zoeken.

(Ik ?) die (het? achterna ging

Tot aan het dorp van den Machtigen God,

Dat (dorp) is den berg afgekomen.

Wat is er ginds (I) voorgevallen?

Ha ! mijn broer,

Voor niemendal Heb ik (u) geroepen, blijf maar daar,

Dat ik gaarn make Een hagedissestaart, Ik heb hem in de banaan gesteken Die rijp en murw is.

Seva iseva kuama, Minu Kit'iainu-t'iamu

Kitiamuna buala. Tsusu kavanga dienze.

Kienda-ntialala Kuna Kip'ungu-Nzambi, Kizelumuka mon go. Diambu dibuidi kuna? Ha ! k'omb' ama,

Mbila na na Itelele, kala vovo,

(1) Ginds, waar vroeger het dorp stond : o in welke reden, sterfte, onge- val..., heeft men het dorp verplaatst ?

297 -

llambila Nkila kitsiode, lsididi mu tse tebe Kibomba foto lo.

III.

A. Tembo, (Kangu).

Vader, vader,

'k Heb eieren gezien.

Van welk een vogel ?

Eene nachtzwaluw.

Waar is hij heengegaan

Naar den overgrooten boom dien God gemaakt heeft

Heel in den beginne.

Hij is omgekeerd, hij helt voorover.

A...

De arend valt op den apenbroodboom.

Verberg het niet,

Geef het niet weer (1).

Hoog in de lucht waar het daglicht gloeit,

Bij 't gesternte dat blinkt,

Bewondert hij de zon,

Bewondert hij de maan,

De maan die afneemt (in haar laatste kwartier).

Het kwikstaartje roept de knapen.

De meisjes rollen den berg af.

Vat ze met hun (inlandsen) kleedje daar ze zoo preutsch op zijn,

Vat dan een wischje

Kletse.

Overal.

Tata, tata,

Mbuene maki.

Ma nuni mbiandi ?

Lubuta-buta.

Kuebi kele ?

Kuna nti uzongalala uvanga INzambi

(1) Of : Het mes verberg liet, Geef het niet weer.

I

298

Tête yoso. Ubangumuka, ukindubuka.

Mbe...

Mbemba kabeta mu nkondo.

Wedi sueka yo,

Wedi vutula yo (1).

Ku yilu ku yilu kuntekanga muinyi,

Kudi mbuetele nde nde ndê,

Unsimina t'angu,

Unsimina ngonde,

Ngonde kafua tengenene.

Matsiasa-nkila untela bamatoko mbila.

Bana bandumba nenge-nenge.

Benga lubongo lu basiïanga'zanga.

Buna bonga nsangabala.

Euaka !

Van het meisje dat koppig was

naar een Mayombscke Volksvertelling. (In Kiolo.)

Er was een man, eu die schafte zich een e vrouw aan. Hij betaalde den bruidschat (1) aan hare oomen-van-moederskant, gaf de balen stof, gaf het slachtvee en den drank,... en hij deed zijne vrouw in zijne hut. De vrouw nu werd zwanger. En zij bracht een vrouwelijk kind ter wereld.

(1) of : Mbele sueka yo, Wedi vutula yo.

(1) Wat wij « bruidschat » noemen, is eigenlijk de prijs eener vrouw, dewelke door hare familie « aan denman gebracht werd » tegen betaling van stoffen, lansen, messen, koperen staven of dito kruisen, of geld, vol- gens de gebruiken van elke streek. In Mayombe is die prijs, van enkele stukjes stof, zooals « in grootmoeders tijd », tot 100 en meer mbuba 's gestegen— 1 mbuba van 20 tot 30 nlele 's (vademen doek), placht op o fr. geschatte worden. Het familiehoofd in Lager-en Midden-Kongoland is de broer der moeder, de ngudi k'azi of mannelijke vertegenwoordiger van moederskant, die dan ook voor zijne neefjes instaat en voor zijne nichtjes 't geld opstrijkt.

Over huwelijk, matriarcaat enz., zie ons Mayombsch Idioticon (ter perse) .

299

Toen dit kind grooter werd, baarde hare moeder nog een kind, ook een meisje... Doch zij, de oudste, werd gramstorig, omdat zij moest beginnen werken : zij meende dat hare moe- der heur niet meer beminde. En zij luisterde niet naar al het- geen haar gezeid werd.

Eens stuurde hare moeder heur om water, zeggende : Ga naar de beek.

Het meisje zeide : Ik, ik wil niet.

Dan zeide de moeder : Moest ik het zeggen aan uw vader, zoudt ge hem niet gehoorzamen ?. . . Ik uw moeder die u gebaard heb, ik gebied u iets enge wilt niet luisteren?

En de dochter hoorde hoe men haar bekeef, was gestoord, nam haar p'id i-mand} en op, en haar mes, en haren nkola-dra&g- band, en ze ging ku nsitu, naar 't bosch. Nog éénmaal keerde ze terug om hare hak (tsengo), en haar dikuwa-mBS te halen, en ze ging 'n stuk bosch ontginnen. Na de eerste ontginning, stak zij er 't vuur aan. Als alles goed verbrand was, ging ze aan 't wieden en aan 't effenleggen. .. Nu de bodem goed effen lag, ging ze, als een manskerel, bula zimbanza, palmlatten slaan : ze telde er honderd en vijftig. Dan ging ze persen snijden voor een dak, en mafuna-lianen voor de vorst en luzombe -Dsmden. Ze vlocht de vlaken, k'akala k'akala..., en k'umini dikungu zette ze tegeneen recht.

Vele dagen had ze gewerkt, zij alleen... Beide vleugels van 't dak waren af. De nacht viel in, zij legde zich te slapen, en dacht : Morgen zal ik weder menschen zien,... ik moet mijn dak opzetten. Zij droomde.

Zij droomde dat ze op weg was naar huis toe. En ze zag haar klein zusje of was zij het zelve?..., zij wist het niet goed - en haar moeder zat luide te weenen, omdat zij een kind vermiste : O ! zij had willen bij moeder gaan, doch zie ! haar vader keek haar aan met zoo 'n stuur gezicht... ; ze liep weer het bosch in e'n verschool zich in haar hutje... En een luipaard achtervolgde haar, en dat was haar eigen vader (l) :

(1) In Mayombe gelooft men dat de gewone luipaard geen menschen aanvalt, alleen de tooverluipaard. d. i . een mensch die door tooverij in luipaard verandert. —Langs de groote wateren speelt de krokodiel de rol van onzen luipaard en maakt inderdaad vele slachtoffers. Bij de « Bangaleesche » stammen echter wordt de betoovenaar de « bezitter » van den krokodiel genaamd .

__ 300

hij zou haar de klauw in de keel geslagen hebben..., doch de inenschen van 't dorp kwamen te voorschijn.

Zij schoot wakker, keek verwilderd rond 't duister, en... voelde zich noch levend. Zij herademde, en ze dacht : of zij geen ij delen droom gedroomd had, ofwel een droom van waar- heid ? doch zij zou het aan niemand vertellen wTat zij gezien had : zij kon toch niet haar vader gaan betichten van tooverij .

* *

Het morgenlicht was aangebroken, zij stond op, nam haar mes, en trok naar 't naastgelegen dor}) van Maluangu, om menschen te halen, die haar zouden helpen het dak opzetten.

Zij ging, ontmoette menschen ; palm wij ntrekkers die hunne kalebassen gingen afhalen, vrouwen die met een volle mande ledige kruiken den berg kwamen afgezakt naar den water- kant..., en zij was bevreesd. Op het dorp echter, daar was zij geen onbekende : het dorpshoofd was haar ngudi k'azi, haar oom- van-moederskant. En ze ging maar door.

Zij kwam va fula di buala, aan den ingang van 't dorp. Vele menschen sliepen nog. De vrouwe van den hoofdman deed een woordje..., Maluangu kwam uit ..

Kort daarop gingen eenige dorpelingen met haar mee, ze gingen haar helpen het dak opzetten.

Toen het dak oplag, zeide zij : Nu jullie mijne hut hebt helpen onder dak zetten, gaat nu maar heen ; ik, ik blijf hier, want vader en moeder hebben het zoo gewild,... omdat « ik niet kon wieden », omdat « ik geen matjes kon vlechten », omdat <( ik niet kon om water gaan »...

Doch (voor de eere der familie) sprak zij hun niet van haren droom.

De jonge dochter bleef daar wonen, jaren lang. Zij bebouwde haren akker, haalde brandhout aan. maakte haar eten klaar... Zij vlocht ook ook vijftig biteva, matjes, en vele zip'idi, rug- manden, en zinzabiingu, kleine korfjes... Verders had zij daar geiten en varkens, en eenden en kippen.

Wanneer zij dit alles had begon ze droefgeestig te worden, en... zij weende gansche dagen : zij was alléén haar dorp gaan bouwen, omdat ze niet had willen gehoorzamen aan haar

301

moeder ; ... en het was er zoo eenig, en het dorpje was zoo klein en zoo vernepen; ... zij schuwde de menschen, en de menschen kenden haar niet...

Zij weende gestadig, zij waschte zich niet meer, zoodat ze vuil en zwart was gelijk een weduwvrouw. Zij verkwijnde door een inwendige kwaal, door een onbekenden nkisi... En niemand die geneeskruiden zou zoeken voor haar ; of niemand die den nganga tesa, den wichelaar, zou roepen om den ndoki aan te wijzen die haar ontzielen wou ; niemand die den nganga- geneesheer zou betalen... Want zij was een verstoo- telinge, en zij had het zoo gewild. Welhaast zou zij te Gode gaan, doodmoede den berg Gods bestijgen (l), verhuizen naar het rijk der babimbindi, naar het dorp der nazielen,... wellicht zonder door moeder of naastbestaanden beweend te worden...

En dan dacht zij weer aan dien naren droom dien zij vroeger

gedroomd had.

* * *

Op zekeren dag, zag de jonge dochter haar vader en haar moeder weer, die voorbijgingen langs den weg. Zij dan zong- een lied :

E moeder, ik kan vlechten,

A ik vlecht hier op het hoogland !

E vader, ik kan wieden,

A ik wied hier op het hoogland !

En haar zusje dat zij op het dorp gelaten had, zeide : O moeder, luister toch,... die daar zingt, 't is krek die zus van me !

De moeder zeide : Och toe ! da's niet waar !

Want dat riep heur droeve dingen te binnen.

Een oogenblik later : Jij moeder Î... zoo jij het niet hoort, wel, kom luister dan ! Jij, vader, heuschjes ik vergis mij niet.

En de jonge meid zong weer :

Vader, ik kan vlechten,

(1) cc Kionini mongo Nzambi, hij bestijgt den berg Gods », zegt men van iemand die in doodstrijd ligt; cc birfiikidi..., hij is den berg over » hij is de eeuwigheid ingetreden.

302

E ik vlecht hier op het hoogland !

Moeder, ik kan wieden,

E ik wied hier op het hoogland !

A izaba tung' è !

A izaba vata ko è !

A ik kan wel vlechten !

A ik kan niet wieden dan !

Vader, hoor- je 't ? Hij zeide : Ja, ik hoor het.

En hij weende : Och arme ! mijn kind dat verloren was ! Zij hare moeder jammerde : Och arme ! misschien hebben ze heur gepakt en gebonden ! . . .

E e ye ! nga taV è !

E maiïï è è !

Ye nga mimi e !

E e ye ! och vader e !

Ach moeder e e !

Ye ! wee mij, och arme !

Is zij soms niet aangevallen !

Kani boy a baboyede e e !

Is zij soms niet aangevallen !

Ye ! nga minu e... !

En zij vervloekte haren moederschoot :

« Och arme ! mijn kind, o wee !

Ik pnt de bron der tranen uit,

Zoodanig zal ik u beweenen !

... Ik wil geen ander kind meer baren, neen !

Omdat ze mij m'n kind ontnamen,

Omdat ze 't hebben opgegeten !... »

Zoo sprak de moeder, over van verdriet,... alsof zij wist in haar hart, dat haar kind door too venaren was ontdubbeld

303

en onzichtbaar weggevoerd, om eerstdaags gedood en gedeeld te worden (l).

Doch het dorpshoofd Maluangu kwam en zeide : Maar wacht toch even, ween zo niet.

Zij dan alzoo : O ! en zou ik waarachtig mijn kind nog weer- zien? !

En zie, daar kwam hare dochter aan, gedragen in eene hang- mat : de hoofdman had haar laten halen.

En hij sprak : Zie- je wel, jij hare moeder, die daar even stondt te schreien! Ik zeide : ween toch nog niet! »... welnu, daar is zij, niet waar?

Het arm meisje sprak niet veel : omdat zij eertijds was weggeloopen van haar vader en haar moeder. Doch vader lachte haar tegen, en hare moeder, met de tranen nog in de oogen, sprak heur zoetjes aan : Och mijn kind, toch! mijn kostelijk kind! Dan kwam het meisje nader. Eu haar zusje, eerst bang van haar, begon haar lief te hebben, en nam haar bij de hand.

Intusschen zette men water op het vuur om haar te was- schen. En hare ouders en bloedverwanten waschten haar op de dorpsplaats. Ze spoelden, ze spoelden,... dan begonnen ze heur op de ribben te schrapen om het vuil af te krijgen, en... fuidi, zij stierf ! Al de menschen stonden verstomd.

Wanneer ze gestorven was, zeide het dorpshoofd : Daar zie ! ik wou het jullie nog zeggen : « weest niet zoo haastig om haar af te spoelen met water ! » Nuis zij dood : is 't nu goed?... Betalen zult ge, en jij haar vader, en jij haar moeder, beta- len ! Betaalt mijn nichtje, fiti-anu!

Wat zij ook daartegen mochten inbrengen, betalen zouden ze!... Ze betaalden dus voor haar, twintig balen doek, en eene geit en een varken, en twee bussen kruit.

Nadat ze betaald hadden,... komini minloko, stuurde de

(1) De dood wordt in de meeste gevallen niet aanschouwd als een na- tuurlijk verschijnsel, doch als veroorzaakt door de « kwade hand » (kin- doki), (d. w. z. door beheksers (bandoki), die onzichtbaar den dubbel- ganger van den mensch ontrooven (zoodoende den mensch ziek maken) en opeten. Dus beteekent « opeten » dikwijls: verslinden, dooden, verbrui- ken... — Was het meisje reeds betooverd ??

Demoeder vermoedt dadelijk het ergste, 't Vervolg zal het uitwijzen.

304 -

hoofdman zijne toovergeesten op. Hij klopte een spijker in'zijn fetisch, wijl hij de bezwering sprak :

In der waarheid,

indien zij de betoovenaren zija,

en zij het kind vermoordden,

dat zij dan mijn dorp verlaten !

Zooniet, gij, nkisi, eet hen op,

en dat de hoofden hen verstooten !

en dat de priesters hen verstooten ! . . . »

En gij, zoo sprak hij tot de ouders van het overleden kind, vertrekt uit mijn dorp, opdat ge mij geen onrecht doen zoudt.

Dan gingen de vrouw en de man naar het dorp waar de dikanda, de verwantschap, van den man woonde. Men gaf hun twee hutten, éene voor den man, éene voor de vrouw. En ze bleven daar (l).

En de man bevruchtte nogmaals zijne vrouw, en zij baarde een kind, een knaapje... Toen dit kind nu begon groot te worden, stierf het. Maluangu, zijn moederlijke oom, vernam dat het kind gestorven was... Hij kwam af en zeide : Mijn eerste kind, mijn nichtje, is gestorven : jullie aat het op...; nu ook dit kind, mijn neefje, jullie zelf hebt het opgegeten en ter dood gebracht! Gij zijt immers bandoki, beheksers! Gij zult beiden k'asa- vergif eten !

De hoofdman nam het ander meisje mee, vertrouwde het toe aan zijne eerste vrouwe.

Men ging in 't bosch de vergiftige schors aftrekken. En 's anderendaags 's morgens moesten de vader en de moeder de giftproef ondergaan... Wanneer de zon nagenoeg op den mid- dag kwam, bezweken zij alle bei (2).

Toen ze gestorven waren, schimpte de hoofdman : Ziet ge wel dat gij die kinderen hebt opgegeten ! Sterven is goed, niet waar ? Wel, sterft dan ook, jullie !

(1) De « gehuwde > vrouw, echtgenoote of bijvrouw, heeft hare eigene hut.

(2) De kasa (la casse, zeggen de verfranschte Belgen) is de boom en de schors, waarmee de inlanders zoogezegde toovenaren vergeven.

305

En ze gingen hen begraven.

Reeds waren ze begraven, en de man begon te spreken on- deruit het graf, en zeide ; Nu Jullie mij het /c'asa-vergif hebt toegediend,... als gij soms nog palabers hebt tegen Maluangu, tracht ze maar klaar te krijgen, dat hij betale !

Zwijgt, zeiden ze fluisterend,... 't is dat lijk dat aldus spreekt.

Ze namen eene houten piu, en ze sloegen hem die in 't hart.

Doch hij schreide : Gij, mijn oom, gij slaat me nu eene pin in 't hart !

Hij, de oom, zeide : Het komt er niet op aan! Sterf maar, want ge zijt geen goede !

Terug op het dorp gekomen, zeiden ze : Die slechterik, die betoovenaar met zijne vrouw, die uitgingen menschen opeten !.. eindelijk is-ie weg voor goed !

't Was afgeloopen (l).

LÉO BlTTFEMIEUX, C. J. C. M.

(1) Deze legende is juist geen voorbeld van ouderliefde noch van kin- derlijke onderdanigheid, zooals er trouwens bij de heidenen ook wel te vinden zijn, doch zij schildert ons in haare naakte wezenlijkheid, de heidensche ziel en zeden af : hartelooshei dvoor een berouwhebbend kind, wreedheid van een ontaarden vader, weerloosheid van den zwakke tegenover de gierigheid van den sterke...

306

Les Chemins de fer au Congo.

A l'heure actuelle, on peut dire que plus personne ne doute de l'avenir économique de notre Colonie. Son expansion peut cependant être considérablement retardée par deux facteurs : les voies de communication et la main-d'œuvre, ce dernier dépendant encore dans nue large mesure du premier.

C'est, en effet, par la création des voies de transport qu'on abolira le portage, ce fléau de la civilisation, libérant ainsi un grand nombre de bras ; c'est grâce aux chemins de fer qu'on pourra, à frais réduits, envoyer du matériel perfectionné pour l'exploitation des mines et le traitement du minerai ; ce sont encore les voies de communication rapides qui faciliteront une distribution rationnelle de la main-d'œuvre en annulant l'effet des longues distances que l'indigène doit parcourir pour arriver aux chantiers.

Nous sommes unanimes à dire que nous ne pouvons re- tarder l'expansion de notre Colonie; le relèvement rapide et l'indépendance économique prochaine de notre patrie sont à ce prix.

Mais nous paraissons lents à faire l'effort nécessaire, peut- être parce que nous n'en remarquons pas suffisamment la portée.

J'ai l'intention de soumettre aux lecteurs de Congo un projet de politique de chemins de fer dont la réalisation me paraît aisée et dont l'exécution constitue en tout cas un mini- mum absolu si nous voulons éviter le reproche d'entraver l'essor de notre Colonie.

L'importance de deux biefs navigables a dominé et domi- nera encore longtemps, à mon avis, notre politique des che- mins de fer; je veux parler du fleuve Congo et de son affluent le Kasaï-Sankuru.

Quand on songe que les frais d'exploitation d'un chemin de

307

fer sont environ trois fois plus élevés que ceux d'une voie navigable, on conçoit aisément l'intérêt économique que pré- sentent ces artères fluviales. Aussi la première grande tâche à laquelle les coloniaux se sont attelés, après la pacification du pays, fut la construction du chemin de fer de Matadi à Leo, qui sur une longueur de 400 kilomètres reliait les deux grands biefs à la mer.

Pour éviter des dépenses qui eussent effrayé les financiers,

si peu confiants au début de l'entreprise, la Compagnie du chemin de fer du Congo dut être modeste : elle construisit un peu mieux qu'un decauville, que certains appelèrent un joujou, à écartement de 0m,75, avec des rampes de 45 p. c. et des rayons de courbure de 50 mètres, de Matadi à Léopold ville.

A partir de Leo, le Congo devient navigable, pour des vapeurs de 1,000 tonnes, jusque Stanleyville, sur une Ion gueur de 1,800 kilomètres environ.

308

De Stanley ville à Pontliier ville, les rapides ont été franchis par un chemin de fer de 127 kilomètres.

De Ponthierville, un nouveau bief navigable, d'une lon- gueur de 315 kilomètres, permet d'atteindre Kindu. Les plus grosses unités actuellement sur le bief sont de 150 tonnes.

A partir de Kindu, de nouveaux rapides ont exigé la con- struction d'uu chemin de fer de 355 kilomètres jusque Kongolo.

De Kongolo à Bukama, il y a environ 600 kilomètres de voies navigables accessibles aux vapeurs de 150 tonnes.

Enfin, 726 kilomètres de chemin de fer nous conduisent à la frontière rhodésienne arrive aussi la voie du Cap ; ils mettent le Katanga en communication avec tous les ports de l'Afrique du Sud.

C'est cet ensemble de voies ferrées et fluviales qui met Eli- sabethville, chef-lieu du Katanga, en communication avec Borna, capitale du Congo.

Un chemin de fer de 373 kilomètres s'embranche sur ce système mixte à Kabalo pour atteindre le lac Tanganika et se trouve ainsi en communication avec le chemin de fer central de l'ancienne Afrique Orientale allemande et aboutit à Dar-es-Salam sur l'Océan Indien.

Le chemin de fer du Katanga a comme caractéristiques : écartement, lm.067 c'est-à-dire l'écartement delà ligne du Cap 3 pieds 6 pouces ; rayon de courbure, 200 mètres mini- mum ; rampes 20 p. c. maximum.

Les trois autres tronçons, de Stanleyville à Ponthierville, de Kindu à Kongolo et de Kabalo au Tanganika, appartenant à la Compagie des Grands Lacs, ont pour caractéristiques : écartement, 1 mètre; rampes maxima 20 p. c. ; rayon de cour- bure minimum, 100 mètres.

Nous devons ajouter à ce réseau le chemin de fer vicinal du Mayumbe allant de Borna à Tshela et comprenant 138 kilo- mètres avec les caractéristiques : écartement, 60 centimètres; rayon de courbure minimum, 30 mètres; rampes maxima, 40 p. c.

On construit actuellement, sur 85 kilomètres, le prolonge- ment du chemin de fer du Katanga de Bukama à Kiabo, ce dernier point étant plus salubre et plus accessible aux vapeurs des Grands Lacs. On entreprend en outre la construction d'un embranchemeut de Tshilongo à Ruwe, soit environ 80 kilo- mètres, faisant partie du tronçon du chemin de fer du Ben- guella situé sur notre territoire.

309

La voie fluviale du Kasaï-Sankuru part de Kwamouth et sur plus de 1,000 kilomètres est navigable jusque Pania-Mutombo.

Enfin, disons encore qu'une bonne partie des petits affluents du Congo sont navigables pour des vapeurs genre « Déli- vrance ■■ de 20 tonnes.

Voilà ce qui existe ou existera à bref délai.

L'ensemble de ce réseau de voies de communication doit être amélioré.

Au moment où, en France, ie Comité National du Rail Africain à la tête duquel se trouve M. René Besnard, ancien ministre des colonies, et qui comprend daus son Conseil de patronage des personnalités telles que MM. Briand, d'Estour- nelles de Constant, Jean Dupuy, Etienne, etc., prévoit l'exé- cution d'un réseau ferré de 30,000 kilomètres et demande d'inscrire au grand livre de la Dette publique, un emprunt à concurrence de quatre milliards, il semble bien que nous ne puissions hésiter plus longtemps à marcher hardiment de l'avant pour l'exécution d'un programme minimum dévoies fer- rées, sans lequel il est impossible à la colonie de se dévelop- per et d'apporter à notre pays les matières premières que le Congo pourrait fournir en si grande abondance.

C'est donc encore plus dans l'intérêt de la Métropole que dans celui de la Colonie que nous devons développer notre réseau au Congo.

Tout le monde sera sans doute d'accord pour dire qu'il est avant tout nécessaire de reconstruire la ligne Matadi-Leo, 400 kilomètres, déversoir de tous les produits de la Colonie.

Les fortes rampes, les petits rayons de courbure et, à un degré moindre, le faible écartement sont autant d'obstacles à une exploitation économique et commerciale, sans parler de la crainte de voir devenir insuffisante, dans un avenir plus ou moins rapproché, la capacité de la ligne.

Une mission est sur place. Elle a pour but de faire le plus tôt possible une bonne plate-forme sur laquelle sera placée la voie actuelle, mais qui devra pouvoir servir ultérieurement à recevoir une voie d'un mètre.

La plate-forme doit être étudiée et construite pour atteindre ce but sans nouveaux frais (travaux de terrassements et autres). Elle aura 4 mètres de largeur. Les travaux d'art seront prévus pour la double voie. Les caractéristiques seront : rampes maxima 20 pour cent; rayon minimum 150 mètres.

310

La capacité actuelle de la ligne, en supposant que son équi- pement soit parfait, est de 200,000 tonnes dans chaque sens par an. Cette capacité sera doublée dès l'achèvement de la nouvelle plate- forme.

La double voie, à écartement d'un mètre, rendra sa capacité pratiquement illimitée.

2°) La voie, qu'en j)ériode héroïque, on a appelée navigable de Kongolo à Kabalo, constitue une liaison précaire entre le 2e et 3e tronçon <c Grands Lacs ». C'est de l'avis de tous les capitaines de steamer, la passe la plus mauvaise du bief Kon- golo-Bukama.

Il y a environ 75 kilomètres à construire, en outre, un pont sur les rapides en aval de Kongolo le fleuve se res- serre fortement; les techniciens estiment que la construction de ce pont ne présentera aucune difficulté. Du coup, on aura supprimé deux transbordements et la distance Albertville- Kindu, (273 {— T5 f— 355) = 703 kilomètres environ, pourra aisément être franchie en trois jours. Plus tard, le ballastage de la voie permettra même de la parcourir en deux jours.

La reconstruction du chemin de fer Matadi-Leo et la con- struction du tronçon Kabalo-Kongolo constitueront une amé- lioration de l'ensemble de notre réseau.

3°) Mais il faut assurer une pénétration plus intense du pays, surtout dans les régions intéressantes au point de vue agri- cole : l'agriculture enrichit le pays et sa population ; le travail des plantations attire plus le noir que le travail minier; loin de nuire à la santé du travailleur, il favorise son développe- ment physique.

Une des plus intéressantes régions agricoles est 1'Uele. Les autorités territoriales ont signalé souventes fois la nécessité de la création d'un chemin de fer reliant les riches et populeuses régions de l'Uele aux rives de notre grande artère fluviale :

De Bumba à Bondo, il y a 304 kilomètres ; à partir du km. 200 de cette ligne, la voie devrait gagner Buta, soit 185 kilomètres de plus pour continuer plus tard vers le district minier de Moto et de Kilo et peut-être aussi vers le Nil la convention du 2 mai 1906 nous concède de grands avantages.

4°) D'après les derniers renseignements que je possède, les administrateurs du << Benguella Railway » ont l'intention de pousser activement l'achèvement de cette voie vers le Katanga. Nous sommes tenus de construire la partie de cette voie située

311

dans le Congo, de façon à arriver à la frontière de l'Angola en même temps que la Compagnie anglo-portugaise; jusqu'à Kambove, la ligne aura 1,952 kilomètres.

Cette ligne permettra de mettre en valeur la région cupri- fère de Ruwe et de construire des centrales hydro-électriques aux chutes de N'Zilo. Le tronçon à construire en territoire congolais ne comprendra pas plus de 600 kilomètres.

Comme je l'ai dit déjà, la construction de 80 premiers kilo- mètres de Tshilongo à Ruwe va être entreprise incessamment.

5°) Enfin, il est aussi urgent de relier un point du chemin de fer des Grands Lacs à un point (Pania-Mutombo) de notre grand bief Kasai-Sankuru.

Certains travaux d'amélioration devront être entrepris sans tarder à ce bief pour le rendre navigable pendant toute l'année aux plus puissantes unités de notre flotille. Les quelques mil- lions qu'on y dépensera seront rapidement productifs.

Le tronçon dont il s'agit aurait environ 400 kilomètres.

Or, la distance de Dar-es-Salam au deuxième tronçon Grands Lacs, axe du trafic de toute la ligne, est de 1,240 + 37 (l) ■+- 273 soit 1,550 kilomètres de chemin de fer. La dis- tance de Matadi au même tronçon, en supposant ce dernier relié à Pania Mutombo, serait de 400 + 333 (2) + 400, soit 1, 133 kilomètres seulement. Le trafic de toute la région aurait donc intérêt à passer par nos voies nationales. La région de l'hinterland de Pania-Mutombo aux Grands Lacs est, comme on le sait, très intéressante au point de vue du coton, si néces- saire au relèvement de nos industries des Flandres.

Voilà, à mon avis, le programme minimum d'un réseau dont la construction devrait être entamée immédiatement.

Il existe d'autres projets, même d'autres concessions de chemins de fer dont cette étude m'oblige à dire un mot.

1°) Le chemin de fer concédé de Stanleyville au Lac Albert, 900 kilomètres environ. Il sera utilement remplacé par le chemin de fer de l'Uele Bumba-Buta qui, comme je l'ai fait

(1) En comptant que la distance d'Albertville à Kigoma est de 1 10 kilo- mètres et en admettant que les frais d'exploitation d'un cliemin de fer sont environ dans la proportion de 3 à 1 par rapport aux voies navi- gables.

(2) En comptant que le bief du Kasai à environ 1,000 kilomètres et en tenant compte, comme il est dit ci-dessus, du coefficient coût d'exploita- tion de chemin de fer à voie navigable.

312

remarquer traverse des régions riches et populeuses, tandis que le chemiu de fer de Stanleyville traverserait des régions quasi désertes sur les premiers trois quarts de son parcours.

Chemin de fer concédé du Bas-Congo au Katanga de N'Dolo à Sankishia, 1,850 kilomètres environ. Au point de vue politique, ce chemin de fer, reliant rapidement les points extrêmes de la Colonie, serait d'une grande utilité.

Mais au j>oint de vue économique sa construction immédiate ne paraît pas s'imposer avec la même urgence que la réalisa- tion du projet que j'ai esquissé à grands traits.

Le trafic du Katanga, dès l'achèvement du chemin de fer du Benguela, passera par Lobito Bay? voie plus courte de G00 kilomètres environ que la ligne du Bas-Congo au Ka- tanga. Dans ces conditions il semble que le bief Kasai-San- kuru doive suffire pour faire face pendant des années au trafic.

Les dépenses pour ce chemin de fer se chiffreraient, en comptant à 400,000 francs le kilomètre équipement compris, à 740 millions environ. Il semble bien qu'on ferait oeuvre plus utile à construire des voies de communication dans des parties du Congo moins bien desservies naturellement que la région du Congo -Kas ai.

Qu'on emploie une partie de cette somme à construire rapi- dement des chemins de fer à voie étroite joignant les nouveaux centres industriels de cette région au bief navigable. Ce réseau de petites voies économiques fera bien plus pour la mise en valeur de toute la région qu'un seul grand chemin de fer. La création de celui-ci s'imposera plus tard quand les industries se seront développées ; à ce moment il sera plus facile aussi de trouver le crédit nécessaire.

Le chemin de fer projeté de Lusambo à Bukama, qui aurait une longueur d'environ 900 kilomètres, ne peut être qu'un chemin de fer d'intérêt local.

En effet, nous savons que le chemin de fer de Lobito à Kambove aura une longueur de 1,952 kilomètres. De Lusambo à Kambove il y aurait 1,213 kilomètres environ ; en y ajoutant 400 kilomètres, pour le chemin de fer du Congo et 333 kilo- mètres pour le bief navigable, soit 1,946 kilomètres, la diffé- rence en longueur et par le fait même la différence du coût de transport avec la ligne de Lobito n'est pas assez sensible et le trafic du Katanga prendra de préférence la voie rapide du Benguella.

313

Un chemin de fer à voie étroite reliant les centres indus- triels qui se créeront dans la riche province du Lomami fera face aux besoins pendant longtemps.

Enfin, le chemin de fer projeté de Lusambo à Pweto doit être abandonné.

Les centres industriels qui se créeraient pourraient être reliés aux grandes artères de communication par des voies étroites.

En résumé les grandes lignes dont la construction doit être entamée sans tarder sont :

Reconstruction du chemin de fer Matadi-Leo 400 kilom. Jonction Kabalo-Kongolo. . . .75 3a Tshilongo à Dilolo vers Lobito Bay . . 600 Bukama-Kiabo (en construction) . . 85 Bumba-Buta et embranchement Bondo . 489 Au 2e tronçon Grands-Lacs à Lusambo . 400

2,049 kilom. à 400,000 francs le kilomètre soit 820 millions environ.

Il faut y ajouter les intérêts intercalaires pendant la con- struction, les travaux d'amélioration des biefs, de ports, la prolongation du decauville du Mayumbe par Ganda Sundi jus- qu'à la frontière, peut-être le dédoublement de cette voie de transport, etc., et nous arrivons en fin de compte au milliard.

Ne demandons pas plus pour un premier effort, à demander plus, on risque de ne rien obtenir ou de l'obtenir avec de grands retards.

Il faut marcher vite.

Comment trouver le crédit? Il y a un an à peine j'étais d'avis que la Belgique devait donner sa garantie. Je suis cer- tain à l'heure présente que la garantie du Congo est bien suf- fisante.

Au reste l'idée que d'aucuns ont empruntée au Ministre français des Colonies me plaît beaucoup : constituer un « crédit national colonial » ; on a ajouté que la garantie pourrait être constituée chez nous par le portefeuille industriel de la Colonie.

Van Leeuw,

314

A PROPOS DES «PRIMITIFS»

Dans un ouvrage consacré à l'histoire des religions, M. E,. Kreglinger débute par l'étude des populations primitives (*),

L'auteur a la préoccupation de résoudre les problèmes rela- tifs aux origines, « de montrer notamment quelle pouvait être la base psychologique des diverses conceptions religieuses et des rites principaux, et de préciser les liens rapprochant l'une de l'autre les religions successivement apparues et les étapes conduisant peu à peu, des solutions naïves imaginées par les primitifs, aux conceptions profondes des religions philoso- phiques. »

Le problème des origines est ainsi présenté comme un pro- blème d'histoire les mots « successivement» et « étapes » ne laissent pas de doute à ce sujet l'auteur l'a résolu par des considérations psychologiques.

Nous pensons que devant la question : « quelles furent dans le temps les premières formes religieuses de l'humanité?», la science doit rester muette. Elle ne dispose pas de moyens d'in- vestigation qui lui permettent de déterminer le premier com- mencement absolu de la religion.

Aussi certains sociologues n'abordent-ils pas cette question de face. Ils élaborent des classifications de formes religieuses d'après le degré de simplicité ou de complexité de celles-ci, d'après la mentalité plus ou moins grossière dont elles pro- cèdent, et se croient autorisés à attribuer une antériorité dans le temps à ce qui, à l'analyse, s'est révélé le plus simple,le plus grossier.

Ils supposent admis que de simples et grossières qu'elles étaient à l'origine, les religions, comme les civilisations, sont

(1) R. Kreglinger, Etudes sur l'origine et le développement de la vie religieuse. I. Les Primitifs, l'Egypte, l'Inde, la Perse, 370 pages. Bruxelles. Lamertin 1919.

315

devenues, en se développant, moins grossières, pins com- plexes.

Ils représentent l'évolution humaine, sous la forme d'une ligne droite ascendante. Ce sont, à notre avis, des idées pré- conçues que l'ethnologie contredit. Toute la théorie repose sur une confusion du simple et de l'essentiel, du grossier et de « l'historiquement antérieur » .

Le problème des origines religieuses est avant tout un pro- blème d'ethnologie, puisque c'est chez les peuples primitifs que les sociologues cherchent les exemples qui doivent servir à illustrer, sinon à démontrer, leurs hypothèses de recons- truction.

Or, l'ethnologie, discipline assez récente, à peine sortie de la période des tâtonnements, étudie avant tout les civilisa- tions dites primitives.

Que faut-il entendre par primitifs ? L'expression manque de précision. On concédera sans difficulté que les primitifs qui sont nos contemporains ne sont pas l'image vivante, la repro- duction exacte de ce qu'ont été les premiers hommes. Les pri- mitifs que nous connaissons sont plutôt des sauvages, des non- civilisés, qui ont déjà derrière eux un long passé sur lequel toute documentation écrite, figurée ou monumentale manque.

Et c'est précisément une des tâches les plus difficiles de l'ethnologie d'examiner dans quelle mesure et par quelles méthodes nous pouvons pénétrer dans ce passé des sauvages actuels.

Les ethnologues de l'école dite historico-culturelle s'atta- chent spécialement à étudier ces problèmes.

Ils constatent que dans la civilisation d'une peuplade déter- minée il se présente des formes archaïques à côté de formes plus récentes. Tous les éléments culturels ne sont pas de même origine : il y a des phénomènes d'emprunt, de contact, de mélange, dûs aux migrations des peuples, aux guerres, aux conquêtes, etc. Tout ne s'explique donc pas par l'évolution sur place. Les migrations de peuples et de civilisations sont plus importantes pour l'explication de certaines formes cultu- relles que les facteurs internes d'évolution.

De même toutes les peuplades ne se présentent pas comme également primitives. L'observation et la comparaison métho- diques révèlent l'existence de groupes ethniques, de provinces ethnographiques, de cycles culturels. Les ethnologues de

316

l'école Mstorico-culturelle cherchent à établir quels sont parmi les primitifs actuels ceux qui présentent les caractères les plus archaïques. On peut ne pas admettre toutes les conclu- sions auxquelles ils ont abouti Mais il faut reconnaître qu'ils ont doté l'ethnologie d'une méthode rigoureusement scienti- fique qui met fin aux fantaisies des idéologues.

Quelle attitude M. Kreglinger, étudiant le problème des origines religieuses, adopte-t-il vis-à-vis de l'ethnologie? Il ne s'explique pas sur la méthode ! Tout en citant à plusieurs reprises la revue Anthropos, qui fit une propagande intense en faveur de l'école historico- culturelle, il n'a pas un mot d'appréciation sur cette école ethnologique, et ne fait pas même allusion aux travaux de Graebner sur les civilisations océaniennes et australiennes, et d'Ankermann sur les civili- sations bantoues. Pas un mot au sujet de la Methode der Ethnologie de Graebner.

M. Kreglinger se borne à exposer la conception qu'il a in globo de la mentalité des primitifs, des croyances et des rites qui, à son avis, doivent résulter de cette mentalité et il choisit, sans indiquer de méthode spéciale, dans la masse des primitifs, les faits qui semblent favorables à sa conception.

Présentée dans ces conditions, une étude sur les origines religieuses ne peut être complète, mais doit rester hypothé- tique, subjective.

Cette observation est d'autant plus fondée que M. Kreglin- ger donne au mot primitif un sens plus étendu que celui de non civilisé. Il entend par « primitifs » toutes les populations dont la mentalité est nettement inférieure à la nôtre, et garde des traces sensibles de ses origines ; les peuples classiques sont dans ce cas (p. 45 note l). Voilà donc les peuples classiques de l'antiquité assimilés aux peuplades sauvages de l'Afrique, de l'Amérique, de TOcéanie ! Ce sont des primitifs ! Cette assi- milation n'est pas faite pour consolider les conclusions de l'auteur.

M. Kreglinger part donc de la mentalité primitive (dans le sens que nous venons d'indiquer) pour rechercher les formes les plus simples, les plus inférieures de la vie religieuse. « La » religion primitive consiste dans la croyance à l'existence » d'une substance matérielle, le mana (1), substance diffuse

(1) Le mana mélanésien n'est pas une substance, mais une force qui peut adhérer à des substances.

317

» dans l'univers, et qui peut donner aux objets sur lesquels » elle se concentre, des pouvoirs inaccoutumés. » (P. 93). Les objets qui sont d'une façon plus spéciale et plus régulière le siège du « mana » finissent par être considérés comme divins. La croyance à la divinité ou à des divinités dériverait donc directement du « mana ». Quant aux rites, ils sont avant tout magiques ; ils doivent aussi leur origine à la mentalité primitive.

Après les considérations générales que nous avons émises sur la méthode, nous pouvons nous borner à quelques re- marques sur cette synthèse.

Et tout d'abord, la mentalité primitive décrite par M. Kreg- linger, n'est que la mentalité prélogique exposée par Lévy- Brühl dans Les fonctions mentales dans les sociétés inférieures : le primitif ne pense pas comme nous, il confond le rêve avec la réalité ; il prend l'ombre, le symbole, l'image, le nom pour la chose ou la personne mêmes ; il est incapable d'un raison- nement logique ; le principe de contradiction n'existe pas pour lui, etc., etc.

Nous devons contester cette psychologie spéciale du primitif. Sans doute, le sauvage n'a pas nos façons de sentir, de penser, nos méthodes perfectionnées d'observation et d'expérimenta- tion, nos habitudes d'abstraction et de classification. Ce n'est pas une raison suffisante pour lui prêter cette incapacité fon- cière d'analyser et de raisonner. Il faut distinguer la causalité magique d'une part et la causalité profane ou naturelle d'autre part. Les sauvages ont aussi cette dernière conception de la causalité. Les coloniaux et les ethnographes sont unanimes à dire qu'ils raisonnent très logiquement sur ce qu'ils con- naissent, sur ce qu'ils ont intérêt à connaître. Ajoutons qu'à notre avis ce n'est pas au seuil d'une étude de ce genre, mais à la fin, comme conclusion des faits et des phénomènes étudiés, qu'il faut placer le chapitre sur la psychologie du primitif.

Nous voudrions faire remarquer ensuite que le « mana » qui est représenté comme primaire, tout à fait originel, est em- prunté aux civilisations mélanésiennes. Or, les ethnologues considèrent comme démontré que ces civilisations mélané- siennes ne figurent pas parmi les plus archaïques. D'autre part, la croyance à un Etre suprême se rencontre chez beau- coup de peuplades primitives. Chez les Bantous, la croyance à Nzambi, Fidi Mukulu, etc., n'a rien de commun avec les rites

318

magiques ni avec les croyances relatives au likundu, au dawa, etc. Chez les Pyginées, les rites magiques sont peu ou pas développés^ existe la croyance à un Etre suprême, maître et créateur du monde. Comment expliquer ces croyances essentiellement religieuses? Assurément pas par le mana. M. Kreglinger ne parle point de ces faits constatés, qui con- tredisent sa synthèse, et nous ne savons donc point comment il croit pouvoir les concilier avec celle-ci.

Nous devons signaler encore que beaucoup de phénomènes d'ordre religieux ne sont pas étudiés, par exemple l'animisme, tandis qu'un chapitre entier est consacré au totémisme. Or, le totémisme n'est pas un phénomène spécifiquement religieux ; il est à la fois religieux et social. Et chez beaucoup de peuples primitifs il est même exclusivement social. Les limites de cette notice ne me permettent pas de discuter certaines asser- tions de l'auteur en matière de totémisme. Je me propose de revenir sur ce sujet dans une autre étude.

J'ai développé un peu longuement peut-être les rai- sons pour lesquelles je ne puis me rallier aux idées de M. Kreg- linger sur les religions primitives.

Je ne suis d'ailleurs pas seul de mon avis.

La thèse de M. Kreglinger n'est pas soutenue par un cer- tain nombre de savants de l'Institut Solvay.

M. Waxweiler n'admettait pas l'hypothèse des primitifs à mentalité prélogique.

M. Wodon a soumis les idées de Bûcher sur l'évolution éco- nomique des primitifs à une critique pénétrante. Les erreurs de méthode qu'il reproche à l'auteur de «Arbeit und Rythmus » sont précisément celles que M. Kreglinger commet dans sa reconstruction psychologique des primitifs (l).

M. Kreglinger s'inspire de procédés de l'école dite anthro- pologique qui cherche, par delà les différences nationales et historiques, à atteindre les bases universelles et vraiment humaines de la vie sociale. Dans ses « Formes élémentaires de la vie religieuse (2), p. 133-134, Durkheim décrit les

(1) WODON. Sur quelques erreurs de méthode dans l'étude de l'homme primitif. Institut Solvay. Notes et Mémoires, f asc. 4. Bruxelles. Misch et Tliron 1906.

(2) Dans Bibliothèque de philosophie contemporaine. Travaux de l'Année sociologique. Paris, Alcan, 1912.

319

rreurs de méthode de cette école, notamment l'abus de la méthode comparative.

» On ne peut, dit-il, comparer utilement que des faits que l'on connaît bien. Or, quand on entreprend d'embrasser toutes sortes de sociétés et de civilisations, on n'en peut connaître aucune avec la compétence qui serait nécessaire ; quand on assemble, pour les rapprocher, des faits de toute provenance, on est obligé de les prendre de toutes mains sans qu'on ait les moyens ni même le temps d'en faire la critique. Ce sont ces rapprochements tumultueux et sommaires qui ont discré- dité la méthode comparative auprès d'un certain nombre de bons esprits. »

Ces remarques générales faites, je relève quelques points spéciaux.

Au bas de la page 41 se trouve une note que je cite : « On » reconnaît ici l'erreur de la philosophie scolastique, qui croit » à tort que l'essence d'un être commence par être posée seule » et ne se complète qu'ultérieurement par le concept d'exis- » tence. En réalité, pour la pensée qui naît, tout existe, et » c'est plus tard seulement que, par abstraction, se conçoit » l'essence des choses. C'est sur cette conception que repose » la preuve ontologique de l'existence de Dieu, développée » par Saint- Augustin et Saint-Anselme. »

Cette incursion dans le domaine de la métaphysique est un hors d'oeuvre.

Elle a le tort de croire réfuter en six lignes la théorie sco- lastique sur l'essence et l'existence. Cette théorie est déclarée erronée parce que pour l'esprit qui naît tout existe, et que l'essence des choses n'est conçue qu'à la suite d'un long tra- vail d'abstraction.

La philosophie scolastique n'ignore pas cela. Elle aussi enseigne que l'esprit humain placé devant un objet d'expé- rience commence par y voir un tout indistinct, posé dans l'es- pace. Elle reconnaît parfaitement que ce complexus entrevu d'abord confusément comme une chose existante, comme un être, est décomposé successivement par des actes d'abstrac- tion. Les caractères particuliers, les traits distinctifs d'espèce, de genre, etc., étant éliminés, l'intelligence finit par se trou- ver devant la substance première, objet propre de la métaphy- sique.

C'est à ce stade du travail intellectuel que le philosophe

320

scolastique étudie la substance (qu'il appelle aussi essence ou nature, suivant le point de vue auquel il se place) ; et il l'en- visage à l'état abstrait, c'est-à-dire indépendamment de sa réalisation, et à l'état concret, c'est-à-dire réalisée. La subs- tance concrétisée s'appelle, en langage d'école, subsistance. Or, l'existence est précisément ce qui concrétise la substance, ce qui fait d'une substance une subsistance.

En métaphysique scolastique, les notions d'être et d'exis- tence ne sont donc pas confondues. L'existence est ici un acte, c'est le principe déterminateur de l'essence.

On ne réfute donc pas la théorie scolastique sur l'essence et l'existence et, en passant, la preuve ontologique de la théo- dicée scolastique (1 ) par cette simple réflexion que l'esprit humain connaît l'existence des choses avant leur essence.

Mais laissons la philosophie qui n'a que peu de chose à faire ici et passons aux citations relatives aux peuplades con- golaises. M. Kreglinger, en matière d'ethnologie congolaise ne cite que M. de Calonne. Et encore n'invoque- t-il que les Bakango, et une discussion à l'Institut Solvay sur la péné- tration de la civilisation au Oongo Belge, qui n'est pas au sens propre du mot, une étude d'ethnologie. L'étude sur les Ababua (Mouvement sociologique international 1909), qui est la plus importante étude ethnologique de de Calonne, n'est pas citée.

La documentation relative aux peuplades congolaises est donc fort insuffisante. De plus l'usage qu'en fait M. Kreg- linger n'est pas toujours justifié.

M. de Calonne est cité aux pages 13, 24, 75 et 120.

A la page 13, je lis : « Les Bakango dressent devant leurs » huttes des statues de léopards farouches, et les croient » gardées effectivement contre les pillards et les brigands. » Or, le passage visé des Bakango dit : « Au dire de quelques » très vieux Bakango, il semblerait qu'elle (l'ornementation » picturale des murs) dérive d'une coutume aujourd'hui » désuète, qui consiste à peindre de chaque côté de l'entrée, » l'image épouvantable de léopards, gardiens farouches du

(1) La preuve, dite de Saint- Anselme, n'est pas admise par les scola- stiques en général. Il en est de même de l'argument de Saint-Augustin. Voir Traité élémentaire de philosophie, 4e éd., Louvain 1913, tome II, pp. 28-35 (La Théodicée par Mgr Mercier.)

:

321

» home en l'absence des propriétaires. Aujourd'hui les motifs » n'en sont plus dictés que par l'exclusive fantaisie du » peintre. »

Une hypothèse visant le passé, devient une réalité actuelle, une peinture murale devient des statues placées devant la hutte !

A la page 24, M. Kreglinger invoque l'exemple des Azande pour illustrer la coutume qu'ont plusieurs sauvages de changer de nom. Cette pratique qui fait partie des rites de la puberté me semble moins répandue et moins caractéristique chez les Azande que chez un grand nombre d'autres non civilisés. Il eut mieux valu renvoyer aux Alter sklassen und Mânnerbunde de Schurtz, aux Rites de passage de Yan Gennep, etc., plutôt qu'à la simple allusion que constitue le passage cité.

A la page 73, il est dit que « chez les Bakango, la femme » infidèle infecte de son vice les meubles et les instruments garnissant son habitation, et parmi eux, les filets dont le » mari se sert à la pêche. » Le passage qui suit est placé entre guillemets, mais la citation n'est pas littérale. Dans le passage cité des Bakango, p. 61-62, il n'est pas question de meubles placés dans la hutte de la femme infidèle, il s'agit des filets de pêche ayant 20 mètres de long, placés aux endroits propices pour la pêche.

Enfin, à la page 120, nous apprenons que la parenté Ba- kango ne se compose en moyenne que de trois adultes, alors que leur industrie principale, la pêche, exigerait qu'il y eût au moins quatre ménages, qu'il s'y trouvât au moins quatre adultes. L'explication est qu'ils ont une crainte religieuse la crainte du mana des étrangers.

Il vaut mieux ne pas se contenter de la citation des travaux de l'Institut Solvay, mais se reporter aux « Bakango » pp. 88-89, de Galonné étudie le phénomène dans le vil- lage de Sumbé. Ce village est composé d'un seul ménage, soit trois hommes adultes ; Sumbé, polygame, Kage, son fils et Gunga, son neveu, célibataires. M. Kreglinger semble croire qu'il faut normalement quatre ménages. Il suffit d'un ménage, mais il faut quatre hommes adultes. Il n'y a pas que la crainte du mana des étrangers, qui soit invoquée comme explication par de Calonne, il y a de nombreuses crises pro- voquées par les incompatibilités de caractères, la psychologie particulariste des jeunes mariés, les jalousies des femmes, etc.

322

Il semble au surplus, que M. de Calonne ait attaché une importance excessive à la théorie du mana qui était fort répan- due vers l'époque il publia son livre. M. de Calonne lui- même a eu soin de nous dire (page 99) qu'il n'était point tout à fait familiarisé avec le Likango, ce qui sans doute explique son erreur. Ce qui semble acquis, c'est que les Bakango habi- tent en petits villages composés d'un seul ménage, et placés sous l'autorité du chef de ce ménage. Dès qu'un célibataire se marie, il y a tendance à segmentation. Il n'est pas désirable qu'il y ait deux chefs de ménage ! Si cette tendance était due à la crainte du mana des femmes étrangères et des parents de celles-ci qui viennent les voir pour emporter des cadeaux, il semble que la même crainte devrait déterminer le chef du ménage à être monogame : plus le chef prend de femmes, plus il s'expose à être contaminé par le mana des étrangers ! Je pense aussi que si cette crainte était réellement aussi forte, les indigènes auraient bien trouvé quelque rite assez puissant pour neutraliser le mana des étrangers : ils auraient peut-être même songé à supprimer simplement ces cadeaux qui ont le privilège d'attirer les visites des femmes étrangères !

L'expérience faite sur les quelques citations relatives aux populations congolaises m'ayant rendu un peu méfiant, j'ai voulu vérifier d'autres notes encore. J'ai pris celles renvoyant à la bible, parce que j'avais la bible à portée de la main. Ici encore il m'a fallu constater que les fiches de M. Kreglinger n'ont pas été soigneusement vérifiées, ou que parfois, l'auteur les emploie mal à propos.

Je me contenterai de quelques exemples. A la page 20, le Lévitique défend de prononcer le nom du Seigneur. Le passage cité xxiv, 16, se rapporte aux blasphémateurs, ce qui est tout différent. Page 26, il cite le Psaume llv, 31. Ce psaume n'a que 23 versets; c'est sans doute 21 qu'il faut lire. A la même page, le passage suivant de l'Evangile de Saint Mathieu est cité xviii, 20) : « Partout trois personnes sont » assemblées en mon nom, je serai au milieu d'eux. » : cela devient sous la plume de M. Kreglinger : « Il suffit que le nom » de Jésus soit prononcé pour que, matériellement, Jésus lui- » même soit présent. »

A la page 54 les textes cités ne font pas allusion à des casques à cornes dont les soldats juifs se coiffaient pour aug- menter leur puissance offensive. A la page 98 le passage

323

cité de Samuel ne parle pas d'Ouzzah, ni du mana, dont l'arche d'alliance aurait été chargée. C'est au II Livre de Samuel qu'on trouve le passage d'Ouzzah. A la même page, l'allusion à la femme de Loth ne se justifie pas : si celle-ci fut changée en un bloc de sel, ce n'est pas parce que les villes détruites étaient chargées du maua, mais parce qu'elle n'avait pas observé les recommandations de l'Ange. M. Kreglinger aurait pu tout aussi bien citer la légende d'Orphée sortant des enfers ! Page 124, comment M. Kreglinger a- t-il pu voir dans le passage des Juges xix, 19, la preuve de ce que les juifs auraient pratiqué l'échange des femmes dans leurs relations pacifiques avec des étrangers ! Il s'agit sans doute ici d'une distraction de l'auteur ! Je ne relève pas le j>assage il est dit que Jésus était chargé du mana puisqu'il guérit les malades en les touchant, ni le passage il est dit que le symbole le plus sacré des chrétiens, la croix, dérive de la roue solaire !

On le voit ; ces citations sont inexactes ou mal comprises.

M. Kreglinger, qui a sans doute le souci scrupuleux de l'exactitude qui caractérise la véritable érudition, doit à ce souci de faire un sérieux travail de revision,

Bruxelles, octobre 1919.

Ed. De Jonghe.

324

Mélanges

KOLONIALE STAATKUNDE.

Ontwerp van een koloniaal congres.

In het tijdschrift Le Mouvement géographique (Nr van 4 Juli j. 1.), geeft de heer O. Louwers, auditor aan den Kolonialen Raad, een alge- meen overzicht van de menigvuldige en belangrijke koloniale vraag- stukken die thans op staatkundig en economisch gebied voorkomen (redematig gebruik der grondstoffen, vervoermiddelen, handarbeid en inlandsche staatkunde, behoud der inlandsche bevolking, standregelen van het personeel, enz).

Hij aarzelt niet de verklaring af te leggen dat Belgisch-Congo eene erge crisis doorstaat.

De oorlog heeft, de gansche wereld door, het economisch leven overeind gebracht. In het algemeen herstellingswerk valt een zeer belangrijke rol aan de koloniën te beurt. De onze echter schijnt er niet gemakkelijk toe te komen; zij aarzelt, zij zoekt hare wegen.

Wat steeds ontbreekt dat is de algemeene medewerking van het Land. Tot nog toe is het slechts eene minderheid die in het koloniale werk belangstelt. Nochtans, zoo men binnen de 10 jaar in Congo geen 30,000 Belgen telt, is de Kolonie te niet. Tegenwoordig telt men er ternauwernood 4,000.

Er wordt dan als middel aangeprezen een groot congres te houden waarin, onder de bescherming van hoogere ambtelijke en private per- sonen, deze vraagstukken in bespreking zouden komen.

Deze loffelijke gedachte, door den heer Louwers uitgebracht, dient met algemeene goedkeuring verwelkomd.

In een tweede artikel {Mouvement géographique, nr van 18 Juli 1920) onderzoekt de heer Louwers wie aan bewust congres zal deelnemen.

De keuze, zegt hij, zal op eene breede wijze geschieden. Niet alleen « specialisten », maar vertegenwoordigers van alle nationale werkkrin-

325

gen dienen uitgenoodigd. Tusschen ingewijden en niet ingewijden der koloniale bedrijvigheid zou een heilvol wedijveren ontstaan.

Deelnemers zouden namelijk in de volgende kringen gezocht worden :

Parlementswereld. Koloniale wereld (Hoofdbeheer in het Moeder- land. — Plaatselijk beheer. Zakenwereld.)

Financieele wereld (Groote bankhuizen). Nijverheid- en handels- wereld (Handelskamers). Krijgswereld. Onderwijs (Hooger, middel- baar en lager onderwijs). Maatschappelijke werken. Arbeidswereld. (socialistische en chrisiene syndikaten). Pers.

In meestal dezer kringen bestaan er vereenigingen. Het ware geraad- zaam deze te verzoeken zelf hare afgevaardigden voor het congres aan te duiden. In de eerste dezer groote koloniale vergaderingen zullen evenwel niet al de huidige vraagstukken ineens besproken worden. Zulks zou de aandacht te zeer verspreiden, tol nadeel van het hoofdza- kelijke. De gewichtigste punten, waarvan het leven der Kolonie af- hangt, zouden het eerst worden opgelost. Daarna, zoo de proef ge- slaagd is, zouden de vergaderingen geregeld alle drie of alle vijf jaar plaats grijpen, met telkens nieuwe punten op de dagorde» Aldus zou de gansche omvang der koloniale vraagstukken na eenen gegeven tijd voor onderzoek in aanmerking komen.

Aan het congres dient overigens een grooten luister gegeven. De pers, steeds bereidwillig wanneer het 's Lands belangen geldt zal er ruimschoots toe bijdragen de besprekingen in den vreemde kenbaar te maken.

POLITIQUE COLONIALE

Projet de Congrès colonial.

Dans le Mouvement géographique du 4 juillet, M. 0. Louwers, auditeur au Conseil colonial, après avoir souligné les efforts faits depuis douze ans par la Belgique pour la mise en valeur de la colonie, énumère les nom- breux et importants problèmes coloniaux, d'ordre politique et économique qui se posent maintenant (utilisation rationnelle des matières premières, équipement du territoire, moyens de transport, main-d'œuvre et politique indigène, conservation des populations indigènes, statut du personnel colonial, etc.)

Il n'hésite pas à dire que le Congo belge traverse en ce moment une crise grave :

t La guerre a bouleversé les conditions économiques du monde et dans

326

le rajustement des forces qui doivent remettre de l'ordre dans la société et rétablir l'équilibre, une mission spéciale importante est assignée aux colo- nies. Or, il semble que la nôtre ait quelque peine à s'adapter à ce rôle. Manifestement, elle hésite , elle cherche la voie.

» Ce qu'il faut encore, c'est associer plus étroitement la nation à l'œuvre coloniale. Jusqu'ici, une minorité seule y a collaboré. Les circonstances exigent une collaboration plus étroite, plus générale, et du monde de la finance, et du monde des affaires, et du monde des œuvres et de la jeunesse. Si dans dix ans, nous ne sommes pas 30,000 Belges au Congo, la Colonie est perdue. On en compte à peine 4,000. Comment provoquer cet afflux nouveau et l'organiser pour qu'il se produise sans mécompte et avec pleine efficacité? »

Dans la plupart de ces milieux, il existe de grandes associations. Il serait sage de prier ces associations de désigner elles-mêmes leurs manda- taires au Congrès. Ainsi, celui-ci formerait, en quelque sorte, les États généraux de la Colonie.

11 ne serait pas bon de tenter d'aborder, dans ses premières grandes assises coloniales, toutes les questions qui se posent en ce moment. Ce procédé présenterait l'inconvénient d'éparpiller l'attention au préjudice des problèmes vitaux. Il faudrait, au contraire, borner les travaux du Congrès aux principales questions et les lui faire examiner avec soin.

Si l'expérience réussit, ces assises coloniales pourraient se réunir périodiquement, tous les trois ou cinq ans, par exemple, et à chacune de ces sessions de nouveaux points seraient mis à l'ordre du jour. Le cycle des questions coloniales serait ainsi parcouru après un certain temps.

Quant au deuxième but, il serait atteint en donnant au Congrès une grande solennité. La presse à qui on ne fait jamais appel en vain, lorsqu'il s'agit des grands intérêts de la nation, se chargera sans doute volontiers de répandre au dehors la relation des débats. »

Aussi préconise-t-il la réunion, sous le patronage de hautes personna- lités oflicielles et privées, d'un grand congrès national qui mettrait à l'étude ces questions.

On ne peut qu'approuver l'idée lancée par M. Louwers. Il importe que tous ceux qui s'intéressent à l'avenir de la plus grande Belgique se réu- nissent, se serrent les coudes, échangent leurs opinions et contribuent sur- tout à créer dans toutes les classes de la nation un courant de sympathique intérêt pour tout ce qui concerne le Congo.

* *

Dans un second article paru dans le Mouvement Géographique du 18 juillet 1920, M. Louwers examine la question des participants.

327

« Le choix des participants devrait se faire d'une manière très large. Jusqu'ici les problèmes coloniaux n'ont jamais été étudiés que par les spécialistes de la colonisation. Il faudrait, cette fois, associer à ce travail des représentants de tous les domaines de l'activité nationale. Ils apporte- raient à l'étude des questions les avis de leur expérience et de leur savoir. Ils exposeraient ce que chaque milieu belge attend de la Colonie. Cette prise de contact entre coloniaux et profanes serait des plus fructueuse. Elle créerait une saine émulation. Chacun, au retour dans son milieu, se ferait le défenseur et le propagandiste de l'idé coloniale. »

Voici les milieux où, semble-t-il, il conviendrait de recruter les parti- cipants :

Milieu parlementaire. Milieu colonial :

Administration métropolitaine;

Administration locale;

Monde des affaires coloniales. Milieu financier, grands établissements bancaires. Milieu industriel.

Milieu commerçant (Chambres de commerce). Milieu militaire. Milieu agricole. Milieu enseignant :

Supérieur,

Moyen,

Primaire. Milieu des œuvres sociales.

Monde du travail (syndicats socialistes et chrétiens). Presse.

L' Allemagne et la question coloniale.

il est superflu de souligner l'importance du remarquable article que M. Camille Fidel consacre à La Nouvelle Allemagne et la question colo- niale {Colonies et Marine, avril 1920). Nous en reproduisons ici de larges extraits.

Des agences d'émigration ayant cherché à exploiter le désir de s'expa- trier, qui se répand de plus en plus dans toutes les classes de la popula- tion, la presse a sollicité l'intervention du Gouvernement et exigé qu'il y ait une politique d'émigration, ainsi définie par la Revue Nord wid Sud : « Conduire dans certaines voies désirées l'exportation de l'esprit, du travail et du capital allemands ». D'après ce système, c'est à l'Etat de

328

décider doit se porter l'émigration allemande.. D'où la nécessité d'un service public rhargé de diriger les émigrants vers les pays ils doivent réussir, ils ont le plus de chances de ne pas se dénationaliser, et aussi de créer des centres d'influence allemande.

Tel est le rôle du nouvel Office d'empire pour l'émigration (Reichswande- rungsamt). Pour montrer l'esprit qui anime cette institution, il convient de signaler, d'après les déclarations faites le 1 1 octobre 1919, à l'Assem- blée Nationale allemande, par le Dr Bell, ancien ministre des colonies, qu'il a été décidé de placer à l'Office de l'Emigration une partie des fonc- tionnaires coloniaux devenus disponibles par suppression d'emploi. Et le Dr Boehmert, social-démocrate, parlant du rôle futur des Allemands des colonies, a exprimé l'opinion que s'ils « ne peuvent plus exercer leur activité sur le sol allemand, ils édifieront en terre étrangère une nouvelle Allemagne. »

L'Office d'empire doit être secondé dans sa tâche par les organisations privées existantes, anciennes ou récentes, qui ont des bureaux de rensei- gnements et toute une documentation leur permettant de donner aux émigrants des indications précieuses. Ce sont : Y Institut allemand pour Vét ranger (Deutsches Ausland-Institut), à Stuttgart; l'Association pour le germanisme à l'étranger (Verein für das Deutschtumin Ausland); VAsso- ciation de protection des émigrants allemands (Schutzverband deutscher Auswanderer); Y Association pour la colonisation (Vereinigung für kolo- niale Siedlung); la Ligue d'empire de colonisation (Reichssiedlerbund); Y Union évang^hque pour les colons et émigrants allemands (Evange- lischer Haupterverein fürdeutsche Ansiedler und Auswanderer) ; V Asso- ciation pour la colonisation et l'émigration allemande (Vereinigung für Deutsche Siedlung und Wanderung), etc. Quant au Bureau central de renseignements pour les émigrants, créé par la Deutsche Kolonial- Gesellschaft, il a été absorbé par l'Office d'empire pour l'émigration, qui fournit maintenant les renseignements officiel?. Le mouvement migratoire a fait naître des journaux et revues tels que D^r Deutsche Auswanderer, Deutsche A>iswandsrer-Zeitnng, Ausland und Heimat, etc.

A un congrès des syndicats allemands, tenu à Nuremberg, il a été pro- posé de confier à ces associations la concession du placement des tra- vailleurs allemands à l'étranger. Dans le même ordre d'idées on projette des me.-ures législatives de protection comportant la suppression des entrepri-es professionnelles de renseignements qui exploitent souvent l'émigrant et l'induisent en erreur. On considère comaie nécessaire de réserver ce rôle aux établissements ayant obtenu une licence et soumis au contrôle officiel.

Le I \ novembre 1919 a eu lieu à Berlin, à l'Office d'empire pour l'émi-

329

gration, une conférence avec les représentants des syndicats et des diffé- rentes organisations qui a abouti à un accord complet sur la nécessité d'une collaboration dans l'intérêt de tous ceux que les conditions écono- miques défavorables du pays contraignent à émigrer.

Le 1 1 janvier 4920, le Conseil de l'Office d'empire pour l'émigration a procédé à une discussion approfondie delà loi, sur l'émigration qui com- porte un contrôle plus rigoureux des bureaux de renseignements, dépla- cement et de colonisation.

Mais les efforts ne doivent pas se limiter à la protection matérielle et au placement des émigrants; il est jugé désirable de maintenir leur caractère national et celui de leurs descendants par l'institution d'écoles allemandes à l'étranger. Dans Nord und Sud (juillet 1919), Willy Ber- thold proposait d'accorder aux émigrés allemands l'exercice de certains droits politiques dans la Métropole, de leur assurer une représentation légale à l'Assemblée Nationale. Or, quelque invraisemblable que cela puisse paraître, on annonce qu'il vient d'être donné satisfaction à ce désir : d'après une dépêche de Berlin (27 janvier 1920), une disposition spéciale des projets de loi pour les élections au Reichstag accorde le droit de vote aux Allemands résidant à l'étranger, qui nommeront un député par 60,000 votants... La Franckfurler Zeitung avoue que cette mesure a été prise « pour resserrer les liens unissant les Allemands à la Mère- Patrie, au moment des millions d'entre eux sont perdus comme citoyens, par suite de leur émigration forcée. »

Ainsi dirigée et protégée, l'émigration non seulement ne sera pas pour l 'Allemagne une cause de faiblesse, mais pourra être un facteur puissant du rétablissement de sa situation dans le monde; elle constituera un lien précieux avec les pays donifles Allemands comptent tirer des matières premières, et ils pourront placer les produits de leur industrie, avec l'espoir d'y exercer leur influence.

Dans un livre intitulé Der Aufmarsch im Osten. Russisch- Asien ais deutsches Kriegs und Wirtschaftziel (La marche vers l'Est, la Russie d'Asie comme but de guerre et économique allemand), le professeur Werhner Daya propose que l'Allemagne et la Russie forment une asso- ciation pour l'exploitation des ressources naturelles illimitées des immenses territoires asiatiques de cette dernière. La Russie, explique-t-il, a besoin, pour son relèvement économique, d'une aide étrangère puis- sante que l'Allemagne seule peut lui fournir, elle doit faire largement appel au capital allemand, à l'industrie allemande, à l'organisation aile-

330

mande, et, de son côté, l'Allemagne s'assurera une mainmise puissante sur le marché russe. Mais M. Daya, considérant que « ce serait une erreur pour l'Allemagne de chercher à trop exploiter la Russie d'Eu- rope», ce qui pourrait provoquer un réveil du nationalisme, estime qu'en Asie russe, le capital allemand peut se mettre à l'œuvre systéma- tiquement, d'autant plus que c'est le pays de l'avenir.

M. Daya propose, à cet effet, la formation d'un consortium de banques allemandes et de grandes compagnies de commerce, d'industrie et de navigation, sous un contrôle unique, pour le développement et l'exploita- tion de l'Asie Russe. On construirait des chemins de fer, des canaux, on établirait des services de navigation, on exploiterait les mines, on créerait des industries nouvelles. L'auteur songe aussi au Turkestan, qui peut devenir une importante région industrielle.

Dans un intéressant commentaire consacré à ce livre, et intitulé « Les buts de paix de l'Allemagne en Orient », le Times (supplément littéraire du 18 septembre 4919), signalait que la concession du grand chemin de fer du Nord, qui reliera la Sibérie à la Côte mourmane et aux ports baltes, d'une part, à la Volga de l'autre, était à ce moment négociée par l'ingénieur allemand Ullmann.

Pour le professeur Daya, comme pour la plupart des protagonistes de l'expansion allemande vers l'Est, « il est parfaitement indifférent d'avoir affaire à un régime maximaliste, cadet ou tsariste » . Et il ajoute avec une netteté qui a au moins le mérite de la franchise :

Ce n'est pas pour l'amour de la Russie que l'Allemagne doit dominer la route qui conduit à travers l'Asie, mais afin d'atteindre le grand but de sa politique continentale. Pour la première fois dans l'histoire, à la poli- tique navale britannique, qui pendant des siècles a détenu l'hégémonie mondiale par la concentration de toutes les forces vers un même but, on opposera une unification aussi vaste et aussi puissante de politique ter- restre. Si nous élargissons notre orbite économique et si nous nous mettons en relations étroites et durables avec toute l'Asie, nous serons peut-être en mesure, dans une guerre future, de faire une descente sur l'Inde et de chasser la domination anglaise du continent asiatique, de plus, nous aurons la certitude de nous rendre indépendants des importa- tions des matières premières par mer rappelons-nous seulement le cuivre et le coton et ainsi toute chance de victoire pour l'Angleterre disparaîtra dès le début. L'Allemagne, le Japon, la Russie, voilà la constellation politique la plus naturelle, c'est l'alliance du XXe siècle.

Il convient d'ajouter que ces lignes débordantes d'enthousiasme étaient écrites au lendemain du traité de Brest-Litovsk, qui a semblé marquer le point de départ de la nouvelle orientation de la Weltpolitik

331

et avant l'effondrement de l'Allemagne sur le front occidental; mais le Times, dans l'article précité, exprime l'opinion que la victoire des Alliés n'infirme pas les conclusions du professeur Daya. Bien plus, le lamentable échec des gouvernements russes nationaux écrasés par le Bolchevisme, accroît, en perpétuant l'impuissance de la Russie, les chances d'une emprise allemande sur ses immenses territoires. Faut-il en voir un commencement de réalisation dans la demande, adressée par les autorités bolchevistes au Gouvernement allemand, de spécialistes pour rétablir les communications régulières avec le Turkestan, par la Basse-Volga, la mer Caspienne et le chemin de fer transcaspien ?

On sait aussi que l'agitation fomentée dans les pays musulmans par le département oriental du commissariat pour les affaires étrangères à Moscou, au moyen d'une « Ligue pour la libération de l'Islam »,a un de ses principaux centres à Berlin, siège le « Comité central européen » de la Ligue, chargé de la propagande en Europe occidentale, dans les Balkans, en Egypte, dans l'Afrique du Nord, en collaboration avec le « Comité central oriental », établit au quartier généra! de Mustapha Kemal, chef du mouvement nationaliste d'Anatolie. Le Times (3 février 1920), commentant cette hospitalité donnée par l'Allemagne aux agitateurs musulmans, fait observer que la défaite n'a pas interrompu le Drang nach Osten et que le gouvernement allemand, continuant à coopérer avec la Turquie, se sert des tendances révolutionnaires encouragées dans les pays musulmans par le bolchevisme, pour essayer de rétablir son influence en Orient. Il préparerait même l'émigration en Chine.

En attendant, l'exode des Allemands et aussi des Autrichiens vers l'Argentine s'accentue. Le correspondant particulier du Temps, à Rio de Janeiro, a donné à ce sujet (4 février 1920) d'intéressantes pré- cisions :

« Il n'est guère de navire hollandais arrivant à Rio de la Plata qui n'amène au moins 300 immigrants allemands, appartenant non pas aux classes inférieures, mais à l'aristocratie et à la bourgeoisie. Il s'y trouve beaucoup d'anciens officiers, d'ingénieurs, etc. accompagnés de leurs familles, disposant d'un capital suffisant pour créer des établissements agricoles et industriels, et même des personnalités venant étudier de giandes entreprises qui ouvriront de vastes débouchés à l'activité allemande. Il semble que toutes les forces d'expansion de l'Allemagne, privée de ses colonies par le Traité de Versailles, se tournent vers

332

l'Amérique du Sud, les arrivages actuels d'immigrants allemands ne semblent être que l'avant-garde d'une véritable invasion.

» L'émigration autrichienne prend le même chemin. Des délégués de plusieurs sociétés d'émigration ont visité récemment l'Argentine pour préparer les voies à plusieurs milliers de familles autrichiennes des classes moyennes qui seraient dirigées vers le territoire de Misiones, limitrophe du Sud du Brésil, existent déjà de longue date d'impor- tés agglomérations allemandes, ou vers la région patagonienne de Neu- quen, qui confine au Chili. »

Mais comment l'opinion argentine envisage-t-elle l'afflux germanique? On lit dans une correspondance de Buenos-Ayres, publiée par le Times (Trade Supplement, 29 novembre 1919), que, d'après des déclarations faites à l'assemblée annuelle de la Deutsche Volksverbindung, tenue en juillet 1919, c'est dans l'influence indirecte de ses techniciens et chi- mistes expérimentés que l'Allemagne doit trouver la dernière chance d'expansion de son commerce et de son prestige en Argentine. L'habileté de cette nouvelle campagne allemande consiste en ce qu'elle paraît tendre à soutenir les industries locales : il faut entendre par les industries argentines les Germano-Argentins ont fourni les capitaux et dont ils détiennent la direction. Une mission officieuse allemande, arrivée récem- ment par le bateau hollandais Gelria, comprenait plusieurs experts, et bien que leur rôle ait consisté à faire un rapport général sur la création de nouvelles industries, il n'y a aucun doute à avoir sur leurs intentions. Mais « au point de vue purement argentin, remarque le correspondant du Times, cet esprit d'initiative allemande tend précisément à satisfaire un besoin de la République : l'activité industrielle allemande du degré supérieur a donné satisfaction dans l'ensemble et la possibilité de libérer des sources étrangères d'approvisionnement dans de nombreuses branches industrielles est accueillie avec satisfaction en Argentine, quel que soit celui qui permettra à cette nation de se passer, dans une cer- taine mesure, de ses fournisseurs étrangers ».

Si la collaboration germanique est jugée avantageuse par les Argentins eux-mêmes, nul doute que l'Allemagne ne trouve dans son immigration, spécialisée ou non, un puissant moyen de rétablir son influence dans cette partie du monde.

Au début de cette étude, nous avons signalé la ténacité avec laquelle l'Allemagne réclame ses anciennes colonies pour l'approvisionnement de sa population, de son industrie en matières premières tropicales indis- pensables, Dans quelques années, lorsqu'auront été oubliées les raisons profondes pour lesquelles cette puissance a été privée de ses possessions d'outre-mer, cet argument, répété à satiété par une propagande habile,

333

ne manquera pas de faire impression chez les neutres, chez les alliés, peut-être même chez nous. Et n'est-il pas à craindre qu'alors il soit prêté attention à des suggestions du genre de celle du Berliner Tugeblatt : « Que tous les territoires producteurs de matières premières soient exploités de la manière la plus intensive par toutes les puissances? »

Pour parer à ce danger, nous devons affronter résolument la formi- dable tâche d'exploiter méthodiquement et scientifiquement, à l'aide d'un vaste programme des travaux publics et de développement des transports maritimes, et au moyen de capitaux considérables, notre magnifique domaine colonial, de manière à lui faire produire une quan- tité de matières premières suffisante non seulement pour couvrir les besoins de la Métropole, mais aussi pour contribuer, avec les autres domaines coloniaux, à l'approvisionnement des pays d'Europe dépourvus de possessions tropicales. Les colonies françaises sont, à ce point de vue, bien en retard sur l'Empire Britannique qui, depuis longtemps, subvient pour des quantités et des sommes énormes aux besoins d'une grande partie du monde. Fort heureusement, l'heureux changement survenu depuis la guerre dans la mentalité de la population française en faveur de nos colonies elle commence à voir un des facteurs principaux de notre relèvement économique, la constitution à la Nouvelle Chambre des Députés et au Sénat de groupes coloniaux nombreux et agissants, la place de plus en plus grande que tient la question coloniale dans les préoccupations des premiers de nos hommes d'État, l'œuvre infatigable de propagande de nos groupements coloniaux et économiques, le pré- cieux concours de la grande presse, tout cela nous permet d'espérer que nous trouverons en France les capitaux, les techniciens et les savants indispensables pour mener à bien la redoutable tâche qui vient d'être définie.

Notre devoir et notre intérêt nous y engagent : notre devoir, envers la France d'abord, et ensuite envers le reste du monde; notre intérêt, parce que l'histoire des peuples prouve, suivant l'exacte expression du Temps (14 janvier 1820), « qu'aux colonies tout domaine mal utilisé est un péril pour son détenteur ». Pourrait-on concevoir un stimulant plus énergique pour nous pousser à un vaste effort de production?

En fournissant à l'Allemagne une partie des matières premières que la France n'absorbe pas en totalité, nos colonies s'assureront un marché très vaste et pourront, comme contre partie, acheter en Allemagne, à des conditions que le change rend particulièrement avantageuses, une quan- tité d'objets manufacturés que l'industrie française n'est pas actuellement en mesure de leur fournir. Une mission envoyée en juillet 1919, par Y Union Coloniale Frnçaise pour étudier l'établissement de relations corn-

334

mereiales entre les colonies françaises et les pays rhénans a rapporté de son enquête la conviction que ce plan est réalisable et absolument conforme à l'intérêt de la France. Nous enlèverons ainsi tout prétexte à une dangereuse agitation en faveur de restitutions coloniales; et, en plaçant l'Allemagne dans une dépendance commerciale étroite de l'Empire colonial Français, nous favoriserons l'établissement de liens économiques il ne peut être question d'autre chose avant longtemps entre les deux pays, ce qui consolidera notre situation sur le Rhin.

Le discours de M. Albert Sarraut au banquet colonial.

Nous reproduisons d'après la Gazette Coloniale (*2 avril 1920), un extrait d'un superbe discours de M. Sarraut, Ministre des Colonies, qui esquisse à grands traits le programme colonial de la nouvelle France :

« Voici désormais, dit-il, l'épopée terminée. La guerre vient d'écrire l'épilogue du livre d'héroïsme... Après celle de l'épée, c'est l'heure de la charrue. »

Et il continue son discours en ces termes :

« La France d'outre-mer qui sait tout ce qu'elle doit à la bonté de sa mère, et de quel geste bienfaiteur l'idéalisme national a transfiguré ses destins, tend à cette heure ses bras chargés d'offrandes, ses mains lourdes de fruits vers celle que l'émouvante et noble pitié du grand patriote qui préside aux destinées de la République appelait hier la « convalescente héroïque ».

Il ne tient qu'à nous de faire que ce concours s'élargisse au point d'alléger immensément le tribut que notre pays verse encore aux' marchés étrangers. Qu'on le sache ! L'heure est passée la ressource coloniale ne représentait qu'un apport complémentaire, un luxe de spé- cialités, une sorte de valeur d'appoint dans le vaste maniement national des besoins économiques. Les colonies sont, dès aujourd'hui, elles seront plus encore demain, des organismes évolués, des puissances intégrales, des instruments de production capables de répondre à la demande principale et non plus seulement au besoin supplémentaire de la France industrielle et commerciale. Ce n'est plus le petit négoce des épices, des condiments rares, des denrées exotiques qui peut doré- navant suffire à l'essor de leur développement. C'est la grande matière première, le produit substantiel, l'aliment fondamental de la vie in- tense des usines, des fabriques, des manufactures, qu'à pleines cales de navire, elles doivent fournir au gigantesque atelier se brasse la richesse française. Coton, soie, matières grasses, bois et pâtes à papier, textiles, caoutchouc, minéraux et combustibles, ces nourritures pre-

335

mières et quotidiennes de la table industrielle et commerciale, ce pain de la vie nationale, c'est à ses colonies que la France, désormais, doit amplement le demander.

Et dès lors, si le but à atteindre se précise en cette donnée simple et claire, la méthode et les moyens d'action qu'il faut ordonner pour aboutir se déduisent à leur tour avec une égale clarté.

Fournir dans le moindre délai aux besoins de la vie nationale la plus grande somme des produits essentiels quelle réclame, c'est affirmer d'abord cette vérité capitale qu'il faut, entre nos colonies, établir enfin la division méthodique du travail. Que chacun ait sa tâche, son lot de création, sa fourniture, sa commande. La Nature, le climat, la tradition indigène ont prédestiné chacune d'elles à une production déterminée sur l'accroissement de laquelle il faut maintenant concentrer l'effort. Assez de ces coquetteries d'amour-propre qui ont éparpillé leur labeur sur une diversité d'expériences et de culture, pour le stérile orgueil des catalogues d'exposition. Assez de tours de force savants et de colonisation en jardinets. Que nos colonies soient des centres de pro- duction, non plus des musées d'échantillons. Libre sans doute à des caprices privés de semer à leur seul risque la graine qu'il leur plaît. Mais que l'effort des Gouvernements locaux, associés aux colons et à l'indigène, en contact plus étroit surtout avec le grand consommateur français, concentre et applique sans délai son encouragement, ses techniciens, ses agronomes, ses moyens budgétaires, à multiplier dans chaque colonie l'abondance du produit qui est sa richesse propre et spéciale.

Que la France, dans l'Afrique du Nord, trouve le vaste grenier de céréales et le cellier complémentaire de ses vins, dans l'Occiden- tale et l'Équatoriale, les matières grasses, le coton, les bois, la pâte à papier, le caoutchouc ; à Madagascar, le bétail, et les graphites ; aux Antilles et à la Réunion les cafés, les sucres et rhums ; en Indochine, la soie, le coton, le riz, le caoutchouc, le café, les minéraux. Cela d'abord avant toute autre chose.

Organisons sur cette répartition fondamentale la production et la surproduction devenues nécessaires par la consommation nationale et les besoins de ses échanges. Gréons l'outillage économique qui les favorisera, par le rail, la route, le port, la flotte de transport. Créons-le d'un effort large, qui renonce aux parcimonies des crédits par petits paquets. Demandons à la nation elle-même par le grand appel du crédit colonial, les capitaux d'exécution qu'elle doit à l'œuvre d'où dépend son salut. Hâtons surtout cette exécution en restituant aux pouvoirs locaux, par l'octroi d'une large autonomie, des facultés d'ini- tiative qu'engourdit la centralisation.

336

Assurons enfin la sécurité de ce grand œuvre par une politique indigène associant à notre tâche les populations protégées, avec un libéralisme qui, sans souscrire à d'impossibles abdications de souve- raineté exprime l'âme paternelle d'une France dont l'égale tendresse respecte les traditions de tous ses fils, catholiques, musulmans et boud- histes...

... A l'œuvre, et tous d'accord, désormais dans la ferveur de cette entreprise, mettons-nous à la besogne avec des forces décuplées, afin que la Patrie victorieuse voie grandir encore dans la prospérité recon- quise, le rayonnement de son génie et de sa gloire.

Et puissent tous les Français s'exalter avec nous pour cette œuvre de progrès et de salut.

Quant à nous, les coloniaux, ceux de là-bas, ceux de la brousse, nous voici prêts à jeter tout ce qui nous reste de volonté, de vail- lance, d'énergie, dans le creuset éblouissant se refond le bon métal de l'énergie française. Nous donnerons tout de nous-mêmes à la dévo- tion d'une foi qui, plus que jamais, nous transporte et nous dévore. Car elle est de celles qu'on n'arrache plus de son âme une fois quelle y est entrée et le dolman blanc du colonial est aux épaules qui l'ont un jour porté, ce que fut pour Hercule la tunique qui consumait son être.

Ah ! nous l'avons tous bu, le philtre du magnifique enchantement, dans l'ombre mystérieuse et sacrée des pagodes ou dans l'immensité torride des déserts hallucinés de mirages ! Et le sortilège d'amour dont des dieux inconnus nous ont versé le charme a pour jamais enchaîné nos cœurs à ces terres de nostalgie, tout ce que notre effort en fanta de beau et d'utile a réclamé de notre chair la rançon de peine et de douleur. Et parce qu'ainsi nous avons incorporé à ces prolon- gements de la Patrie, avec la sueur austère de nos fronts, la substance de nos cerveaux, de nos nerfs, de notre sang aussi, un invisible réseau de fibres frémissantes relie fidèlement nos tendresses exilées à la vie ardente et profonde qui fermente, en ces édens perdus.

Coloniaux, mes compagnons, vous le connaissez, vous, l'âpre et cher supplice de ces brusques réveils qui, parfois ici, dans la paix des nuits d'autres reposent, nous dressent haletants sur la couche que le sommeil vient de fuir. Sous les doigts fiévreux qui se crispent pour arracher le casque de feu, la tête bourdonnante de bruits, des murmures lointains de voix humaines répondent aux harmonies de musiques étranges ; que sur la face en moiteur passent des souffles glacés qui semblent chargés des effluves humides des grands bois et laissent aux lèvres des saveurs indicibles, des amertumes de poi-

337

sons et des arômes de fleurs se mêlent à la douceur des fruits d'on ne sait quels Chanaans retrouvés. Un délire cruel et heureux à la fois fait bondir le cœur dans la poitrine et les bras le sang saccade ses pulsations, se tendent pour saisir des chers fantômes fugitifs. Palu- disme, dit la raison, qui vacille en nous en lueurs de veilleuse. Non ! dit le cœur, qui a mieux compris. Car ce qui est venu jusqu'à nous à travers l'infini de l'espace, le choc soudain qui a retenu en nos êtres, la clameur qui nous a réveillés, c'est l'appel de la jungle !

Pour porter jusqu'à nos âmes le grand cri qui a franchi l'immensité, la Brousse, amante souveraine que n'oublie jamais qui l'a aimée, a confondu en lui toutes les voix de la nature éternelle, le murmure du vent dans les savanes, le chant des oiseaux aux ailes de pierreries, le grondement des fauves parmi l'ombre des halliers, toute la parole innombrable des êtres et des choses dont se compose, chaque matin, le grand hymne panthéiste que l'éveil de la forêt vierge élève vers le soleil, dans la splendeur d'un cantique à la vie universelle que les siècles émus retrouveront sur les lèvres fraternelles du bouddha et de François d'Assise.

Mais voici qu'au-dessus de celte rumeur, enfantine et grêle, vi- brante et distincte, une autre voix monte, celle de Mowgli, Mowgli, le petit d'homme, le petit frère des autres races qui répète vers nous son cri nocturne de la Jungle. « Nous sommes du même sang, vous et moi ». Oui, Mowgli, du même sang, du même sang d'humanité, qui, sur les traits de l'homme noir, de l'homme jaune, de l'homme rouge, comme de l'homme blanc inscrit le même droit à la vie, au bonheur, à la justice, au progrès, qui, par le travail fécond, fera la destinée plus haute.

Et nul peuple dans l'éternité, ô Mowgli, ne sera plus grand que la France qui, pareille au soleil dont l'allégresse, inonde les ténèbres des forêts millénaires, a éclairé la forêt humaine en marche vers l'avenir des sublimes lumières de la justice et de la bonté. »

Le Gouvernement du Congo-Belge.

Projet de Réorganisation.

Considérations justificatives.

Nous reproduisons à titre documentaire des extraits d'un document communiqué à M. le ministre Franck par des personnalités de la Co- lonie.

338

Il a été publié par Y Étoile du Congo du 5 mai :

La Belgique s'est essayée à une grande œuvre coloniale. Son coup d'essai, à tout prendre, est couronné de succès. La richesse même du Congo et l'initiative privée expliquent ce succès mieux que le rôle joué par le Gouvernement colonial. L'histoire administrative du Congo se dis- tingue, en effet, par l'instabilité d'un régime sans cesse modifié et porté aux méthodes les plus opposées. Ces brusques à coups sont d'un barreur encore novice. A l'absolutisme Léopoldien, nécessaire à la création de l'œuvre, a succédé le formalisme administratif, outrancier et défiant. La manière trop rude des débuts, a, par réaction, tourné au sentimen- talisme. La politique indigène, chose capitale et fort délicate, est sujette à des variations telles que nos populations africaines en sont désempa- rées. Les grands monopoles commerciaux, créés par Léopold II, ont été combattus comme des ennemis et la liberté du commerce a été poussée jusqu'à la licence. La responsabilité personnelle est une notion perdue, eue s'est réfugiée au sommet de la hiérarchie. Elle y reste une force et une garantie. Mais l'incertitude des directives venant d'en haut, les hé- sitations du commandement énervent la main qui doit agir. L'obéissance devient passive, routinière et stérile.

Il est temps d'en arriver à un juste équilibre.

Douze années de tâtonnements suffisent à une mise au point devenue nécessaire.

La tentative de réforme de 1914 est partie d'un bon mouvement et de louables idées. Les deux Rapports au Roi de M. le ministre Renkin, prononcent les mots de responsabilité, d'initiative, de décentralisation, de réduction progressive du monde administratif. Mais la lettre elle- même du projet d'Arrêté royal, trahit ces sages pensées et ne sort pas de l'ornière profonde. Quatre administrations arrivent à ce superposer en un savant édifice : Bruxelles, Borna, la Province, le District, ont des cadres complets et plus nourris que jamais. La guerre et i'après-guerre ont fait des vides, c'est entendu; mais c'est un résultat inattendu et d'ailleurs plus nuisible qu'utile, car les vides se sont produits à contre temps.

Le Gouvernement Général de Borna a pu, en s'appuyant sur ses droits, renforcer son action centralisatrice au point de paralyser toute action en dehors de lui. Ses ordonnances s'étendent à toutes les Pro- vinces, sans limite aucune à leur objet (article 21 ). Les propositions bud- gétaires des Provinces sont établies conformément aux instructions du Gouverneur Général (art. 22). Le personnel colonial de la Colonie entière est livré au gré d'une ordonnance du Gouverneur Général (art. 26).

Kn définitive, le projet de réorganisation a déplacé les centres de

339 -

congestion, sans dégager efficacement les points trop encombrés et trop encombrants. Borna et le District sont venus s'ajouter à Bruxelles et à la Province. Le malaise est accentué d'autant.

La lettre de la réforme administrative demande donc à être mise en harmonie avec l'esprit du projet de 1914. Tel est le problème que l'on cherche à résoudre.

La solution proposée se ramène à quelques données essentielles.

i'o Autonomie plus large des provinces.

La « cheville ouvrière » de l'Administration, pour reprendre un terme du rapport de 1914, n'est pas le Ministre ni le Gouverneur Général, qui sont placés trop haut, elle n'est pas bien représentée non plus par le Commissaire de District, qui se trouve trop bas. L'étendue géographique des districts est considérable; elle crée une illusion. Leur importance réelle n'est pas en rapport. Le jour viendra les communes même du Congo revendiqueront avec raison l'autonomie accordée à nos communes belges. A l'heure, actuelle, l'unité constitutive du régime colonial est la Province.

La Province a atteint un développement qui justifie un budget propre et un personnel administratif distinct. La colonie a été prise d'abord dans son ensemble; la Province vient ensuite; le District viendra à son heure. Oq propose donc que la Province gère ses finances, et les soumette au Gouvernement Métropolitain par l'intermédiaire du Gouvernement Géné- ral qui se contente d'y ajouter ses observations. Le District établit ses prévisions budgétaires, mais la Province a le droit de les modifier. Le District à l'égard de la Province est un mineur, encore en tutelle.

L'autonomie financière est à la fois le meilleur stimulant et le meilleur frein. Elle garantit mieux le bon emploi des fonds disponibles et la prompte exécution du budget.

La participation des provinces au budget général de la Colonie, ordi- naire ou extraordinaire, est prévue. La participation au budget ordinaire est inscrite dans la loi budgétaire, la participation à des dépenses extra- ordinaires ferait, dans chaque cas particulier, l'objet d'un Décret. Il importe, croyons-nous, de sanctionner par un acte législatif distinct, une disposition qui constitue une exception au principe de l'autonomie pro- vinciale Un Décret paraît suffire à ce but.

La faculté, pour les provinces, d'émettre des emprunts, avec les garanties légales ordinaires ne semble pas exagérée. La moindre ville d'Europe en fait autant. A mesure qu'elles se développent, les provinces se créent une clientèle financière qui est directement intéressée à lapros-

340

périté locale. Il importe de tirer parti de ces ressources avec la prudence qui s'impose. La Métropole jugerait de l'opportunité d'accorder des sub- ventions aux provinces dont les ressources seraient encore insuffisantes.

Transfert du Gouvernement Général à Bruxelles,

L'administration centrale de Borna serait portée à Bruxelles. Les ser" vices du Ministère des Colonies et ceux duGouvernement général seraien unifiés et réorganisés par le Gouverneur général.

Les avantages de cette modification paraissent devoir être :

a) De mettre le Gouverneur général en contact immédiat avec le Ministre des Colonies.

La Colonie serait présente en Belgique et le Gouvernement belge serait, en quelque sorte, présent au Congo;

b) De stabiliser le Gouvernement de la Colonie en le soustrayant aux fluctuations de la politique belge. Les services généraux de la Colonie, se trouvant placés sous l'autorité immédiate du Gouverneur général se ressentiront moins encore qu'aujourd'hui des changements de Ministère. Le travail sera d'autant plus suivi. Les questions de partis qui énervent la Mère-Patrie, n'auront plus pour les Coloniaux qu'un intérêt très éloigné. Le Gouvernement colonial sera lui-même plus indépendant vis-à-vis des sollicitations et des influences qui n'intéressent pas l'essor de la Colonie ;

c) L'œuvre coloniale bénéficiera du prestige d'une représentation directe dans la capitale. Il est avantageux d'avoir pignon sur rue. Le Ministre, de par ses fonctions, est un personnage plus politique que colonial;

d) L'unification des cadres administratifs de Bruxelles et de Borna sup- primera tout double emploi, permettra de réaliser une économie très appréciable, facilitera l'expédition des affaires, améliorera la compétence du personnel administratif. Le personnel soit de Borna, soit de Bruxelles, mis en disponibilité, pourrait avantageusement être réparti dans les gouvernements provinciaux ;

e) Le Gouvernement général de la Colonie, qui gagnera à être rappro- ché du Gouvernement belge, gagnera aussi à être plus éloigné des gou- vernements provinciaux. La proximité immédiate du champ d'action limite trop les vues de la haute direction. La place d'un directeur général d'usine n'est pas à l'atelier. Les traditions centralisatrices du Gouverne- ment général lui rendent le séjour constant en Afrique peu salutaire.

f) Le choix du Gouverneur général sera plus facile si la résidence de ce haut fonctionnaire est fixée en Belgique.

341

Constitution plus rationnelle du Ministère des Colonies.

Le Ministère des Colonies est l'organe de la souveraineté de la Bel- gique sur son immense Colonie. Son rôle n'est pas d'assumer à lui seul la tâche répartie dans la Métropole entre plusieurs départements. Il est vrai de dire ici que le Ministre gouverne et n'administre pas. L'administra- tion est chose si différente du gouvernement proprement dit, que le Ministre n"abdiquerait rien en laissant à la Colonie et à ses provinces le soin de s'administrer elles-mêmes, sous son haut contrôle. En se débar- rassant de tous les services spéciaux, le Ministre des Colonies se grandi- rait et marquerait le caractère supérieur de sa fonction.

Le Cabinet du Ministre constituerait l'organisme unique du Ministère. Ses attributions seraient étendues à tout ce qui relève directement des fonctions ministérielles : contrôle général, orientation de la politique colo- niale, rapports avec le pouvoir législatif, conciliation des intérêts de la Mère Patrie et de ceux de sa Colonie, toutes questions qui dépassent l'ordre administratif et concernent l'exercice de la souveraineté de la Métropole.

La Justice coloniale qui relève directement du Ministre serait ratta- chée au Cabinet.

Réorganisation administrative de la Colonie.

La réorganisation proposée ne modifie pas l'armature générale de notre système colonial. Elle y applique trois principes :

a) Le principe de la représentation effective, mais discrète, des inté- rêts privés dans le gouvernement colonial. C'est ainsi que, aux degrés principaux de la hiérarchie, interviennent des Conseils réguliers: Conseil du Gouvernement général, Conseil provincial, Conseil du district.

Il est grand temps de modifier le caractère autocratique du gouverne- ment colonial. L'esprit de nos institutions nationales l'exige autant que la bonne conduite des affaires publiques. L'union fait la force au Congo comme en Belgique. L'administration ne gagne rien à s'isoler, à s'abs- traire, à se renfermer dans un compartiment étanche, d'où elle ne peut plus orienter la marche du navire.

La création de Communes dans les grands centres urbains semble prématurée. Mais il est indispensable que des agglomérations aussi importantes que Kinsahsa et Elisabethville ne soient pas livrées à l'arbi- traire administratif. La solution des Districts urbains, que l'on propose, semble offrir le double avantage de maintenir le cadre régulier de l'ad- ministration et d'assurer à ces centres une gestion convenable. D'ail-

342

leurs, tant que les centres importants ne sont pas dotés d'une organisa- tion propre, ils distraient trop l'attention des autorités de la Province et du District. Celles-ci perdent de vue les intérêts généraux de la région.

b) Le principe de l'adaptation des services administratifs aux besoins réels de la région.

La Colonie est très inégalement intéressante : son développement offre des aspects très variés. A vouloir tendre sur toute la Colonie un réseau administratif dont toutes les mailles sont identiques, on en arrive aune mauvaise distribution du travail. Voilà pourquoi une grande latitude est laissée au Gouverneur Général et aux Gouverneurs de provinces dans la composition et les attributions de leurs services.

c) Principe de la responsabilité effective.

Le mot de responsabilité, introduit dans le texte du règlement, ne suffit pas à rendre la chose effective. Le mot est énorme. Il appelle une définition, une sanction, une autorité chargée de statueren matière de responsabilité. Tout cela suppose un décret et ne rentre pas dans le cadre d'un projet administratif.

Telles sont les grandes lignes de cet essai.

Parmi les questions connexes à celles de l'organisations administra- tive, il en est deux qui paraissent réclamer une attention immédiate :

La revision du Statut des fonctionnaires et du décret de 19 iO sur les Chefferies indigènes. Le Conseil du Gouvernement pourrait avanta- geusement être chargé de présenter les projets de modifications néces- sitées par la réorganisation éventuelle.

La stabilisation des fonctionnaires territoriaux et la concordance du Statut de l'armée coloniale avec le Statut de l'armée métropolitaine offriraient de sérieux avantages et répondraient à des vœux légitimes.

2°) L'extension du pouvoir législatif du Conseil colonial et la modi- cation de sa composition.

Les Coloniaux d'Afrique sont lents à prendre la plume et à ex- primer leurs idées. Dans les circonstances graves de l'heure présente, le silence ne paraît plus permis. C'est un devoir de parler.

De jour en jour, une tranchée plus profonde se creuse entre la sphère administrative et le reste de la population européenne et indigène. Le mécontentement grandit à mesure que les erreurs s'ac- cumuleût. La confiance publique est ébranlée. Les intentions généreuses du Gouvernement métropolitain sont pleinement reconnues ; mais l'administration, en dépit de grands mérites personnels, est tenue pour

343

inférieure à sa tâche. Il est grand temps de se ressaisir. Il le faut pour l'honneur de la Belgique et pour le bien de la Colonie.

Les mesures proposées sont généralement admises par les coloniaux les plus avisés. Elles ont été soumises au jugement d'un haut magistrat, M. Robert de Meulemeester, Président du Tribunal d'Appel à Élisa- bethville. Le gouvernement colonial, débarassé de la cangue qui le paralyse, sera plus éclairé, plus souple et plus fort. Il sera ce qu'il doit être : non plus un figurant mal à l'aise et gênant sur la scène congolaise, mais le premier acteur conduisant le mouvement, soutenant sans en avoir l'ar, tous les rôles de second plan.

Le public congolais est trop occupé pour être frondeur. Il ne demande qu'à se soumettre à une autorité dans laquelle il lui sera permis de voir un soutien, un guide, un ferment de vie économique et morale.

La Mère-Patrie elle-même, confiante dans ses représentants attitrés, ne serait plus obligée de recourir à des « Missions spéciales » chaque fois qu'elle médite quelque beau projet. L'expérience a prouvé que ces missions spéciales sont un remède pire que le mal. L'échec a été régulier ; il est forcément inévitable.

L'organisme administratif lui-même doit être capable d'agir. S'il est bien constitué, il résoudra sans effort et très simplement les pro- blèmes qui de loin semblent inextricables. Les fluctuations déjà signa- lées du régime congolais en matière de politique indigène et de développement économique, trouveront leur équilibre naturel dans une solution appropriée aux différentes régions de la Colonie.

Le Gouvernement d'un pays neuf est chose assez simple à condition de ne pas s'obstiner à faire prévaloir des formules générales. Un cadre rigide et uniforme ne peut s'adapter à la vie africaine. Le bon sens est la première loi coloniale. Si notre projet ne pèche point contre cette loi, c'est beaucoup : c'est assez pour lui permettre d'espérer trouver quelque prise en considération.

De Hemptinne.

Élisabethville, le 1er mai 1920.

Suit un projet d'arrêté royal condensant en « articles » ces diffé- rentes observations.

Ce projet peut paraître séduisant à première vue et en théorie. Dans la pratique, il se heurte à de grosses difficultés. Si, d'une paît, il ren- force l'autonomie des provinces et esquisse l'idée d'une « Fédération d'États congolais », il ramène, d'autre part, la centralisation à outrance dont on s'écarte depuis I9I4. Car transporterie Gouverneur générai avec ses bureaux à Bruxelles, c'est tout simplement rétablir dans la capi-

344

taie l'administration principale de la Colonie. Ce n'est pas de cette façon qu'il faut procéder, croyons-nous. 11 faut laisser aux réformes introduites le temps de sortir leurs effets.

Rien n'est plus nuisible à la bonne administration d'une colonie que les changements continuels.

Dans l'esprit du législateur, la décentralisation à Borna devait suivre celle qui a eu lieu à Bruxelles.

Agissons en ce sens et laissons le Gouverneur à Borna.

L'exposition coloniale d'Anvers.

M. Jean Pauwels, Directeur de la Tribune Congolaise, consacre à l'exposition coloniale d'Anvers un numéro spécial qui contient les rubriques suivantes : Deux augustes figures (Léopold II et Albert Ier), une esquisse historique du Congo belge, une liste des principales matières premières du Congo, un aperçu d'ensemble de l'exposition et une description des principaux stands. (Chasse et pêche, Compagnie belge maritime du Congo, Lloyd royal belge, Compagnie Cotonnière congolaise, Association des Planteurs de Caoutchouc, Firme Osterrielh et C°, Comité spécial du Katanga, Société anonyme Bunje, Société Coloniale Anversoise, Compagnie auxiliaire des transports internationaux, Willaert Frères, Société Géomines, G. et C. Kreglinger, Banque du Congo belge, Omnium Africain, Belgica (Comptoir Colonial), Société Commerciale et Minière du Congo, Société Coloniale de Constructions, Union Minière du Haut- Katanga, Compagnie du Chemin de fer du Bas-Congo au Katanga, Société Internationale Forestière et Minière du Congo, Compagnie du Congo belge, Société Commerciale et Financière Africaine, Société Anonyme des Huileries du Congo, Société d'entreprises commerciaies au Congo beige, Compagnie du Kasai).

QUESTIONS ÉCONOMIQUES.

L'exploitation du palmier à huile en Afrique occidentale .

(Extrait de la Revue des Produits chimiques, du 51 mars 11)20.)

L'Institut colonial de Marseille a tenu, le 50 janvier, sous la présidence de M. F. Bohn, une séance intéressante au cours de laquelle ks mesures à prendre en vue du développement de l'exploitation du palmier à huile, en

345

Afrique occidentale, ont été examinées. Cette question a déjà été l'objet, de la part de cet institut, d'études approfondies, dont les résultats ont été publiés dans son Bulletin des matières grasses, ainsi que dans l'ouvrage que MM. E. Baillaud, secrétaire général et A. Stieltyès, chef du service des études industrielles de cet institut, ont consacré aux amandes et huiles de palme. ,

Au cours de cette réunion, M. G. Van Pelt, docteur ès-sciences de l'In- stitut colonial de Marseille, envoyé en mission en Afrique occidentale, au cours de l'année 1919, avec le concours de la Compagnie française de l'Afrique occidentale et de la Société commerciale de l'Ouest africain, a exposé le résultat de ses opérations, en ce qui concerne l'exploitation du palmier à huile, et il a examiné cette queslion en utilisant la profonde expérience des cultures tropicales qu'il a acquise dans les plantations de Malaisie.

Les observations qu'il a faites pendant son séjour à la Côte d'Ivoire, l'ont amené à conclure que, contrairement à ce que l'on est porté à penser, l'aménagement des palmeraies existantes non seulement donnerait des résultats moins intéressants que les plantations régulières, mais encore, serait plus coûteux à organiser et à entretenir.

M. Van Pelt préconise nettement la création des plantations dans les régions forestières il n'existe pas de peuplement de palmiers à huile, ce qui évitera toutes difficultés avec les indigènes.

Au cours de sa mission, il a pu, avec le concours de M. Teissonnier, directeur des Services agricoles de la Côte d'Ivoire, commencer un travail de sélection de graines qui sera des plus utiles pour la création des planta- tions.

L'Institut colonial a, d'autre part, pris toutes les dispositions nécessaires pour que ces travaux de sélections soient poursuivis parallèlement dans une des principales plantations de Sumatra, de manière à ce que l'Afrique occidentale puisse bénéficier de l'admirable organisation scientifique dont disposent les planteurs de ce pays.

La collaboration des entreprises qui se consacreront à la culture du pal- mier à huile en Afrique occidentale avec les plantations de Malaisie, paraît d'ailleurs à l'Institut colonial, nettement à recommander, et constitue peut-être le moyen le plus simple de faire bénéficier nos colonies africai- nes de l'expérience acquise en Extrême-Orient.

Les indications fournies par M. Van Pelt ont été complétées dans la

même réunion par une communication très intéressante faite par M. Houard,

directeur des Services de l'agriculture du Dahomey, qui a bien voulu venir

exposer devant l'Institut colonial les conditions particulières au Dahomey.

Les conclusions que M. Houard a rapportées de l'enquête approfondie

346

à laquelle il s'est livré au cours de son très long séjour au Dahomey, diffèrent sensiblement de celles auxquelles s'est arrêté M. Van Pelt pour la Côte d'Ivoire, ce dernier n'ayant pas eu le temps de poursuivre sa mission jusqu'au Dahomey.

M. Houard pense, ainsi qu'il l'a indiqué dans l'étude qu'a publiée le Bulletin des Matières yrasses de V Institut Colonial dans son numéro 5, 1910, que les peuplements de palmiers sont assez bien cultivés au Dahomey pour qu'il soit possible de les exploiter par de petites usines centrales d'une capacité ne dépassant pas 10 tonnes de fruits par jour pen- dant huit mois. Les eslimations auxquelles il s'est livré lui ont permis de conclure que cette introduction des procédés mécaniques permettrait de aire rapidement passer la production annuelle du Dahomey en huile de palme de 12,000 à 50,000 tonnes.

Ces usines pourraient s'alimenter, pense M. Houard, par simples achats des fruits aux indigènes que ceux-ci n'auraient pas à transporter plus loin qu'il n'ont à le faire actuellement pour parvenir aux points ils trouvent l'eau nécessaire à l'extraction de l'huile de palme par leurs procédés.

MM. Van Pelt et Houard sont d'accord pour estimer que l'on peut con- sidérer la queslion de la machinerie comme résolue à la suite des travaux de M. l'ingénieur Trevor, qui a inventé non seulement une remarquable machine pour le dépulpage, mais encore qui a mis au point la série des procédés nécessairss pour la séparation des fruits du régime, leur stérili- sation, le concassage, le triage et le séchage. Ces appareils combinés avec les procédés de MM, Félix Fournier et C°, de Marseille, qui ont été les pionniers du traitement mécanique du palmier à l'huile, sont susceptibles dès maintenant de donner toute satisfaction.

Des perfectionnements de détail, comme par exemple l'emploi des dis- solvants, viendront probablement compléter ces systèmes qui diffèrent entièrement du procédé à l'eau, qu'avaient appliqués les Allemands, mais dès maintenant les plantations, ainsi que les usines fonctionnant simple- ment par achat, sont à même d'être dotées du matériel nécessaire par l'application de ces systèmes, indépendamment du très grand nombre d'autres appareils qui ont été étudiés dans les publications spéciales de l'Institut Colonial de Marseille.

Cet Institut a ainsi contribué à préciser la manière dont se pose le pro- blème de l'exploitation du palmier à huile et l'action qu'il se propose de continuer à exercer à ce point de vue doit avoir principalement pour but de provoquer et de seconder la constitution des entreprises qui se livreront à cette exploitation dans les colonies françaises. En même temps ses inves- tigations porteront sur l'étude des questions techniques relatives aux ren- dements des diverses variétés d'hevéa à cultiver et des méthodes de pré- paration à adopter définitivement.

347

Le Katanga pendant la guerre.

Nous extrayons du Rapport du Comité spécial du Katanga sur ses opérations pendant la guerre, les indications intéressantes qui suivent :

I. Chemins de fer.

En 1918, la ligne de chemin de fer du Katanga a atteint le Lualaba.

Lorsque l'Union Minière du Haut-Katanga fut constituée à la fin de 1906, ses concessions minières se trouvaient à plus de 500 kilomètres du ter- minus du chemin de fer le plus proche. D'heureux arrangements conclus par l'État Indépendant du Congo et la Compagnie du chemin de fer du Bas-Congo au Katanga avec M. Robert Williams et les chemins de fer de la Rhodésie et du Mashonaland assurèrent la construction de la jonction du Mashonaland Railway avec la frontière sud du Katanga. En 1908, cette frontière fut atteinte; en 1909, la voie passe à Elisabethville (255 kilomètres) et au-delà.

La guerre n'interrompit les travaux que pendant une assez courte durée. Ils furent repris en 1916 et poussés activement jusqu'à Bukama sur leLualaba qui fut atteint en 1918. La ligne a unelongeur totale d'environ 750 kilomètres en territoire congolais. Plusieurs embranchements ont élé construits pour desservir les mines d'Étoile du Congo, de Likasi, etc.

Le Gouvernement vient de décider de prolonger ce chemin de fer jusqu'à Kiabo (80 kilomètres environ), point sur le Lualaba accessible en toute saison aux navires de la Compagnie des Grands Lacs.

On va également mettre la main à la construction du chemin de fer vers les mines du Sud-Ouest (Ruwe). Cette voie formera le premier tronçon, en territoire belge, de la grande ligne Bengwela-Katanga.

Dans le Bas-Kantaga, le chemin de fer Lualaba-Tanganika a été égale- ment achevé pendant la guerre.

Dès maintenant le Katanga possède donc un réseau de voies navi- gables et ferrées qui le mettent en communication avec l'Ouest avec Matadi, vers l'Est avec Dar-es-Salam, et vers le Sud-Est et le Sud avec Beira et Capetown.

IL Ventes et locations de terres.

A. Terrains urbains et suburbains.

Le mouvement des opérations de vente et de location de terres a suivi une progression constante, ainsi qu'on peut le constater en examinant le le graphique joint au présent rapport.

348

Le tableau ci-après donne le résultat financier de ces opérations durant les trois dernières années :

1916. 1917. 1918.

Ventes de terrains 23,884.79 26,619.00 111,829.27

Locations . . . 125,992.77 147,987.38 139,412.72

Coupes de bois. . 85,236.31 146,851.06 174,444,96

Fr. 235,413.87 321,457.44 425,686 95

Il résulte de ce tableau que les ventes de terrains il s'agit pres- qu'exclusivement de terrains à bâtir dans les villes ont pris une marche ascendante rapide tandis que le mouvement des locations s'est plutôt ralenti. Alors que peu après la création d'Elisabethville, dès que se fut calmée la spéculation qui marqua les premières adjudications de terrains, le bail était devenu le mode presque exclusif de l'occupation des emplacements à bâtir, c'est actuellement la vente qui tend de plus en plus à devenir la règle. Il faut voir dans ce fait l'affirmation de la confiance des habitants du Katanga dans l'avenir de cette belle province.

Une autre conclusion est à tirer des chiffres ci-dessus, c'est l'augmen- tation subie par les revenus des coupes de bois. Les difficultés de trans- port résultant de la guerre et l'augmentation des prix des matières premières a obligé les consommateurs à tirer parti des ressources du pays. En vue de maintenir et de développer ce mouvement favorable, le Comité a décidé d'organiser un service forestier qui veillera à l'exploita- tion rationnelle des forêts. 11 s'occupera en même temps du défrichement des terrains propres à la culture et de leur mise en état de préparation convenable pour être offerte aux colons.

B. Terres rurales.

Les terres rurales pour cultures ne sont pas concédées directement à titre définitif. Le Comité exige un stage. Il accorde d'abord aux colons un droit d'occupation provisoire pour cinq années avec obligation d'exécuter certains travaux marquant l'occupation. Ce n'est qu'à l'expiration de ce terme et après l'exécution de ces obligations que les colons peuvent ache- ter ou louer à long terme le terrain occupé.

Les terres rurales sont réparties en trois classes suivant, leur situation par rapport aux centres de population, aux chemins de fer et voies navi- gables. Dans le but d'encourager l'établissement de cultures vivrières et de fermes, elles sont vendues ou louées à des prix très bas et variant suivant la catégorie à laquelle elles appartiennent.

Malgré cela, 37,000 hectares seulement ont été jusqu'ici concédés à

449

titre d'occupation provisoire. Sur ce chiffre, 7,000 hectares ont été cédés en toute propriété aux occupants, après exécution des conditions d'occu- pation.

La location des terrains destinés à l'établissement de factoreries en dehors des agglomérations urbaines marque un mouvement nettement décroissant depuis 1917. On l'attribue à l'arrêt presque complet des achats de caoutchouc, causé par la baisse sur les marchés d'Europe du caoutchouc de forêt.

Cependant, depuis l'achèvement du rail jusqu'à Bukama, il s'est créé un mouvement commercial assez important du Bas-Katanga et même de la Province orientale vers le sud du Katanga; on transporte du riz, de l'huile de palme et des noix palmistes, du manioc, du café, etc. Malheu- reusement, la navigation sur le bief de Bukama à Kiabo est difficile aux eaux basses. Le gouvernement ayant décidé de poursuivre le rail jusqu'à Kiabo, nul doute que l'exécution de ce travail, qui sera entrepris inces- samment, imprimera un nouveau mouvement ascendant à ce trafic inté- ressant.

III. Mines.

En moins de douze ans, la société a été créée fin 1906, il a été installé en plein Katanga une puissante usine métallurgique, capable de produire annuellement 40,000 tonnes de cuivre. Ajoutons que de juin 1918 à juin 1919 (période de travail qui n'est pas la meilleure qu'ait traversé cette entreprise), l'usine a employé 157,000 tonnes de minerai de cuivre, 80,000 tonnes de minerai de fer, 61,000 tonnes de dolomie et 70,000 tonnes de coke.

Les mines de cuivre à Kambove, Etoile du Congo, Likasi, Ruashi et Chituru sont en pleine exploitation. Les mines de cuivre de Kakande, Fungurume, Sesa, Luisha, Kamwheli et Luishi sont en préparation et fourniront prochainement leur contingent à la fonderie. La société tire son fondât des mines de Kasumbelesa (fer) et de l'Etoile (dolomie). Son cal- caire provient de la carrière de Kakontwe. Une usine de concentration pour le triage des minerais est en construction à Lubanda,à proximité des mines de cuivre de Likasi et de Chituru.

La production du cuivre, qui était de 7,407 tonnes en 1913, a atteint 27,000 tonnes en 1917. Diverses circonstances exposées dans le rapport ci-annexé ont réduit la production à 20,000 tonnes en 1918, mais elle tend à reprendre son niveau de 1917.

Le prix de revient du cuivre aux usines est de 1,000 à 1,200 francs la tonne, non compris les frais généraux et les amortissements.

La Société est entrée dans l'ère des dividendes. Les résultats de ses

350

bilans de guerre ont permis de distribuer un dividende de I 50 francs par action.

L'usine et les mines occupent environ 45,000 ouvriers indigènes.

Tel se présente, en bref résumé, le brillant tableau de douze années d'activité et d'efforts déployés au cœur même de l'Afrique, par une entre- prise constituée par le Comité spécial, avec le concours de M. Robert William et de la Société Générale de Belgique, en 1906, à une époque le Katanga était une région à peu près déserte, éloignée de 500 à 600 kilomètres de toute voie ferrée. Le Comité spécial apprécie les résul- tats acquis par l'Union Minière et ses collaborateurs, sous la haute direc- tion de M. Jean Jadot, et il se plaît à reconnaître ieur effort incessant et la confiance persistante avec laquelle ils se sont attachés à résoudre les problèmes multiples et ardus que posait la mise en œuvre de cette affaire, toute nouveile pour nos industriels et nos ingénieurs.

Durant la période de guerre, les recherches minières proprement dites ont marqué un arrêt presque complet. Aucun nouveau bloc n'a été délimité durant les exercices sous revue. Cependant deux sociétés, la Société Géologique et Minière des Ingénieurs et Industriels belges (Géomines) et laSociété Belge Industrielle et Minière du Katanga (Simkat) ont poursuivi le développement des blocs délimités avant la guerre. L'une d'elles, la Géomines, a même commencé l'exploitation de gisements d'étain.

La Géomines a communiqué au Comité d'importants rapports concer- nant principalement les travaux de développement exécutés dans ses blocs de Lukushi et de Kikondja, situés sur les deux rives du Lualaba.

La société y a reconnu, par des travaux méthodiques, des gisements de cassiténte dont l'étendue et la teneur justifient ieur mise en exploitation. En 1916, la société a été autorisée à mettre ses gisements en exploitation provisoire en attendant la fin de la guerre.

Un matériel d'exploitation rudimentaire a été installé pendant la guerre et le travail d'exploitation a été organisé. Au moment de l'armistice, plusieurs centaines de tonnes de cassitérite (70 à 75 p. c. d'étain) avaient déjà été extraites et exportées. Les résultats de l'exploitation confirment au point de vue du rendement en minerais utiles les données fournies par les travaux préalables de reconnaissance exécutés par les ingénieurs de la Société.

La Géomines a également poursuivi la reconnaissance du bassin char- bonnier de la Lukuga. Un peu avant la guerre, elle a chargé un spécia-

351

liste, M. Fourmarier, ingénieur principal au corps des mines et chargé de coursa l'Université de Liège, de l'étude géologique de ses découvertes de charbons. M. Fourmarier a fait paraître en 1916 un rapport important sur le résultats de ses études. D'une manière générale, ce rapport con- firme les travaux antérieurs des ingénieurs de la Société.

La Simkat a exécuté des travaux intéressants pendant la guerre. Elle a notamment continué l'exploitation du gisement d'étain deMuika, qui est maintenant le siège d'une petite exploitation.

Elle a exploré les nombreux pipes de terres à diamants qu'elle avait découverts en 1913, dans la région des Kundelugu.

Ces essais ont démontré que le diamant existe dans la plupart des pipes, mais en proportion trop faible pour en permettre l'exploitation. Une étude plus complète en sera faite ultérieurement.

Le Comité a conclu, le 25 juillet 1919, avec un groupe représenté par la Société Générale de Belgique, une convention aux termes de laquelle ce groupe, qui comprend le groupe américain intéressé dans la Société internationale forestière et minière du Congo (Forminière) obtient le droit de rechercher le diamant dans toute l'étendue du Katanga.

* * *

Un décret du 19 avril 1919 apportée l'ancienne législation quelques modifications. L'article 61 détermine comme suit les conditions aux- quelles sont soumises les sociétés d'exploitation des mines :

a) L'objet de la Société sera limité à l'exploitation des mines, au trai- tement des minerais, et aux opérations accessoires;

b) la Société n'exploitera que la mine faisant l'objet du permis et celles dont l'exploitation lui serait ultérieurement accordée, soit par de nou- veaux permis d'exploitation, soit en vertu de conventions spéciales con- clues avec le Comité;

c) le capital effectivement souscrit sera suffisant pour assurer la réali- sation de l'objet social ;

d) sans l'assentiment du Comité spécial, la Société ne pourra faire aucune émission d'obligations, ni contracter aucune det'e dont la charge annuelle excéderait 7 % des sommes effectivement reçues par elle. Cette charge s'entend des intérêts, des primes de remboursement et de tous autres bénéfices accordés soit aux obligations, soit aux banquiers ou autres intermédiaires chargés de l'émission ;

e) un délégué nommé par le Comité spécial aura sur les opérations de la Société tous les droits de contrôle et de surveillance qui appartiennent aux administrateurs; il sera notamment convoqué à toutes les réunions

352

du Conseil d'administration et du collège des commissaires; aura voix consultative, recevra copie des procès-verbaux des séances et toutes les communications adressées aux administrateurs ou aux commissaires. Ce délégué aura droit à une indemnité ou à des jetons de présence qui seront fixés d'accord avec le Comité spécial;

f) chaque année, dans le mois qui suivra l'approbation du bilan par l'assemblée générale, la Société paiera au Comité spécial dans les bureaux que celui-ci désignera, une part des bénéfices à distribuer en vertu du dit bilan ; cette part sera calculée sur les bases suivantes;

Si la Société a pour objet, soit exclusivement, soit en partie, l'ex- ploitation des diamants ou de pierres précieuses, le Comité spécial rece- vra une participation égale à 12 % des bénéfices lorsqu'ils ne dépassent pas 7 °/o du capital social; 20% des dits bénéfices qui excèdent 7 % jusqu'à concurrence de 40 •/<> du capital social ; 25 % des dits bénéfices qui excèdent 10 % jusqu'à concurrence de 15 % du capital social; 40 °/0 des dits bénéfices qui excédent 15 °/0 jusqu'à concurrence de 35 °/„ du capital social, 60 °/0 des dits bénéfices qui excèdent 55 % du capital social ;

Si la Société a pour objet soit l'exploitation de gisements miniers autres que des gisements de diamants ou de pierres précieuses, soit sim- plement le traitement métallurgique ou autre des substances extraites dans le territoire déterminé à l'article premier, le Comité spécial recevra les mêmes quotes-parts de bénéfices que celles indiquées ci-dessus, sau qu'il ne recevra que 50% des bénéfices qui excèdent 35 % du capital social ;

g) le Comité spécial aura le droit de souscrire 20 % du capital et de toute augmentation de capital. Il ne peut céder ce droit si ce n'est au Gouvernement du Congo belge ;

h) si les bénéfices à distribuer en vertu du bilan n'excèdent pas7%du capital social, les administrateurs et commissaires ne pourront recevoir que des allocations fixes, dont le montant aura été déterminé par les statuts;

i) en cas de liquidation de la Société, le Comité spécial aura droit, sur le reliquat de l'actif après apurement des dettes et remboursement, à leur valeur nominale, des actions de capital non amorties, à une part qui sera calculée sur les mêmes bases que sa part dans les bénéfices distri- bués après chaque bilan.

Si l'exploitant est un particulier, il est suumis à des conditions analo- gues en ce qui concerne les redevances (art. 63).

Il est à remarquer que le Comité participe tant aux bénéfices de l'ex- ploitation des mines, qu'à ceux du traitement des minerais. En cette

353

matière le décret contient même une innovation assez originale, justifiée par les circonstances. Elle crée un permis de traitement délivré par le Comité spécial. Celui-ci a, dans les sociétés qui ont pour objet spécial le traitement du minerai extrait des mines concédées, la même participa- tion que dans les sociétés d'exploitation des mines.

Le nouveau décret supprime donc la redevance de 1 °/0 et de 5 °/o sur le produit brut des mines, et il remplace la remise au Comité spécial de 33 °/o des actions des sociétés, par la redevance proportionnelle et pro- gressive, telle qu'elle est libellée ci-dessus. Il en résulte que la part des bénéfices du Comité se trouve réduite tant que les bénéfices des sociétés exploitantes n'atteignent pas environ 40 °/0 du capital social, mais au- delà, la part du Comité est portée jusqu'à 50 ou 60 °]0 suivant qu'il s'agit de métaux ou de pierres précieuses.

Une disposition transitoire autorise les titulaires d'un permis spécial de recherches minières antérieur à la promulgation du décret, à placer leur entreprise sous le nouveau régime minier.

Le décret ne fait pas mention à ce point de vue du cas des sociétés concessionnaires par convention. Il a cependant été examiné au cours des travaux préparatoires, et il a été admis que celles-ci peuvent être soumises aux nouvelles conditions d'exploitation par convention approu- vée par le pouvoir législatif de la Colonie.

Cette question est actuellement à l'examen, toutes les sociétés intéres- sées ayant demandé à passer sous le nouveau régime.

Le Comité spécial ne peut que se féliciter de la solution donnée à la question des redevances minières. Elle donne satisfaction, dans une large mesure, aux revendications des intéressés, en supprimant l'obsta- cle que pouvait rencontrer la mise en valeur des gisements de richesse et d'importance moyenne et elle lui accorde dédommagement, dans une mesure toute aussi large, en augmentant sa part dans les affaires à grand rendement.

IV. Service cartographique et géologique du katanga.

Le Comité spécial du Katanga vient de créer un service cartogra- phique et géologique. Ce service répond à deux nécessités.

La première est de posséder pour les besoins du cadastre, de l'admi- nistration des mines et des terres des bases topographiques, avec une précision qui ne puisse prêter à aucune discussion.

La seconde est d'avoir une carte générale, topographique et géologique du Katanga et de mettre à la disposition du public une documentation générale sur toutes ces matières.

354

Les données géographiques que nous possédons actuellement à l'inté- rieur du Katanga sont de nature trop précaire et -trop incomplètes, pour que l'on puisse songer à exécuter méthodiquement les conventions et la législation minière. Il faut notamment, pour écarter les contesta- tions, que les cercles et les concessions diverses puissent être reportés sur un graphique unique afin d'éviter des superpositions ou la confusion des limites.

Il faut également que sans crainte de discussions, il soit possible de faire tracer sur le terrain les limites des concessions accordées. Cela ne peut se faire qu'en assurant aux travaux cadastraux une base précise et dont on doit connaître le degré de précision.

D'un autre côté, le développement économique du Katanga demande qu'un inventaire géologique systématiqne en soit fait, que non seulement la nature du sous-sol soit étudiée, mais encore que les terrains superfi- ciels soient examinés.

C'est le meilleur moyen d'arriver à guider les initiatives et à déve- lopper le domaine géré par le Comité.

Enfin, si nous voulons assurer d'une manière rationnelle l'étude de nos voies de communication, de la répartition des populations, de la végéta- tion, des ressources en eau, des possibilités d'immigration et d'utilisation des forces hydrauliques etc., si nous voulons, en résumé, résoudre les problèmes économiques la notion de lieu joue son rôle, il est indispen- sable de relever dans ses détails la topographie du pays, en ayant soin d'y comprendre un nivellement d'allure générale.

Le Comité publiera les résultats de ses travaux et mettra à la disposi- tion de tous ceux que la chose intéresse, les renseignements capables de guider efficacement les agriculteurs, les prospecteurs, les savants.

VOIES DE COMMUNICATIONS.

La Belgique coloniale,

M. le colonel Moulaert indique la marche à suivre pour mettre en valeur notre empire colonial. (Extraits de la Belgique coloniale, commer- ciale, financière, industrielle, maritime, sociale, publiée par la Société belge d'études et d'expansion, 1920.)

Le Congo peut et doit être pour la Belgique :

Un fournisseur de matières premières nécessaires à nos industries métropolitaines ;

355

Un consommateur de produits manufacturés dans nos usines;

La base de notre expansion commerciale en Afrique.

Ce programme colonial exige la féconde et intime collaboration de la Colonie et de la Métropole.

La Colonie doit créer l'atmosphère favorable aux affaires, au dévelop- pement commercial et industriel :

Directement par sa politique de voies de communications, par les essais agricoles, les recherches et prospections;

Indirectement par une sage et prévoyante administration, par une législation appropriée aux conditions locales.

La Belgique, de son côté, doit remplir ce cadre. Elle fournira les hommes, les capitaux, l'organisation commerciale et financière.

La Belgique et le Congo seront les bénéficiaires de cette politique colo- niale inspirée des plus hauts intérêts.

La restauration de la Belgique et la prospérité du Congo sont intime- ment liées.

Le Congo ne peut baser son développement que sur une Belgique finan- cièrement forte; et la Belgique, pour redevenir une grande puissance économique mondiale, est obligée de provoquer au Congo une production croissante.

Ce n'est que si le Congo est un grand fournisseur qu'il pourra être un puissant consommateur et aider le commerce belge à pénétrer les autres colonies africaines.

Tout se ramène en ordre principal au problème de la production.

La production est conditionnée directement :

Par la population indigène;

Par les moyens de transports;

Par les initiatives gouvernementales;

Par l'investissement de capitaux métropolitains.

Nous devons nous inspirer de ses essais; ils nous faut, d'abord par district, au chef-lieu, une école primaire et professionnelle pour former et éduquer les populations urbaines. C'est le premier pas. Les écoles des missions catholiques et protestantes seraient de plus subsidiées sous condition d'adopter un programme et de se soumettre au contrôle de l'inspection de l'enseignement. L'enseignement doit, avant tout, être pratique, c'est-à-dire professionnel. Il faut former des artisans et non des primaires déclassés.

Qu'on ne l'oublie pas la grande, la principale richesse d'une colonie

356

tropicale est sa population indigène, mais une population nombreuse, saine, forte et éduquée par le travail.

Moyens de transports. Dans un pays de 2,300,000 kilomètres carrés, largement arrosé, les possibilités sont immenses. Mais les réali- sations sont limitées aux conditions de transport.

L'indigène produit, le commerçant achète et conditionne, l'industriel fabrique, mais il importe avant tout que les produits puissent être valo- risés, c'est-à-dire qu'ils arrivent au port maritime d'exportation en bonnes conditions d'état et de prix.

Le Congo Belge a, certes, le précieux avantage d'un magnifique réseau navigable, mais la concentration de ce réseau se fait au Stanley Pool, à 400 kilomètres du port deMatadi et à 500 kilomètres de l'estuaire mari- time.

Les possibilités de production du Congo belge (équatorial) dépendent de la capacité et des conditions de transport du chemin de fer du Congo.

Pour un hinterland équatorial de i, 500, 000 kilomètres carrés, la capa- cité de transport d'exportation n'atteint actuellement que 85,000 tonnes et les flottille fluviales ne peuvent d'ailleurs amener à Kinshasa qu'environ 70,000 tonnes.

L'effort doit donc porter tant sur le développement des transports flu- viaux que ferrés.

Dans les transports fluviaux, la flotille des affluents du Congo doit avoir sa capacité quadruplée; non seulement des stocks considérables de produits s'accumulent dans les magasins des rivières, mais de nombreux cours d'eau navigables ne sont pas desservis.

Le réseau navigable doit être aménagé et les hauts cours des rivières nettoyés des obstacles qui les encombrent (troncs d'arbres). L'installation d'un service à vapeur sur une rivière, c'est l'ouverture d'une nouvelle région à la grande production. Des ports fluviaux outillés doivent être construits aux principales escales et tout particulièrement à Kinshasa qui concentre toute l'exportation et l'importation du Congo équatorial.

Le gouvernement vient de constituer la « Société Nationale des Trans- ports Fluviaux » afin de doter la marine du Haut Congo d'un organisme d'exploitation nettement industriel. Cette société, associant les compa- gnies commerciales et le gouvernement dans une féconde collaboration, permettra la réalisation, dans le plus bref délai, et dansles meilleures conditions, d'un vaste programme de constructions navales et d'installa- tions de transbordements.

Quand au chemin de fer du Congo, une mission vient de partir pour Matadi, pour piqueter sur le terrain, le tracé d'une voie nouvelle ayant les caractéristiques des grands chemins de fer africains.

357

Actuellement, l'unité-train est de 50 tonnes utiles; nous devons arri- ver à l'unité-train de 200 tonnes. Provisoirement vu le coût des maté- riaux — l'écartement de 0^75 est maintenu.

Mais il ne suffit pas de construire une voie ferrée économique et de grande capacité, il importe, pour écouler un gros trafic, que cette voie ferrée eoit soudée convenablement d'un côté aux services mari- times, d'un autre côté aux services fluviaux. 11 faut donc à Kinshasa entrepôt commercial du Congo équatorial un port moderne de 500 mè- tres de développement, avec extensions possibles à 1,000 mètres, large- ment outillé et bien aménagé.

Quant au port maritime, la question est plus complexe et n'est pas résolue.

Il ne s'agit pas seulement de construire un bon chemin de fer écono- mique et à grande capacité, il s'agit avant tout de relier le port fluvial, concentrant la production du Congo, à un port maritime.

Si le port maritime est médiocre ou mauvais, à quoi peut servir le perfectionnement de la voie ferrée. Le port maritime doit être d'accès facile en toutes saisons pour les types ordinaires de vapeurs (cargos et paquebots). De plus, le port doit permettre l'extension continue des installations.

Matadi notre port actuel ne répond pas à ces conditions. 11 est situé en amont des obstacles constitués par les bancs de sable et le cou- rant du Chaudron d'Enfer; il ne se prête nullement aux développements.

Matadi, port de début, est actuellement aussi désuet que le chemin de fer du Congo.

Le terminus maritime du Congo doit se trouver dans l'estuaire du Congo, tous les vapeurs et les les voiliers ont un accès facile en tout temps et les terrains permettent une extension indéfinie des instal- lations.

Le point qui est le plus intéressant est Kissanga, ancien poste com- mercial en face du poste belge de Mateba.

Des pourparlers avec nos voisins portugais devraient mettre cette question au point. Indépendamment de notre chemin de fer primordial du Congo du Stanley-Pool à l'Océan et du développement de notre marine fluviale du Haut-Congo, nous devons aborder résolument l'en- semble de notre programme de voies de communications.

Participation belge a la mise en valeur du Congo par l 'investissement des capitaux.

La Colonie peut devenir un grand producteur de matières premières. Mais il importe que celles-ci viennent sur le marché métropolitain, ali- menter les industries belges.

358

Il faut donc que l'industrie et le commerce belge fournissent à la Colo- nie, les hommes et les capitaux nécessaires pour diriger la production vers Anvers.

Le Ministre des Colonies a attiré l'attention du pays sur l'insuffisance de sa participation. Sur 6,266 Européens, il n'y a que 3,268 Belges. Si on déduit les fonctionnaires et missionnaires il y a environ 1,500 Beiges commerçants contre 2,500 étrangers. Il y a trop peu de Belges; il y a trop peu de capitaux belges; or, le commerce d'importation et d'expor- tation suit le capital.

Avant la guerre, l'emprise allemande qui englobait toute l'Afrique, menaçait le Congo. Actuellement, à l'emprise allemande a succédé l'em- prise anglaise. Cette emprise a été singulièrement aidée par les circon- stances de la guerre qui ont coupé nos firmes belges de leur base de crédit, mais aussi par un large esprit de prévoyance, de persévérance et de continuité.

Les usines de la firme Lever ont produit en 1916, 2,735 tonnes d'huile, en 1918, 4,554 tonnes.

De nombreuses sociétés anglaises s'installent dans la colonie; et envi- ron les trois quarts de notre exportation via Matadi, surtout les oléagi- neux, sont contrôlés par les Anglais.

Liverpool tente le drainage des matières grasses de l'Afrique occiden- tale et veut supplanter Hambourg.

La lutte pour les matières premières une des formes de la lutte pour la vie est ouverte ; la Belgique doit faire les efforts nécessaires pour éviter que les commerçants et les industriels belges ne se fassent battre sur leur propre territoire. Les conventions internationales nous interdisent tout droit préférentiel, tant à l'importation qu'à l'exporta- tion. Nous ne pouvons donc compter que sur nous-mêmes.

Les dures leçons que la Belgique a subies depuis un an l'ont rendue sceptique sur la valeur des promesses et lui ont donné une opinion suffi- samment décevante des services à attendre d'autrui, mêmes des amis et alliés, pour qu'elle ne compte désormais que sur sa ténacité, son ingénio- sité et son propre travail. Ce peuple de travailleurs infatigables, de har- dis financiers, et d'ingénieux industriels ne peut se laisser battre chez lui.

L'avenir de la Belgique se conditionnera en Afrique dans les terres vierges et fécondes qui doivent fournir les matières premières pour nos industries.

La Colonie étudie le programme de la production, prépare les voies ; à la Belgique de semer, et de venir recueuillir les fruits.

Le véritable vainqueur sera, non pas celui qui aura le moins souffert,

359

mais celui qui pansera le plus vite ses blessures et qui, grâce à sa méthode, à son énergie, sera prêt le premier à reprendre la lutte écono- mique sur les marchés du monde.

Nous l'avons compris en Belgique; nous devons le comprendre dans la Colonie. x

Nous devons comprendre que nos industries sont fondées sur le sable mouvant des marchés étrangers, aussi longtemps que nous n'avons pas acquis la maîtrise des matières premières; il ne dépend que de nous d'acquérir ce contrôle, en organisant nous-mêmes, par nos capitaux, notre ingéniosité el notre travail, la mise en valeur de notre vaste et inépuisable domaine belge d'Afrique.

La guerre a montré cruellement que la méthode et la discipline sont les premières conditions du succès.

Certes, le groupement des efforts répugne à notre tempérament indi- vidualiste épris d'indépendance. Mais l'heure est venue de choisir entre ce qui nous est cher et ce qui nous est indispensable.

Rien ne se fait de grand, de durable, sans les concentrations discipli- nées, sans l'union persévérante des forces.

Notre grand Roi, le conducteur du peuple belge, s'affirmait dans son discours du trône de 1918, comme le premier et le plus clairvoyant des coloniaux, et, tout récemment, à Washington^ il affirmait sa foi robuste et inébranlable dans la renaissance de la Belgique, renaissance basée sur l'empire congolais.

La Télégraphie sans fil au Congo Belge.

(Analyse publiée par le Mouvement géographique.)

Dans un livre qui vient de paraître, M. Robert Goldschmidt expose, en collaboration avec M. Raymond Braillard, l'installation et le fonc- tionnement de la télégraphie sans fil dans notre colonie, elle pût être établie grâce à l'appui moral et financier du Roi Albert.

Les deux auteurs sont particulièrement qualifiés pour traiter ce sujet, car M. Goldschmidt, chargé de cette mission par le Roi, préside à l'étude et à l'installation du réseau congolais, qui fut construit notam- ment sous la direction du Major Wibier et de MM. Brai flard et Jamotte.

Les premiers essais au Congo furent tentés par M. De Bremaeker, en 1902. Pour des motifs techniques, ils ne réussirent pas, malgré la science et le dévouement de M. De Bremaeker.

Au début de 1911, il fût procédé à de nouveaux essais, très satis- faisants cette fois, entre Banane et Borna. En automne de la même

360

année, l'établissement d'une chaîne de stations fut commencée, com- prenant les postes de Goquilhatville, Lisala, Stanleyville, Lowa, Kindu, Kongolo, Kikondja, Élisabethville. En 1912, la chaîne était établie, avec des moyens techniques et financiers réduits au minimum. En 19 1 4, on ajouta les postes de Basoko et de Basankusu ; le poste de Lowa, devenu inutile, fut supprimé. En 1914, on construisit le poste de Kinshasa et de Lusambo. En 1915 et 1916, on installa les postes de Lukuga et de Runia-Kilo.

Le réseau actuel comprend 15 postes d'une puissance d'environ cinq kilowatts.

Les difficultés furent grandes au début, ainsi que nous le content MM. Goldschmidt et Braillard : difficultés d'ordre matériel, provenant des conditions locales de transport, de construction, de la pénurie de mair-d'œuvre, des mauvaises conditions sanitaires, etc., et difficultés d'ordre technique, plus dures à surmonter que les premières. En effet, deux obstacles très graves : les « parasites » atmosphériques qui cou- vraient les signaux Morse et les rendaient illisibles, et l'absorption solaire qui, pendant le jour, affaiblissait et annulait les signaux, rendaient les communications pratiquement impossibles. C'est à peine si, vers la fin de la nuit, on pouvait échanger quelques pénibles mes- sages.

Les auteurs expliquent longuement l'origine, la cause et les consé- quences des « parasites » et les moyens qui furent mis en œuvre pour s'efforcer de les vaincre. Divers dispositifs « antiparasites » basés sur l'emploi des émissions à ondes entretenues ont été réalisés déjà ; ils donnent des résultats très encourageants.

Toujours est-il que malgré les « parasites » atmosphériques, on reçoit quotidiennement au Congo, les communications des grandes stations européennes à ondes entretenues: Paris, Lyon, Rome, Nauen, etc., et MM. Goldschmidt et Braillard affirment qu'une liaison directe entre la Belgique et le Congo peut parfaitement être réalisée actuellement.

Dans un chapitre consacré à la destruction d'un poste de télégraphie sans fil au Congo Belge, les auteurs disent que les portées réalisées par des postes identiques sont extrêmement variables avec les condi- tions extérieures. C'est ainsi qu'on a enregistré à Madagascar des réceptions de Stanleyville à plus de 2,000 kilomètres. Au Congo, des télégrammes ont été échangés directement entre Stanleyville et Élisa- bethville (1,500 kilomètres), Kindu et Kinshasa, Kilo et Brazzaville, etc.; mais il s'agit de performances qui, quoique fréquentes et utiles, ne peuvent servir de base à un service régulier.

Sauf par mauvais temps, les postes de la chaîne congolaise peuvent

■OB

361

travailler avec des postes plus éloignés que leurs voisins immédiats : l'on réalise généralement des communications directes Stanleyville- Umango-Coquilhatville, ou Lusambo-Coquilhatviile et Lusambo-Élisa- bethville, ou même Stanleyviile-Lukuga et Stanleyville-Élisabethville.

Après un exposé détaillé de l'organisation générale du service au Congo Belge, les auteurs examinent la question de la liaison Congo- Belgique par télégraphie sans fil. Le premier stade de réalisation en fut la station intercontinentale de Laeken, achevée en 1913 et détruite volontairement quelques heures avant l'entrée des Allemands à Bru- xelles. Ce poste était l'un des plus puissants du monde. À plusieurs reprises, les signaux de Bruxelles avaient été nettement entendus au Congo, à l'aide d'installations relativement précaires. Au cours d'un voyage en Amérique, M. Goldschmidt avait entendu ces mêmes signaux à la station d'Arlington, c'est-à-dire à une distance de 6,500 kilo- mètres.

Actuellement le problème des communications Bruxelles-Congo est théoriquement et complètement résolu, puisque les postes du Congo entendent Lyon, Nantes, Rome, Londres, Nauen, etc., et quelques stations américaines. Il ne reste donc, pour passer de la théorie à la pratique, qu'à reconstruire la grande station de Bruxelles ;

D'autre part, il importe que le réseau congolais, actuellement saturé déjà, soit développé, pour faire face aux besoins futurs et que ie Congo entier soit outillé selon les derniers progrès de la scienee : phare hertzien à l'embouchure du fleuve, appareils de télégraphie sans fil sur les avions, les vapeurs fluviaux et les bateaux « autotransbor- deurs », dont MM. Goldschmidt et Braillard étudient en ce moment la réalisation.

Les auteurs terminent leur ouvrage instructif et largement docu- menté, par des considérations sur l'aide précieuse que peut donner le réseau radio-télégraphique aux études météorologiques et aux tra- vaux cartographiques et ils ajoutent, entre autres, en conclusion que, « les temps ne sont pas éloignés tout le vaste « Continent mysté- rieux » de Stanley sera constellé d'antennes dont les ondes relieront de leurs liens subtils les coins perdus de la brousse equatoriale, quelques Européens isolés, luttent pour apporter un peu de civili- sation.

Le livre de MM. Goldschmidt et Braillard est aussi réconfortant qu'intéressant, car il nous enseigne qu'un pays qui peut donner au monde un exemple d'énergie et de persévérance dans l'action, tel que celui de la création en pleine et sauvage Afrique de l'outil admirable qu'est le réseau congolais de télégraphie sans fil, ce pays saura vaincre les formidables difficultés de l'heure présente.

362

GÉOGRAPHIE.-

Le. Timrs a publié récemment diverses notes de M. P. Chalmers-Mit- chell, prises au cours de la randonnée aérienne du Cap au Caire. En voici un extrait d'après le Mouvement Géographique du 4 avril 4 920.

Dar-es-Salam, le 14 mars.

Malgré mon opinion sur la fatiguante aridité de l'Afrique, nous avons trouNé la beauté de la route aérienne tout à fait extraordinaire.

Le Nil inférieur nous a paru comme un ruban bleu à bordure verte, serpentant dans ie désert doré, bordé de collines d'un bleu d'acier se fon- dant dans un ciel gris. De temps en temps la bordure verte disparaissait et le ruban bleu se fondait dans l'or des sables. Les bandes vertes étaient grouillantes de vie. Les villages arabes, avec leurs huttes aux murs carrés, comme des pommes dans une boîte, se trouvaient toujours sur le bord du désert, plantés de cimetières tout pareils, s'égaillant dans les sables.

Les parties montagneuses sent extraordinaires, sauvages, désolées et pittoresques; les rapides et les gorges sont belles, mais moins impression- nantes vues d'une grande hauteur. Nous pûmes contempler d'intéressantes et parfois de palpitantes scènes de rivières àMongolla et plus loin àNimuIe, lorsque nous volâmes le long du Nil. Malheureusement, nous ne trou- vâmes pas le courant qui nous était nécessaire. Notre avion effleura les eaux de si près qu'il effraya des crocodiles et nous vîmes des hippos ouvrir et fermer leurs narines.

En quittant Jinja, nous fin es une heureuse ascension le long de la gorge et nous sentîmes sur nos visages la poussière d'eau que nous envoyaient les rapides dans notre montée à peu près verticale au-dessus du Lac Victoria.

Le long de la route que nous suivîmes de l'Egypte au Soudan, appa- raissent des solitudes désolées, sans voies de communication, maigrement peuplées ou tout à fait désertes et à peine cultivées. L'Uganda présente encore beauconp de territoires désolés, mais les routes sont bonnes; les cultures sont meilleures que dans le Soudan et les villages sont nombreux et prospères. Il en est de même, mais sous une apparence moins marquée, dans l'Est africain britannique.

Le territoire du Tanganika, ci-devant l'Est africain allemand, paraît être le pays le plus développé. Les routes sont abondantes et bien entretenues, et presque toujours bordées d'arbres. Les villages sont grands et prospères et le bétail est extrêmement nombreux. Il y a des centaines de milles car-

363

rés en pleine culture : plantations de maïs, de riz, de mohoga, de sisal, de cacao et de caoutchouc.

Les plans des villes allemandes, vus du haut des airs, semblent infini- ment meilleurs que lesplans britanniques. Dans ces dernières aggloméra- tions, il semble que l'agencement soit l'effet du hasard, tandis que dans Jes agglomérations allemandes, les habitations sont disposées en larges plans géométriques, avec des avenues nombreuses s'irradiant d'un Borna central, piltoresquement situé.

Nous eûmes plus tard l'occasion d'apercevoir d'autres agglomérations allemandes et cette impression se confirma. On a certainement fait grande dépense d'ingéniosité et d'argent.

Même dans l'Est africain allemand, et davantage encore dans d'autres régions, j'ai été frappé par l'isolement des centres de civilisation euro- péens. Us sont presque toujours situés à un jet de pierre du désert ou de la brousse. Les lions font des expériences sur la solidité des fenêtres, les léopards et les hyènes visitent les dépendances, tuant, les chiens, tandis que les terrains de golf et les aérodromes sont envahis par les animaux sauvages.

Le commerce de détail est presque entièrement entre les mains des Grecs; jusque dans le Soudan et dans le Sud, il est entre mains des Hin- dous. Les produits hindous et japonais supplantent les produits textiles, la coutellerie, les ustensiles, les chaussures, la papeterie, les allumettes, les perles et les ornements de fabrication britannique. La qualité en est mauvaise et le prix exorbitant, mais ils sont adaptés aux besoins locaux des européens et des indigènes.

Jusque passé Kartoum, nous n'avons pratiquement vu aucune pièce importante de gibier. Il était facile d'identifier l'éléphant à n'importe quelle hauteur, à cause de sa couleur, de sa forme, de ses larges oreilles et de sa dégaine. Une femelle suivie de son jeune fut surprise sur une île flottante de sedd, elle plongea brusquement au bruit que faisait le moteur de notre avion. Nous vîmes fréquemment des girafes, mais jamais en troupeaux nombreux. Il est probable que nous n'aperçûmes que quelques individus surpris en dehors des épais fourrés. Nous les identifiâmes par la taille et la forme. Elles s'en allaient tranquillement lorsqu'elles entendaient le ron- flement de notre machine.

A partir de Kartoum, les hippopotames sont extrêmement nombreux sur le Nil, au bord des lacs et des autres rivières, mais jamais à proximité des villages. De haut, ils paraissaient noirs, mais lorsque nous appro- chions, ils semblaient avoir une teinte rosée. Ils ne semblèrent jamais avoir été dérangés par le bruit de l'avion. Par contre, nous jetâmes souvent le dé- sarroi dans des troupeaux de buffles. Ils décampaient généralement à toute

364

vitesse. Il était facile de les reconnaître à cause de leur taille et de leur allure. Leur couleur paraissait noire ou rouge, suivant la force de la lumière.

Nous aperçûmes quantité d'antilopes. Elles s'enfuyaient craintivement et nous ne parvînmes que difficilement à les reconnaître, car leur taille relative variait avec la hauteur de l'avion. Il était impossible d'employer des jumelles pour les observer, car la rapidité de leur course les mettait immédiatement hors du champ de vision. La coloration, excepté au petit matin, ou très tard dans la soirée, lorsque l'éclairage est horizontal, est d'un brun foncé unifoime. Nous vîmes aussi des élans, des impala, des kudus. Nous ne parvînmes jamais à reconnaître des zèbres, il est possible que leur coloration les dissimule.

Nous discutâmes la question de la protection du gibier avec plusieurs personnes. Pendant la guerre, il se commit des déprédations sans nombre. Par exemple, dans l'Est africain, les soldats furent autorisés à tuer les girafes sans aucune restriction, et des mitrailleuses furent dirigées contre des troupeaux. Il ne reste plus de grand gibier aux abords des routes bri- tanniques. Le gouverneur actuel prend toutes les mesures nécessaires pour protéger ce qui reste de la faune. L'humeur extraordinairement agressive des lions est probablement due à la rareté du gibier. Il se produit des plaintes continuelles contre les « mangeurs d'hommes » et des appels s'élèvent de tous les villages indigènes.

Les règlements concernant l'ivoire appellent revision dans toute l'Afrique. Il faudrait que l'abattage des éléphants fut interdit partout. La limite actuelle de deux pièces est très souvent excédée dans le Soudan, et particulièrement par les Mamurs. Le permis de L. 10 au Soudan est ridi- cule, et le permis de $ 50 dans l'Est africain allemand est trop minime. Toutes les stations militaires sont ornées de vains trophées; lesjeunes offi- ciers devraient être plus strictement surveillés.

Les voyages en aéroplane ne permettent guère l'étude de la vie des oiseaux. Je n'ai vu que peu d'aigles, mais, par contre, j'ai aperçu d'innom- brables hérons gris, des aigrettes blanches, petites et grandes, des mara- bous, des pélicans, des ibis, des oies, des canards qui tous furent troublés par notre moteur.

Mon attention fut attirée par la possibilité d'emporter des insectes sur l'avion, mais les résultats furent négatifs; peut-être à cause de la saison sèche. Avant chaque départ, j'examinais soigneusement l'aréoplane avec l'intention de collectionner des exemplaires d'insectes qui se seraient installés pendant la nuit. A part quelques cadavres de mouches, noyés dans des gouttes d'huile, je n'ai rien trouvé.

Les fourmis blanches constituent le plus grand danger. Depuis Mongalla

365

et dans la direction du Sud, tous les aéroplanes devraient êlre étroitement surveillés. On peut difficilement apercevoir une fourmilière d'une semaine d'une certaine hauteur, et cependant, au moment de l'atterrissage, elle peut faire capoter l'appareil. Au repos, les caoutchoucs de l'avion furent sur- veillés, et la queue de l'appareil protégée par une épaisse couche de graisse.

Sur le sol et dans les buissons, les morsures d'insectes furent abomi- nables. Les onguents préservatifs étaient absolument inutilisables à cause de la chaleur. Malgré nos moustiquaires nous fûmes tous dévorés parles moustiques. Je fus piqué par une tsé-tsé à Nimule, et dans l'Est africain allemand. La morsure est extrêmement douloureuse. Telle est également la piqûre de ia mouche d'hippo qui possède une véritable lancette et celle de la mouche des lacs qui provoque instantanément des cloches.

Je n'ai vu qu'un seul serf ent en Afrique, mais j'ai vu des quantités prodigieuses de lézards. Le temps fut magnifique pendant tout le voyage et nous n'eûmes à essuyer qu'un seul orage tropical.

En somme, la route est praticable, mais il faudrait de meilleures indica- tions à Jebelein et Mongalla les feux diminuent la visibilité. Il faudrait de plus grands aérodromes dans les hautes stations tropicales. Les appro- visionnements en pétrole furent suffisants et l'assistance de la R. A. F. et des civils fut infatigable et très efficace.

Le public porte un très vif intérêt à l'entreprise, et on demande instam- ment, dans le Nord comme dans le Sud, la liaison des centres isolés au point de vue affaires comme au point de vue officiel. Même si l'usage commercial de l'avion est coûteux, le prix en est compensé par l'économie du temps. Les longs congés sont nécessaires au monde officiel. Actuelle- ment, on perd des mois à effectuer des voyages d'aller et retour. Les con- sultations entre gouverneurs de provinces ne sont plus possibles, actuel- ment, qu'en s'absentant de longues semaines.

Des passagers tels que moi, éprouvent moins de fatigue et plus de plaisir à voyager en avion que de toute autre manière. L'avenir de l'avia- tion en Afrique est entièrement entre les mains des ingénieurs.

QUESTIONS DE POLITIQUE FINANCIÈRE.

Rapport sur le budget des recettes et des dépenses du Congo belge pour Texercice 1920.

Le rapport a été rédigé par M. Tschoffen. Nous en extrayons les pas- sages suivants :

366

Tandis que le budget du Congo pour l'exercice 1919 clôturait par un léger boni,

celui de l'exercice 1914 accuse un déficit de fr. 21,484,724.00

1915 21,484,724.00

1916 23,481,830.90

1917 16,221,797.60

1918 7,050,967.00

1920 21,109,376.11

Le solde déficitaire s'installe donc, permanent, alors que la Métropole a pris à son compte les dépenses de guerre c'était justice et que la colonie a passé en ces dernières années par ce qu'on appelle une « crise d'abondance ».

Ceci ne doit ni nous étonner, ni nous effrayer.

Nous pensons que le budget de 1919 a été un accident heureux, que la balance financière du Congo se clôturera pendant de longues années encore par un déficit; nous croyons même que cette situation est nor- male, et qu'il ne faut pas céder au désir d'y mettre fin dans un avenir tout proche de nous, au prix de tous les moyens, même des pires.

« Aussi important que soit l'équilibre budgétaire, il ne résume pas à lui » seul les multiples aspects de la vie coloniale qui n'a pas encore passé la » période des accidents, ni même des maladies de croissance. »

M. René Wautier, qui s'exprimait ainsi en 1915, parlait le langage de la raison et celui du bon sens.

Notre honorable collègue, M. du Bus de Warnaffe, lui faisait écho lors- qu'en son remarquable rapport sur le budget pour l'exercice 1919, il observait que « l'utilité économique d'une colonie ne se traduit pas par » une balance budgétaire, mais bien par les richesses qu'elle procure aux » citoyens de la Métropole. »

Une politique financière dont la prudence est apparue à certains comme un peu étroite et craintive a établi entre la Métropole et la Colonie le régime de la séparation des patrimoines.

Nous n'allons pas jusqu'à dire qu'il y faille renoncer; un jour vien- dra — il serait puéril de vouloir en fixer l'échéance la Colonie se pourra suffire à elle-même. Il n'est pas mauvais que, dès à présent, elle s'accoutume à vivre de sa vie propre et établisse seule son budget.

Mais il ne faut pas compter cependant que la Métropole pourra, sans devoir supporter pendant un certain temps encore de lourdes charges,

367

profiter des avantages directs et indirects immenses que lui offre sa tutelle sur la Colonie.

Le commerce du Congo est un commerce belge; les possibilités presque infinies de son développement sont des espoirs belges; l'œuvre gigan- tesque de la colonisation par notre petit peuple d'un territoire cinquante fois grand comme le sien, est une œuvre belge.

Le Congo est un des facteurs essentiels qui fait de la Belgique une grande nation.

La Belgique a de graves devoirs envers le Congo. Elle lui doit notam- ment son appui financier. S'il veut être efficace, cet appui doit être géné- reux.

Pour conclure d'une façon plus précise, nous voudrions essayer de dégager quelques éléments qui doivent dominer nos délibérations.

Faire des économies sur le budget de l'Instruction publique, des Cultes, de la Bienfaisance publique, de l'Hygiène serait administrer à l'encontre des principes qui doivent régir les finances de notre colonie.

Rien ne doit être refusé permettant de développer les organismes qui sauvegardent au Congo la santé morale et physique d^s populations.

Pour autant que les dépenses consenties dans ce but soient judicieuse- ment ordonnées et s'appliquent exactement à leur objet, elles ne peuvent être exagérées.

Une population indigène respectée, bien traitée, bien portante et qui contracte envers le peuple civilisateur une dette de reconnaissance; des agents convenablement rémunérés, pénétrés de leurs devoirs envers les noirs, moins soucieux de rechercher parmi eux des travailleurs qui pro- duisent sous la menace que des hommes dont il importe d'assurer l'éduca- tion, et au besoin le relèvement, voilà qui fait les colonies prospères.

Procéder autrement, « exploiter la colonie » exiger d'un peuple enfant et d'un sol encore vierge des profits immédiats, ce serait sacrifier les magni- fiques certitudes de demain aux maigres réalités d'aujourd'hui.

Il faut donc se féliciter de ce que le Gouvernement se rende compte qu'il u a vis-à-vis des populations indigènes des devoirs de conservation et » d'amélioration » et qu'il s'engage « à fournir à ce sujet un effort sérieux».

Loin de chicaner sur les dépenses relatives à l'instruction, aux cultes, à la bienfaisance et à l'hygiène, le Parlement se montrera certes disposé à majorer ces crédits dans la mesure le Gouvernement se déclarera lui- même en état de profiter utilement des fonds qui seraient mis à sa dispo- sition.

368

Les « Ifvées des travailleurs »

Les nécessités de la guerre, le désir d'assurer le rendement des impôts et la mise en valeur de la richesse naturelles de la colonie, joints à l'obli- gation dans laquelle on se trouve de combattre l'apathie et la paresse naturelle du nègre, autant de prétextes trop tentants pour justifier la « levée de travailleurs d'utilité publique », autrement dit le « travail forcé ».

Le droit naturel, le droit positif et même les nécessités immédiates d'une bonne organisation du travail condamne cette pratique de quelque nom qu'on veuille la désigner.

Le droit naturel affirme que le travail est libre et que cette liberté a droit au respect sous toutes les latitudes.

Le droit positif, consacré par l'article 16 de la Charte coloniale, interdit la levée des travailleurs d'utilité publique autrement que par enrôlement dans le contingent annuel de la Force Publique.

Les travailleurs arrachés à leurs forêts, sans aptitudes et sans éducation spéciale, brusquement soumis à un travail et à un régime qui leur sont étrangers, ne fournissent aucun rendement appréciable.

Et quels lamentables « décheis » si l'on doit s'exprimer ainsi... n'a-t-on pas à déplorer?

A diverses reprises, la question a été examinée au sein du Conseil colonial.

Le travail forcé, sous toutes ses formes, y a toujours été condamné de la façon la plus expresse et avec une impressionnante unanimité.

M. le Ministre des Colonies, a, de son côté, déclaré qu'il s'opposerait énergiquement à cette pratique abusive.

11 peut être malaisé d'éviter des abus particuliers se produisant au fond de la brousse ou de la forêt et dont ia responsabilité remonte à des fonc- tionnaires ou à des agents commerciaux subalternes, mais on doit regretter de trouver au bulUt>n de la Colonie, sous la signature du Gou- verneur général, une ordonnance-loi en date du 1er octobre 1919, prescri- vante levée de 1,000 travailleurs d'utilité publique destinés à la construc- tion du chemin de fer de Matadi à Ango-Ango, et prévoyant, en son article 4, des levées supplémentaires pour parer aux c déchets > qui sur- viendrait ni i armi les travailleurs recrutés.

L'ordonnance, illégale du reste, a été inspirée par le désir légitime d'ac- tiver les travaux.

Le Parlement doit veiller à ce qu'elle soit sans lendemain.

Nous ne critiquons pas l'intention, qui était bonne, mais le fait est là, que le Parlement ne peut approuver.

369

Disons à ce propos que le Conseil colonial s'est préoccupé, à un point de vue plus général, de la question des ordonnances-lois.

Un de ses membres a prié M. le Ministre de vouloir proposer aux Cham- bres législatives un projet de loi soumettant les ordonnances-lois à l'ap- probation du Conseil colonial dans un délai déterminé.

Peut-être serait-il bon que le Parlement se préoccupât de cette réforme et que, pour le surplus, on en revint, pour ce qui regarde les attributions du Conseil colonial, à la législation d'avant-guerre.

L'arrêté-loi du 15 septembre 1915 apportant des restrictions impor- tantes aux attributions du Conseil colonial est de la guerre. Il pourrait disparaître avec elle.

Nous ne voulons pas abandonner ce sujet sans signaler le danger dont sont menacés les indigènes par les façons de faire de certains recruteurs de main-d'œuvre pour les industries du Katanga.

On nous signale qu'il s'exerce actuellement une contrainte occulte, mais intense, dans l'embauchage des indigènes par contrats à longs termes pour les travaux miniers du Katanga.

Au risque de désorganiser la vie familiale des noirs et au mépris du principe qui veut que l'indigène ne soit employé au travail que dans le milieu il a vécu, les mines du Katanga s'en vont demander des travail- leurs jusque dans le Kasai.

C'est l'arrêt de la natalité, l'abandon de l'agriculture, la famine dans les régions dévastées et la maladie sévissant parmi les noirs transplantés loin du sol natal.

Sans doute, les richesses minières du Katanga doivent être exploitées, mais il est plus important que l'agriculture, facteur de richesse, d'ordre, de stabilité et de moralité, ne soit pas sacrifiée ; il est plus important encore de sauvegarder dons le fait, la liberté et la santé des noirs.

Les abus en l'espèce sont patents et leurs conséquences, hélas... trop apparentes

Nous pensons que la législation en vigueur, fermement et humainement appliquée, suffit pour y mettre fin.

S'il en était autrement, il serait urgent de la reviser.

Au surplus, c'est tout le régime des concessions qui doit être examiné de très près.

Sans vouloir entrer dans le détail des réformes à y apporter, signalons

370

le vœu émis récemment par la « Commission pour la Protection des Indi- gènes », « que le Gouvernement se réserve dans les concessions des terres » dont il puisse disposer ultérieurement à l'avantage des intérêts moraux » supérieurs des indigènes et notamment pour l'installation d'oeuvres » philanthropiques ou religieuses ».

Les maladies épidémiques.

Nous touchons ici à l'un des problèmes les plus angoissants que pose l'administration de la Colonie.

Les maladies épidémiques, plus spécialement la maladie du sommeil, continuent à faire d'effroyables ravages dans la population noire.

Les statistiques parlent à ce sujet avec une triste éloquence el attestent ce fait, angoissant, que la population noire du Congo ne cesse de décroître avce rapidité.

Le mal est grave, au point qu'on se trouve dans l'obligation de consi- gner cette constatation : depuis le début de l'occupation européenne, la population indigène du Congo a diminué de moitié.

Nous signalons à la Chambre que la Commission instituée pour la pro- tection des indigènes, dans le rapport au Roi qu'elle a signé le 18 décem- bre 1919, a formulé comme suit ses conclusions :

« La Commission estime de son devoir de signaler d'une façon toute » spéciale à l'attention du Gouvernement, le péril grave et imminent qui » menace les populations de la Colonie.

» Elle l'adjure :

» De prendre sans retard les mesures proposées ailleurs par elle pour enrayer les maladies ou en préserver les populations et d'assurer l'appli- cation effective des prescriptions du service d'hygiène ;

» De diriger davantage l'effort d^ la colonisation vers le développe- ment de l'agriculture et des industries indigènes entreprises par les natifs aux environs de leurs foyers ;

» De prohiber sévèrement tout procédé de nature à fausser dans les transactions commerciales et le recrutement de la main-d'œuvre, les prin- cipes delà liberté;

» De faire présider un esprit de modération et de sage circonspection à la mise en valeur du domaine colonial et dans l'appui à donner aux gnndes entreprises;

» De veiller à ce que la lutte contre l'immoralité reste un de ses grands soucis et d'assurer notamment une efficace protection aux jeunes filles en qui réside l'espoir de la régénération de la race et du relèvement de la natalité. »

371

Nous sommes loin de sous évaluer les efforts multipliés par le Gouver- nement pour combattre le fléau, et pourtant nous devons proclamer qu'on n'a pas fait assez et qu'on a trop largement tenu compte dans la lutte contre l'ennemi, le plus terrible peut-être, qui menace notre œuvre afri- caine, de difficultés budgétaires.

Devant pareil danger la question d'argent est secondaire. Il faut, à tout prix, enrayer le mal.

C'est aux techniciens qu'il appartient d'indiquer dans le détail les dis- positions auxquelles il convient de recourir.

La question, du reste, est sous la dépendance de causes générales, que nous ne pouvons qu'indiquer et qui tiennent à l'occupation par la race blanche. L'introduction du commerce et de certains procédés qui devaient en accroître l'intensité ont modifié profondément les conditions de vie des indigènes et diminué leur vitalité; le recrutement des travailleurs, trans- plantés loin de chez eux, et placés dans des conditions hygiéniques déplo- rables; l'insuffisance des lazarets, l'insouciance de certaines entreprises industrielles qui se préoccupent plutôt de prélever de nouveaux contin- gents de travailleurs, que de protéger contre la malaJie ceux qu'elles se sont assurés, autant de facteurs qui ne donnent qu'une explication trop claire de phénomènes douloureux entre tous.

Remédier à cet état de choses implique une série de réformes générales, et un travail de longue haleine.

Des mesures cependant s'imposent dont l'utilité se manifeste avec évi- dence.

Il faut favoriser l'application des méthodes prophylactiques et accorder le plus large concours en subsides, fournitures de médicaments, etc., aux missions qui s'attachent à combattre le fléau ; il faut aussi pourvoir la colonie d'un Corps médical bien outillé.

Or, les chiffres qu'a bien voulu nous communiquer M. le Ministre des Colonies, sont déplorables.

L'eflectifde médecins prévus au Budget est de 73.

Le nombre des médecins en service est de 50.

congé 11.

disponibilité est de .... 9. Cinquante médecins en service pour la Colonie...

Le Gouvernement ajoute « qu'il a été décidé d'augmenter le nombre de médecins, seules les difficultés de recrutement pourraient y faire obstacle. »

L'obstacle ne serait-il pas levé si l'on assurait aux intéressés une situa- tion telle qu'au lieu de rechercher des postulants sans les trouver, on pût faire un choix parmi les candidats.

Cela imposerait des sacrifices financiers considérables? Sans doute. Mais

372

nous pensons que jamais capitaux ne seraient plus utilement dépensés, même si l'on se place à un point de vue exclusivement financier et ce n'est pas le vrai point de vue ..

Les mêmes conclusions s'imposent du reste, en général, pour tout ce qui regarde

Le recrutement des fonctionnaires.

Le Congo est insuffisamment occupé; les circonscriptions administra- tives sont trop étendues, surtout si l'on considère que l'administrateur territorial cumule toutes les attributions administratives de sa circonscrip- tion.

Déplus, les fondions des administrateurs territoriaux ne sont pas suffi- samment stabilisées.

L'influence civilisatrice d'un bon administrateur ne peut s'exercer utilement que par une action continue, se poursuivant dans la même circonscription.

Il importe de l'attacher à son territoire par la certitude d'y obtenir son avancement hiérarchique et l'augmentation périodique de son traitement. D'une manière générale, s'avère, du reste, la nécessité de réformer le statut des magistrats et des fonctionnaires à un double point de vue :

Il faudrait arriver à substituer à l'engagement à terme la nomination à vie, comme pour les fonctionnaires et magistrats de la Métropole, sauf à assurer aux intéressés des congés périodiques assez prolongés, sans réduc- tion d'appointements et à prévoir la mise à la retraite plus tôt que dans la Métropole.

Le taux des pensions devrait, d'autre part, être fixé de telle sorte que le magistrat ou le fonctionnaire, rentré en Belgique à la fin de sa carrière, fut assuré d'une vie paisible, sans devoir chercher des ressources supplé- mentaires dans de nouveaux emplois. Or, les pensions sont aujourd'hui presque dérisoires.

Bref, on doit former des vocations coloniales et trouver des agents qui fassent pleine carrière au Congo. On n'y peut songer qu'en offrant aux agents la double assurance d'une existence aisée dans la Colonie et d'une retraite sans soucis dans la Mère Patrie.

La question financière.

Aucune des grandes réformes, aucun des grands travaux qui doivent être réalisés, ne peut être mené à bien sans qu'on y consacre des capitaux con- sidérables.

^M

373

Il faut trouver des ressources; à l'heure actuelle, le Congo, qui en est à la période de croissance, ne peut les fournir.

Son seul crédit serait, pensons-nous, insuffisant pour garantir l'emprunt important auquel il faudra recourir.

La Belgique doit faire son devoir, autoriser la Colonie à émettre cet emprunt et, pour en assurer le succès, engager sa propre signature et le garantir.

Elle tiendra ainsi la parole donnée quand elle a entrepris son œuvre civilisatrice en Afrique centrale et affermira du même coup l'existence d'une Colonie qui rendra au centuple ce que nous ferons pour elle.

SCIENCES NATURELLES

La domestication de réléphant (T Afrique au Congo belge.

M. Ed. Leplae donne dans un numéro récent de la Nature, de curieux renseignements sur le dressage des éléphants au Congo.

Le roi Léopold II choisit, pour diriger l'entreprise de capture et de dressage des éléphants sauvages, le commandant Laplume. Cet officier qui avait bataillé pendant six ans dans l'Uele avec Chaltin, et commandé le poste de Redjaf, qui était de plus un chasseur très expérimenté, fut envoyé au Congo, en juillet 1899, pour commencer le dressage des éléphants.

Après avoir examiné au Gabon la façon dont un colonial français avait dressé un jeune éléphant, parfaitement apprivoisé, Laplume s'établit à Kira-Vungu, dans l'Uele.

Quatre ans plus tard, bien qu'il eut livrer dix-huit combats aux indi- gènes pour réprimer une révolte, il avait déjà capturé et dressé douze éléphants.

En 1904, il atteignit, au prix d'une peine énorme, le nombre de vingt- huit éléphanteaux bien portants, sachant tirer la charrue et transporter des matériaux.

On peut dire que, dès cette époque, la capture et le dressage de l'éléphant d'Afrique étaient résolus.

Le commandant Laplume avait d'abord essayé des trappes indigènes, trous profonds, couverts de branchages, dans lesquels les éléphants tom- baient et pouvaient être ligotés.

Une ligne de trappes longue de plus d'un kilomètre, barra la savane entre la rivière et la forêt.

374

Un jeune éléphant ne tarda pas à y tomber, mais les éléphants sauvages accoururent, le saisirent avec leurs trompes, et le retirèrent de la trappe. Un second éléphanteau se fit prendre; il avait deux mètres de taille et portait des défenses respectables. Les éléphants sauvages qui voulaient le délivrer furent, cette fois écartés à coups de fusils, mais le captif mourut subitement, au moment on allait le faire sortir par un plan incliné. Ces morts subites sont fréquentes chez les éléphants à la suile de fortes émotions.

La plume essaya ensuite une force enceinte ou kraal, comme on en emploie aux Indes pour capturer l'éléphant. Elle est précédée d'un couloir largement évasé, dans lequel, au moyen de plusieurs centaines d'indigènes, on rabat les troupeaux d'éléphants. L'expérience réussit très bien et plu- sieurs éléphants furent enfermés, mais il fut impossible de s'en rendre maître : c'étaient des adversaires de grande taille, d'une sauvagerie inouïe, et si dangereux qu'il fallut leur rendre la liberté.

C'est alors qu'on trouva le meilleur moyen de capture, employé encore aujourd'hui. Les chasseurs ayant abattu une femelle suitée, le petit, qui n'avait que 90 centimètres de hauteur, essaya de fuir dans la forêt. Mais les chasseurs, tous anciens soldats de Laplume, très agiles et auda- cieux se jetèrent sur l'animal, et malgré les menaces du troupeau sauvage le renverser* nt, l'entravèrent au moyen de lianes et le ramenèrent triomphalement, dans l'enclos.

Plusieurs autres furent capturés de la même façon.

Une nouvelle difficulté se présenta toutefois, car ces éléphants trop jeunes, moururent rapidement, bien qu'on leur sacrifiât toutes les boîtes de lait condensé que possédait le poste.

Les chasseurs s'attaquèrent donc à des jeunes de plus en plus grands, ayant 1 m. 15 à 1 m. 20, au moment de la capture, et arrivèrent même à prendre de vive force des animaux mesurant 1 m. 50 et armés de défenses de 0 m. 50 de longueur.

Des éléphants de cette taille sont habitués à se nourrir de feuillages et brindilles d'arbres, et peuvent être conservés en captivité sans grandes difficultés.

La station de dressage d'éléphants fut transférée à Api, en 1904 (août). Elle ne comprenait au début qu'un enclos de deux ares, ombragé de quelques arbres. Deux indigènes y habitaient avec les éléphants, et, à force de patience et de douceur, leur inspirèrent confiance.

On put bientôt les laisser sortir journellement de leur enclos et pâturer dans la brousse. Ils soitent au point du jour, reviennent s'abriter au poste durant les heures chaudes de la journée, et pâturent encore dans la soirée. Quelques friandises, bananes, manioc, pain de maïs, les attendent à leur

'.'

375

rentrée et !es récompensent de leur bonne volonté. Le troupeau est mené chaque jour à ia rivière pour s'y baigner et s'y divertir. La docilité de ces animaux est parfaite.

Quand on essaya de faire porter un cornac par les plus grands éléphan- teaux, ils résistèrent d'abord avec violence, mais s'habituèrent assez vite à porter, soit un homme, soit une charge.

On fit ensuite des exercices de traction en attelant les éléphantêaux à un tronc d'arbre dont on augmenta le poids petit à petit; puis on attela des chariots,

Bref, en 1907, il y avait à Api 25 éléphants, dont la taille variait de lm.30 à lm,72. Ils se comportaient fort bien, se laissaient monter facile- ment, même par des Européens.

On leur faisait faire fréquemment des promenades d'entraînement dans lesquelles ils montraient une prudence extrême et une grande adresse ; ils traversaient sans difficulté les marécages, montaient et descendaient les pentes les plus abruptes. On les employait à transporter des briques pour les constructions, à tirer des chariots, à labourer la terre; ils suivaient le sillon très attentivement, comme le feraient les bœufs les mieux dressés.

La difficulté principale provient de la mortalité considérable de la pre- mière année de captivité et qui résulte, soit de marasme, soit de brimades ou sévices infligés par les plus anciens éléphants sur les jeunes nouvelle- ment capturés, soit, enfin, de la difficulté avec laquelle se guérissent les plaies, même légères et superficielles,

L'insolation est également très à craindre; l'éléphant sauvage se met toujours à l'ombre pendant la grande chaleur.

Au 1er janvier 1918, le poste de Api renfermait 30 éléphants. Le plus âgé est une femelle, capturée en 1902, haute de 2m.09. L'éléphant qui a la plus grande taille est aussi une femelle, nommée Marie, capturée en févner 1 905, et mesurant au garrot 2m.26. La plupart des éléphants ont plus de lm.80; cirq d'entre eux dépassent 2 mètres. Deux n'ont que lm.45. La dernière recrue, l'éléphant Pamba, est une femelie capturée en jan- vier 1914 et mesurant lm.45.

On ne commence le dressage proprement dit, que lorsque les éléphants ont l'âge voulu et une taille d'environ lm.80.

La croissance est mesurée régulièremeLt : elle fut en 19! 7 de 2 à 7 cen- timètre en neuf mois.

Les captures n'ont pu être recommencées depuis 1914, le commandant Laplume ayant passé deux ans comme prisonnier de guerre en Allemagne, et son adjoint, M. Magnetle, ayant également été retenu en Europe par la guerre. D'ailleurs, le gouvernement du Congo, cherchant à réaliser des économies, avait fait suspendre les captures et même le dressage des élé- phants.

376

11 s'en fallut donc de peu qu'une des initiatives les plus intéressantes prise par les Belges en Afrique, r.e fut abandonnée avait d'avoir pu pro- duire un effet utile.

Mais le Roi Albert, qui porte le plus vif intérêt à tous les progrès de la colonie be'ge, prit à sa charge particulière les frais de la station, et pour arriver plus rapidement à des résultats plus pratiques, fit engager aux Indes un personnel spécialiste, chargé d'essayer à Api les méthodes indiennes de dressage, de harnachement et de travail. Ces cornacs deman- cèrent aussitôt une longue liste de médicaments indispensables pour traiter les éléphants malades ou blessés. Les essais d'utilisation systématique seront commencés sous peu et sous une forme commerciale, cVst-à-dire que les animaux travailleront chaque jour pendant plusieurs heures, la durée du travail étant proportionnée à l'âge de chaque animal.

Les éléphants d'Api appartiennent à la grande race congolaise, bien distincte de la race plus petite qui habite les marécages de la frontière orientale.

L'éléphant d'Afrique présente, en effet, plusieurs variétés différants sen- siblerrent par leur taille et par la forme des oreilles.

Contrairement à ce que l'on admet souvent, l'éléphant d'Afrique n'appartient pas à la même espèce zoologique que l'éléphant d'Asie. Il se distingue par une tête allongée, flanquée d'énormes oreilles, armée de défenses puissantes, et d'une trompe fortement annelée. La ligne du dos, très caractéristique, estrettement ensellée, l'échiné formant sur la croupe une bosse prononcée. La queue est longue et terminée par une forte touffe de longs crins noirs. L'éléphant d'Asie au contraire, a la tête courte, le front énorme et saillant, de petites oreilles, des défenses presque toujours petites ou nulles, un dos convexe et jamais ensellé, une queue tourte. Le nombre de doigts n'est pas le même. Enfin, la taille de l'éléphant d'Afrique dépasse de 1 à 2 pieds celle de l'éléphant asiatique.

Association pour ie Perfectionnement du Matériel Colonial

SECTION I. Moyens de transport intérieurs et étude des moteurs.

Président

Vice-Présidents

Secrétaires

Bureau de la Section :

M. Mahieu, directeur au Ministère des Colonies, direc- teur des Transports fluviaux au Congo, avenue Rogier, 51, Bruxelles. MM. Crets, ancien directeur des Usines Cockerill d'Hoboken, rue Jourdan, 94, Bruxelles; Debacker, ingénieur-administrateur du chemin de 1er du Congo, avenue Louis - Lepoutre, 45, Bruxelles ; Mathot, ingénieur-conseil, rue du Marteau, 81,

Bruxelles ; Smal, ingénieur, directeur des Chantiers Cockerill d'Hoboken, à Hoboken. MM. Habig, Jean, ingénieur, rue Herman, 41, Schaer- beek ; Walterthum, rue Jennart, 18, Bruxelles.

Procès-verbal de la vingt-septième séance du samedi 29 mai 1920.

ORDRE DU JOUR :

lo Lecture du procès-verbal de la dernière séance ;

Exposé par l'auteur du système de tracteur Foidart ;

Navigation sur le Haut-Congo. Balisage du fleuve (suite),

par M. Willemoës d'Obry ; Examen de la voiturette Davreux ; Examen du bateau glisseur, système Villard ; Divers.

1. La séance est ouverte à 16 1/2 heures, sous la présidence de M. Mahieu, président de la section.

Sont présents : MM. Adam, Debacker, de le Conrt-Wincqz, De Wildeman,

378

Dryepondt, Foidart, Gasthuis, général Gillain, Habig, Liebrechts, Mahieu, Tielemans, Tobiansky d'Althoff, Walterthum et~ Willemoës d'Obry.

Se sont fait excuser : MM. Crets, de Montigny, Bassesse, Smal et Ie major Vervloei.

2. Le procès-verbal de la séance précédente est approuvé.

3. Le Président accorde la parole à M. l'ingénieur Foidart qui expose en ces termes avec plans à l'appui les avantages de son système de tracteur sur route :

La question du transport sur route joue actuellement un rôle important dans les domaines industriel, commercial et domestique.

Depuis la guerre surtout, les chevaux étant rares et leur alimentation coûteuse et difficile, la traction chevaline a été en grande partie remplacée par la traction mécanique. Celle- ci se fait au moyen de moteurs à essence ou de moteurs à vapeur.

Pour le transport de poids légers permettant de faire des vitesses relativement grandes, les moteurs à essence donnent des résultats satisfaisants ; mais pour le transport des matières pondéreuses, qui ne permettent en charge qu'une vitesse de 10 kilomètres à l'heure, il n'a été trouvé jusqu'à présent aucun appareil remplissant les conditions requises, c'est à- dire pratique et économique.

Nous pensons que pour les poids lourds le moteur à vapeur est à préférer. En effet, M Colin, ingénieur, membre du Comité de l'Automobile Club de France, a écrit dans un traité sur « les moteurs à vapeur appliqués aux transports des poids lourds » que la vapeur est depuis nombre d'années Famé de la locomotion mécanique sur eau et sur rails et que l'automobile a profité d'une expérience déjà longue. Pour la production de vapeur, les constructeurs ont recours à des générateurs à vaporisation intensive dont les caractéristiques sont le volume d'eau faible, la grande surface de chauffe et la pression élevée. L emploi des huiles lourdes de pétrole supprime toute diffi- culté dans la manutention du combustible. Pour réduire au minimum l'encombrement et le poids générateur, il faut rechercher la meilleure utilisation de la vapeur produite. On y arrive par l'application du sj'stème Compound, aujourd'hui universellement connu On sait qu'il consiste dans l'emploi de plusieurs cylindres dans lesquels la vapeur passe succes-

.

379

siveinent et se dépouille de l'énergie emmagasinée. Outre l'éco- nomie de vapeur, on y trouve encore le précieux avantage d'éviter presque toujours la terrible panne. En cas d'avarie au mécanisme d'un cylindre, on continue à rouler à vitesse moindre avec les autres cylindres. Le moteur à vapeur est éminemment et exclusivement propre à la traction des fortes charges de par sa grande élasticité et la surveillance néces- saire de ses organes de sécurité.

On nous a présenté, tant en France qu'en Angleterre, plu- sieurs types de camions à vapeur ; il y en a malheureusement fort peu donnant des résultats pratiques. Il nous a semblé que les industriels qui avaient entrepris ces constructions, n'avaient pas la compétence nécessaire dans la matière. Ainsi conçoit-on que l'on construise des chaudières sans réservoir de vapeur, sans niveau d'eau, sans soupapes de sûreté, et dans lesquelles on introduit l'eau provenant de la condensation de la vapeur échappée de la machine. Conçoit-on que ces chau- dières très petites, formées de serpentins placés à côté les uns des autres, soient chauffées par des produits laissant des résidus tels que cendres et suies, qui, se déposant sur les tubes, nuisent non seulement à la vaporisation, mais peuvent provoquer des accidents graves quoique ces chaudières soient déclarées inexplosibles.

Quant à la machine, elle présente des défauts révélant la même incompétence.

Dans mon système de camion, j'ai cherché à éviter les dé- fauts que je viens de signaler en me servant de documents écrits par les techniciens les plus compétents.

Les deux principaux éléments de ce camion sont la chau- dière et la machine dont je vais vous expliquer le système de construction.

La chaudière se compose de serpentins dilatables et établis de sorte que la production de vapeur soit toujours libre, que le camion monte ou descende, exécute un virage soit à droite, soit à gauche.

La partie inférieure de la plupart de ces serpentins est reliée à un réservoir d'eau et la partie supérieure débouche dans le réservoir de vapeur. Les autres, reliés au réservoir de vapeur pour prendre la première vapeur formée, dite « va- peur saturée », passent par la chaleur de chauffage et se

380

réunissent à un réservoir pour donner la_« vapeur surchauf- fée » qui est utilisée par la machine.

II est préférable de se servir de vapeur surchauffée que de vapeur saturée, celle-ci conservée au contact de la niasse Ji- quide génératrice et utilisée telle quelle, contient une certaine quantité d'eau à l'état vésiculaire, de 8 à 40 p. c, suivant la disposition et la nature des générateurs et suivant la plus ou moins grande activité de la demande Cette eau entraînée pré- sente un grave inconvénient quand il s'agit d'alimenter des machines, car d'une part la vapeur saturée a moins de puis- sance que la vapeur surchauffée, et d'autre part elle peut pro- voquer des « coups d'eau », dans les cylindres, tandis que la vapeur surchauffée ne contenant presque plus d'eau à l'état vésiculaire, permet de supprimer la condensation de la vapeur d'échappement de la machine et ensuite, surtout si l'on tra- vaille à haute pression, d'utiliser très peu d'eau pour la vapo- risation, Ainsi J. Buchetti dans son « Guide pour l'essai des machines à vapeur » écrit (page 216) que la vapeur surchauf- fée étant incolore, si l'on ouvre un robinet, le jet de vapeur sera invisible à sa sortie parce qu'il ne contient pas plus de 3 à 4 p. c. d'eau.

Cette chaudière est timbrée à 20 atmosphères. Son réservoir de vapeur est muni des deux soupapes de sûreté exigées par la loi, et d'un flotteur indiquant le niveau de l'eau dans la chaudière.

Le chauffage se fait à l'aide de pétrole lampant, préalable- ment gazéifié, puis mélangé à l'air pour former une flamme qui circule autour des tubes sur lesquels il ne se produit pas le moindre dépôt pouvant nuire à la vaporisation. En outre, la combustion complète du pétrole ne laisse échapper ni odeur, ni fumée.

La machine, de petite dimension et appelée à utiliser de la vapeur surchauffée allant jusqu'à 20 atmosphères, doit, pour pouvoir développer une force importante, être particulière- ment soignée dans sa construction. Elle est du type jumelle Compouud à quatre cylindres, dont 2 cylindres à vapeur d'admission et deux cylindres de détente. Les tiroirs de distribution doivent être cylindriques, car dans une publi- cation de mai 1016 intitulée Revue Générale des Applica- tions industrielles, M. F. Gyseling, directeur des Ateliers de construction H. Bollinckx, a dit dans un article sur les « Machines à vapeur modernes qu'un autre inconvénient des

381

machines à tiroir est qu'elles ne permettent pas l'emploi de vapeur à des pressions supérieures à 6 ou 7 kilos, et ces pres- sions exigent encore un bon graissage ; cet inconvénient résulte des pressions énormes qui s'exercent sur les tiroirs tout au moins dans les tiroirs plans. Il est dit également dans un opuscule intitulé « La surchauffe de la vapeur » publié par l'Institut scientifique et industriel de Paris, 2e édition de 1914, page 26 que la fonte supporte bien les effets de trac- tion et de compression, même soumise aux températures de surchauffe, mais que sa dilatation ne lui permet pas d'être em- ployée au-dessus de 250° à 300° pour la confection de cer- tains organes, par exemple de tiroirs plans, remplacés géné- ralement par des tiroirs cylindriques.

Pour diminuer autant que possible les effets de la forte pression de la vapeur sur les joints de la boîte dans laquelle circule chaque tiroir cylindrique, j'ai fait breveter un sys- tème spécial qui réduit considérablement les effets de cette pression.

Chaque boîte de distribution communique avec le cylindre par 3 orifices appelés « lumières >». Généralement celle du milieu est la lumière d'échappement et les deux autres sont alternativement, l'une la lumière d'admission et l'autre la lumière d'échappement. Dans mon système de tiroir cylin- drique, la lumière du milieu devient la lumière d'admission de vapeur, le tiroir étant creux et ouvert du côté des lumières sur une partie de sa longueur. La vapeur qui arrive de la chau- dière pénètre dans le tiroir, puis se rend dans le cylindre par une des deux autres lumières ; pendant ce temps, la vapeur qui s'échappe du cylindre sort par l'autre lumière en dehors du tiroir pour se rendre dans la boîte à tiroirs.

Ce qui constitue le grand avantage de ce système, c'est que le tiroir circule avec la vapeur en pression dans l'intérieur et que la tige qui commande ce tiroir peut être de faible dimen- sion parce qu'elle n'a que peu d'effort à faire.

Quant au graissage des cylindres et des tiroirs de distribu- tion, il se fait automatiquement à l'aide d'un graisseur méca- nique mû par la machine qui injecte l'huile dans la vapeur au fur et à mesure qu'elle arrive dans la machine.

Monsieur Mahieu, président de la Section, félicite M. Foi- dart de son intéressante communication. Il fait remarquer que le projet de tracteur établi sur les nouvelles données de

382

M. Foidart est pourvu d'une machine Coinpo-uud à 4 cylindres et d'une chaudière à serpentins pouvant être chauffée à volonté au moyen d'huile de paline ou de pétrole.

Imaginé en vue du Congo, il paraît appelé à y rendre de grands services.

4. Le président donne connaissance de la deuxième partie du travail de M. Willemoës d'Obry, hydrographe en chef au Congo belge, sur le balisage du Haut-Fleuve et sur la Navigation du Haut Congo.

Le balisage d'un fleuve à lit large et à fonds mobiles, d'une longueur de 2,000 kilomètres dans un pays désert ne s'impro- vise pas. !Nous avons pris connaissance des principes fonda- mentaux exposés si nettement par M. Roussilhe; il nous reste à examiner comment on peut les appliquer au balisage du grand bief.

Au point de vue financier, une des deux solutions suivantes s'impose : déterminer les travaux à exécuter et demander les crédits y afférents, ou subordonner les travaux aux crédits réguliers alloués par le budget.

Ce n'est pas l'exécution des travaux, mais leur organisation qui constitue la partie la plus ardue de cette entreprise.

Un balisage correct ne peut être fait que d'après une carte hydrographique donnant le relief du fond. Si les éléments limnimétriques et hydrographiques ne se trouvent pas dans les documents provenant de travaux antérieurs, on doit les calculer théoriquement, les supposer, les deviner même par les quelques renseignements, souvent fort aléatoires, fournis par les indigènes.

Le travail cartographique est basé sur les sciences géodé- siques et topographiques ; il exige des connaissances sérieuses et leur application aux conditions locales. Pour l'établissement d'une carte hydrographique, il faut posséder, avons-nous dit, un réseau de repères topographiques du chenal de la route à suivre.

Si le cours d'eau forme un chenal unique comme le Rhin et le Rhône, la carte topographique doit se faire ,sur les rives mêmes en y créant des repères.

Sur la plus grande partie du Haut-fleuve, on se trouve en présence de milliers de chenaux, il faut choisir la meilleure

383

route, c'est-à-dire celle ayant une profondeur suffisante. Ce choix arrêté, il importe de déterminer le degré de la pente aux eaux basses, en vue de la réduction des sondes. La pente n'a que peu d'importance, au cas les profondeurs du chenal dépassent de beaucoup aux eaux basses le tirant d'eau maxi- mum, mais son importance devient primordiale, s'il y a dans le chenal des seuils dont la profondeur s'en rapproche.

Dans un chenal à profil régulier, on pourra facilement cal- culer la pente d'après les mesures hydrométriques; toutefois, cette méthode n'est applicable sur le Haut-fleuve que sur quelques passes à fond rocheux assez stables pour permettre la mise en formule approximative des éléments hydrologiques. Si Ton coupait le grand bief en tranches de quelques kilomètres, en amont de Sandy-Beach, on ne trouverait pas une seule tranche dans laquelle le régime soit le même aux deux extré- mités.

De Stanleyville à Léopoldville, avec une différence d'altitude de 130 mètres, on arrive à une pente d'environ 7 centimètres au kilomètre. C'est la moyenne pour tout le bief. Cette connais- sance n'est d'aucune utilité quand il s'agit de faire le nivelle- ment du fond d'une section renfermant des seuils si on la rapporte aux eaux basses, parce que la pente varie presque toujours avec le niveau.

Nous avons constaté en 1913, qu'à deux mois d'intervalle, le niveau avait haussé de 1 mètre à Romée et baissé en même temps de 20 centimètres à Isanghi située à 80 kilomètres en aval de Komée, au confluent de la Lomami.

La pente moyenne de cette section avait donc augmenté de 1.5 centimètre par kilomètre et cette différence était nettement localisée sur une section de 20 kilomètres de longueur ; dès lors, la pente avait ici augmenté, non de 1.5 centimètre, mais de 6 centimètres par kilomètre. S'il existe un seuil au milieu de cette section, la profondeur ne correspond plus aux lectures faites aux échelles à Romée ou à Isanghi ; elle indiquera une différence de plus d'un demi-mètre, ce qui suffit pour barrer le passage aux eaux basses.

Il faut donc, pour la détermination de la pente ou, en d'autres termes, pour la rédaction de la carte de navigation, des obser- vations limnimétriques. Il en faut beaucoup, elles doivent être exactes, régulières, surtout aux eaux basses.

Dans son rapport sur la « Mission hydrographique du Congo

384

Ubangi-Sanga », M. Roussilhe constate qu'à la gorge du fleuve à Câlina, à 5 kilomètres en amont des rapides de Léopoldville, la pente augmente avec la décrue; il en est de même pour une partie de la passe française dans le Stanley-Pool. La vitesse est plus grande aux eaux basses qu'aux eaux hautes.

Cette situation n'est d'ailleurs pas particulière au grand bief.

Dans un canal à profil régulier ayant une libre sortie à l'aval, on augmente la pente et par conséquent la vitesse du courant en augmentant le débit à l'amont du canal. La pente s'élèvera avec le niveau, si la plus grande différence est à l'amont; et elle est inverse à la crue si l'amplitude, pour la même époque, est plus grande à l'aval.

A Léopoldville, nous nous trouvons en présence d'un barrage à vannes naturelles arrêtant les eaux de telle sorte que le niveau, au moment de la crue, augmente plus rapidement au barrage qu'en amont, tandis que, lorsque la crue cesse, les vannes restant ouvertes, les eaux baissent plus vite à l'aval.

Au Stanley-Pool même, la passe française relativement étroite et la j>asse belge très large, sont soumises à des régimes différents; les naréogrammes établis par M. Roussilhe nous en donnent la preuve. En prenant comme base la pente du 6 juillet, il est facile de constater qu'elle augmente considéra- blement en sens inverse à la crue et que de plus, elle n'a pas son application sur toute la section entre Câlina et le Couloir. (Voir fig. 1.)

Nous avons vu déjà, au Service Hydrographique, que dans la partie supérieure du Stanley-Pool (passe belge), la création de bancs sableux se produisait surtout au moment de la décrue. Cette circonstance permettait de présumer que dans cette région le courant diminue avec la décrue, c'est-à-dire que le régime du couloir entre Sandy Beach et Maluku est le même pour une partie du Stanley Pool.

En ajoutant aux maréogrammes précités celui de Maluku, qui est situé à quelques kilomètres de la sortie du couloir, nous nous rendons immédiatement compte que la pente moyenne entre Maluku et Léopoldville est sensiblement plus faible que celle entre le poste de bois dans la passe française et Léopoldville.

Nous avons cité ce cas qui n'a aucune importance au point de vue de la navigation pratique dans le Stanley-Pool afin de

385

démontrer qu'on trouve des régimes différents à petites dis- tances sur le grand bief.

En aval de Coquilhat ville, se trouvent partout des pas- sages d'une profondeur supérieure à 3 mètres aux plus basses

djudLst

Fia I

<6 Je/itemêr*

Pale à Loi*

L c'oholaLvLllc

JUet bentes </a/u le ôtanlejr Pool

eaux probables ; mais en amont de Coquilhatville commencent les passages à faible profondeur et à régime variable ; il est donc indispensable d'être en possession de documents limni-

386

métriques exacts avant d'entreprendre la rédaction définitive de la carte hydrographique.

Tant que ces documents n'existent pas, il faut avoir des échelles près des seuils afin de pouvoir en tout cas prendre, pour la réduction des sondes, la surface de la pente aux plus basses eaux constatées.

Avant de procéder aux sondages, il nous faut encore des repères fixes. la rive est élevée, on ne rencontre en général aucune difficulté. Avec un débroussement rapide, on pourra établir les stations nécessaires à la détermination des repères de sondages.

Nous avons va par la description du fleuve et de ses rives, que même en suivant celles-ci, nous nous trouverions, sur une grande partie du Haut-Fleuve, dans des terrains inondés pen- dant six à neuf mois de l'année.

La route ne suit pas toujours la rive, mais se trouve, le plus souvent, dans les chenaux entre les îles.

Il faudra au préalable connaître la région dans laquelle on devra travailler, afin de déterminer à quelle époque les tra- vaux topographiques pourront s'exécuter assez rapidement pour établir, en trois à cinq mois, un réseau de repères suffi- sant aux travaux de sondages qui dureront sept à neuf mois de l'année.

Les bancs de sable, cauchemar des capitaines, deviennent le rêve des topographes. Ces bancs sont d'excellentes stations topographiqnes : on a devant soi un vaste horizon, point de débroussement à faire, point de construction spéciale à édifier pour la mise en place de l'instrument.

La topographie pourra, certes, se faire dans la forêt et aux hautes eaux pendant les inondations, mais à quel prix !

Il faudra grimper dans les arbres le long de la rive, couper le tronc à une certaine hauteur, en niveler la surface à l'aide de ciment afin d'obtenir une table propre à recevoir le tachéo- mètre. Tous ces travaux préliminaires entravent les opérations et on n'avancera tout au plus que d'un kilomètre en cinq jours, alors que dans de bonnes conditions on arrive à faire 5 kilo- mètres journellement. L'établissement de la première carte devrait être plutôt le travail d'une mission spéciale et tempo- raire que celui d'un service permanent L'organisation du tra vail d'un service hydrographique ou d'une mission comprend

387

avant tout le groupement des divers travaux d'après les saisons et les régions.

Il est à noter qu'aucun autre travail cartographique n'offre une aussi belle occasion de se perdre dans des considéra- tions théoriques.

Les observations astronomiques, les opérations géodésiques, les travaux topographiques sont, si la carte doit avoir la valeur d'un document, aussi indispensables, que les sondages eux- mêmes, mais ils doivent être limités au strict nécessaire, notamment en ce qui concerne leur exactitude.

Il ne faut pas. perdre de vue que le but principal des tra- vaux hydrographiques est l'établissement d'une carte de navigation, c'est-à-dire d'une carte de grande précision locale, mais non pas une carte minutieuse au point de vue géodésique et topographique.

C'est ici que se rencontrent les plus grandes difficultés pour déterminer les voies à suivre. Si l'on ne dispose pas d'un per- sonnel très expérimenté en topographie et en somme en mathématiques appliquées on risque que ceux qui sont chargés de ces travaux soient éblouis par les décimales sans avoir aucune notion réelle des erreurs commises.

Ces erreurs pourront toujours être rectifiées par la suite, mais on s'aperçoit qu'on a j)erdu un temps précieux pour arriver à une précision que l'ensemble des opérations ne néces- site pas, ou que l'exactitude nécessaire n'a pas été obtenue.

Ici, comme dans les questions techniques de résistance des matériaux, il est toujours bon de se rappeler qu'aucune chaîne n'est plus forte que son maillon le plus faible.

Dans les travaux d'organisation ? il faut comprendre les limites des erreurs moyennes, en d'autres termes, il faut fixer les opérations géodosiques et topographiques de façon à obtenir V exactitude minimum nécessaire et en même temps écarter tout travail qui n'a pas pour but de tenir les erreurs commises dans les limites fixées.

Nous n'entrerons pas ici dans une description détaillée des simplifications que nous avons trouvé pratique d'apporter aux observations et aux calculs topographiques. Il suffit d'en citer trois exemples afin qu'on puisse voir comment nous avons pu faire tenir les travaux dans le cadre des connaissances en topographie, souvent très peu approfondies, du personnel disponible.

388

1 . Afin de réduire les erreurs delà compensation des angles, cette compensation est faite, autant que possible, par quadri- latère. Toutefois, la méthode utilisée aux grandes triangula- tions — méthode appuyée au théorème de Gauss relatif aux équations des angles et des côtés est beaucoup trop longue et trop difficile pour nos travaux et notre personnel. L'exacti- tude qu'on obtient par cette méthode n'est pas indispensable aux résultats que nous voulons obtenir, et l'organisation des travaux doit, ainsi que nous l'avons déjà dit, éliminer en premier lieu tout travail inutile.

Nous avons donc substitué à la méthode classique une autre qui. il est vrai, ne satisfait pas aux conditions des « moindres carrés », mais qui suffit amplement pour nos calculs, et qui a, ainsi que l'on verra, l'avantage d'être accessible à tout le monde.

Dans le quadrilatère ABCD nous avons les 8 angles mesurés :

(i)

(2) (8)

(8)

somme = 400 + Ef

Il faut avoir :

(8) + (l) + (2) + (3)

= (2) + (3) + (4) + (5)

= (4) + (5) + (6) + (7)

= :(«) + (7) . + (8) + (1) = 200 grades.

De ces équations nous tirons :

(H + (8) = (4) + (6) et l2)+(3) = (6)+(7).

En faisant a = b et c = d, nous avons :

a+c = b-{-d-= 200e

et nous faisons les différences a = :b ~ a = -7 {3

y=dTc = T8

et 200 -f (a+c) = A, 200 T (6+d) - A„

389

On aura alors les corrections, pour les couples d'angles a, b, c et d par les équations :

corr. a = 1/2 (a + A,vl/2 (a, - A„))

corr. b =■ 1/2 ((3+ A - 1/2 (a„ - Ai )), et les analogues.

Un exemple montrera la simplicité de l'application. A Sandy Beach, nous avions, en 1911, un quadrilatère avec les angles mesurés :

(0 =

28,7031

(2) =

41,2944

(3) =

39,8773

(4) =

65,7408

(5) =

55,0867

(6) =

19,65)8

(7)-

61,5193

(8) =

90,1240

somme = 399,9974 (Ef= +26" Nous faisons les deux colonnes I et II

+

4

+

2

Les corrections

-{-

2

trouvéespar la com-

+

2

pensation ci- des-

+

2

sous :

•+■

5

+

5

+

4

somme

+

26"

I

a (1) 28,7031 (8) 90,1240

II

b (4) 65,7408 (5) 53,0867

118,8271

a - + 4

118,8275

P--T4

c (2) 41,2944 (3) 39,8773

d (6) 19,6518 (7) 61,5193

81,1717 Y-t6

81,1711

y = + 6

199,9988 AI= + 12

199,9986

A„- + 14

contrôle : A* + An = + 26" = Ef.

Nous avons d'abord 1/2 (^ -f An) =^ 1 , qui entre avec signe contraire pour les deux colonnes.

Les corrections sont :

corr. a— 1/2 (+ 4 + 12 +1) = 17 : 2 = 2 x 4 corr. b = 1/2 (-f 4 + 14 -1 l) = 9:2 = 2x2

390

coït, c = i/2 (-f 6 4- 12 + 1) = 7:2 = 2x2 coït, d = 1/2 (+ 6 + 14 ^ 1) 19": 2 = 2 x 5

déterminées à une seconde près.

^Sous inscrivons ces corrections ci-dessus, et nous aurons alors les angles corrigés suivants :

(8) - 90,1244

400,000

(1) = 28,7035

(2) = 41,2946 j

(3) = 39,8775 j

(4) = 65,7410 l

(5) = 53,0869 ,

(6) = 19,6523 i

(7) -- 61,5198 j

(8) = 90,1244

(1) = 28,7035

En inscrivant l'angle (8) en haut de la colonne, et l'angle (l) en bas, nous avons un contrôle facile. Il suffit d'additionner les derniers chiffres pour quatre et quatre angles formant les triangles du quadrilatère (en commençant chaque série par un numéro pair). Ces sommes doivent toutes être des multiples de dix.

2. Il faut avoir un moyen facile, un tableau simple, pour reconnaître, pendant l'observation angulaire, si tous les angles sont suffisamment grands afin que les erreurs moyennes admises ne soient pas dépassées.

Il est évidemment trop tard, quand on découvre pendant les calculs faits souvent à des journées de voyage du lieu d'obser- vation, que certains angles sont trop petits pour qu'on puisse y appliquer les corrections d'après les méthodes ordinaires.

A cette fin, nous avons construit un tableau qui nous ren- seigne, sans calcul spécial, si les petits angles conviennent pour tenir les erreurs moyennes dans le cadre admis, ou s'il faut procéder à une réitération.

Le tableau est fait sur la base suivante :

L'erreur moyenne linéaire sur les côtés ne doit pas dépas- ser 1 : 10.000.

391

Les corrections pour excès sphérique et pour convergence des méridiens n'entrent pas dans les calculs.

Les erreurs principales et les seules dont nous tenons compte, sont celles qui sont toujours sensibles aux observa- tions topograpliiques : l'erreur de la pointée (Ep), et l'erreur de la lecture !E}).

La somme (Es) de ces erreurs peut être écrite comme

Es - f/E/ + E,2

Il faut que l'observateur réduise ces deux erreurs par un maniement très régulier de l'instrument et par une lecture uni- forme, mais les jeunes observateurs n'ont généralement pas la patience de consacrer à ces opérations le temps voulu.

Le nivellement exact, la mise au point de l'oculaire sur le réticule, et du système oculaire sur le repère sont souvent négligés.

La pointée n'est pas toujours, comme elle devrait l'être, terminée par un mouvement horizontal dans le même sens, ce qui a une grande importance, non seulement pour l'instrument l'on mesure les angles à l'aide d'un fil mobile et vis micro- métrique, mais aussi au tachéomètre, dont le calage du cercle vertical imprime presque toujours, par un mouvement de ce cercle, une erreur à la visée en déplaçant dans le sens hori- zontal la croisée du réticule.

A la lecture, la loupe doit être, pour chaque lecture, placée verticalement au-dessus des traits coïncidents du vernier, afin de ne pas donner une lecture oblique. On s'habitue vite à faire des lectures à un ou deux millièmes de grade près.

L'écart linéaire pour 1" d'arc n'esta la distance del kilomètre que de 1.5 millimètres, pour 15", donc seulement la moitié de l'épaisseur d'un jalon ordinaire, et l'on voit donc, que pour bisecter cette épaisseur, il faut que la mise au point de la lunette soit faite méticaleusement.

En admettant Es == l/gOO, déterminé comme l'erreur d'un observateur moyen travaillant avec le tachéomètre de S. H. (le double de l'erreur d'un observateur expérimenté), pour la simple observation, nous avons pour les observations à réitérations :

/2ÖÖ

392

Nous avons déjà fixé le maximum admissible de l'erreur linéaire à 1 : 10,000 pour la triangulation, et à 1 : 1000 pour les repères de sondages.

Souvent, même comme règle, nous devons travailler avec des triangles très allongés, ce qui fait qu'il y a presque toujours un petit angle dans chaque triangle de la chaîne principale.

Il faut savoir si la petitesse de cet angle exige une augmen- tation du nombre d'observations afin d'avoir la détermination de l'angle dans les limites d'erreurs admises.

Mais il faut avoir une méthode facile à employer en cours de route, au moment même de l'observation, et par un person- nel peu expérimenté en topographie.

Dans les travaux, nous ne nous occupons pas de la conver- gence des méridiens, ni de l'excès sphérique. L'azimut est pour nous le gisement, et la somme des angles d'un triangle est toujours 200 grades.

Les triangles sont calculés d'après la formule :

a = c. cosec C. sin A = 5. cosec B. sin A.

Si dans ces angles on introduit l'erreur e, on aura aY = c. cosec (C ± e) sin (A =f e) et donc, par ces deux équations :

log a -f- log ax log cosec C -f log cosec (C ± e) + log sin A -f log sin (A qF e). Or, log a -f log ax ne représente autre chose que la diffé- rence tabulaire du logarithme de a, comme log cosec C -f log cosec (C e) et log sin A -f- log sin (A =f <?) sont, à très peu près, les différences tabulaires pour e" des sin C et sin A.

Nous avons donc les conditions suivantes pour les erreurs maxima, en prenant comme différence tabulaire (Df) celle pour 100" :

a) Pour une erreur linéaire maximum de a : 1000 sur a

100

D* (log 1000) > Vt (log sin C) + Dt (log sin A) ;

b) Pour une erreur linéaire maximum de a : 10.000 sur a

10

Df (log 1000) > D* (log sin C) + T>t (log sin A).

Nous avons ici indiqué par C l'angle le plus petit du triangle.

393

Il peut y avoir deux petits angles, et l'on aura donc comme condition absolue pour l'erreur linéaire de 1 : 10.000

5 I)t{\og 1000) > (log sin C).

Si cette condition est remplie par le plus petit angle (C), on sait que l'erreur angulaire e ne donnera pas une erreur linéaire dépassant 1 : 10.000 sur les côtés du triangle.

L'erreur angulaire que nous avons admise comme erreur de

fermeture est 3e, et pour e = ^200, on aura e 14" environ.

La différence tabulaire entre les logarithmes de 1000 et 999 ou de 1000 et 1001 est (pour les logarithmes à 5 décimales) 43.

Les tables à 5 décimales donnent directement les différences tabulaires pour 100" (une minute centésimale) et nous avons ainsi, pour la simple observation sans réitération, que

x ^ 5 43

m (log sin C) <

ou, en d'autres termes, que la différence pour 100" du log sin C doit être inférieure à 15.

En cherchant dans la table, nous trouvons que cette condi- tion est remplie par C plus grand que 27 grades.

La forme allongée des triangles fait que nous ne pourrons compter avoir des angles de cette valeur; il faudrait, en effet, faire un très grand nombre de stations pour obtenir cette limite. D'ailleurs, c'est une règle sans exception, au service, qu'on mesure tous les angles de la chaîne principale au moins d'eux fois, à réitération.

L'expression e = % / nous donne approximativement

V n

our n = 2,

e= 10"

» n = 3,

e= 8"

» n -= 4,

e = 7"

<?e qui correspond, comme on le voit, à

T)t (log sin C) < 22, ou C > 19 grades. Dt (log sin C) <. 27, ou C > 16 " » D* (log sin C) < 31, ou C > 14 »

394

Ces limites sont toutes déterminées pour le cas le plus défavorable : celui d?un triangle avec deux petits angles.

Nous avons ici déjà des limites acceptables, qui pourront servir à notre but, qui est de trouver des règles simples et catégoriques pour donner aux observations topograpliiques l'uniformité indispensable.

Avec le plus petit angle de 19 grades, nous savons donc que nous pourrons continuer l'observation d'après les règles géné- rales, qui exigent pour les stations topographiques deux observations complètes ou quatre pointées.

Si un des angles est inférieur à 19 grades, on examinera simplement un tableau de poche, qui nous donne le nombre de réitérations à faire, si une augmentation du nombre des réité- rations est nécessaire.

Ce tableau nous dit e. a. que pour

A et B entre 60 et 140 grades, la condition est Dt (log sinC)

430

< 5, et pour A et B entre 30 et 170 grades la condition

e

devient

Dt (log sin C) < 12,

e

ce qui donne comme limite de l'angle C respectivement 11 et 14 grades.

Enfin, on pourra avoir encore des cas et nous en avons eus même ces conditions ne pourront être obtenues.

Il faut alors augmenter, au sommet qui renferme le petit angle, le nombre de réitérations. Mais il faudra aussi, dans ce cas, qu'on corrige les angles d'après leur valeur d'observations.

La méthode de compensation la plus facile est celle de Puissant, qui nous donne directement les corrections par les équations

n . Bf n . Ef n . Ef

a = 3 = Y =

na nb I nc

E/"est Terreur totale de fermeture; iia, nA, et nc les nom- bres d'observations aux stations A, B, C, et n un coefficient déterminé par

1

I

I I

= -

f. 1

11

na

nh n,

395

3. On aura souvent le cas qu'un repère de sondage ne peut être pointé que de deux stations qui sont invisibles l'une de l'autre. Il faut alors employer la méthode analytique et déterminer le repère comme l'intersection de deux lignes droites (AP et BP}.

- i/L *"?£?_ _ I^SMkP fc*J

Si les deux stations sont A et B, et le repère est à P, nous avons

x ■= xb + Dy . tg. e6, et y = yb + By

et pour Dy on aura l'expression logarithmique

D,, = cosec 9. eos 9b. sin (9 -f Qa) . cosec (9a %) . (xb xa) .

On n'aura donc qu'àremplir la formule suivante pour obtenir directement les coordonnées du point P.

xb log cossec 9 =

- x„

DX ' =

y& =

T J a

log cos

=

log sin (9 - 9fl)

==

log cosec (9a - 96)

=

log DX

=

DY =

log DX log DY

log tg9

log D„

+ log tg 9,

log D. D„ =

'a

K

r =

D. =

+ *t = a; =

39Ô

Ces calculs sont simples et rapides, et les. signes, qu'il faut ajoutera chaque fonction, pourront erre pris directement eu tableau, qui sert en même temps aux calculs des coordonnées

e

a

100 4- a

200 + a

300 4- a

Dy |

+ sin -r cos

cos

sin

-r sin COS

+ COS

-f sin

Les sondages se fout comme règle à la ligne, divisée à l'aide de marques de différentes couleurs facilement reconnaissables.

Les petits fonds pourront être sondés à l'aide d'une perche divisée.

Dans les sections à fonds sableux, la sonde peut être en plomb,, tandis que dans les fonds rocheux on emploiera des sondes en fonte de fer ou de bronze, de forme ogivale afin qu'elles ne s'accrochent pas dans les fentes et les crevasses.

Les profils doivent être suffisamment nombreux pour que les sondages donnent une idée générale du relief du fond, quand celui-ci est à plus de quatre mètres de profondeur à l'étiage et à fond mou...

Dans les passes étroites à fonds rocheux, les sondages exécutés en profils ne suffisent pas à assurer la sécurité de la navigation. les seuils rocheux out subi des éboulements, le fond peut être très irrégulier. Les pointes ou les crêtes des blocs détachés du massif, ou des macarons restés au milieu d'une crevasse ont souvent une crevasse trop petite pour être aperçue aux sondages ordinaires.

Il faudra d'abord dans ces passes sonder d'après des aligne- ments terrestres, ou même an cordeau, et puis, après avoir balisé provisoirement la passe présumée, repasser celle-ci avec un gabarit, afin de s'assurer qu'il ne se trouve plus aucune pointe dangereuse dans la route.

Le sondage au gabarit se fait à l'aide d'une barre de fer suspendue horizontalement sous le bateau et à une profondeur sous l'eau, qui est égale à celle à garantir plus le niveau du jour par rapport à l'étiage.

Les aspérités qui se trouvent dans une passe ainsi parcourue ne peuvent passer inaperçues, et c'est la seule méthode de sondage, qui présente une garantie absolue.

Les profils de la passe Belgica montrent quelques-unes des pointes rocheuses trouvées à l'aide du gabarit.

397

Pendant les' sondages, en passant d'un profil à l'autre,* il faut déterminer des points de la rive, donnant la configuration du fleuve, et aussi tous les points qui seraient utiles à la physionomie de la carte : confluents de ruisseaux et de rivières; villages indigènes et leur extension sur la rive; les clairières, les plaines et les falaises ; les groupes d'arbres caractéristiques, et tout autre objet qui pourrait servir de repère pour la navigation.

Les expériences acquises pendant les années 1911-1912 prouvent clairement, que les balises flottantes doivent être réservées exclusivement pour : les passes rocheuses; pour les sinuosités particulières dans les passages à fond mobile, et pour les grandes nappes d'eau, l'on ne pourra placer des repères de direction à terre.

Pendant toute l'année, mais surtout aux eaux montantes, lorsque le courant fouille la vase et le sable qui, pendant l'émersion ont été couverts de longues herbes, des îlots de ces herbes détachées, parfois de dimensions extraordinaires, descendent le fleuve et enlèvent toutes les balises, fixes ou flottantes, qui se trouvent sur le chemin.

Si le poids d'ancrage est trop faible, la bouée est entraînée avec son crin et son crapaud, jusqu'à ce qu'elle se dégage des herbes et se mouille quelque part dans le fleuve, ce qui est extrêmement dangereux dans les passes rocheuses une bouée déplacée pourra conduire les bateaux sur les roches.

Dansles passes à fonds sableux, le crapaud d'ancrage devient parfois la base d'un amas de sable, qui finit non seulement par englober le crapaud et une partie de la chaîne, mais par créer un véritable banc. Si le crapaud se trouve en amont d'un pas- sage transversal, la route qui devrait être indiquée par la bouée sera rapidement fermée.

Toutes ces difficultés nous ont suggéré une méthode de balisage consistant en des repères de direction, placés à terre, semblable au genre de balisage du Bas-Mississipi, mais sans lumières.

On commença par l'installation de quelques repères en vieilles tôles de fer, coupées en bandes de 2 à 3 mètres sur 20 centimètres, et blanchies à la chaux. Or, ces tôles, prove- nant d'anciennes coques de bateaux, rouillées et trouées, furent vite enlevées par les indigènes pour servir à la fabrication des

398

menus objets en fer, que confectionnent les forgerons noirs partout clans le Haut-Congo.

Xous avons donc du nous en tenir à des- planches pour la construction des repères de direction

Une seule planche, dont un bout est taillé en flèche, indique que les bateaux doivent se tenir près de la rive jusqu'au signal suivant. La passe étroite est dans la direction de la flèche.

Deux ou trois planches horizontales (on alterne le nombre pour ne pas exposer les bateaux à se diriger contre un faux repère) sont des signaux de direction pour traverser le chenal qui renferme la route.

Quand les îles sont nombreuses et peuvent donner lieu à méprise, la pointe de celle qu'on doit suivre est marquée par un triangle ou un rectangle, correspondant au profil des bouées coniques (rouges) et cylindriques (noires).

Enfin, la passe est très étroite, on construit des ali- gnements terrestres, qui consistent en deux triangles suspen- dus à des poteaux espacés, et placés de façon que, vus dans l'axe de la route, les deux triangles se présentent comme un X.

La table montre également le signal que nous avons adopté pour indiquer les endroits de bon accostage dans les chenaux rocheux.

Dans quelques stations sur le fleuve, il faut comme à Léopoldville, à Kinshasa, à Lisala et à Stanleyville tenir compte de l'arrivée d'un bateau après le coucher du soleil, et l'on pourra ici installer des feux de couleur, libres ou à écrans (secteurs) qui, vus dans la même verticale, donnent la bonne direction.

Un alignement à feux rouges existe à Léopoldville.

Les essais des couleurs phosphorescentes (Goldschmidt), présenteront un grand intérêt et pourront être utilisés éven- tuellement pour les voyants de certaines bouées et balises des ports, peut être même pour les repères de direction.

La carte de navigation doit indiquer le trajet à suivre par les bateaux, trajet appelé « route de navigation », que cette route soit balisée ou non,

La carte doit en outre contenir :.

1) Toutes les échelles d'étiage ;

2) Tous les hauts -fonds qui pourraient, aux basses eaux, avoir une influence sur la navigation;

399

3) La topographie des rives avec tout ce qui pourra servir de repères à la navigation ;

4) les points de bon accostage, notamment dans les chenaux à fonds rocheux.

Comme la carte doit être facile à manier, il faut que le format en soit relativement petit.

Les migrations des bancs exigent des modifications pério- diques du balisage ; la carte ne doit donc pas être définitive, du moins pour les régions mouvantes, mais faite sur feuilles aisément renouvelables.

Quant à l'échelle de la carte, elle doit suffire pour per- mettre l'indication nette des signaux et des seuils, même dans les passes étroites; mais il ne faudra pas exagérer. Les courbes équidistantes donnant le relief du fond n'ont aucune impor- tance pour la navigation, si la profondeur est supérieure à celle qui est nécessaire pour marcher à pleine vitesse. Comme les seuils limitent le tirant d'eau des bateaux aux eaux basses à lm.70, nous pourrons adopter comme profondeur suffisante à la navigation celle de 3 mètres.

Il suffit que la carte de navigation indique les courbes de trois, deux et un mètres, et les fonds émergeants à l'étiage.

Nous avons fait des essais avec des feuilles au 1 : 50,000 ^t au l : 25,000; nous nous sommes arrêtés à la dernière échelle estimée la plus pratique.

Le format des feuilles ne doit pas être trop grand pour qu'on puisse placer la carte ouverte sur une table ordinaire.

La carte de navigation ne doit donner que la route par rap- port à des repères naturels ou construits avec une exactitude locale. Elle n'est donc pas à considérer comme carte géogra- phique, mais exclusivement comme a vade mecum » des navi- gateurs.

La confection d'une carte générale du fleuve est un travail de longue haleine n'ayant pas, pour le moment, un caractère urgent. Il eut, évidemment, été désirable de posséder une carte hydrographique établie d'après une carte topographique détaillée comme cela se fait généralemeut, mais le balisage étant urgent ne pourra attendre l'achèvement de la carte topo- graphique du fleuve.

Nous pourrons toutefois éviter le double travail dans les parties du fleuve à sonder en apportant sur la carte hydro-

400

graphique tous les détails qui serviront en même temps à l'éta- blissement de la carte générale de ces parties.

Le service de la surveillance de la route de navigation et de l'entretien du balisage n'est pas nécessairement inséparable du service hydrographique. En plusieurs pays d'Europe, le pilo- tage, attaché à la Marine, assure le service du balisage d'après les levés hydrographiques.

L'organisation d'un service général de navigation devient, au Congo, une question assez compliquée à cause des diffé- rences qui existent entre les deux réseaux navigables.

Le Bas-Fleuve est navigable et balisé pour les bateaux de haute mer jusqu'à Matadi et le service des transports y est réduit au minimum.

Les ateliers ne doivent pas être outillés pour les grandes réparations, ni pour les constructions de nouvelles unités.

On applique ici l'aménagement d'un port de mer dans des conditions analogues à celles qu'on trouve partout et même plus favorables à certains points de vue à cause de l'absence d'une marée sensible.

Comme l'examen du bief du Bas-Congo n'entre pas dans le cadre de cette étude, nous ne verrons pas les détails des ques- tions d'hydrographie de ce bief.

Le Haut-Fleuve forme un réseau intérieur, d'une étendue considérable, qui par le seul fait de son extension limite forter ment les travaux techniques d'amélioration.

Comme dans toutes les colonies dépourvues d'un port de mer ou sans communication facile avec la mer, les travaux techniques sont, dans le Haut- Congo, très onéreux. En dehors du dérochement des seuils barrant la route, on ne doit pas chercher à améliorer les conditions de la navigation par des travaux techniques, mais bien par une surveillance effective donnant des renseignements sûrs, quant aux profondeurs de la route connue et éventuellement balisée.

Pour arriver à une solution satisfaisant aux besoins des transports fluviaux, il faut que les responsabilités des diffé- rents services soient faciles à établir.

L'organisation économique des transports fluviaux dépend des conditions locales autant que des ressources financières de la Colonie. Ce qui nous intéresse, c'est la situation et les conditions de travail d'un service de balisage chargé de la sur- veillance et de l'entretien de tout le réseau de navigation du Haut-Fleuve.

401 ,

Si ce service est englobé dans la Marine avec celui des trans- ports et qu'on le sépare du service hydrographique, les res- ponsabilités se divisent.

La surveillance et l'entretien d'une route de navigation, qu'elle soit balisée ou non, est un travail spécial qui doit néces- sairement être dirigé par un personnel expert en hydrogra- phie et connaissant à fond le bief.

La solution qui répond le mieux à l'état actuel de la naviga- tion sur le Haut-Fleuve et ses affluents, est de créer des services distincts, mais réunis, pour le Haut- Congo, sous une même direction.

La section du balisage pourra très bien être chargée d'études spéciales passes nouvelles, épaves, inspection des échelles d'étiage et autres constructions le long du bief du moins aussi longtemps que le travail du balisage se borne aux passes difficiles et dangereuses.

Mais quand le balisage comprendra toute la route du grand bief et les biefs des affluents navigables, la section devra s'occuper exclusivement de la surveillance des passes et de l'entretien de ce balisage.

Il ne faut pas oublier qu'un balisage non surveillé est un danger pour la navigation.

Les travaux techniques à effectuer sur un bief de 2,000 kilo- mètres sans compter les passes des affluents qui ne sont que partiellement connues, dépendent avant tout de l'importance des transports.

Les travaux d'amélioration du bief doivent, comme nous l'avons dit, pour autant que les transports ne nécessitent pas de constructions spéciales (épis, digues, etc.), se borner aux dérochements indispensables, afin d'obtenir la profondeur minimum correspondant à «elle sur les seuils sableux.

Ces travaux s'appliquent aux passes de l'île Bertin et du chenal de Gundji : un dérochement ne changera rien au régime du fleuve.

Les passes de Swinburne (Kasai), d'Aketi (Itimbiri) et de Yankwamu (Lomami) présentent vraisemblablement des situa- tions analogues encore à vérifier.

Mais les grands travaux de correction régularisation des rives; construction d'épis ou de digues longitudinales; aug- mentation de la profondeur générale, etc., ne sont pas urgents et ne peuvent pas être entamés sans un examen très minutieux des conditions locales.

402

Les théories sur ce qu'on pense pouvoir prévoir se heurtent souvent à des imprévus. Les exemples abondent.

Un des plus remarquables est celui des constructions faites dans le Paraguay.

L'expérience que les ingénieurs néerlandais y ont acquise leur avait permis de constater que dans un fleuve aussi capri- cieux, où les seuils se déplacent incessamment , on ne peut espérer obtenir une amélioration permanente. Ce au il faut en pareil cas, cest établir une triangulation servant de repère aux obser- vations hydrographiqnes et poursuivre celles-ci régulièrement .

Les travaux techniques sur le grand bief doivent donc se borner, en ce moment, à faire face aux situations imprévues, par des travaux provisoires et non par des travaux permanents.

Les seuils du Haut-fleuve, sur une partie de 7 à 800 kilo- mètres de longueur, ont un caractère très irrégulier, le bief n'y étant alimenté, pendant six à huit mois de l'année, que par les pluies qu'il recueille directement.

Le lit du fleuve, divisé en une multitude de chenaux, ne permet pas d'amélioration par dragage. Les profondeurs limi- tent tout simplement le tirant d'eau des bateaux, et les seuls travaux de caractère permanent qu'on pourrait effectuer, devraient avoir en vue l'obstruction successive des chenaux secondaires en amont des seuils principaux.

Le fleuve lui-même nous indique ce moyen. Beaucoup de chenaux ont été fermés (du moins aux eaux basses et ce sont celles qui nous intéressent) par des bancs ou des barrages sableux, formés par le dépôt d'alluvions autour d'un snag.

La construction d'épis est très coûteuse et le résultat n'est jamais assuré. Le barrage à l'aide de snags est beaucoup plus simple; il est aussi plus solide et moins cher. Mais ce travail exige une étude approfondie des conditions locales et une grande prudence dans son application.

D'ailleurs, la question vitale des transports fluviaux ne consiste pas dans l'augmentation des profondeurs mais dans la recherche du meilleur type d'embarcation pour le tirant d'eau dont on dispose.

(A suivre.)

ROYAUME DE BELGIQUE-

MINISTERE DES COLONIES

Renseignements de l'Office Colonial.

1920. 9e année. Juillet.

Contribution à l'étude du palmier à huile

I. Préliminaires.

Le palmier d'Afrique Elaeis guinéensis est une véritable source de produits économiques.

Les indigènes se servent de son feuillage pour la construction des huttes, d'abris artificiels pour semis. Le bourgeon terminal constitue un bon légume connu sous le nom de chou palmiste et le vin, extrait des différentes parties de l'arbre, sert de boisson et de levain. Les feuilles contiennent des fibres de meilleure qualité, paraît-il, que celles du chanvre ou du lin, mais on ne les utilise pas encore faute d'une méthode d'ex- traction économique. L'axe des régimes, après martelage, sert à la confection de brosses rudimentaires. Au point de vue du commerce international, les seuls produits importants sont les huiles et les amandes de palme, extraites, les unes et les autres, des fruits de l'arbre.

Ces fruits sont réunis en larges grappes, nommées régimes, dont la grosseur et le nombre varient beaucoup selon la variété de palmiers, les conditions climatériques, la richesse du sol. Les noix de palme ont la forme grossière d'une prune dont la grosseur et la couleur dépendent également des mêmes fac- teurs.

404

Au point de vue botanique la noix de palme constitue une drupe et se compose de trois parties bien distinctes.

L'épicarpe varie d'épaisseur. Il est constitué par une pulpe plus ou moins fibreuse chargée d'une huile semi liquide de couleur orangée qui fournit l'huile de palme du commerce. L'endocarpe est formé d'une écaille de consistance ligneuse dont l'épaisseur et la dureté varient beaucoup selon la variété de palmiers ; parfois il est réduit à un faisceau de fibres. Cet endocarpe porte ordinairement trois cicatrices ou pores dont l'un correspond à l'embryon de l'amande ; il renferme le plus souvent une amande, parfois deux et trois.

L'amande, second produit économique important, est de couleur rouge brun sombre presque noir extérieurement et renferme une chair blanche plutôt dure, chargée d'une huile blanche, connue dans le commerce sous le nom d'huile de pal- miste.

Au point de vue cultural on sait que le palmier à huile pousse de préférence dans les terres basses alluvionnaires, riches en humus, humides sans être marécageuses,

Il croît aussi bien dans les pays à climat équatorial que dans les pays à climat tropical, à condition de trouver dans ces derniers l'humidité suffisante.

Aux environs de l'Equateur, il pleut presque toute l'année. Et même si, comme c'est le cas à Eala, se manifeste une saison sèche d'un mois à peine vers la mi-juin jusqu'à la mi-juillet, l'humidité n'en reste pas moins forte par suite de l'abondante condensation de la rosée qui se produit chaque matin.

De telles conditions sont éminemment favorables au déve- loppement du palmier à huile. L'influence des pluies sur la production ne se fait donc pas sentir à l'Equateur ainsi que cela se constate dans les régions les saisons sont bien tran- chées. Il convient de remarquer que les peuplements de rap- port constituent de véritables cultures au même titre que les plantations de cacaoyers. Les peuplements non aménagés que que l'on rencontre sur l'emplacement des cultures d'anciens villages ou par îlot à travers la forêt secondaire, ne pourront acquérir de réelle valeur qu'après avoir reçu des soins appro- priés pendant plusieurs années consécutives. En effet, le pal- mier qui n'est pas entretenu ne donne qu'un rendement insi- gnifiant.

L'industrie du palmier à huile a, dans ses dernières années,

405

pris une importance énorme. L'utilisation des huiles de palme et des amandes en savonnerie, en stéarinerie et dans la fabri- cation de margarines a suscité une consommation formidable de ce produit. Les colonies productrices ont donc cherché à augmenter la production. Elles se sont d'abord aperçues que :

Le procédé indigène de préparation de l'huile était d'un faible rendement. Elles ont taché d'y remédier, notamment, en initiant les noirs à l'emploi de machines ;

Beaucoup de palmiers ne sont pas exploités ou le sont imparfaitement, faute de moyens de transport;

Ensuite, l'étude des variétés de palmiers a surtout été entreprise après la publication des résultats des recherches effectuées par le Dr. Preuss au Cameroun en 1902. Des champs d'expérience ont été créés en vue de pouvoir élucider la question si importante de la détermination des caractères spécifiques chez les palmiers connus. Enfin, des plantations ont été faites dans certaines colonies.

A ce point de vue il y a grand intérêt à connaître la valeur des diverses espèces de palmiers, afin de pouvoir recom- mander pour un milieu donné, celle qui lui convient et qui peut y donner le maximum de produits.

II. Variétés d'Elseis.

En 1851, Werwitscli a décrit deux variétés de palmiers à huile qu'il nommait Elaeis microsperma etElseis macrosperma. Depuis cette époque, peu de recherches avaient été faites, lorsqu'en 1902, Preuss publia les résultats de ses recherches au Cameroun il venait de découvrir une variété de palmier qui' lui semblait supérieure aux autres : c'était le Lisombe ou Taombe.

A partir de ce moment, nous voyons les Colonies anglaises et françaises entreprendre l'étude des divers palmiers à huile. Au Congo Belge, la Mission Laurent signalait déjà quelques variétés de palmiers rencontrées dans la colonie, d'autres furent encore observées parla suite dans certaines régions de la Colonie, à l'Equateur, dans le Kasai, au Mayumbe, dans la Province Orientale. Il faut cependant convenir que ces études, quoique bien intéressantes, sont encore incomplètes en ce qui concerne la connaissance de la composition chimique des diffé- rentes variétés signalées et, partant, la valeur économique

406

réelle de chacune d'elles. Envoyé à l'Equateur pour y étudier les variétés d'Elseis croissant dans les environs de Coquilhat- ville, j'ai eu la bonne fortune d'examiner des variétés non encore renseignées pour la région. Une seule variété connue par les indigènes sous le nom d'Eolongo m'a donné sept types différents tant par la coloration des noix que par leur teneur en huile et le nombre d'amandes. La variété Eseke dont les fruits sont verts avant maturité m'a permis d'étudier trois types bien distincts dont il n'avait pas encore été fait mention dans la région. Un quatrième type n'a pu être examiné, les régimes n'étant pas mûrs. Disposant de fruits frais en quantité suffisante, je me trouvais dans de bonnes conditions pour procéder à l'étude comparative des variétés d'Elœis.

Mes observations ont porté sur les fruits se trouvant vers la partie extérieure des régimes qui, non gênés dans leur crois- sance par la compression des autres noix, ne sont pas déformés comme les fruits de l'intérieur, dont la forme spécifique n'existe plus.

Variétés de palmiers.

Les elaeis rencontrés dans la région de Coquilhatville peuvent se classer en deux grands groupes :

a) ceux donnant des régimes dont les fruits sont noirs avant maturité :

b) ceux donnant des régimes dont les fruits sont verts avant maturité ;

Dans le premier groupe nous avons : a) l'élaeis connu par l'indigène sous le nom d'Eolongo (Yolongo, Ibolongo, Dybo- longo). Ce palmier est le plus commun.

b) Elaeis connu sous le nom de M'pée Esombe Ndje, c'est le Lisombe à petits fruits, de Preuss;

c) Elaeis nommé Djongo, c'est le lisombe à gros fruits, de Preuss ;

d) Elaeis appelé N'Kalanga ou Lofete poussant dans les marais ;

e) Elaeis à folioles soudées : c'est l'Elaeis guinéensis var. idolatrica, de Chevalier ;

Le deuxième groupe est constitué par les palmiers dont les fruits sont verts avant maturité. Il renferme :

L'Elaeis connu par l'indigène 'sous le nom d'Eseke (Eleke,

407

Doekumu, Libokumu). Ce palmier est relativement commun. Dans cette variété d'Eseke j'ai rencontré quatre types bien distincts que je signalerai comme :

I. Eseke Eolongo;

II. Eseke Esombe; :il Eseke ; IV. Eseke

offrant ainsi des ressemblances avec les variétés dn premier groupe.

La distinction entre les deux groupes peut se faire aisément à la vue des régimes; celle des variétés, à part le palmier à folioles soudées, ne peut se faire sans être en présence du fruit.

Les caractères que l'on pourrait déduire du port du pal- mier, de la coloration des pétioles, de la grosseur des régimes, de leur forme, de la vigueur de l'arbre, sont loin d'être spécifiques.

L'indigène lui-même, sans avoir la noix de palme en main, n'est pas capable de faire la distinction et, quand il sait dire à la vue d'an arbre, que celui-ci appartient à telle ou telle variété c'est qu'il le connaît pour en avoir récolté auparavant les fruits.

A côté de ces variétés, il en existerait d'autres encore d'après les indigènes ; celles qui ne donnent ni fleurs, ni fruits. Les indigènes m'en ont montré un exemplaire. D'autres ne porteraient que des fleurs mâles, tandis que d'autres encore n'auraient que des fleurs femelles.

J'ai observé également des palmiers portant des fleurs hermaphrodites; je ne puis en faire une variété spéciale, atten- du que sur le même arbre se rencontraient aussi des régimes normaux. Il s'agirait donc plutôt d'une forme accidentelle et non de la variété androgyne de Chevalier.

A. Premier groupe : Régimes dont les noix sont noires

AVANT MATURITÉ.

1 . Eolongo, c'est le nom donné par les indigènes au palmier le plus commun. Ainsi que je l'ai dit plus haut, j'ai pu étudier dans cette catégorie sept types différents tant par la colora-

408

t ion des noix, leur grosseur, les rendements en huile et amande.

ƒ Eolongo 82. La noix est de forme assez régulière, son extrémité est d'un noir violacé foncé, la teinte s'affaiblit rapi- dement, devient rouge-violacé lavé jusque vers le milieu, puis jaune orangé pour finir, vers le point d'attache, par une colo- ration jaune.

Cent noix pèsent 2,175 kilogrammes, renferment 51.73 p. c. de péricarpe oléagineux et 46.27 p. c. de noyaux. Ces derniers, après légère dessiccation, donnent 84.11 p. c. de coques et 15.89 p. c. d'amandes.

Le péricarpe oléagineux sec renferme 75.10 p. c. d'huile de palme ce qui* correspond à 49.17 p. c. sur pulpe fraîche (34.52 p. c. d'humidité). Son épaisseur varie de 3.75 à 4.2 millimètres. L'amande sèche contient 52.26 p. c. d'huile de palmiste ce qui rapporté à l'amande fraîche (par amande fraîche j'entends celle obtenue au concassage) donne 40.24p. c. Comme rendement, ce palmier donne pour cent noix de palme fraîche 25.43 d'huile de palme et 7.30 d'amandes.

La proportion de noyaux à deux amandes a été trouvée de 41.17 p. c. En ce qui concerne les dimensions des noix, noyaux, amandes et coques je m'en rapporte au tableau I.

II. Eolongo 166. La noix est de forme assez régulière, plus longue que le 82 et moins large. La teinte à l'extrémité est noir-violacé, s'affaiblit, quoique toujours foncée, jusque vers le milieu. A. partir de ce point, la coloration devient orangé clair pour se terminer par du blanc jaunâtre sur une largeur de 5 à 6 millimètres au point d'attache.

Cent noix pèsent 1 kg. 540, renferment 46.76 p. c. de péri- carpe oléagineux et 53.24 p. c. de noyaux. Ceux-ci fournissent après légère dessication 80.32 p. c. de coques et 19.68 p. c. d'amandes.

Le péricarpe oléagineux sec donne à l'analyse 60.73 p. c. d'huile de palme ce qui correspond pour la pulpe fraîche (58 27 p. c. d'humidité) à 25.33 p. c. d'huile, son épaisseur varie de 2.6 à 2.9 mm. L'amande sèche contient 54.45 p. c. d'huile de palmiste, l'amande fraîche v27. 68 p. c. d'eau) en en donne 39 38 p. c.

Cent kilogrammes de noix fraîches de ce type donnent 11 kg. 89 d'huile de palme et 10 kg. 71 d'amandes.

La proportion de noyaux à deux amandes a été de 5 p. c.

409

III. Eolong'o 89. La noix est plus longue, plus large que celles des deux espèces précédentes. La forme en est assez régulière bien que pourvue de surfaces planes assez nom- breuses.

La teinte noir- violacé de la pointe va en s 'affaiblissant jus- qu'au tiers supérieur environ, passe ensuite au rouge-orangé pour finirai! point d'attache par une faible bande jaune

Cent noix pèsent 2 kg. 285 contenant 56.24 p. c. de péri- carpe oléagineux et 43.76 de noyaux.

Ceux-ci au moment du concassage ont donné 77.41 p. c. de coques et 22.59 p. c. d'amandes. Le péricarpe oléagineux sec donne à l'analyse 77.14 p.c. d'huile de palme ce qui, par rap- port à la pulpe fraîche (28.02 p. c. d'eau), correspond à 55.53 p. c.

Son épaisseur varie de 3.8 à 4.15 millimètres. L'amande sèche accuse une richesse en huile de palmiste de 54.28 p. c. ce qui ramené à l'amande fraîche (18.10 p. c. d'eau) devient 44.46 p. c. Cent kilogrammes de noix de palme fraîches, don- neront donc 31 kg. 23 d'huile de palme et 9 kg. 58 d'amandes palmistes. La proportion de noyaux à deux amandes a été de 58.82 p. c.

IV. Eolongo 77. La noix est moins longue que celle des espèces précédentes, quant aux autres dimensions elles sont à peu près les moyennes des nos 166 et 89. La forme de ces noix est très irrégulière, présente beaucoup de facettes planes. La teinte violacée à la pointe s'étend en pâlissant jusque vers la moitié et très souvent moins. A partir de ce moment, la colo- ration devient très uniforme rouge-orangé pour finir près du point d'insertion par une bande jaunâtre de 2 mm. environ.

Cent noix pèsent 1 kgr. 180 accusant 45.77 p. c. de pulpe fibreuse et 54.23 p. c. de noyaux, lesquels donnent au concas- sage 81.89 p. c. de coques et 18.11 p. c. d'amandes. La pulpe fibreuse sèche fournit à l'analyse 81.06 p. c d'huile de palme, ce qui, en raison des 20.38 p.c. d'eau, correspond à une teneur de 64.54 p. c. par rapport à la pulpe fraîche. Son épaisseur varie de £.63 à 3.07 millimètres.

L'amande sèche renferme 53.40 p. c. d'huile de palmiste ou 46.90p. c. par rapport à l'amande fraîche contenant 12.17 p.c. d'eau. Cent kilogrammes de noix de palme fraîches donneront donc 29 kg. 54 d'huile de palme et 8 kg. 90 d'amandes.

La proportion de noyaux à 2 amandes a été de 20 p. c.

410

V. Eolongo 469. La noix est plus longue que le 77, moins longue que les 82-166-89, moins large et moins épaisse que les types examinés plus haut. La noix est de forme assez régulière, de teinte noir-violacé à la pointe allant en s'affai- blissant insensiblement jusque vers le milieu, devenant ensuite orangé-rouge et se terminant par du jaune au point d'inser- tion.

100 noix pèsent 1 kilogramme; donnent 47 p. c. de péri- carpe oléagineux et 53 p. c. de noyaux.

Ceux-ci fournissent à leur tour au concassage 77,78 p. c. de coques et 22,22 p. c. d'amandes. Le péricarpe oléagineux contient 74,09 p. c. d'huile de palme, ce qui rapporté à la pulpe fraîche (31,72 p. c. d'eau), équivaut à 50 p. c. Son épaisseur épaisseur varie de 2,17 à 2,35 millimètres.

L'amande sèche renferme 57,22 p c. d'huile de palmiste, ou 41,89 p. c. par rapport à l'amande fraîche (26,79 p. c. d'eau).

Cent kilogrammes de noix de palme fraîches fourniront donc, 23,78 kilogrammes d'huile de palme et 11,11 kilogram- mes d'amandes palmistes.

T7. Eolongo 298. La noix est moins longue que celles des types précédents, affecte une forme plutôt globuleuse bien que pourvue de nombreuses facettes planes. La teinte noir- violacé de la pointe va en s'affaiblissant insensiblement jusque vers le milieu elle devient orangée-rouge pour finir en orangé clair près du point d'insertion.

Cent noix pèsent 1 kg. 725.

Les proportions de péricarpe oléagineux et de noyaux sont de 59.43 p. c. et de 40.57 p. c.

Les noyaux au concassage donnent 77.02 p. c. de coques et 22 98 p. c. d'amandes.

La teneur en huile de palme du péricarpe sec est de 83.04 p.c., ce qui correspond à 63.44 p. c. par rapport au péricarpe frais (23.60 p. c. d'eau. Son épaisseur varie de 4.36 à 5.21 millim.J.

L'amande sèche donne à l'analyse 54.78 p. c. d'huile ou, par-rapport à l'amande fraîche (22.25 p. c. d'eau), correspond à 42.59 p. c.

Cent kilos de noix de palme fraîches donneraient donc 37 kg. 70 d'huile de palme et 8 kg. Il d'amandes palmistes.

VII. Eolongo 309. La noix est de forme assez irrégulière.

La pointe est noir violacé très foncé sur une épaisseur assez

411

limitée de 5 à 7 millimètres, puis la teinte s'affaiblit jusque vers le milieu en brun violacé assez clair. A partir de ce point, la coloration est orangée pour finir, sur une épaisseur de 5 à 6 millimètres, par une zone jaune clair.

Cent noix pèsent 1 kg. 660, donnent 50.13 p. c. de pulpe oléagineuse et 49.67 p. c. de noyaux.

Les noyaux, avant concassage, fournissent 83.87 p. c. de coques et 16.13 p. c. d'amandes.

Le péricarpe oléagineux sec contient 77.02 p. c. d'huile de palme, ce qui correspond à 52.78 p c. pour le péricarpe frais contenant 37.47 p. c. d'eau; son épaisseur varie de 3.21 à 3.29 millimètres.

L'amande sèche donne à l'analyse 50.23 p. c. d'huile de pal- miste, ce qui pour l'amande fraîche contenant 15.87 p. c. d'eau correspond à 42.26 p. c. Cent kilos de noix de palme fraîches renferment donc 26 kg. 46 d'huile. #

La proportion de noyaux à deux amandes a été de 25 p. c.

2. Esombe ou M'pee ou Ndje. La noix est de forme assez irrégulière avec nombreuses facettes planes, allongée, relati- vement peu large et peu épaisse. La pointe est couleur noir violacé sur une épaisseur de 1/2 centimètre environ, puis la teinte s'affaiblit jusqu'au tiers inférieur, avec des facettes orangé clair s'avançant par pointe jusque vers la moitié pour finir en jaune vers le point d'attache. Beaucoup de fruits de l'intérieur des régimes sont dépourvus de coque et d'amande, la coque est réduite à l'état de fibres. Poids de 100 noix, 1 kg. 160.

Ces noix renferment 86.20 p. c. de péricarpe oléagineux et 13.80 p. c. de noyaux. Ceux-ci donnent au concassage 50p. c. de coques et 50 p c. d'amandes.

Le péricarpe oléagineux sec contient 72.58 p. c. d'huile de palme, ce qui ramené au péricarpe frais (32.66 p. c. d'eau), équivaut à 48,88 p. c.;son épaisseur varie de 4.58 à 5.85 mm.

L'amande sèche accuse à l'analyse une richesse en huile de palmiste de 57.41 p.c. ou 48.05 p. c. si l'on part de l'amande fraîche contenant 16.31 d'eau.

Cent kilogrammes de noix Esombe fraîches donneraient donc 42 kg. 14 d'huile de palme et 6 kg. 04 d'amandes pal- mistes.

lia proportion de noyaux à deux amandes a été de 4 p. c.

412

3. Djongo. Ce serait, comme je l'ai dit plus haut, le Lisombe à gros fruits, de Preuss. Il est rare.

La uoix possède des dimensions plus fortes que les autres espèces, est de forme plus globuleuse, de teinte noir violacé à la pointe sur une épaisseur de 1 centimètre environ, puis rouge violacé lavé pour finir à la base par une coloration jaune.

4. N'Kalanga. ou Lofele. C'est un palmier quj, pousse dans les marais, il ne possède aucune particularité en ce qui concerne le port et les feuilles.

Les régimes sont hérissés de longues pointes épineuses résul- tant des bractées de l'inflorescence. Sans constituer peut-être un caractère spécifique de la variété, je n'ai pas vu de régime d'autres variétés possédant de si longues pointes.

Ces noix sont de dimensions plus faibles que celles des varié- tés examinées plus haut.

La forme est assez irrégulière, présente de nombreuses facettes planes.

La coloration de la pointe est noir violacé, légèrement lavé; elle s'affaiblit jusque vers le milieu pour devenir jaune orangé jusqu'à 2 à 3 millimètres du point d'insertion elle passe au jaune.

Cent noix pèsent 1,180 kilogrammes renfermant 47.46 p. c. de péricarpe oléagineux et 52.34 p. c. de noyaux.

Ceux-ci, au concassage, fournissent 70.43 p. c. de coques et 29.57 p. c. d'amandes.

Le péricarpe oléagineux sec donne, à l'analyse, 75.05 p. c. d'huile de palme ou 56.82 p c. par rapport au péricarpe frais contenant 24.29 p. c. d'eau. Son épaisseur varie de 2.87 à 2,9 millimètres.

L'amande sèche renferme 53.57 p. c. d'huile de palmiste, ce qui pour l'amande fraîche contenant 19.12 p. c. d'eau corres- pond à 43.33 p. c.

Comme particularité remarquée je signale que cette variété possède assez bien de noyaux à quatre pores (28 p. c. dans le cas examiné), une seule noix d'un régime n'avait pas de coque ligneuse, celle-ci était constituée par des faisceaux de fibres et n'avait pas d'amande.

100 noix pèsent 2kg. 440 contenant 86.06 p. c. de pulpe oléa- gineuse et 13.94 p. c. de noyaux. Ceux-ci, après concassage, donnent 57.15 p. c. de coques et 42.85 p. c. d'amandes.

413

La pulpe oléagineuse sèche renferme 79.69 p. c. d'huile de palme, ce qui rapporte à la pulpe fraîche (26.84 p. c. d'eau) devient 58.30 p. c. Son épaisseur varie de 7.59 à 8.27 milli- mètres.

L'amande sèche donne 52.11 p. c. d'huile de palmiste ce qui correspond pour l'amande fraîche (14.73 p. c. d'eau) à 4 4. 43 p. c. d'huile de palmiste.

Cent kilogrammes de noix Djongo fraîches donnent donc 50 kg. 17 d'huile de palme et 5 kg. 34 d'amandes.

Dans ce type j'ai constaté une proportion de 34.7 8 p. c. de noyaux à deux amandes.

A des intervalles différents, j'ai encore eu l'occasion d'exa- miner des régimes Djongo du même palmier ; les dimensions des noix sont à peu de chose près les mêmes et les différences dans la proportion des divers éléments, pulpe, noyaux, aman- des et coques sont renseignées dans les tableaux suivants. Les poids des régimes varient également pour le même arbre. Ceci nous montre suffisamment que pour avoir une documentation complète sur les palmiers à l'huile de nombreuses observations doivent être faites, néanmoins l'intérêt que présente l'étude comparative des variétés d'éîseis ne peut être nié.

Cent kilogrammes de noix N'Kalanga fraîches donnent 26 kg. 97 d'huile de palme et 14 kg. 41 d'amandes palmistes.

La proportion de noyaux à deux amandes a été de 31 .25 p. c.

5. Elœis à folioles soudées. C'est la variété Idolatrica, de Chevalier.

Ce palmier est facilement reconnaissable à son port; les folioles sont soudées entre elles, sur toute leur longueur, du moins au début par groupe de quatre ou cinq et même plus, et ce n'est que lorsque le vent intervient qu'une certaine séparation des folioles a lieu; néanmoins la soudure est tou- jours reconnaissable; je dois aussi remarquer que le port de l'arbre est plus ornemental, les feuilles sont plus dressées que dans les autres variétés.

Les dimensions de ces noix sont à peu de chose près celles des noix N'Kalanga. La forme en est assez régulière, glo- buleuse.

L'extrémité est d'une coloration noir violacé foncé allant jusque vers le milieu, parfois le dépassant; à partir de ce point, la teinte devient orangée pour finir en jaune au point d'insertion.

414

Les proportions de péricarpe oléagineux -et de noyaux sont respectivement de 18. 14 p. c. et 51.86 p. c.

Les noyaux rendent au concassage 77.73 p. c. de coques et 22.22 p. c. d'amandes.

La teneur en huile de palme du péricarpe oléagineux sec est de 73.38 p. c, ce qui, rapporté au péricarpe frais contenant 37.96 p. c. d'eau, correspond à 45 52 p. c. Ce dernier a une épaisseur variant de 2.33 à 3.21 millimètres.

L'amande sèche donne à l'analyse 52 70 p. c. d'huile de palmiste ou 41.04 p. c. si l'on part de l'amande fraîche conte- nant 22.12 p. c. d'eau.

Cent kilogrammes de noix fraîches de la variété Idolatrica donneraient donc 21.91 kilogrammes d'huile de palme et 11.11 kilogrammes d'amandes palmistes fraîches.

J'ai trouvé une proportion de 12 p. c. de noyaux à deux amandes.

B. Deuxième groupe : Régimes dont les fruits sont verts

AVANT MATURITÉ.]

Ce deuxième groupe est constitué par les palmiers nommés par les indigènes Eseke ou Ibeke, Ibokumu, Lebokumu, ils sont relativement communs.

Dans ce groupe, j'étudierai trois types bien distincts : l'Eseke Eolongo, l'Eseke Esombe et un troisième l'Eseke III, les deux premiers ainsi nommés par leur ressemblance avec les mêmes types du premier groupe. Le type Eseke IV n'a pu être étudié faute de régimes mûrs. Je n'en mentionnerai que la forme caractéristique et l'aspect du régime non arrivé à maturité.

Au sujet du palmier Eseke certains indigènes prétendent que la consommation d'huile de palme occasionnerait une maladie de la peau. Pour d'autres, rien de semblable n'existe; ils consomment indifféremment toutes les huiles. Leur préfé- rence semble cependant aller vers l'huile de palme fournie par l'Esombe et le Djongo, vraisemblablement à cause du rende- ment plus élevé de ces variétés en huile.

I. Eseke Esombe. La noix est relativement longue, peu large et peu épaisse et, comme l'Esombe du premier groupe, elle est de forme assez irrégulière avec de nombreuses facettes planes.

415

La noix avant maturité est vert foncé ; au fur et à mesure que celle-ci avance la teinte s'éclaircit.

A maturité la coloration est uniformément orangé rouge avec l'extrémité delà noix légèrement verdâtre ; le point d'insertion est assez large. De même que dans i'Esombe du premier groupe beaucoup de petits fruits se trouvant à l'intérieur du régime, ont la coque réduite à un faisceau de fibres et sont dépourvus d'amandes.

Cent noix pèsent 1 kg. 444, renfermant 81.71 p. c. de péri- carpe oléagineux et 18.29 p. c. de noyaux.

Ces noyaux au eoncassage ont fourni 50.82 p. c. de coques et 49.18 p. c. d'amandes.

Le péricarpe oléagineux sec contient 78.42 p. c. d'huile de palme, le péricarpe oléagineux frais avec ses 26.08 p. c. d'eau en contient 57.97 p. c. Son épaisseur varie de 5.42 à 6.20 mil- limètres.

L'amande sèche a fourni 54.81 p. c. d'huile de palme, ce qui correspond à une teneur de 46.56 p.c, si l'on se rapporte à l'amande fraîche, contenant 15,06 p.c. d'eau.

Cent kilogrammes de noix fraîches d'Eseke Esombe fourni- raient donc 47.37 p.c. d'huile de palme et 8.31 p.c. d'amandes, palmistes. La proportion de noyaux à deux amandes a été de 24 p. c.

2. Eseke eolongo est le plus commun des esekés.

La noix est de forme irrégulièrement ovoïde avec nombreuses facettes planes vert foncé avant maturité, rouge orangé à ma- turité avec anneaux jaunâtres aux deux extrémités.

Cent noix pèsent 1 kg. 500, renfermant 52. 18 p. c. de péri- carpe oléagineux, 47.82 p.c. de noyaux, qui rendent au eon- cassage 64.81 p. c. de coques et 35. L 9 p. c. d'amandes.

Le péricarpe oléagineux sec fournit 79.46 p. c. d'huile de palme, soit 60.11 p. c. par rapport au péricarpe frais (24.35 p.c. d'eau). Son épaisseur varie de 3.34 à 3.57 millimètres.

L'amande sèche donne 50.25 p.c. d'huile de palmiste, ce qui correspond à 37.24 p.c. par rapport à l'amande fraîche conte- nant 25.89 p. c. d'eàu. Cent kilogrammes de noix fraîches d'Eseke Eolongo donneront donc 31 kg. 37 d'huile de palme et 1 kg. 509 d'amandes fraîches.

3. Eseke III. La noix est de forme plus ou moins irré- gulière, plus longue que les deux autres types précédents, glo- buleuse vers le milieu avec rétrécissements aux deux bouts.

416

A maturité la coloration est orangé-rouge dans l'ensemble vers le sommet, la teinte est légèrement verdâtre et jaunâtre près du point d'insertion.

Cent noix pèsent 1 kg. 54 4, renfermant 51.65 p. c. de péricarpe oléagineux et 48.45 p. c. de noyaux.

Ceux-ci au concassage accusent les rendements suivants en coques et amandes de palme : 84.72 p. c. et 15.28 p. c.

Le péricarpe oléagineux sec donne à l'analyse 62.20 p. c. d'huile de palme ou 40.81 p. c. par rapport au péricarpe frais contenant 34.39 p. c. d'eau Son épaisseur varie de 2.9 à 3 millimètres. L'amande sèche fournit 64.40 p. c. d'huile de palmiste, ce qui pour l'amande fraîche contenant 30.64 p. c. d'eau équivaut à 44.77 p. c-.

Cent kilogrammes de noix fraîches d'Eseke III donnent donc 21 kg. 04 d'huile de palme et 7 kg. 13 d'amandes palmistes fraîches. La proportion de noyaux à deux amandes a été de 16 p. c.

4, Eseke IV. Ici le régime est plutôt petit, renferme peu de noix. Celles-ci assez volumineuses sont globuleuses vers le milieu et portent un rétrécissement marqué vers le sommet affectant vaguement la forme d'une poire renversée. Pour les raisons citées plus haut je n'ai pu en faire l'étude.

Le tableau I donne la composition des parties constitutives des régimes de palme frais et mûrs.

Le tableau II fournit les dimensions des différentes parties constitutives des noix de palme des variétés d'Elaeis étudiées. Au point de vue du poids des noix, de l'épaisseur du péricarpe oléagineux et des dimensions, la variété Djongo l'emporte sur les autres.

L'Esombe possède la plus faible épaisseur de coque, mais elle est encore suffisamment résistante que pour ne pouvoir être brisée à la dent. La noix de l'Eseke Esombe a une coque sensiblement la même que le Djongo, la noix est moins longue que l'Esombe, mais plus grosse que cette dernière et possède un péricarpe oléagineux plus épais.

Le tableau III donne la composition chimique des péricarpes oléagineux et amandes de palme.

Le tableau IV donne le rendement théorique p. c. des noix de palme fraîches des variétés examinées, avec la composition de leurs éléments constitutifs. Comme on le voit la teneur p. c.

417

Tableau 1. Proportion des différents éléments des régimes de palmier.

Variétés

Kég

ime.

Noix.

Noyaux.

Amandes.

O 3 ï

des palmiers .

Halles p.c.

Noix p.c.

Pulpe p.c.

Noyaux p.c.

Coques p.c.

1,5 a o

"> m °

® * 1

a. 5

c8

Eolongo 82

27 78

72.22

51.73

48.27

84.11

15.89

2.30

ld. 166

41.67

58.33

46.76

53.24

80.32

19.68

2.90

id. 89

42.31

57.69

56.24

43.76

77.41

22.59

1.37

Id. 77

30

70

45.77

54.23

81.89

18.11

5.09

ld. 169

44.12

55.88

47

53

77.78

22.22

3

Id. 298

45.29

54.71

59.43

40.57

- 77.02

22.98

5.27

Id. 309

44.88

55.12

50.13

49.87

83.87

16.13

3.20

Esombe 358

44.45

55.55

86.20

13.80

50

50

1.73

Djongo I

38.18

61.82

86.06

13.94

57.15

42.85

1.48

ld. VI

35

65

85.29

14.71

52.94

47.06

1.38

ïd. Vil

30.46

69.54

83.33

16.67

^53.84

46.16

1.38

N'Kalanga I

39.17

60.83

47.46

52.54

70.43

29.57

3.82

Id. II

38.73

61.27

49.79

50.21

70

30

2.77

P. à folioles soudées.

29.42

70.58

48.14

51.86

77.78

22.22

1.86

Eseke Esombe. .

48.96

51.04

81.71

18.29

50.82

49.19

1.39

Id. Eodongo .

46

54

52.18

47.82

64.81

35.19

4.93

Id. III

39.73

60.27

51.55

48.45

84.72

15.28

1.82

N. B. Cette perte avant concassage est due à l'évaporation d'eau provenant de la coque, pour la plus grande partie, et aussi de l'amande,

La proportion de pulpe dans les noix de palme est de 45.77 à 86.20 p. c, donc près du simple au double ; celle des amandes dans les noyaux varie de 15.28 à 50 p. c, soit plus du simple au triple.

418

Variétés des palmiers.

Eolongo.

Numéros d'acide.

82

166

89

77

469

298

Noix de palme.

T ( minima . Long"el"'| maxima.

380

399

416

319

369

330

523

555

571

430

493

438

T \ minima . Lar«cur 1 maxima .

289

212

280

245

203

281

35a

328

397

354

269

367

ri . i minima . Epaisseur < 1 ( maxima .

241

180

229

170

156

333

327

271

328

325

239

220

Noyaux.

, ( minima . Longueur |mMlma

282

296

269

224

272

246

397

453

438

330

402

344

Largeur minima ' & / maxima .

214

155

198

180

150

195

300

265

32 i

317

261

290

Épaisseur minima v \ maxima .

161

137

150

145

130

132

265

212

250

211

203

199

Coques.

Épaisseur! minima y ( maxima .

30

56

25 54

25 45

28 40

24 45

29 40

Amandes.

Longueur! minima- to / maxima .

137

162

175

124

150

119

213

220

230

182

226

182

Largeur j m!njma s ( mixima .

121

89

140

117

96

118

180

164

177

186

128

214

Épaisseur minima r ( maxima .

70

79

80

79

74

85

114

119

117

129

104

130

Noyaux à deux

amandes, .

41.17 °/0

5 %

58.82 °/o

20 °/o

Néant

Néant

Dimensions de ces

dernières.

Longueur j mlni.ma

° ( maxima .

150

200

150

118

220

221

269

177

Largeur j minima ( maxima .

94

164

139 144

80 164

110 166

Épaisseur! niinima / maxima .

59 91

74

82

56 120

55 121

Poids de 100 noix.

2,175

1,540

2,285

1,180

1000

1,725

Épaisseur de la pulpe.

gram.

gram.

gram.

gram.

gram.

gram.

37.5

26 à 29

38

26.3

21.7

43.8

à 42

à 41.5

à 30.7

à 23.5

à 52.1

N. B. Ces mensurations sont indiquées en dixièmes de millimètres.

419

Djongo .

N'Kalanga.

P. à fol. soudées.

Eseke .

!"

VII

I

II

Esombe

Eolongo

III

420

420

403

309

300

307

339

332

441

528

504

496

400

400

409

458

459

519

294

294

267

205

210

211

250

250

237

382

378

377

337

355

385

356

344

314

251

235

254

186

172

192

179

191

206

342

308

333

271

269

248

276

340

269

192

192

188

222

227

196

122

241*

319

239

259

248

332

316

290

332

273

374

149

140

145

145

135

142

92

172

181

246

230

229

287

259

241

212

255

249

138

117

127

136

126

128

73

114

150

178

171

196

209

212

215

168

214

211

12

11

11

21

19

23

9

21

32

19

16

17

35

28

41

20

36

45 "

141

132

133

129

148

110

94

146

174

167

180

169

199

200

177

176

242

203

119

112

106

88

101

78

72

130

100

138

146

134

176

189

151

148

191

138

103

84

86

73

79

69

53

92

77

129

117

123

128

153

142

112

159

108

34.78 °/o

20 "/o

52 %

31.25%

33 33 /o

12%

24%

Néant.

16 %

104

136

127

161

154

114

128

170

152

156

182

205

218

183

205

186

104

112

90

100

105

98

109

104

150

146

152

146

159

134

146

129

69

76

55

71

74

72

66

62

100

92

98

108

115

103

96

77

2,440

2,040

2,040

1,180

1,110

1,080

1,444

1,500

1,544

gram .

gram.

gram.

gram.

gram.

gram.

gram.

gram.

grain

75.9 à 82.7

75.9

75.9

28.7

28.7

23.3

54.2

38.4

±)

à 82.7

à82.7

à 29

à 29

à 32.1

à 62.9

à 35.7

à 30

419

Largeui Épaisse

Poids de 100 noix. , Épaisseur de la pulpe

Djongo.

N'Kal

anga.

P. à fol. soudées.

Eseke.

r™-

VII

I

Il

Esombe

Eolongo

F

420

420

403

309

300

307

339

332

lil

528

504

496

400

400

409

458

459

519

294

294

267

205

210

211

250

250

237

382

378

377

337

335

385

356

344

314

251

235

254

186

172

192

179

191

200

342

308

333

271

269

248

276

340

26!)

192

192

188

222

227

196

122

241-

319

239

259

248

332

316

290

332

273

374

149

140

145

145

135

142

92

172

181

246

230

229

287

259

241

212

255

t* iît

138

117

127

136

126

128

73

114

150

178

171

196

209

212

215

168

214

-211

12

11

11

21

19

23

9

21

32

19

16

17

35

28

41

20

30

i:.

141

132

133

129

148

110

94

146

m

167

180

169

199

200

177

176

242

203

119

112

106

88

101

78

72

130

100

138

146

134

176

189

loi

148

191

138

77

103

84

86

73

79

69

53

92

129

117

123

128

'153

142

112

159

108

34.78 "/o

20 o/0

52°/0

31.25%

33 33 la

12%

24 %

Néant.

16 °/o

104

136

127

161

154

114

128

170 186 loi 129

152

156

182

205

218

183

205

104

112

90

100

105

98

109

150

146

152

146

159

134

146

Ii2

69

76

55

71

74

72

06 96

77

100

92

98

108

115

103

2,440

2,040

2,040

1,180

1,116

1,080

gram-

54.2 à 62.9

1,500 gram.

1,544 grain

h

à 30

g'am . 759à82.7

gram. 75.9

gram:

75.9

gram.

28.7

gram.

28.7

gram. 23.3

33.4 à 35.7

à 82.7

à82.7

à 29

à 29

à 32.1

Ces mensurations sont indiquées en dixièmes

420

en huile de palme des noix varie de 11.84 à 50.17 selon la variété, la variation du rendement en amande est de 5.34 à 15.09 p, c.

Le tableau V renseigne les rendements théoriques p. c. en huile et amandes de palme pour les régimes frais.

Le rendement p. c. en huile de palme des régimes frais varie de 6.89 à 31.09, celui des amandes fraîches de 3.30 à 8.77.

Conclusions.

L'examen des tableaux IV et V nous montre que la variété Djongo l'emporte, à égalité de production, pour le rendement des noix et des régimes en huile de palme. Viennent ensuite l'Eseke Esombe, l'Esombe, etc.

En ce qui concerne le rendement en amandes de palme, les variétés N'Kalanga, Idolatrica, Eseke-Eolongo l'emporte- raient, mais par contre la production en huile de palme est faible. Il peut paraître intéressant dès lors de faire l'évaluation en argent des huiles et amandes de palrne fournies par les variétés d'Elaeis admettant comme base les prix de 245 et 155 francs par 100 kilogrammes. Pour cette évaluation je ferai la correction due à l'humidité des amandes de palme. Les amandes normales pérsentées au commerce contiennent une proportion d'eau que nous évaluons à 5 p. c. Nous tablerons donc sur des amandes à 5 p. c. d'eau. Valeur-argent fournie par 100 kilogrammes de régimes des différentes variétés d'Elaies.

421

Tableau III. Composition du péricarpe oléagineux et de /' amande de palme.

Variétés de palmiers.

Péricarpe oléagineux

p.c.

cc ep

■s S

G JA

«5 Ü

TS '<U

'C «5

*> «•

«D «S

eu

=1

3 O,

B. 'S

o.

û.

p.c.

p.c.

p.c

Amandes de palme.

«

.

22 -es

.eu

s «

as 'O

T3

'H «2

« S

g

S

= S

ffi

a |

«s

p.c.

p.c.

eu «

3 S

p.c.

p.C

Eolongo

Id.

Id.

Id.

Id.

Id.

Id. Esombe Djongo N'Kalanga.

82

166

89

77

469

298

309

358

1

1

Palmier à folioles sou dées . . . . .

Eseke Esombe .

Id. Eolongo . .'

Id. III ...

34.52 58.27 28.02 20.38 31.72 23.60 31.47 32.66 26.84 24.29

37.96 26.08 24.35 34.39

75.10

60.73 77.14

81.06 74.09 83.04 77 02 72.58 79.69 75.05

73.38

78.42 79.46 62.20

49.47 25.33 55.53 64.54 50.59 63.44 52.78 48.88 56.30 56.82

45.52

57.97 60.11

40.81

16.31 16.40 16.45 15 08 17.69 12.96 15.75 18.46 14.86 18.89

16.52 15.95 15.54

2i.80

22.99 27.68 18.10 12.17 26.79 22.25 15.87 16.31 14.73 19.12

22.12 15.06 25.89 30.64

52.26 54.45 54.28 53.40 57.22 54.78 50.23 57.41 52.11 53.57

52 70 54.81 50.25 64.40

40.24 36.77 39.3832.91

44.46 37.44 46.90 40.93

41.89 42.59 42.26 48.05 44.43 43.33

41.04

31.32 35.18 41.87 35.64 40,84 37.55

36.84

46.56 38.38

37.24 36.87

I 44.77:24.59

N. B. La teneur en huile du péricarpe oléagineux sec et des amandes sèches offre d'une façon générale relativement peu de différences.

La teneur en huile des palmistes sèches est élevée, supérieure à la moyenne renseignée pour les palmistes des colonies voisines. Cela doit vraisemblablement tenir aux conditions cliniatériques spéciales de la région envisagée.

Le chiffre donnant la teneur en huile des amandes de l'Eseké III est très élevé; un accident survenu au cours de l'opération doit avoir encore influencé sur le résultat.

422

Rendements théoriques pour cent des noix de

ers.

Péricarpes oléagineux .

Variétés des palmi

Eau.

Huile Fibres de palme. | et divers.

Total.

Eolongo

82

17.86

25.43

8.44

51.73

Id.

166

27.25

11.84

7.67

46.76

Id.

89

15.76

31.23

9.23

56.24

Id.

77

9.33

29.54

6.90

45.77

Id.

469

14.91

23.78

8.31

47 »

Id.

298

14.03

37.70

7.70

59.43

Id.

309

15.78

26.46

7.89

50.13

Esombe.

359

28.15

42.14

15.91

86.20

Djongo.

I

23.10

56.17

12.79

86.06

Id-

VI

85.29

ld.

VII

83.33

IVKalanga.

I

11.53

26.97

8.96

47.46

Id.

II

49.79

Palmier à folioles soudées .

18.28

21.91

7.95

48.14

Eseke Esombe . .

.

21.31

47.37

13.03

81.71

Id. Eolongo .

12.71

31.37

8.10

52.18

Id.

III.

17.73

21.04

12.78

51 .55

N. B —La colonne «amande» ne renseigne pas le poids exact des am

de la perte de poids des noyaux renseignés dans la colonne «perte avant concas

Le rendement des noix de palme en huile de palme est en rapport

423

'les avec la composition de leurs éléments constitutifs.

Noyaux .

Amandes.

*erte soncassage.

Amande.

Total .

Eau.

Huile de palmiste.

Tourteau.

1 30

7.30

48.27

1.68

2.94

2.68

i.90

10.71

53.24

2.96

4.22

3.53

L .37

9.58

43.76

1.73

4.26

3.59

>.09

8.90

54.23

1.08

4.18

3.64

\

11.11

53

2.98

4.65

3.48

>.27

8.11

40.57

1.80

3.46

2.85

L20

7.53

49.87

1.20

3.18

3.15

.73

6.04

13.80

0.99

2.90

2.15

,48

5.34

13 94

0.79

2.37

2.18

.38

6.29

14.71

.38

7.06

16.67

.82

14.41

52.54

2.76

6.24

5.41

.77

14.23

50.21

.86

11.11

51.86

2.46

4.56

4.09

.39

8.31

18.29

1.25

3.87

3.19

.93

15.09

47.82

3.91

5.62

5.56

.82

7.13

48.45

2.19

3.19

1.75

)S, mais bien le poids des amandes obtenues au concassage en tenant compte seur du péricarpe oléagineux (cfr. tableau II).

422

423

Rendements théoriques pour cent des noix de p4khes avec la

composition de leurs éléments constitutifs.

Amandes.

Huile de palmiste.

Palmier à folioles soudées Eseke Esombe . . .

Id. Eolongo . . .

Id.

Tourteau.

6.24

2.91

2.68

4.22

:;.:>;!

•4.20

3.89

4.18

3.64

4.(1;;

3.48

3.46

2.85

3.18

8.48

2.90

2.18

2.37

2.18

La colonne «amande» ne renseigne pas le P°Vf ayaa

-n

bien le poids des amandes obtenues

concassage

4.56

4.09

3.87

3.19

5.62

5.56

3.19

1.-:.

n tenai

t compte

de la perte de poids des noyaux renseignés dans la colonne ,«per ^ rapp0rt ppai8seur ^ e oléagineux (cfr. tableau U)-

Le rendement des noix de palme en huile de paim

424

Tableau V.

Rendements théoriques p. c. des régimes frais en huile et amandes de palme.

Variété des palmiers.

Huile de palme.

Amandes de palme.

Amandes

normales

à 5 °/o d'eau.

Eolongo .... 82

17.37

5.27

4.27

id 166

6.89

6.25

4.75

id 89

18.02

5.53

4.75

id 77

20.68

6.23

5.78

id 469

13.29

6.21

4.78

id 298

20.63

4.44

4.75

id 30$

14.58

4.15

3.67

Esombe .... 358

23.41

3.36

2.96

Djongo .... .1

31.02

3.30

2.96

N'Kalanga

16.41

8.77

7.46T

Palmier à folioles soudées.

15.46

7.84

6.42

Eseke Esombe. . . .

24.18

4.24

3.79

id. Eolongo

16.94

8.15

6.35

id. III

12.68

4.30

3.13

La quatrième colonne donne le rendement en amandes normales, c'est- à-dire celles que l'on présente généralement au commerce.

425

Tableau VI.

Variétés de palmiers.

Valeur de l'huile.

Valeur des amandes.

Totaux.

Djongo . .

76.00

4.59

80.59 f..

Eseke Esombe ....

59.24

5.87

65.11 »

Esombe

57.35

4.59

61.94 »

Eolongo .... 77

50.67

8.92

59.59 »

» .... 298

50.54

7.36

57.90 »

N Kalanga

40.20

11.56

51.76 »

Eolongo .... 89

44.15

7.36

51.51 »

Esrke Eolongo ....

41.50

9.84

51.34 »

Eolongo . ... 82

42.56

6.62

49.18 »

Palmier à folioles soudées .

37.88

9.95

47.83 »

Eolongo . . . .309

35.72

5.69

41.41 »

» .... 469

32.56

7.41

39.97 »

Eseke III

31.07

4.85

35.92 »

Eolongo .... 166

16.88

7.36

24.24 »

Ainsi qu'il ressort de ce tableau, à égalité de production eu poids de régime pour l'unité de surface, la variété d'Elaeis Djongo l'emporte de loin. Viennent ensuite, les Eseke esombe, Esombe, Eolongo 77, etc. Selon la variété de palmiers, la valeur argent des produits varie de plus du simple au triple.

42ö

III. Huile de palme des différentes variétés d'Elaeis.

J'ai fait l'analyse de six huiles de palme provenant de variétés différentes d'Elaeis de la région de Coquilliatville. Les résultats se trouvent consignés dans le tableau VII ci-dessous.

VII.

Variétés

Esombe.

Eolongo.

N'Ka- langa.

Djongo

Palmier à folioles soudées.

Eseke Eolongo.

de palmiers.

Rouge orangé.

Rouge

orangé

sale.

Jaune orangé.

Orangé rouge clair.

Orangé rouge foncé .

Jaune orangé pple.

Poids spécifique

, iOO°C

* 15"C

Indice de saponi- fication .

Indice d'acide .

Indice d'iode .

Indice de Helmer .

0.860

198.2 3.06 54.60 94.50

0.8598

197.20 10.07 54.79 94.76

0.8604

191.36

5.08

96.29

0.859

198.59 4.50

95.22

0.8598

205.43 5.77

95.44

0.860

198.28 6.65

95.73

La coloration qui est légèrement différente, mais dont l'appréciation est souvent délicate, ne peut constituer évidem- ment une caractéristique pour la détermination de l'huile. L'exposition au soleil, la température de chauffage de l'huile sont autant de facteurs qui la font modifier.

Quant aux autres indices, ils n'offrent aucune différence sensible entre eux. Des résultats semblables ont été obtenus pour la Côte-d'Or et le Togo.

IV- Production moyenne annuelle par arbre et poids moyen d'un régime.

L'Elaeis commence à porter ses premiers régimes vers l'âge de quatre à cinq ans, ceux-ci assez nombreux sont très petits; au fur et à mesure que l'élaeis avance en âge, les régimes grossissent parfois, diminuent en nombre; la produc- tion véritable ne commence que vers les huit à dix ans.

427

Beaucoup de facteurs interviennent dans la production d'an elaeis : les conditions climatériques, la nature du sol, les soins dont il est l'objet, les fumures, l'âge etc.; c'est dire que les chiffres que l'on peut renseigner pour la production moyenne d'un elaeis ne sont, la plupart du temps, que des variables dont il ne faut se servir qu'à bon escient à moins que les expé- riences n'aient porté sur un grand nombre de. sujets pendant plusieurs années et ce pour une région déterminée.

Pour l'année 1918 j'ai relevé pour les Elaeis étiquettes d'Eala les chiffres suivants :

Variété Eolongo : les 7 types s'y trouvent représentés en mélange.

Poids des régimes .

Poids des fruits.

Nombre de régimes.

Nombre d'arbres producteurs.

8543.45 kgrs . .

.5334,60

560

138

Le poids moyen d'un régime est de 15 kg. 256.

Le nombre de régimes par arbre et par an est de quatre.

Cent kilogrammes de régimes contiennent 62 kg. 44 de noix de palme et 37 kg. 56 de rafles.

D'autre part deux récoltes de régimes d'Eolongo faites le 29 juillet et le 6 août m'a fourni les pesées suivantes :

Date de récolte.

Poids des régimes.

Poids des fruits.

Nombre de régimes.

Nombre

d'arbres

producleurs.

29 juillet 1919 . 6 août 1919 .

384 382

339.5 239

25 25

15.360 15.280

Les proportions des noix et des rafles sont respectivement:

Pour la première récolte 62.37 p c. et 37.63 p c.

Pour la deuxième récolte 62.56 p c. et 37.44 p. c.

Comme on le voit tous les chiffres sont assez constants et sensiblement les mêmes que la moyenne, calculée pour les Eolongo voir tableau I. On pourrait admettre comme poids moyen d'un régime d'Eolongo 15 à 15 kg. 50 avec une

428

production moyenne par arbre et par an de quatre régimes. Au sujet de cette production moyenne il y a lieu de faire la remarque que ces elaeis ne sont pas tous en pleine production, il y en a de tous les âges et, de même que j'ai pu voir des pal- miers Eolongo ne portant que deux régimes, j'en ai vu égale- ment dont le nombre s'élevait à treize et dont le poids était au moins de 15 kilogrammes. Il s'agissait d'un palmier de vingt à trente ans.

En ce qui concerne l'Esombe, j'ai relevé pour les palmiers étiquetés d'Eala, pour l'année 1918 :

Poids des régimes. | Poids des fruits

Nombre de régimes I Nombre d'arbres.

847.45

498.75

56

Les proportions de rafles et de noix dans les régions sont de 41,42 p. c. et de 58.58 p. c Ce rapport est sensiblement le même que celui figurant au tableau I. Le poids moyen d'un régime est de 15kg. 133 et la production moyenne annuelle par arbre de 6 régimes.

Pour l'élaeis Eseke je relève à Eala pour 1918 et pour les palmiers étiquetés :

Poids des régimes.

Poids des noix. Nombre de régimes.

Nombre d'arbres,

454

103.95

42

Le régime renferme donc 67.49 p. c. de noix et 32.51 p. c. de rafles.

Le poids moyen d'un régime est de 12 kg. 833 et la pro- duction moyenne annuelle par arbre est de 6 régimes.

Pendant mon séjour à l'Equateur je n'ai pu examiner aucun Eseké d'Eala et je ne saurais donc dire à quels types ils se rattachent.

* *

En ce qui concerne les autres variétés, les renseignements ne peuvent être donnés, les expériences n'ont pu être faites ou n'ont porté que sur un ou deux elaeis et dès lors les chiffres obtenus n'ont aucune valeur.

429

Pour fixer les idées cependant, je signalerai que j'ai vu le palmier à folioles soudées portant cinq régimes paraissant plutôt petits et pouvant atteindre à maturité 10 à 13 kilogr. Le Djongo portait une dizaine de régimes de l'année; trois ont été cueillis à maturité; ils pesaient 17kg. 700, 20 et 22 kilog.

Deux régimes de N'Kalanga pesaient &3k.5 et 24 kilo- grammes. Ils provenaient du même arbre.

V. Rendement en huile des variétés d'Elaeis par voie sèche à la presse.

La méthode employée sera décrite plus loin quand nous ferons l'étude comparative au point de vue du rendement des diverses méthodes de préparation de l'huile de palme.

Il' faut dès à présent noter que cette méthode par le système de pression s'éloigne déjà de la pratique indigène. Ces expé- riences, ainsi que celles qui vont suivre, ont été faites avec la collaboration de M. l'agronome adjointCorbisierBalland. Nous avons pris toutes nos dispositions pour éviter les moindres fuites de matières premières et sous notre surveillance conti- nuelle, les semis ont été exécutés.

Je ne puis qu'exprimer toute ma gratitude à M. Corbisier qui, malgré ses nombreuses occupations à Eala, n'a pas craint d'en entreprendre d'autres encore.

Yoici, résumés en un tableau, les rendements en huile du péricarpe oléagineux des noix provenant de diverses variétés d Elaeis. Nous n'avons pu travailler sur les Eolongo examinés.

VIII. Variétés de palmiers.

Huile contenue

dans 100 kil. de noix.

Huile exprimée

par 100 kil. de noix.

Rendement.

Esombe 358

42k. 14

29k. 38

69.71 p. c.

Djongo ......

50k. 17

23k. i 2

46.08 «

N'Kalanga I

26k. 97

I4k. 45

53.57 ))

Palmier à folioles soudées .

2Ik.91

7k. 28

33.22 »

Eseke Esombe ....

47k. 37

25k. 55

53.93 »

Id. Eolongo ....

31k. 37

16k. 15

51.48 »

Id. III

21k. 04

7k. 40

35.17 »

430

Comme ou le voit, les rendements pratiques ne sont pas proportionnels aux teneurs des noix en huile de palme. Il est, en effet, difficile de donner aux pressées successives toujours la même pression. Nous arrêtons les pressions quand la boue commence à passer avec l'huile à travers la cage de la presse. Le rendement plus faible du Djongo ne s'explique pas autre- ment L'utilisation de la presse à filtre se justifierait pleine- ment ici.

VI. Étude comparative des méthodes d'extraction de l'huile de palme.

Voie sèche indigène;

Voie sèche à la presse ;

Voie humide indigène ;

Voie humide à la presse.

Les régimes cueillis, arrivés à maturité, ont été traités de la façon suivante : au moyen d'une machette on a procédé à l'enlèvement des épis de noix en les sectionnant près de l'axe du régime. Cela fait, les noix ont été enlevées à la main et net- toyées. Toutes les noix obtenues ont été mélangées soigneuse- ment et partagées eu quatre lots de 75 kilogrammes pour servir aux expériences comparatives.

Voie sèche. - A partie système de pression, la voie sèche indigène ne diffère en rien de la voie sèche à la presse. Description : les noix sont placées sur un treillis fait en bam- bou, reposant à lm.50 du sol environ, sur des traverses sou- tenues par quatre poteaux enfoncés dans le sol. Afin de ramol- lir la pulpe, .on soumet les noix ainsi disposées à un feu de bois pendant une heure et demie environ. Les noix sont alors placées dans un mortier indigène dans lequel par pilonage on déchiquette la masse. On sépare ensuite les noyaux à la main.

La palpe fibreuse déchiquetée est alors placée dans une large cuvette ou vieille tôle que l'on place au dessus du feu de façon à obtenir à la pression une meilleure séparation de l'huile.

I. Voie indigène. Entretemps un filet à forme d'augette de 0ra.50 de longueur, 0ra.20 de largeur efc 0.ml de profondeur a été préparé par l'indigène au moyen d'écorces de différentes plantes (lianes-palmiers grimpants, etc.), il l'attache à un sup- pôt t quelconque à hauteur d'homme soit au dessus de feuilles

431

de bananiers ou d'écorce d'arbres destinées à conduire l'huile dans un récipient ad hoc.

Pour éviter qu'une partie d'huile de notre expérience ne soit absorbée par le filet, nous avons d'abord fait une pressée avec d'autres noix ; il en a été de même avec la presse.

La masse fibreuse chauffée est placée dans le filet elle subit la pression, l'huile exprimée tombe sur la feuille de bana- niers ou Técorce de bois et se rend dans le récipient ad hoc. Une deuxième pression est faite après réchauffage de la masse fibreuse.

II. La masse fibreuse est placée dans la cage de la presse et elle subit la pression : l'huile s'écoule et tombe dans un réci- pient. De même que pour la voie sèche indigène nous avons arrêté la pression quand l'huile commençait à passer avec des impuretés (du péricarpe oléagineux de noix).

III. Voie humide indigène. Les noix sont mises dans une bassine avec de l'eau recouverte de feuilles de bananier et chauffées pendant 1 à 1 1/2 heure jusqu'à ramollissement de la pulpe. Les noix sont ensuite pilonées au mortier jusqu'à désa- grégration de la masse et la séparation des noyaux se fait à la main.

La pulpe restante est mise à part et laissée jusqu'au lende- main; l'indigène prétend que l'huile s'obtient plus facilement de eette façon, Le lendemain un grand bassin d'eau froide est apporté sur les lieux, la pulpe est malaxée dans l'eau, lavée entièrement et mise à part. L'écume huileuse qui surnage sur l'eau est recueillie. Au moyen d'un fouet (poignée de fibres au bout de bambou déchiqueté), l'indigène tapotte l'eau du bassin jusqu'au moment il ne se forme presque plus d'écume huileuse qui est recueillie.

Cette écume constituée par de l'huile, des impuretés et de l'eau est reversée dans la bassine et mise à bouillir, l'huile se dégage, surnage ; est recueillie par décantation.

Les impuretés, boue, eau, restent au fond.

IV. Voie humide à la presse. La pulpe obtenue comme il est dit plus haut, est chauffée au bain-marie et passée à la presse, de l'huile s'écoule de l'eau et des boues. Le tout recueilli est mis à chauffer au bain-marie et l'huile est ensuite décantée.

432

RÉSULTATS.

Chaque expérience a porté sur 75 kilogrammes de noix mélange homogène.

I. La méthode indigène par voie sèche à donné 13.52 p. c. d'huile;

II. La méthode par voie sèche à la presse a donné 1 8.36 p. c. d'huile;

III. La méthode par voie humide indigène a donné 10.66 p. c.

IV. La méthode par voie humide à la presse a donné 10.04 p. c.

Conclusions.

La voie sèche nous a donné un rendement plus élevé, la première méthode par voie sèche à la presse donne le maxi- mum, ce qui tient à la puissance de pression que l'on peut obtenir. La différence de 5 p. c. environ que l'on obtient milite en faveur de l'introduction, auprès des indigènes, de petites presses. Celle dont nous nous sommes servi est une presse du genre de celles à presser les citrons. Chaque pressée peut contenir environ 3 kilogrammes de masse fibreuse et le prix d'achat de la machine ne doit pas dépasser 75 francs.

La méthode par voie humide donne le moins, les opérations sont plus faciles, ensuite les boues résiduaires qui se déposent dans le fond de la bassine contiennent encore de l'huile à tel point qu'en certains endroits les indigènes s'en servent pour la fabrication de savon grossier.

Comme qualité d'huile obtenue d'après mes expériences antérieures, l'huile préparée par voie sèche verrait son acidité augmentée plus rapidement que celle préparée par voie humide. Aussi des huiles préparées en janvier 1918 par ces deux méthodes m'ont fourni les résultats suivants comme indices d'acides.

Tableau IX

Date d'expériences.

Voie sèche indigène.

Voie humide indigène.

13 mars 1918.

30 avril » .

G juin )) .

o juillet « .

5.54

8.60 10.97 11.92

4.15

5.12 5.20 5.19

433

La conservation est quelque peu différente. Je me hâte de faire remarquer cependant qu'à mon avis il y aurait moyen d'obtenir par voie sèche une huile meilleure que celle que l'on obtient parfois. En effet, dans le chauffage de la pulpe fibreuse, par suite de l'insouciance du noir, il se produit souvent des coups de feu, la masse en certains endroits se carbonise, décom- posant ainsi l'huile (l'odeur d'aéroline que j'ai aperçue plus d'une fois en est une preuve).

Il faut chauffer la pulpe à une température suffisante pour tuer les enzymes (70° est la température moyenne) et ne jamais dépasser 90 à 100°.

La méthode par voie sèche indigène et à la presse sont les plus rapides. Si nous représentons ces durées par 0.75, la méthode par voie humide à la presse est 1 et la méthode indi- gène par voie humide est 11/4.

Il résulte de nos expériences qu'un indigène non habitué peut produire par voie sèche de 1 kg. 75 à 2 kg. 50 d'huile de palme par jour.

Le concassage des 44 kilogrammes de noyaux obtenus dans une opération nous a fourni 8 kg 1/2 d'amandes, il a coûté quatre journées de travail à un homme. Un indigène habitué au concassage de noyaux peut fournir 2 kg. 125 d'amandes par jour.

VII. Ennemis des Elaeis.

Les dégâts causés par les insectes dans les palmeraies n'ont pas jusqu'à présent retenu l'attention, bien que plusieurs espèces aient été examinées déjà.

Parmi les oiseaux, il faut signaler particulièrement celui désigné sous le nom de « républicain-gendarme », Ce petit passereau utilise les folioles de l'Elaeis, qu'il réduit en lanières, pour construire son nid sur le pétiole même.

Ces passereaux se rencontrent surtout près des villages. Leur nombre, leur faculté de reproduction élevé en font peut- être, jusqu'à présent, les pires ennemis des Elaeis.

Je dois encore mentionner comme ennemis des Elaeis, ces arbres epiphytes, tels les ficus, qui se développent en un point- support quelconque (encoche laissée par la base engainante du pétiole d'une vieille feuille) et dont les racines descendent le long du tronc en l'enserrant, finissant par atteindre le sol pour

434

s'y enraciner. A ce moment le ficus peut atteindre de grandes dimensions, former parfois, comme je l'ai vu, un tronc plus puissant que celui du palmier qu'il finit par tuer. Ceci se remarque sur les palmiers uon entretenus. Il en est de même en ce qui concerne d'autres plantes epiphytes : fougères, lyco- podes, etc.

Reste encore un ennemi que je n'ai rencontré que sur de vieux troncs de palmier. C'est un champignon tabulaire à sur- face supérieure blanche, inférieure brune qui fait périr le palmier.

Avant de terminer, je dois ajouter que M. l'Agronome- adjoint Corbisier-Bulland a semé en pépinières les variétés de palmiers que j'ai étudiées. Il sera dès lors intéressant de se rendre compte, dans cinq ou six ans, des résultats obtenus quant à la transmission des caractères spécifiques de chacune d'elles, sans laisser se perdre les fruits d'une étude sur les variétés d'Elaeis de la région de Coquilhatville.

L'intérêt que présente la transmission par semis des carac- tères spécifiques des différentes variétés d'Elaeis est énorme et les essais faits jusqu'à présent dans cet ordre d'idée sont encourageants pour l'avenir.

Septembre 1919, Le chef du Laboratoire de Borna,

L. TlHON.

NOTE COMPLÉMENTAIRE.

Mon séjour dans la région de Coquilhatville a duré du \\ juin au 22 août 1919. J'ai visité Bakusu, Ipeko, Muke-Ipeko, Munene, Bosoto, Boyeka, Coquilhatville et Eala. C'est ici que j'ai procédé aux essais physiques sur des régimes récoltés à Eala pour la plus grande partie, à Banalia, Lpeko, Coquilhatville pour le reste. Il ne m'a pas toujours été possible de procéder à l'examen de plusieurs régimes de la même variété ; il en a été ainsi pour l'élaeis à feuilles soudées et l'Iseke Esombe dont je n'ai pu obtenir qu'un régime. Pour le n'Kalanga j'ai pu opérer sur deux régimes. Pour le Djongo, d'abord, sur trois régimes, puis, vers la fin de la mission, sur deux nouveaux régimes. Pour les Elonga j'ai pu examiner jusque cinq régimes.

Bien que le nombre de régimes ne soit pas très important, les premiers résultats acquis sont comparables à ceux obtenus pendant la période d'un an au jardin botanique d'Eala pour les elaeis qui s'y trouvent des éolongos ne forment ici qu'un groupe). Au surplus, mes résultats n'ont pas la pré- tention de refléter l'exacte vérité. Il est un point sur lequel j'insiste c'est qu'en ce qui concerne la valeur comparative des variétés étudiées, mes •résultats ont toute leur valeur.

435

Toutes les déterminations physiques ont été faites à Eala (mensurations, pourcentages, rafle, noix, pulpe, noyaux, coques, amandes) en tenant compte des pertes de poids éventuelles pour ramener les pourcentages à la matière fraîche.

Les mensurations ont été faites sur des noix de l'extérieur des régimes pour les raisons indiquées dans mon rapport et en procédant au moyen d'un vernier dont j'étais pourvu. Au cours des expériences faites, à Borna, auparavant et que j'ai renouvelées surplace avec 25, 50, 100 noix, je me suis arrêté au chiffre de 25 noix pour les mensurations, ce nombre est suffi- sant. Les moyennes calculées sur l'ensemble et la moyenne des extrêmes sont égales à 0.1 ou 0.2 millimètres près. Ces 25 noix étaient prélevées par moi personnellement, aucune opération essentielle n'a été abaudonnée aux noirs. Le pourcentage des éléments de noix a été établi sur 100 noix, d'un poids variant assez sensiblement comme on peut le constater d'après le rapport.

Ces divers prélèvements ont été effectués par moi personnellement. Mon aide de laboratoire et un moniteur agricole ont dépulpé ces noix au moyen de couteaux, sans perte et sous ma surveillance. Des pesées de contrôle étaient faites chaque fois de même que pour le concassage des noyaux, à l'occasion duquel j'ai tenu compte de la perte de poids par dessiccation (le concassage se faisait après cinq ou six jours d'exposition à l'air). Les éléments destinés à l'analyse ont été prélevés et pesés par moi. La pulpe (échantillon moyen de 100 à 150 grammes environ) a été logée dans des tubes en verre (complètement remplis), légèrement tassée, addi tionnée de quelques gouttes de formol pour éviter l'altération. Ces tubes bouchés au liège (bouchons neufs) ont été paraffinés, étiquettes et soigneu sèment emballés après nouvelles pesée. Après des périodes de quatre à cinq mois, les échantillons paraissaient entièrement frais; aucune altéra- tion ne s'est manifestée. J'ai tenu compte des pertes de poids éventuelles (2 fois sur 15). Les amandes entières, saines, moyennes, ont été prélevées à concurrence de 200 à 250 grammes pour servir à mes analyses à Borna. J'ai tenu compte des pertes de poids éventuelles (celles-ci comptées comme eau .

Pour les analyses, j'ai utilisé les méthodes ordinaires et la technique habituelle. L'extraction des matières grasses faite au tétrachlorure de carbone a porté sur 10 à 20 grammes de matière sèche rendue homogène (dessiccation à 99-100,J). Extraction à l'aide de l'appareil Soxhlet suivant la technique habituelle. Chaque substance a exigé deux extractions sépa- rées par la pulvérisation complète au moulin de la matière après une pre- mière extraction partielle suivie de dessiccation, en prenant tous les soins voulus et sans perte de matière. Ces analyses ont demandé un mois et demi ioctobre-novembre). Les analyses d'huiles ont été faites par moi : quatre échantillons d'huiles provenant de quatre variétés d'élaeis (prépa- rées par l'Agronome de District à Coquilhatville en 1918) avaient été analysées en avril et mai 1918 ; les deux autres, Djongo et Idolatrica, l'ont été en octobre 1919 sur des huiles que j'ai fait préparer et sur lesquelles j'ai effectué un prélèvement.

Le Chef du Laboratoire, L. Tiiion Ingénieur-Agronome.

436

Commerce de la Colonie

Statistique des importations et exportations.

Les résultats généraux du commerce du Congo belge durant les années 1914 à 1918 se présentent comme suit :

Commerce général.

Le commerce général comprend l'ensemble des entrées et des sorties de marchandises, quel que soit leur provenance ou leur destination, c'est-à-dire commerce spécial et transit.

Le commerce général d'importation s'est élevé en :

1914. 1915. 1916. 1917. 1918.

159,585,496 kilogr. valant 51,603,969 francs

90,239,208 29,620,585

150,890,751 68,739,799

162,555,539 71,610,997

150,243,600 87,926,590

Le commerce général d'exportation s'est élevé en

1914. 1915. 1916. 1917. 1918.

35,791,785 kilogr. valant 61,211,051 francs

41,404,848 69,122,237 89,765,971 70,055,101

82,488,114 147,442,715 184,948,166 123,361,531

Le commerce spécial qui comprend exclusivement à l'entrée les marchandises consommées dans lepa}^. et à la sortie les produits d'origine locale, s'est élevé à l'importation en :

1914. 1915. 1916. 1917. 1918.

154,097,289 kilogr. valant 44,492,138 francs

85.866,289 23,453,243

143,869,605 53,765,830

157,705,925 59,699,700

144,012,838 74,588,093

Le commerce spécial d'exportation s'est élevé en :

1914. 32,447,195 kilogr. valant 52,874,756 francs

71,994,714

1915. 1916. 1917. 1918.

38,213,526

62,844,140

81,975,438

65,607,757

129,431,604 164,327,591 111,968,877

437

L^°->)

J / A

■^ooc/oortcz u'ons / 1 »

(<UH-^iM

o -7-rvi -rr^n^C €_

^llilM

jillueo 5^||f»||||»$||||ij^^^*|?^?l^i^?H

.Out I

tli

438

/m

i/o

7' 'li- /iS '/So Hf

'ff.

t/S

r

iC

L, Si St iS i/o JS

C

o-?rijriesï.eLe -<?**?.

7t e^r^r.Z

'ij L».cetL^

^ »i 1 °i ?.. r>

3 /Vw^ » i 3 t

u_

439

L&

K

/'»

'ff &

/Vo 'ÎS lio 115-

/Zo "5 //C

J' SS

S D

?"

ei

4o SS

^Lc

-^rfTTTfff

* - - - ^

4^{vUÜL*£ Allé . ."-'; ,

^

yi3

\!<tofr/l//l//tttl\ (Q-c^-*CLA^tvCa^> ^lv -TVvXa yvAMAw fc-<1

440

C_X

'/'

Hf

lie

n ?>J

tAA/l^ £tA

^/Tri^Ut /

441

Tableau des principaux produits exportés du Congo belge

depuis 1914.

PRODUITS

1914.

Commerce spécial.

Quantités.

Valeurs

Commerce général.

Quantités.

Valeurs.

Cacao Café .

Caoutchouc

des herbes

de lianes Copal Coton

Cuivre brut . Diamants Huile de palme Ivoire brut . Mabula Panza Minerai d'étain Noix palmistes Or brut . . Peaux brutes Ramie et autres fibres Riz

Kg.

482,360

10,367

408,927

1,839,912

6,993,063

55

10,343,466

24,000 c,s

2,498,386

295,496

2,871

30,957

8,052,176

929k.716

81,850

469

422,237

Fcs. 602,950

15,550

1,431,244

9,199,560

6,293,757

55

15,515,198

600,000

1,573,983

7,091,904

718

89,983

3,623,479

3,195,434

147,330

352

147,783

Kg-

488,012

37,638

599,459

2,499,918

7,005,400

55

10,604,511

24,000 cts

2,541,251

409,090

2,912

30,957

8,625,025

929*. 716

83,098

469

422,237

Fcs. 610,015

56,457

2,098,106

12,499,590

6,304,860

55

15,906,766

600,000

1,600,988

9,818,160

728

89,983

3,881,261

3,195,431

149,576

352

147,783

442

PRODUITS.

1915.

Commerce spécial .

Quantités. Valeurs.

Commerce général.

Quantités.

Valeurs.

Cacao Café .

des herbes

Caoutchouc

/ de lianes. Copal . . Coton

Cuivre brut . Diamants Huile de palme Ivoire brut . Mabula Panza Minerai d'étain Noix palmistes Or brut . . Peaux brutes Ramie et autres fibres . Riz . .

Kg-

619,819

30,796

876,909

1,301,941

4,265,653

2,931

14,274,142

30,300 cts

3,407,813

214,932

726

40,250

11,023,913

3,934k.834

72,584

5,023

1,140,048

Fcs.

1,146,665

37 ; 879

3,946,090

7,160,675

2,815,331

2,931

28,548,284

757,500

2,129,883

4,588,798

181

120,750

5,181,239

13,524,025

163,314

3,767

Kg.

619,819

77,928

1,446,246

2,249,918

4,337,317

2,931

14,274,142

30,300 cts

3,427,547

297,872

726

40,250

11,958,754

3,934k.834

75,017

5,227

456,019 1,200,588

Fcs.

1,146,665

95,851

6,508,107

12,374,548

2,862,629

2,931

28,548,284

757,500

2,142,217

6,359,567

181

120,750

5,620,614

13,524,025

168,789

3,920

480,235

443

PRODUITS,

1916.

Commerce spécial.

Quantités,

Valeurs,

Commerce général

Quantités. Valeurs.

Cacao Café .

Caoutchouc

des herbes

de lianes. Copal

Coton . ... Cuivre brut . Diamants Huile de palme Ivoire brut . Mabula Panza Minerai d'étain Noix palmistes Or brut . . Peaux brutes Ramie et autres fibres . Riz

Kg.

769,839

23,044

1,043,271

1,974,229

8,676,621

11,258

21,882,086

58,350 c?;

3,851,879

360,418

25,905

25

22,390,571

2,851k.583

70,275

12,547

901,512

Fcs. 1,424,202

26,501

5,529,336

11,944,085

5,379,505

25,330

63,895,691

1,458,750

3,351,134

7,929,196

9,585

104

12,762,625

9,800,891

243,854

12,547

389,620

Kg.

769,839

132,293

1,875,704

3,200,391

8,718,773

12,332

21,882,086

58,350 cts

4,120,412

448,785

25,905

25

24,992,006

2,851k.583

75,199

13,001

1,004,915

Fcs. 1,424,202

152,137

9,941,231

19,362,365

5,405,639

27,747

63,895,691

1,458,750

3,584,758

9,873,270

9,585

104

14,245,443

9,800,891

260,941

13,001

412,016

444

PRODUITS.

1917.

Commerce spécial.

Quantités.

Valeurs.

Commerce général

Quantités.

Valeurs.

Cacao

Café

Caoutchouc

des herbes

de lianes. Copal . . Coton

Cuivre brut . Diamants Huile de palme Ivoire brut . Mabula Panza Minerai d'étain Noix palmistes Or brut . . Peaux brutes Ramie et autres fibres Riz ... .

Kg-

783,785

27,843

1,129,195

1,744,91?

7,402,921

22,545

27,380.668

185,380 c,s

5,408,527

181,882

92,542

200,310

35,026,969

3,613k.651

148,996

53,768

703,617

Fcs. 1,391,218

34,804

5,081,377

9,422,563

6,477,556

74,398

85,564,587

6,377,072

5,949,380

3,637,640

50,898

901,395

23,117,800

12,420,118

417,188

67,210

386,989

Kg-

783,785

170,095

1,924,012

3,759,235

7,432,035

23,552

27,380,668

185,380 cts

5.603,280

271,590

92,542

200,310

39,103,004

3,613k.651

163,166

55,733

703,911

Fcs. 1,391,218

212,619

8,658,053

20,299,869

6,503,031

77,721

85,564,587

6,377,072

6,163,608

5,431,800

50,898

901,395

25,807,982

12,420,118

456,864

69,666

387.151

445

PRODUITS.

1918.

Commerce spécial.

Quantités.

Valeurs.

Commerce général.

Quantités.

Valeurs.

Cacao Café .

i des herbes . Caoutchouc <

( de lianes. .

Copal

Coton . .

Cuivre brut .

Diamants

Huile de palme

Ivoire brut .

Mabula Panza

. . .

Minerai d'étain

. . .

Noix palmistes

. . .

Or brut . .

Peaux brutes

.

Ramie et autres fibres .

Riz

Kg.

742,753

68,187

591,730

1,163,879

3,610,913

55,532

19,419,423

144,325 cts

5,126,141

127,117

11,820

153,379

31,363,163

2,433k.011

100,764

281,827

363,045

Fes. 1,485,506

136,374

1,804,776

3,782,607

2,708,185

236,011

54,374,384

5,992,374

5,638,755

3,050,808

7,683

914,139

20,386,056

7,415,817

251,919

338,197

235,979

Kg-

742,753

90,247

1,072.633

2,631,673

3,635,697

55,834

19,419,423

149,660 c,s

5,326,517

227,893

11,820

153,379

32,792,079

l,433k.011

210,322

304,822

363,045

Fcs. 1,485,506

180,494

3,271,531

8,552,937

2,726,773

237,294

54,374,384

6,213,883

5,859,169

5,469,432

7,683

914,139

21,314,851

7,415,817

525,805

365,791

235,979

446

Statistique commerciale de l'exercice 1918

Notice analytique

IMPORTATIONS-EXPORTATIONS

Résumé général.

Les résultats généraux du Commerce Extérieur du CONGO-BELGE. pendant l'année 1918, se présentent comme ci-après. Ceux de l'an- née 1917 sont rappelés à titre de comparaison.

Commerce général

Commerce Général d'Importation.

Quantités.

1918 150,243,600 kil.

1917 162,555,539

Différence en moins. 12,311,939 kil. Taux de la diminution : 2.57 p. c.

Valeur .

1918 1917

87,926,590 fis, 71,610,997

Différence en plus. 16,315,593 frs. Taux de l'augmentation : 22.78 p. c,

Commerce Général d'Exportation.

Quantités.

1918 70,055,101 kil.

1917 89,765,971

Différence en moins. 19,710,870 Taux de la diminution : 21.95 p. c.

Valeur .

1918 123,361,531frs.

1917 184,948,166-

Différence en moins. 61 ,586,635 frs. Taux de la diminution : 33.29 p. c.

Commerce spécial

Commerce spécial d'Importation.

Quantités.

1918 144,012,838kil.

1917 157,705,925

Différence en moins. 13,693,087 kil. Taux de la diminution : 8.68 p. c.

Valeurs .

1918 74,588,098frs.

1917 59,699,700

Différence en plus. 14,888,393 frs. Taux de l'augmentation : 23.93 p. c.

447

Commerce spécial d'Exportation

Quantités.

1918 65,607,757 kil.

1817. .... 81,975,438

Différence en moins. 16,367,681 kil. Taux de la diminution : 19.96 p. c.

Valeur.

1918 lll,968,877frs.

1917 164,327,591

Différence en moins. 52,358,714 frs. Taux de la diminution : 31.85 p. c.

Comparés aux résultats de l'exercice 1917, les produits suivants accusent, au Commerce spécial, au point de vue des quantités, une régression assez sensible.

Marchandises.

Exportation en 1917. I en 1918.

Différence en moins.

Cuivre brut . Copal .... Noix palmistes . Caoutchouc de lianes Caoutchouc des herbes

Riz

Huile de palme. * Ivoire brut . Cacao .... Or brut .... Diamants

27,380,668

7,402,921

35,026,969

1,744,919

1,129,195

703,617

5,408,527

181,882

783,785

3,613 k. 651 gr

185,180 carats

19,419,423

3,610,913

31,363,163

1,163,879

591,730

363,045

5,126,141

127,117

742,753

2,433 k. OU gr

144,325 carats

7,961,235 kil.

3,792,008

3,663,806

581,040

537,465

340,572

282,386

54,765

41,032

1.181

41,055 carats

Par contre, les produits qui suivent sont en augmentation :

Ramie et fibres 228.059 kilog.

Maïs 57.280 »

Café 40.344 »

Coton 52.987 »

Arachides , . 11.843 »

Les diminutions doivent être attribuées aux circonstances exposées ci-après.

Cuivre.

La quantité de métal recueilli ne s'est élevée qu'à environ 20.000 tonnes, par suite d'un ravitaillement en combustible de beaucoup inférieur aux exigences de la production, pendant les dix premiers mois de l'exercice et des conséquences de l'épidémie sévère de grippe qui a sévi au Katanga en novembre et en décembre.

448

Gopal.

Dès le début de Tannée, le marché européen s'est trouvé sous l'in- fluence des conditions qui avaient déterminé la hausse en 1917, à savoir : les difficultés d'embarquement et les restrictions aux impor- tations. Celles-ci eurent pour effet de raréfier les stocks disponibles. Les cours les plus forts tombèrent suivant les qualités : de 320 à 500 francs, de 250 à 225 francs, de 175 à 150 francs et de 135 à 125 francs par cent kilogrammes.

Noix palmistes.

La régression n'est qu'apparente et ne signifie en aucune façon une diminution de la production ; celle-ci, au contraire, n'ayant jamais été aussi élevée. C'est l'impossibilité d'exporter les stocks acculés dans nos ports et au Stanley-Pool qui a réduit le chiffre de nos exportations.

Caoutchouc.

Le marché européen a manifesté de l'indifférence à l'égard -des caoutchoucs sylvestres. Les exportations en ont pâli.

Au début de 1918, les bonnes espèces se vendaient assez aisément à raison de fr. 4.70 et 4.85 le kilogramme. Malgré ces bas prix, le com- merce se soutenait. Progressivement, les cours se relâchèrent : en juin la baisse oscillait entre fr. 0.25 et 0.35 par kilogramme, sur toutes les catégories.

Depuis lors, les détenteurs de caoutchouc sylvestre tinrent leurs lots et les cotes ne donnèrent plus qu'une estimation des opérations possibles, sans représenter de transactions.

Dans l'entretemps, le caoutchouc de plantation était offert en plus grandes quantités et les stocks énormes restés en souffrance aux Indes impressionnaient le marché au point de lui enlever tout équilibre.

Riz.

La nécessité d'assurer une nourriture convenable aux troupes, amena le Gouverneur général à prendre une ordonnance interdisant l'expor- tation du riz.

Les gouvernements voisins demandèrent fréquemment, en faveur de leurs administrés, des licences d'exportation de riz congolais. Elles leur furent accordées chaque fois que le ravitaillement des populations du Congo belge ne s'y opposa point.

La sécheresse persistante dans le Maniema et le Sankuru réduisit de deux tiers la récolte prévue dans ces régions.

449

Huile de palme.

La diminution n'est qu'apparente, le fret ayant manqué pour ex- porter les produits emmagasinés dans nos ports.

Ivoire.

En vue de l'accomplissement des buts de guerre, on a favorisé la création et le développement de certaines industries et nui, par contre- coup, à d'autres dont la prospérité paraissait devoir marquer des pro- grès constants. Ce fut le cas pour les industries de luxe et, notam- ment, pour celle qui utilise l'ivoire comme matière première.

Afin d'éviter une mévente désastreuse, les vendeurs se mirent d'ac- cord pour ne céder que les stocks susceptibles d'être écoulés sur le marché. De ce fait, ils prévinrent une dépréciation des cours.

De même qu'au cours de l'exercice 1917, l'ivoire ne fit l'objet, en 1918, que de rares transactions.

Cacao.

La sécheresse exceptionnelle causa un tort considérable à toutes les cultures faites dans la partie de la colonie située au sud de l'équateur. Les importantes plantations du Mayumbe éprouvèrent un déficit sérieux- dans la récolte.

La production a baissé de 41 tonnes en 1918. De grandes étendues de jeunes plantations devaient entrer en rapport en I9i8. Elles au- raient, dans des conditions normales, procuré un accroissement notable de la production.

Or brut.

La production totale des mines de VIturi et de YUelé a été, en 1918, de 3,604 contre 3,552 kilogrammes en 19 i 7, soit une augmentation totale de 52 kilogrammes. Toutefois, cette production n'a pas été entièrement exportée en 1918.

Diamant.

En 1918, la production de la « Société Internationale Forestière et Minière » a atteint 164,182 carats contre 90,000 en 1917, soit 82.40 °/0 de plus; mais toute la production n'a pas été exportée au cours do l'année 1918.

- 450

Tableau récapitulatif des résultats généraux du extérieur du Gongo Belge.

(Quantités).

Importations.

commerce

Commerce spécial.

Commerce général.

Désignation.

1917. Kgs.

1918. Kgs.

1917. Kgs.

1918. Kgs.

1. Animaux vivants

2. Boissons et ob- jets d'alimenta- tion ....

3. Matières brutes ou simplement préparées .

4. Produits fabri- qués. .

5. Or et argent non ouvrés et monnaies d'or et d'argent.

1,338,627

19.640,732

119,996,766 16,729,636

164

1,685,971

51,400,129

100,292,091 20,629,647

5,000

1,338,627

21,703,847

120,154,904 19,349,145

9,016

1,699,256

24,023,726

101,369,245 23,143,125

8,248

Totaux. . .

157,705,925

144,012,838

162,555,539

150,243,600

Exportations.

Commerce spécial.

Commerce général.

Désignation.

1917.

1918.

1917.

1918.

Kgs.

Kgs.

Kgs.

Kgs.

1. Animaux vivants.

25,463

36,289

25,713

36,289

2. Boissons et ob-

jets d'alimenta-

tion ....

1,789,708

1,536,451

1,972,548

1,616,003

3. Matières brutes

ou simplement

préparées .

73,913,439

58,298,105

81,296,710

62,464,032

4. Produits fabri-

ques. . .

6,243,180

5,734.316

6,467,352

5,936,181

5. Or et argent

non ouvrés et

monnaies d'or et

d'argent.

3,648

2,596

3,648

2,596

Totaux . . .

81.975,438

65,607,757

89,765,971

70,055,101

451

Tableau récapitulatif des résultats généraux du commerce extérieur du Congo Belge.

[Valeurs).

Importations.

Commerce spécial.

Commerce général.

Désignation.

1917.

1918.

1917.

1918.

Francs.

Francs.

Francs.

Francs.

1. Animaux vivants.

2. Boissons et ob- jets d'alimenta- tion ....

3. Matières brutes

t, 521 ,414

11,163,339

2,022,581 14,234,979

1,521,414 12,726,985

2,045,177 17,201,257

ou simplement préparées .

4. Produits fabri- qués.

5. Or et argent non ouvrés ei

6,122,708 40,816,392

5,453,334 51,667,199

6,273,510

46,836,241

6,520,394 60,239,762

monnaies d'or et d'argent. . .

75,847

1,200,000

4,836,247

1,920,000

Totaux . . .

59,699,700

74,588,093

71,610,997

87,926,590

Exportations,

Commerce spécial.

Commerce général.

Désignation.

1917.

1918.

1917.

1918.

Francs.

Francs.

Francs.

Francs.

1. Animauxvivants.

26,296

47,263

26,858

47,263

2. Boissons et ob-

jets d'alimenta-

tion ....

2,333,115

2,254,930

2,546,622

2,329,484

3. Matières brutes

ou simplement

préparées .

141,561,887

95,042,632

161.310,354

106,121,017

4. Produits fabri-

qués.

7,979,475

7,175,635

8,637,414

7,415,350

5. Or et argent

non ouvrés et

monnaies d'or et

d'argent.

12,426,918

7,448,417

12,426,918

7,448,417

Totaux . . .

164,327,591

111,968,778

184,948,166

123,361,531

4 52

Statistique des produits exportés durant les exercices 1918-1919 et les quatre premiers mois de 1920.

Marchandises.

Caoutchouc

Ivoire .

Copal . .

Noix palmistes

Huile de palme

Cacao

Café

Coton

Cire.

Peaux

Raphia

Piassava

Piment.

Ma bu la Panza

Graines diverses

Graines de ses

Riz . . .

Fibres .

Noix de kola

Graines de ricin

Bambous .

Minerais divers

Mais . .

Arachides .

Pantaclelhra

Cassiterite .

Madibas

Graines.

Coconotes .

Cubebe.

Or . . .

Minerai d'étain

Cuivre .

Autres produ

me

Totaux

1918.

Diamant

Kilogrammes.

1,755,609

127,117

3,610,913

31,363,163

5,126,141

742,753

68,187

55,532

2,091

100,76-4

))

»

»

11,820

90,027

363,045

281,827 ' »

» )) 60,162 15,795 )) )) )) » )) » » 153,379 19,419,423 2.257,547

65,607,757 144,325 carats.

Chiffres provisoires

1919.

Kilogrammes,

3,797,440

513,630

6,680,910

34,350,030

6,404.510

76,110

285,910

130,030

12,840

242,220

41,470

90,970

24,990

17,390

))

221,540

4,089,520

))

8,990

17,110

3,700

189,810

137,850

234,300

50,140

49,280

24,700

1,000

32.100

»

4,410

600,000

23,028,000

81,393,543 215,489 carats.

Quatre premiers mois de 1920.

Kilogrammes.

766,180

164,040

3,178,910

12,916,170

2,117,200

6,950

153,870

76,190

4,340

219,280

6,690

32,500

9,870

9,380

68,840 648,280

8,030 43,600 37,980

»

54,750

920

1,170

156,510

1,880

1 , 100

11,130

3,220

300,000

10,251,000

32,250,193 69,605 carats.

453

ADJUDICATIONS

Adjudications de terres.

Il sera adjugé publiquement, le 1er septembre 1920, à 9 heures du matin, par-devant le commissaire de district de l'Equateur, dûment délégué à cet effet, la vente, et à défaut de preneur pour la vente, la location de six parcelles de terre situées à Coquilhatville.

Les superficies respectives sont :

Parcelle 54 : 879.55 mètres carrés;

55 : 1,672.07

56 : 2,207.82

57 : 1,831.72

58 : 5,092.80

59 : 3,092.80

L'adjudication aura lieu aux enchères. Elle se fera aux conditions générales de vente ou de location énumérées par l'arrêté royal du 12 août 1918 et aux conditions spéciales ci-après déterminées.

Pour chaque parcelle le dernier enchérisseur sera déclaré adjudi- cataire.

Les enchères seront reçues des preneurs en personne ou de leurs mandataires dont les pouvoirs, à défaut de publication régulière au Bulletin Administratif et Commercial, devront être prouvés parle dépôt d'une procuration authentique dûment légalisée à la Conserva- tion des Titres Fonciers à Coquilhatville, au plus tard l'avant-veille du jour de l'adjudication.

En cas de location, les baux seront conclus pour un terme qui ne pourra être inférieur à six ans ni dépasser quinze ans.

Lors de l'adjudication, le ou les adjudicataires devront faire élec- tion de domicile dans une localité de la Colonie, toutes significa- tions, demandes et correspondances relatives à l'adjudication pourront lui ou leur être adressées.

4o Les parcelles seront mises à prix comme suit :

Parcelle 54 : pour la \ente. . fr. 2,638 65

location. . 131 94 55 : vente . . 3,344.14

location. . 167.il

venle .

. 4,415 64

location.

220 78

venle .

. 3,663.44

location.

183.17

vente .

. 6,185.G0

location.

509/28

vente .

. 6,185.60

location.

509 28

454

56 : -

57 :

58 :

59 :

Les prix de vente seront payables soit au comptant, soit en cinq annuités, au gré (te l'adjudicataire.

Dans le premier cas, le paiement aura lieu au moment même de l'adjudication.

Dans le second cas la première annuité, augmentée des intérêts à 5 p. c. de la partie du prix de vente restant due, sera liquidée au moment de l'adjudication.

Les annuités suivantes seront payables, chacune d'elles augmentée des intérêts à 5 p. c. de la partie du prix de vente restant due au 1er janvier de chacune des quatre années suivantes.

En cas de location le premier terme de loyer se payera au moment de l'adjudication, les suivants ahticipativement le 1er janvier de chaque année.

Pour chaque parcelle adjugée, le montant de la taxe d'enregistre- ment, soit 25 francs, et pour les parcelles vendues, celui des frais de mesurage, soit 70 francs par parcelle, seront payables au moment de l'adjudication.

Tous les paiements à effectuer au moment de l'adjudication se feront entre les mains d'un sous-comptable délégué par le commissaire de district de l'Equateur. L'adjudication sera annulée de droit pour les terrains dont les adjudicataires ne pourront satisfaire à cette condition et sera refaite immédiatement.

6* Dans un délai d'un an, à dater du jour de l'adjudication, un bâti- ment en briques, pierres, métaux ou autres matériaux admis par l'au- torité compétente, destiné à un usage commercial et couvrant au moins un are de terrain, devra être construit sur chaque parcelle aliénée, de sorte que les murs aient atteint à l'expiration de ce délai au moins 3 mètres au-dessus des fondations.

Les terrains adjugés devront être clôturés sur toutes les parties de leurs périmètres libres de constructions.

Les constructions et clôtures à ériger sur les parcelles adjugées et tous travaux d'aménagement de ces parcelles devront être conformes

455

aux prescriptions de l'autorité compétente, qui approuvera le plan des travaux de construction, de clôture, de remblai et de drainage à effec- tuer et sera seule juge pour apprécier si ces obligations sont remplies.

L'inexécution des conditions générales reprises à l'arrêté royal du 12 août 1918, ainsi que l'inexécution des conditions spéciales énu- mérées aux articles 5°, 6°, et delà présente ordonnance, donnera au Gouvernement de la Colonie le droit de prononcer la résolution de la vente ou de la résiliation du bail consentis lors de l'adjudication.

L'intérêt à 5 p. c. du montant du prix de vente sera à la Colonie depuis le jour de l'adjudication jusqu'au jour serait éventuellement prononcée la résolution de la vente.

Le 25 août 1920, à 1 1 heures, dans les bureaux de la 9e direction du Ministère des Colonies, 20, rue de Namur, à Bruxelles. Adjudication de l'entreprise de la fourniture de bandes-molletières et de ceintures rouges en coton.

Cahier des charges 728 du 51 juillet 4920, à demander directe- ment à l'administration (20, rue de Namur, Bruxelles).

INFORMATIONS

BOURSE DU TRAVAIL.

La Bourse du Travail du Katanga, société congolaise constituée sous forme de coopérative par les principales entreprises industrielles de la province, a recruté durant les neuf premiers mois de l'exercice en cours, 5,066 travailleurs noirs, représentant 49,672 hommes-mois. Ce chiffre dépasse, dès à présent, le total des recrutements effectués durant les douze mois de l'exercice 1918-19, et qui était de 4,272 hommes représentant 39,255 hommes-mois.

En présence du succès obtenu par cet organisme de recrutement, le Gouvernement a invité les principales sociétés du Bas et du Moyen- Congo, que la crise de la main-d'œuvre atteint plus particulièrement, à créer entre elles une institution analogue.

Les négociations poursuivies dans ce but aboutiront prochainement à la fondation de la « Bourse du Travail du Bas-Congo », dont le siège sera probablement établi à Kinshasa.

456

De même que son aînée duKatanga,la nouvelle Bourse fonctionnera sous forme de société privée avec l'assistance du Gouvernement.

Exportation de confitures de Belgique au Congo Belge. La Commission des sucres accorde aux fabricants une ristourne de fr. 1.75 par kilogramme de sucre exotique utilisé dans la fabrication des confitures consommées en Belgique.

A la demande du Minis're des Colonies, la Commission des sucres a décidé d'accorder la même ristourne aux fabricants dont les confitures, fabriquées avec du sucre exotique, sont exportées à destination du Congo Belge.

Modifications au décret du 17 décembre 1917 sur les droits de sortie Une ordonnance du 20 avril 1920 remplace l'article pre- mier du décret du 17 décembre 1917 par les dispositions suivantes :

Sauf ce qui est stipulé à l'article 2 au sujet de l'ivoire, les marchan- dises et produits sont soumis au paiement d'un droit de 2 p. c. de leur valeur à la sortie du territoire.

Les marchandises importées dans la Colonie et qui en sont réex- portées ultérieurement sans y avoir été manufacturées, sont exemptes de droits de sortie.

D'autre part, l'article 5 du décret du 17- décembre 1917 est rem- placé par les dispositions suivantes :

L'ivoire exporté du territoire de la Colonie est soumis au paiement des droits de sortie indiqués ci après :

a) morceaux pilons, 200 francs par 100 kilos.

b) dents d'un poids inférieur à 6 kilos, 320 francs les 100 kilos.

c) dents de 6 kilos et plus, 420 francs par 1 00 kilos.

Perception des droits de sortie « ad valorem ». Par ordonnance du 6 mai 1920, les valeurs suivantes ont été fixées pour servir de base à la perception des droits de sortie ad valorem sur cer- tains produits d'exportation, depuis le 13 mai 1920 :

Par 400 kilos indivisibles.

Arachides fr. 100.00

Cacao . 315.00

Cire d'abeilles 440.00

Copai 290.00

Colon brut 630. 00

Cuivre brut en lingot 300.00

Mattes de cuivre 450.00

457

Étain lingots 1,150.00

Minerai détain 670.00

Huile de palme r . ..-.,... 200.00

Noix palmistes .......... 400.00

Piassava 35.00

Raphia 20 00

Sisal 50.00

Ramies et autres fibres non dénommées. . 50.00

Riz 80.00

Sésame . 10500

Poivre. ............ 170.00

Par 10 kilos indivisibles. Café fr. 30.00

Par kilogramme indiv:sible.

Caoutchouc des herbes fr. 1.60

Caoutchouc des arbres et lianes 2.10

l'ar 10 grammes indivisibles.

Or fin fr. 58.00

Par carat indivisible. Pierres précieuses et diamants . . . . fr. 90.00

Exportation de produits congolais vers les États-Unis. Les maisons indiquées ci-après sont susceptibles de recevoir directe- ment des expéditions suivies de produits congolais :

Copal : Guillaume Van de Putte, 106, Wall street, à New York maison belge).

L. C. Gillespieet Sons, 8, Fletcher street, New-York (maison amé- ricaine).

Noix palmistes : L. C. Gillespie et Sons, 8, Fletcher street, New-York maison américaine).

Beigian Trading Company, 44, Witehall street, New- York (maison américaine).

Crédit Commercial (anciennement Van de Velde), 59, Pearl street, New-York (maison belge).

Transports. Les tarifs de transports sur le réseau fluvial du Haut-Congo, publiés aux Renseignements de l'Office Colonial de jan-

458

Wer 1920, p. 31 et suivantes, sont majorés dans les proportions

suivantes :

Voyageurs : 50 p. c. Marchandises : montée. 50 p. c. descente, 100 p. c.

L'application de ce relèvement est mis en vigueur jusqu'au ier jan- vier 1921.

Excursion dune société scientifique au Katanga, D'après la revue South Africa, la réunion annuelle de l' Association sud-afri- caine pour l'avancement des sciences (South African Association for ad\ancement of Science) aura lieu en juillet prochain, à Bulawayo (Hhodésiej. A cette occasion, ajoute la revue, une visite au plateau méridional du Katanga sera probablement organisée.

Une mission américaine. Dans son numéro de mai 1920, The Missionary Herald (Etats-Unis), annonce que les administrateurs du « Phelps-Stokes Fund », constitué pour venir en aide aux popula- tions nègres, d'accord avec le Commiitee of Référence and Counsel of the Foreign Missions Conference of Norlh America, ont décidé d'en- voyer une mission d'étude en Afrique Equatoriale et Occidentale. La mission a pour principal objectif de rechercher les moyens d'éducation appropriés aux diverses populations indigènes et aux nécessités locales. Elle se rendra, vers le 1er septembre, à Sierra-Leone, pour visiter ensuite la Nigérie, le Cameroun et l'Angola. Après avoir passé quelque temps dans le Sud de l'Afrique, la mission se propose de séjourner plusieurs mois au Congo Belge.

Voyage du duc de Sudermanie. S. A. R. le duc de Suder- manie, accompagné du chambellan comte Nils Gyldenstolphe, attaché au Musée royal d'histoire naturelle de Stockholm, se propose d'entre- prendre l'automne prochain un voyage d'exploration zoologique au Congo Belge. 11 est vraisemblable que le prince suédois visitera la région de la Ruz zi Kivu ainsi que les nouvelles provinces du Ruanda et de l'Urundi.

ÉTRANGER.

Le commerce des oiseaux à la Côte d'Ivoire. Avant la guerre on faisait un grand commerce d'oiseaux vivants dits des îles, provenant du Sénégal et Casamance. Cette industrie a été abandonnée. Ii serait souhaitable qu'elle prenne un essor nouveau, car elle est très rémunérai rice. La chasse des oiseaux des îles est faite par les indi- gènes et il y aurait lieu de créer des comptoirs d'achat.

459 --

Le commerce des peaux de singe. Les peaux de singe utili- sées pour la confection des manteaux, valaient avant la guerre, toutes préparées, 9 francs. Actuellement, une peau non préparée vaut de 30 à 40 francs. Par suite des exigences d'une mode nouvelle, les peaux de singe font l'objet d'une grosse demande en France.

(La DépêcU Coloniale du 9 juin 1920.)

Les oranges d Afrique. Le W aimer Castle est arrivé à Londres, transportant deux mille caisses d'oranges en excellent état. Les prix n'ont pas été aussi favorables qu'on l'espérait par suite de l'abondance des fraises et autres fruits. Mais cette situation n'affectera pas long- temps le marché.

Les oranges ont été vendues au prix de 45 à 60 shillings par caisse, suivant grosseur et qualité.

A propos d'oranges, il est fait remarquer que le Gouvernement de l'Union Sud-Africaine désire depuis longtemps introduire des orangers de Jaffa qui donnent un produit particulièrement recherché. Il y a quelques années, des plants choisis avaient déjà été expédiés, mais, faute de soin, ils ont péri en cours de transport. A l'occasion du voyage d'un fonctionnaire du Département de l'Agriculture à Londres, des mesures seront prises pour permettre à celui-ci de faire embarquer en place convenable et de veiller au transport d'un lot d'orangers de Jaffa. {South-Africa, 19 juin 4920.)

Les Japonais en Afrique. MM. Osamu Toyoda, Zoshiyuki Hashimoto et S. Yamasaki, les trois fonctionnaires de l'administration des chemins de fer de l'empire japonais, qui ont traversé l'Afrique du Sud du Cap au Katanga à l'effet de recueillir tous renseignements utiles en vue d'améliorer le régime ferroviaire de leur pays, ont été frappés des perspectives et des richesses qu'offre le territoire par- couru. (D'après South-Africa, 19 juin.)

ACTES OFFICIELS 0).

Accaparement. Quatre ordonnances du 26 février promulguent certaines mesures en vue d'empêcher l'accaparement et le suren- chérissement injustifié des marchandises (B. A. C. 10 mai 1920)^

(1) Abréviations. B. O. signifie Bulletin Officiel du Congo belge. 1

B. A. C. Bulletin administratif et commercial.

460

Animaux sauvages. Une ordonnance de police du 2 février réglemente la détention des animaux sauvages réputés dangereux ou nuisibles (B. A. C. 40 mai 1920).

Banques. Situation de la Banque du Congo belge au 31 dé- cembre 1919 (B. 0. 15 juin 19:20).

Chasse Une ordonnance du 27 avril porte à deux mille francs le coût du permis spécial pour la chasse à l'éléphant et accorde aux commissaires de district le pouvoir de les délivrer.

Une ordonnance du 29 avril crée une réserve de chasse dans le district du Haut-Uele (B A. C. 10 mai).

Constructions. Une ordonnance du 26 janvier complète l'ordon- nance d'administration générale du 30 juin 1912, 164, réglemen- tant les constructions dans les circonscriptions urbaines (B. A. C. 10 mai 1920).

Coton. Un décret du 28 mai 1920 interdit aux particuliers d'in- troduire des graines de cotonniers dans tout le territoire de la Colonie. Rapport du Conseil Colonial.

Un décret de la même date modifie le décret du 7 août 1918 relatif à la culture du coton. Rapport du Conseil Colonial. (B. O. 15 juin).

Courriers. Service des courriers par la voie du Nil (B. A. C. 10 mai).

Dette Publique. Un arrêté du 1er avril prolonge les délais de prescription des intérêts, arrérages et remboursement des titres de l'emprunt de 4 p. c. de 1(J01 sortis au tirage du 14 juin 1911.

Un arrêté du 1er avril concerne la non-boni/icaiion au Trésor de coupons d'intérêts de l'emprunt de 4 p. c. de 1901 (B. 0. 15 mai 1920).

Donation. Par un arrêté du 15 avril 1920 est accepté le legs dune rente de cinq mille francs fait par M. Trémouroux en faveur des hôpitaux créés au Congo par le Roi (B. 0. 15 mai).

Douanes. Par une ordonnance du Gouverneur Général du 20 jan- vier 19i0 les frais de transport, de déchargement et, d'une façon générale, de toute manipulation de marchandises dans les entrepôts de la douane, lorsque l'administration se charge de ces opérations, sont facturés aux particuliers à raison de soixante centimes par 100 kilos (B. 0. 15 mai 1920).

Droits de sortie. Conformément à l'ordonnance-loi du 20 avril

461

J 920 modifiant le décret du 17 décembre 1917, les marchandises et produits, sauf l'ivoire, sont soumis au paiement d'un droit de 2 p. c. de leur valeur à la sortie du territoire. L'ivoire exporté de la colonie est soumis au paiement des droits de sortie indiqués ci-après :

a) Morceaux pilons, 200 francs par 100 kilos ;

b) Dents d'un poids inférieur à 6 kilos, 320 francs par 100 kilos ;

c) Dents de 6 kilos et plus, 420 francs par 100 kilos.

Une ordonnance du 6 mai fixe les valeurs destinées à servir de base à la perception des droits de sortie ad valorem sur certains produits d'exportation (B. A. C. 10 mai).

École coloniale. Un arrêté du 1er février 1920 désigne les président et membres du Conseil d'administration de l'École Colo- niale Supérieure d'Anvers. Extraits de l'arrêté portant nomination des professeurs de l'École (B. O. 15 mai).

Un arrêté ministériel du 23 avril 1920 fixe à trente le nombre des élèves à admettre pour l'année 19120 1921.

Un arrêté de même date définit la composition du Conseil de per- fectionnement de l'École.

Un arrêté du 4 mai 1920 apporte des modifications aux articles 9 et 15 de l'arrêté royal du 2 février 1920 concernant le programme des études et les conditions d'admission (B. O. 15 juin).

Force publique. Une ordonnance du Gouverneur Général du 15 août 1919 porte création d'une police municipale dans certaines localités de la colonie (B. O 15 mai).

Hygiène. Une ordonnance du 1er mars 1920 met en vigueur le nouveau règlement de police sanitaire maritime (B. O. 15 juin).

Immigration Suivant l'ordonnance-loi du 50 janvier modifiant l 'ordonnance-loi du 2 juin 1919, 7, les chefs des bureaux d'im- matriculation, avant de donner passage aux immigrants, doivent s'assurer, en dehors de toutes autres formalités et conditions d'accès, que ces derniers sont en possession, soit d'un contrat régulier d'une durée minimum de trois mois et conclu avec une maison non indi- gène sérieuse, soit d'une somme de 1,500 francs (B. A. C. 10 mai 1920).

Impôt indigène. Par ordonnance du Gouverneur général du 3 février 1920, les Vice-Gouverneurs généraux sont délégués pour accorder aux contribuables indigènes des réductions et des exemp- tions temporaires d'impôt (B. O. 15 mai).

Lettre de change. Un décret du 28 mai 1920 définit les droits

462

et obligations du porteur d'une lettre de change. Il vise encore le billet à ordre et les proiêts. Rapport du Conseil Colonial (B. 0. 4 5 juin).

Mines. Rapport du Conseil colonial sur un projet de décret per- mettant de placer sous le régime du décret du 16 avril 1919 certaines concessions minières antérieurement consenties par le Comité spé- cial du K a tanga.

Un décret du 22 avril 1920 approuve la convention conclue entre le Comité spécial du Katanga et la Compagnie géologique et minière des Ingénieurs et Industriels belges (B. 0. lo mai).

Un arrêté royal du 28 mai 1920 autorise l'exploitation des mines de diamant par la Société Minière du Bécéka (B. 0. 15 juin).

Monnaies. Une ordonnance du 13 février 1920 du Vice Gouver- neur général porle que les billets de la Banque du Congo belge ont cours forcé au Katanga. la fonte et la transformation des monnaies d'or et d'argent ayant cours dans la colonie sont interdites (B. 0. lo mai).

Organisation territoriale. Une ordonnance du Gouverneur géné- ral du 15 janvier abroge l'ordonnance d'administration générale du 30 septembre 1919, divisant le district du Moyen-Congo en sept ter- ritoires (B. 0. 15 juin).

Une ordonnance du 16 avril fixe le nombre des territoires du dis- trict des Bangala (B. A. C. 10 mai).

Orthographe. Une circulaire du Gouverneur général du 19 avril invile les fonctionnaires et agents à écrire les noms géographiques au Congo tels qu'ils sont orthographiés sur la carte officielle de la Colonie, édition 1919.

Protection des indigènes. Rapport au Roi de la Commission insti- tuée pour la protection des indigènes (B. 0. 15 mai).

Sociétés. Convocations aux assemblées générales de la Compa- gnie du Congo Belge et de la Société des chemins de fer vicinaux du Mayumbe.

Sociélé commerciale et financière africaine : procès-verbal de carence et modifications aux statuts.

Pêcheries à vapeur du Congo Belge, Sociélé anonyme : Acte de consul ution (B. 0. 15 juin).

Société Commerciale Africaine : Modifications aux statuts (B. 0. 15 juin).

463

Société en nom collectif « Silva, Nogueira et G0 » : Acte de consti- tution.

Société en nom collectif « Rodrigo et Van den Plas » : Extrait d'acte (B. A. G. 10 mai).

Statistiques. Statistiques des marchandises importées et expor- tées pendant l'année 1918 dans le Congo Belge, à l'exclusion du Katanga (Imprimerie du Congo Belge, Borna).

Tarifs de chemin de fer. Un arrêté du 22 avril 1920 autorise le relèvement provisoire des tarifs de transport de la Compagnie du chemin de fer du Congo jusqu'à concurrence de 75 p. c. (B. 0. 15 mai).

Vivres. Une ordonnance-loi du Vice-Gouverneur général du Katanga du 27 février 1920 porte interdiction provisoire de la cession aux noirs de certaines vivres d'importation indispensables à la popu- lation européenne (B 0. 15 juin).

Bibliographie

LES REVUES.

Belgique :

Bulletin de l'Association des planteurs de eaoutchouc (juin 1920). Le marché du caoutchouc. La technique d'une plantation d'hévéas. L'humus dans les plantations. La culture du coton au Congo belge. Maladies du cacaoyer. La culture et la préparation de la vanille. L'avion dans les colonies.

La. Belgique coloniale, commerciale, financière, industrielle, maritime, sociale (publication delà Société belge d'études et d'expansion, 1920, pre- mière édition).

Revue pratique (mai 1920). Quelques aspects de la vie au Congo.

Bulletin des Missions belges de la Compagnie de Jésus (juin 1920. La lutte contre la tuberculose dans le Moyen Congo.

Missions de Scheut (juin 1920 ), Les noirs du Kasai.

Maandschrift der Missionarissen van Africa (Ie11 Juni). Missiegebied van het Albertmeer. Door Urundi.

Bulletin de la Société belge d'études coloniales (mai-juin 1920). La politique coloniale en Belgique de 1830 à 1818. Une expédition franco-

464

belge en Guinée. Le « Royal Colonial Institute » et ses comités en 1919. Ténériffe et son avenir comme station sanitaire. La vie chère an Congo.

Revue zoologique africaine (15 mai} . —Poissons de la mission Stappers 1911-1913 pour l'exploration hydrographique et biologique des lacs Tanga- nika et Moer o G. -A. Bonlenger). Comment distinguer les serpents dangereux au Congo belge ? Notes sur la paléontologie du Congo. Notes sur quelques rapides du Congo belge. Fourmis nouvelles du Congo belge. Végétation du Bas Chiloango et limite occidentale de la forêt du Mayumbe. Etc.

Bulletin de la Société belge d'études et d'expansion (n0 l, janvier-avril 1920). Rapport sur les travaux et l'activité de la société en 19191 Arm. Béthune'. Le Congo fournisseur de matières premières (lieutenant- colonel G. Moulaert). Etc.

L'Étoile du Congo (12 maij. Belges, venez voir votre Colonie Dans la partie anglaise de ce journal est reproduite l'intéressante biographie de M. I. F. Marcosson. le distingué journaliste américain séjournant au Katanga La lettre de recommaudation de M. Lloyd George signale que M. Marcosson est chargé en Afrique d'une importante mission.

Bulletin de la Société centrale forestière de. Belgique (juin). La question forestière, question mondiale.

Missions d'Afrique des Pères Blancs (' o juin). Une tournée au Kivu. Le pays des Bashi (côte ouest du lac Kivu) Physionomie de Tabora.

L'Écho du Katanga 15 mai). La culture du manioc et du maïs au Kisale (M. Bailleux, agronome de district).

France :

Revue agricole et vétérinaire de Madagascar et dépendances (mars 1920). La pourriture du bourgeon terminal du cocotier.

Revue des questions coloniales et maritimes (mars-avril 1920'. Les- besoins cotonniers de la France. Politique coloniale et politique afri- caine. — Au cours de cet article, l'auteur, M. le général Aubier écrit: « Pour l'avenir, n'oublions pas que l'Afrique reste notre ressource suprême. Hâtons nous d'organiser l'Afrique ». La discussion coloniale au Sénat français (discours de MM. Lucien Hubert et Albert Lebrun).

La Nature [H0 2405, io mai 1920). L'éléphant d'Asie et la domesti- cation de l'éléphant d'Afrique au Congo belge.

Revue générale des chemins de fer (janvier 1920). Le développement actuel de la traction électrique sur les grands réseaux de chemius de fer.

Les matières grasses (15 mai). - L'industrie de l'huile de palme. L'industrie de la noix de coco à la Trinité.

465

L'Afrique française (mai 1920). L'Afrique de demain. L'âge de l'air eu Afrique. Nos troupes de couleur.

Renseignements coloniaux (supplément no 5 de l'Afrique française). Les oléagineux en Afrique occidentale.

Colonies et Marine (31 mai). La valeur économique de notre plus grande France. Deux livres et programmes coloniaux.

L'Exportateur français (10 juin 1920). Un problème d'approvisionne- ment : le jute. Un institut de crédit colonial.

Les Annales coloniales (1er juin 1920). La liquidation des biens alle- mands au Cameroun.

La Réforme économique (30 mai 1920). La renaissance du troc.

Le Bulletin financier de V Indo* Chine (20 avril). A propos du trans- saharien.

Les Annales Coloniales (3 juin).— Dans l'article « La réduction de la mortalité dans nos Colonies d'Afrique », M. Goude, député du Finistère, écrit : « Grâce aux mesures les plus énergiques et à une rare ténacité, la région de Lemfu (Congo belge) a été débarrassée de la maladie du som- meil en 1918. La disparition du paludisme a donné pour 148 ménages 361 enfants, alors que dans la région impaludée 104 ménages n'ont donné que 165 enfants. L'Union Coloniale de Bruxelles a organisé un cours gra- tuit et d'assistance maternelle et de puériculture que suivront avec profit les femmes se rendant à la Colonie ». (8 juin) : Le Café à la Côte d'ivoire. (10 juin) : l'Exploitation du papyrus au Gabon.

L'Économiste français (5 juin). Le Protectorat des Somalis.

Bulletin de la Chambre de Commerce de Paris (8 mai). Droits et intérêts allemands hors de l'Allemagne (Partie IV, section I du Traité de Paix du 28 juin 1919 : Colonies allemandes!.

Bulletin de l'Institut Pasteur (15 mai). Rend compte de diverses publications concernant les trypanosomiases et la maladie du sommeil en Afrique.

Revue générale des chemins de fer (février). Éducation profession- nelle des agents de chemin de fer. Électrification des chemins de fer sud africains. Etc.

Bulletin des céréales et plantes à fécule de l'Institut colonial de Mar- seille (n° 1, 1920). Le riz de la Birmanie (M. F. N. Paton)

L'Exportateur Français (17 juin). Méthode de Colonisation : Denrées coloniales en France. Une disette de coton est à craindre. Vers l'insti- tution d'un brevet international. Les détaxes à l'entrée en France dos cacaos et cafés originaires de la Côte d'Ivoire et du Dahomey L'Afrique Occidentale française offre des cornes de bœuf en abondance. L'exploi- tation de l'huile de palme : La Société de la Sangha Oubanghi vient de

466

décider de créer a la Côte d'Ivoire une exploitation modèle d'huile de palme, avec une huilerie et des laboratoires. CONGO BELGE : un projet intéressant la réorganisation de la Colonie.

Les Cahiers coloniaux (publication de l'Institut Colonial de Marseille) juin, 21. Assimilation-Désorganisation. I. Les interdictions d'expor- tation des produits coloniaux. IL Les interdictions d'importation dans nos colonies. III. Les spiritueux. IV. Le Régime douanier colonial, etc.).

l'.euue générale des Sciences pures et appliquées, (30 mai 1920;. La mé- thode trophique dans la lutte contre les insectes et les affections qu'ils transmettent. Dans cet importante étude, M. E. Roubaud de l'Institut Pasteur de Paris, après avoir exposé notamment la prophylaxie tro- phique de la maladie du sommeil, déclare dans les conclusions de son article : « Paludisme, trypanosomiases diverses d'Afrique et d'Amérique, fièvre jaune, fièvre des tiques, d'une façon générale toutes les nom- breuses et graves affections transmises à l'homme par les insectes suceurs de sang, pourraient être combattus d'une manière idéalement simple, en dressant entre l'homme et les insectes l'écran protecteur des animaux domestiques. »

Journal d'Agriculture Pratique (2 juin). La question du cadastre.

La Revue des Produits Chimiques »31 mai). Le Sénégal (Industrie, Ma- tières grasses).

Journal Officiel de l'Afrique Equatoriale Française 15 avril).

Circulaire relative à la formation d'aide-médecins et d'infirmiers indi- gènes expérimentés (1er mai). LTn arrêté du 28 avril promulgue le décret du 13 août 1919 relatif à la publication des prix de vente des denrées et des boissons alimentaires. Un arrêté du 12 avril vise l'organisation des réserves indigènes en vue du recrutement des troupes coloniales. Un arrêté du 27 avril fixe le prix de rétrocession de l'ivoire dans les colonies du Gabon, du Moyen-Congo et de l'Ubangui-Chari (lo mai). Un arrêté du 27 avril modifie l'arrêté du 8 novembre 1919 interdisant la vente ou la délivrance de l'alcool aux indigènes. Un arrêté de même date modifie les dispositions de l'arrêté du 6 octobre 1910 relatives à l'élevage. Un autre arrêté de celte date complète l'arrêté du 4 août 1916 sur les postes abois. Sous la date du 30 mars, un premier arrêté réglemente les prestations dans la colonie du Gabon, un second fixe les taxes à percevoir sur les permis de port d'armes perfectionnées et de traite dans cette colonie, un troisième fixe les quantités d'armes et de munitions de traite dont la délivrance pourra être autorisée ; un quatrième détermine les régions du Gabon dans lesquelles peuvent être délivrés des permis de port d'armes à feu non perfectionnées et des permis d'achats de munitions dites de traite.

Bulletin et comptes rendus mensuels de la Société de l'Industrie Minérale imars avril). Essai sur les études préparatoires aux entreprises coloniales, avec application plus spéciale aux mines en pays isolés.

467

Grande Bretagne.

La Government Gazette (Accra, Côte d'Or, Afrique Occidentale) publie dans son numéro du 17 avril une ordonnance modifiant l'ordonnance de 19io relative à la circulation des automobiles.

Le numéro du 21 avril publie le règlement issu du chapitre 6 de l'or- donnance du 1919 relative à la vaccination.

Le numéro du 8 mai publie une ordonnance donnant pouvoir au Gouver- neur de promulguer des restrictions en matière d'importation et d'ex- portation d'animaux et de marchandises.

La British South-Africa C Government Gazette du 30 avril reproduit l'ordonnance modifiant la loi concernant l'imposition des indigènes.

Le même journal, dans son numéro du 7 mai, publie l'ordonnance prise en vue de régler les différends entre employeurs et employés. La création de tribunaux industriels y est prévue.

Northern Rhodesia Government Gazette du 5 mai 1920 publie la procla- mation n° 3 concernant les licences de commerce et les droits de timbre.

South-Africa (22 maii. Définition des termes « colonie » et « domi- nion ». Les habitants du Transvaal ont remis une pétition couverte de huit mille signatures pour prier le parlement de l'Union de prendre des mesures contre le « péril » asiatique. Dans la suite de l'article sur le « Tanganyika Terri tory », il est signalé que les Belges continuent à admi- nistrer une partie de ce territoire, comprenant le Ruanda, l'Urundi, Bismarckbourg et tout le district d'Udjiji avec le chemin de fer de Tabora à Kigoma. Il est ajouté que la Belgique est favorisée en obtenant les deux provinces du Ruanda et de l'Urundi qui forment la part la plus riche du territoire conquis. Elles renferment, écrit l'auteur de l'article, 3 millions d'indigènes et près de 3 millions de têtes de bétail. Le reste du « Tanga- nyika Territory » est habité par 3 millions cinq cent mille noirs et le nombre de têtes de bétail s'élève à 3 millions environ.

(12 juin). La question des asiatiques. Au cours de la conférence ento- mologique, le projet de 1' « Impérial Bureau of Entomology » tendant à la création de six laboratoires dans diverses régions de l'Afrique pour l'étude de la maladie du sommeil et de la mouche tse-tse a été vivement appuyé.

Board of T rade Journal (3 juin). Tanganyika Territory : Avis aux futurs colons. Protectorat de l'Afrique Orientale : Législation relative à l'électricité. Congo Belge : Projets de travaux d'utilité publique. Sierra-Leone : Par une ordonnance du 26 avril 1920, l'exportation de la gomme copal est interdite pendant trois ans.

The Board ofTrade Journal (20 mai). Suppression des permis de tra- fiquants dans le « Tanganyika Territory ». L'exposition des bois à Lon- dres, ouverte du 5 au 17 juillet 1920. Développement commercial du Nyassa portugais. Institution d'un Conseil chargé du contrôle de la cir- culation monétaire en Afrique Orientale anglaise. Taxes maritimes dans le « Tanganyika Territory ». Augmentation des droits d'entrée sur les spiritueux importés en Afrique Orientale anglaise. Modification aux droits de sortie dans le protectorat du Nyassaland.

468

The African World (5-juin). - Afrique du Sud : Projet de loi concer- nant les affaires indigènes (note rédactionnelle)*- Congo Belge : Lettre de Bruxelles traitant d'une nouvelle ligne maritime française vers le Congo, du sans-fil direct vers le Congo, du coton du Sankuru Kasaï, de la pro- duction de l'Union Minière, des ressources de la colonie, etc. Afrique Orientale anglaise : Régime fiscal. Afrique Occidentale anglaise : La Compagnie du Niger et la Société « Lever Brothers ».

(12 juin). Rhodésie : La production aurifère. L'arrangement anglo- belge (note rédactionnelle). Congo Belge : Lettre de Bruxelles traitant du service des hydro-avions au Congo, du rapport de la Commission instituée pour la protection des indigènes, de l'Institut Rockefeller et du Congo etc. Commerce de l'Afrique du Sud : Le coton, la canne à sucre, les citrons et les oranges.

19 juin). La question indigène en Afrique Australe. Congo Belge : Lettre de Bruxelles traitant de la ligne américaine versie Congo, de la nouvelle ligne maritime française, du terminus du chemin de fer du Cougo, de Matadi comme port maritime, de la voie ferrée vers Kisanga, de la navigabilité du Kasai et du Sankuru, de la voie la plus courte vers l'Urundi et le Ruanda, de l'école coloniale, etc. Rhodésie : L'exploitation des fibres sauvages, notamment de l'hibiscus cannabinus. Les oranges d'été. Compte rendu du livre « The Bantu, Past and Present», dont l'au- teur S. M. Molema appartient à la race bantoue.

United Empire (publication du Royal Colonial Institute, juin) reproduit sous le titre « Uganda » un mémoire de Sir Robert T. Coryndon, gouver- neur de l'Uganda. Celui-ci signale qu'un commerce important de peaux pourrait s'établir avec les riches régions environnant le Ruanda.

The Colonial Journal (avril 1920). Les chemins de fer africains. Les che- mins de fer de l'Afrique orientale anglaise.

Man (Juin). Dans ce numéro Sir James G. Frazer rend compte des pre- miers résultats de la mission ethnologique Mackie, dirigée par le révérend John Roscoe. Les Bahima, tribu de pasteurs habitant Ankole, dans la partie occidentale de l'Uganda, ont fait l'objet d'une étude approfondie.

Italie :

Bulletin mensuel des institutions économiques et sociales de l'Institut international d'agriculture de Rome (avril 1920). Union de l'Afrique du Sud : Avances aux colons au Transvaal (d'après Union of South Africa Government Gazette no 997. Pretoria, lo sept. 1919). La colonisation intérieure dans le protectorat du sud-ouest africain (d'après The Farmers' Weekly, vol. XVIII, 447. Bloemfontein, 1er octobre 1919).

Bulletin mensuel des renseignements agricoles et des maladies des plantes de l'Institut international d'agriculture de Rome (avril 1920). Etudes sur la « rouille »> des « sheets » de caoutchouc (d'après Archief voor Rubber- cultuur in Xederlansch-Indie. Batavia, octobre 1919 . Maladies de l'avo- catier à la Trinité. Antilles d'après Bulletin o f the Department of Agricul- ture Trinitad et Tobago, Port d'Lspagne, 1919;. Mai 1920 .-Origine pro-

469

bable du cocotier du type normal. La culture du cotonnier dans les colonies françaises. Le sisal en Afrique et en Afrique orientale en parti- culier. — Notes sur l'élevage en Afrique occidentale française. L'api- culture, source de profits pour les colonies tropicales. Coléoptère nuisible au palmier à huile à la Côte d'Or.

Bulletin mensuel des institutions économiques et sociales de l'Institut international d'agriculture de Home (mai). Nouvelle-Zélande : La coloni- sation agricole par les soldats démobilisés, etc.

Union de l'Afrique du Sud :

Quarterly Abstract of Union Statistics (n° 2, avril 1920) renferme les der- niers renseignements statistiques émanant de sources officielles au sujet de la population, des institutions sociales, du prix de la vie, de la produc- tion, du commerce, des transports, des finances, etc.

The South African Mining & Engineering Journal (22 mai). L'élément humain dans les travaux miniers. Les champs aurifères du Congo belge : La plus grosse pépite africaine. Le développement de la pro- duction à Kilo.

Divers :

Anthropos (revue internationale d'ethnologie et de linguistique, 1917- 19!8, janvier-avril). La divination au Huanda. Contribution â la grammaire des langues bantou. Le « Kviengo » des Wachaga, peuplade bantoue du Kilimandj aro.

LES LIVRES.

Baron de Trannoy. « Léopold II et Jules Malou ». Revue Générale, juin 1920,5 pp.

Le baron de Trannoy révèle dans ce petit article un projet inconnu de colonisation des Philippines poursuivi par Léopold II vers 1870 sous le cabinet Malou. Notre souverain cherchait à déguiser la cession des îles par l'Espagne sous la forme d'un contrat à bail ou d'une société interna- tionale sur le modèle de la Compagnie de Suez. Chose curieuse! Ce sont ces deux formes qui reparaîtront plus tard lors de la création de l'Associa- tion internationale africaine et de la location à bail de l'enclave de Lado.

T. S.

Ch. Delhaise Arnould. « Les associations secrètes au Congo. Le Nebili ou Negbo ». Bulletin de la Société Belge d'études coloniales, 1919. nuSS et 6, pp. 283-290.

Le Nebili est une société secrète répandue dans l'Hèle, l'Ituri et le dis- trict des Stanley-Falls. M. Delhaise, qui consentit à se faire initier dans

-- 470

la secte, pense que celle-ci est née dans les villages Abarambo, Ababua et peut être aussi Mangbetu d'un commun désir de s'opposer aux invasions des Azande.

Quoiqu'il en soit de cette hypothèse, le Xebili semble former aujourd'hui une société de secours mutuel.

Les réunions ont lieu dans des espèces de temples cachés dans la forêt.

Un hangar central forme le temple proprement dit. On y remarque des bancs pour les différents gradés de la société : les Kuruku, les Likungu, les Kauna, les Baro et les Lubasa. Au milieu du temple se trouve le feu sacré.

Le feu semble jouer un rôle important dans les cérémonies du Xebili. Jamais il ne peut s'éteindre. S'il est éteint, il faut le rallumer en frottant deux bâtons de Nakasi. Il ne peut être employé à aucun usage profane. En se chauffant les mains au-dessus de ce feu sacré et en se frottant ensuite les membres, on éloigne les accidents et les maladies.

Devant le temple s'étend une place qui sert aux danses. Autour de cette place se trouvent les emplacements des gradés, une petite maison réservée aux fétiches et des chambres à coucher.

L'obtention de grades et même la simple initiation sont subordonnées à des versements d'argent L'initiation comporte : 1) l'étourdissement du candidat qu'on tient penché au-dessus du foyer dans lequel on jette une poudre odoriférante ; 2) le versement de la médecine de force (dawa sur les extrémités des doigts du candidat; 3) des instructions ; 4) de la musique du chant et des danses.

Ainsi décrit, le Xebili apparaîtra au lecteur comme une institution bien innocente.

Ce n'est cependant pas le cas. Xous devons compléter l'étude de M. Delhaise par certains renseignements que les coloniaux connaissent et que M. de Calonne a donnés dans son étude sur les Ababua {Mouvement sociologique international, 1909, juin).

Le Xebili est une société secrète l'on se livre à des pratiques immo- rales. Le dawa « médecine de force » est composé de sperme, de ngula et de nzuda. M. Delhaise n'ignore certainement pas la destination de huttes qui sont marquées du chiffre 9 sur le plan de la page 287. « A mesure que la danse s'énerve, écrit M. de Calonne (O. C, p. 395 , des couples s'écartent dans la hutte voisine pour s'y procurer par un coït rituel le sperme néces- saire à la confection de la médecine. »

Je ne pense pas que le silence de M. Delhaise sur ces pratiques immo- rales puisse être interprété en ce sens que l'immoralité du Xebili aurait diminué ou cessé depuis 1909.

E. DE JONGHE.

II. Lixg Roth, cc Studies in Primitive Looms ». Journal of the Royal A n- thropological Institute. London 191Ö-1918.

J'ai lu avec plaisir cette étude de H. Ling Roth, qui forme une contribu- tion d'autant, plus intéressante à l'étude des usages et coutumes des populations primitives, qu'il s'occupe d'un sujet peu connu, peu observé et quelquefois bien ingrat à traiter. Il me paraît regrettable que l'auteur se soit borne aux documents de quelques musées d'Angleterre et qu'en

471

particulier il semble ne pas tenir compte de ce qui existe ailleurs, ou de ce qui a été publié antérieurement sur la question.

J'ignore si cette remarque peut s'appliquer à toutes les parties du tra- vail de M. Roth H. Ling. La deuxième partie « African Looms » en souffre beaucoup et l'ensemble du travail perd de ce chef une grande partie de sa valeur scientifique.

Les métiers à tisser ne* présentent pas seulement un intérêt par la technique et les détails de la construction de chacune de leurs parties; mais la méthode de la tension, la manière de s'en servir et en particulier la technique du travail de tissage sont des points dont il faut tenir compte. L'auteur ne parle guère de toutes ces questions ni de tout ce qui a été publié dans ces dernières années à ce sujet. Les notices sur les métiers à tisser du lac Léopold II, des Batempa, des Bena Lulua, des Baluba, des Ababua publiées par la Revue Congolaise; les données rassembléee dans la série des monographies de Van Overbergh, la note sur le tis>age des Akela, des A nnales de la Soc. Scientifique de Bruxelles 1911, les renseigne- ments donnés par Delhaise dans le Bull, de la Soc. Royale Belge de Géogra- phie de Bruxelles, sont autant de pages dont l'auteur a fait abstraction. L'auteur a négligé de même l'ouvrage du Dr. H. Eplirain, Ueber die Ent- wicklung der Webetechniek und ihre Verbreitung ausserhalb Europa* Rien que dans cette dernière étude, qui date de 1905, M. H. Ling Roth aurait pu trouver, à côté de renseignements très précieux, une bibliographie très étendue sur la question .

Malgré tout cela, le travail de H. Ling Roth reste très intéressant. Les soins extrêmes que l'auteur a consacrés à l'étude de certains détails de la construction du métier à tisser et lf s conclusions générales qu'il a su en tirer montrent que dans les études générales ces petites choses, qui échappent si facilement même aux auteurs les plus avertis, ont très sou- vent une importance capitale. A tous ceux qui s'intéressent à l'étude de la vie des primitifs et aux manifestations économiques des non civilisés nous recommandons vivement l'ouvrage de H. Ling Roth.

D' J. MAES

G. MONDALNI. Storia coloniale dell' epoca contcmpcranea. Pirenze, 1916. Parte I : La colonizzazione inglese. lxxxiii 809 pp.

Il manquait jusqu'ici un manuel d'histoire coloniale contemporaine. Pour se faire une idée du formidable mouvement d'expansion qui caracté- rise le XIXe siècle et rechercher les idées directrices de ce mouvement, il fallait fouiller dans un amas bibliographique touffu, inégal, et dispersé aux quatre vents. M. Mondaini, un des collaborateurs les plus fidèles de l'ancien Bulletin de Colonisation comparée, s'est efforcé d'écrire ce manuel attendu et de mettre un peu d'ordre dans la littérature du sujet. Entre- prise difficile d'ailleurs et de nature à rebuter les plus intrépides. Entre- prise que l'auteur a réussi à mener à bonne fin, du moins en ce qui concerne l'Angleterre, la principale des puissances coloniales. Une intro- duction rappelle en quelques traits les origines de l'expansion anglaise depuis le XVI0 siècle. Puis l'auteur entre aussitôt dans le vif de son sujet et explique la formation et l'évolution de chacune des colonies britan- niques dans le cours du XIX' siècle. 11 ne peut être question de résumer en ce court compte-rendu le contenu de ce gros volume.

472

Sa lecture suggère pourtant quelques réflexions dont les coloniaux peuvent tirer profit. On s'aperçoit au premier coup-d'œil que la politique coloniale anglaise a suivi dans le cours du siècle deux ligues de conduite diamétralement opposées. La première fut celle du « laissez-faire » et du « laissez-passer », mise en pratique de la célèbre doctrine manchestérienne qui considérait les colonies comme un poids pour la métropole et aspi- rait même au moment elles se sépareraient de la mère patrie, comme un fruit mûr se détache de l'arbre qui le porte. Cette politique siguifiait évidemment autonomie administrative et décentralisation Elle incarne le vieil esprit « vhig », libéral et jaloux des prérogatives des individus comme des nationalités, petites ou grandes. On retrouve son influence prépondérante dans les chartes constitutives des dominions (Canada, Australie, Afrique australe).

L'Anglais aime ce qui est spontané, libre, ce qui échappe aux construc- tions logiques

Mais le dernier quart du XIXe siècle a été marqué par une recrudescence de l'esprit impérialiste, niveleur centralisateur, unificateur, esprit éta- tiste qui s'est d'ailleurs manifesté un peu partout en Europe et a conduit à la formidable catastrophe de 1914.

La doctrine impérialiste comporte le protectionnisme économique et des tarifs inter-im'périaux différentiels, défense militaire commune àlaMétro- pole et aux Colonies, maîtrise de la mer par une flotte puissante [Lwo powers standard car la mer est le lien unificateur entre ces régions dispersées constitution impériale qui substitue à la direction parlemen- taire un système fédéral mais centralisateur. Jusqu'ici, comme le remarque M Mondaini (p. 781), la forme militaire seule a donné des résultats appréciables II est peu probable que les dominions consentent à sacrifier leur liberté économique aussi bien que leur liberté politique sur l'autel de 1' « unionisme » ou du « torysme ». Cependant, le problème impérial tracasse beaucoup les hommes d'État anglais, car, malgré son apparente vigueur, l'empire britannique ne présente pas l'unité et la belle cohésion romaine Dans son armature, on entend parfois de sourds cra- quements : tantôt c'est la question d'Irlande, tantôt c'est le nationalisme égyptien ou hindou, tantôt les querelles entre Anglais et Afrikaanders en Afrique australe, tantôt les conflits entre Canadiens français et Canadiens anglais. La répugnance de l'Anglais à la synthèse, son penchant invétéré à la diversité peuvent produire, à la longue, des résultats néfastes. Liberté dégénère facilement en anarchie et... il n'e&tpas toujours bon de trop « décentraliser » (1).

Slmar Th.

Arthur Keith, Nationàlity and Race from an Anthropologist's Point of View ;24" Robert Boyle Lecture*, Oxford, 1919.

L'éminent anthropologiste anglais avait déjà traité un sujet semblable dans le Journal o f Royal Anthropological Institute, 1916, XL VI; p. 10 suiv. (Certains Factors concerned in the Evolution o f Human Races). Il y développe la thèse que la race et la nationalité sont un élément de diversité voulu

1 1) Lue traduction française du livre de M. Mondaini par M. G. Hervé vient de paraître (Paris, 1920)

473

par la nature et provoqué par l'isolement. Des groupes isolés et séparés spécialement par d'autres groupes tendent à former le noyau d'une race nouvelle, d'un groupement ethnique nouveau dont l'essence, par l'héré- dité, se propage aux générations successives Telle est la base anthropolo- gique et naturelle du fameux principe des nationalités. C'est un élément instinctif, spontané, irrationnel, qui jaillit des profondeurs du subcon- scient et provoque ces enthousiasmes nationaux qui stupéfient les intel- lectuels de notre époque.

Les réflexions de M. Keith sont très justes. Nous croyons aussi' que la base du sentiment national est d'ordre naturel et quantitatif et qu'il trouve son plus ferme soutien dans la conviction d'une parenté ethnique violemment opposée à la solidarité d'autres groupes.

Cependant, la « Nation » dans son vrai sens est autre chose que la liai- son du sang. Elle suppose un principe idéal qui surmonte la nature et tend à l'unité. Peut-être que la nature n'est pas simple, disait naguère M. Boutroux. Bien loin d'être simple, elle semble au contraire tendre à une diversité de plus en plus grande, à telle enseigne que les races se sec- tionnent en sous races, eu groupes ethniques et ceux-ci en collectivités de plus en plus différenciées. Finalement, apparaissent les individus dis- tincts les uns des autres, irréductibles les uns aux autres. Nous pensons donc que la nature parce qu'elle est quantité et étendue tend à l'ex- trême diversité.

Aussi, ne comprenons-nous guère M. Keith, quand il affirme que « inhe- rited Instincts and modem Ideals are out of Harmony» (p. 6) Si la raison suivait aveuglément la poussée naturelle et instinctive, il n'y aurait que des poussières de groupements sans liaison entre eux ; il n'y aurait pas d histoire « politique » ; il n'y aurait pas de nations. M. Keith le recon- naît lui-même quand il dit que « toutes les forces héréditaires dans un peuple tendent à la dislocation. seulement la raison prend le des- sus, ces forces divergentes peuvent être surmontées et le processus de fusion effectué. » Il reconnaît encore que dans la formation de la natio- nalité le processus de fusion vient d'en haut, c'est-à-dire de l'élite, tandis que les tendances à la dislocation viennent d'en bas (p. 21). Or. l'élite représente la raison, le jugement sain, la pondération. L'élite joue donc un rôle idéal, unitaire, dans la constitution d'une nationalité. Si on ad- mettait sans contrôle la thèse de M. Keith, on donnerait raison aux théo- riciens des races et aux fougueux adeptes de Gobineau, Chamberlain, Woltmann et Cie.

Tu. Seviar.

Sir Hakry H. Johnston. A comparative study of Bantu langnages. Nous donne un gros volume le résultat de sept années d'études sur les langages bantus. Il cite 3G6 langues bantoues et 87 dialectes, et dans une notice XJrécédant chaque vocabulaire, il explique l'origine de chaque idiome en remontant jusqu'au XVIe siècle. Une bibliographie très détaillée est jointe à cet ouvrage.

W. B. P.

Major Pearce : Zanzibar. Quoique le nom de Zanzibar soit familier, peu de travaux ont été publiés à son sujet.

474

L'auteur examine d'abord le passé historique de l'Ile et ses associations étroites avec les arabes.

La seconde partie traite de Zanzibar tel qu'il est actuellement et nous donne entre autres de très intéressants détails sur l'industrie des clous de girofle dont dépend la prospérité de l'ile.

Dans la troisième partie l'auteur donne une très intéressante descrip- tion des anciennes ruines persanes et arabes qui sont cachées dans les forêts de Zanzibar et de Femba, qui sont d'un grand intérêt archéolo- gique. W. B. P.

Les bois de la Guyane française et du Brésil : Sous ce titre vient de paraître le tome cinquième des rapports de la mission Forestière Colo- niale dirigée par M. le commandant A. Bertin. L'ouvrage comprend six grands chapitres : I. Notice générale et description de l'aspect de la forêt; II. Comptages et prospections; III. Études botanique et technique des bois ouvrables ; IV. Classement industriel des bois ; V. Monographies des principales familles botaniques delà Guyane; VI. Description des méthodes d'exploitation actuelles ; VIL Moyens propres à créer une indus- trie forestière en Guyane: le VIIIe chapitre, plus général, résume la ge- nèse et la philosophie de la question forestière coloniale.

En préfaçant cette importante étude, M. Henri Lecomte. membre de l'Institut a voulu immédiatement rencontrer les objections de ceux qui pourraient « se demander si des bois importés des pays chauds présentent les mêmes qualités de résistance aux influences atmosphériques ou autres et aussi les mêmes propriétés de conservation que nos bois d'Europe. » Le savant français répond : « Sans avoir même besoin de rappeler des expériences concluantes de l'administration des chemins de fer de l'État sur des bois de provenances diverses, il nie suffira de dire que le palissandre, l'acajou, le teck, etc., sont des bois provenant de pays essen- tiellement comparables à nos colonies au point de vue du climat, et que cependant tout le monde connaît leurs grandes et incontestables proprié- tés de conservation. 11 ne peut subsister aucun doute au point de vue des propriétés de résistance et de conservation de nos bois coloniaux. »

Il importe donc de ne pas négliger ces richesses naturelles. Et l'auteur de l'intéressant rapport insiste sur la nécessité de faire connaître aux architectes, constructeurs et industriels toute la valeur des bois colo- niaux, dont l'inscription devrait être exigée sur les cahiers des charges. 4&Ü préconise dès à présent l'instauration d'une « politique forestière » qui réglemente l'exploitation, l'aménagement et la conservation des forêts coloniales.

La publication nouvelle de la Mission d'études forestières envoyée clans les colonies françaises doit retenir l'attention de tous ceux qui se préoc- cupent de la mise en valeur rationnelle des ressources coloniales.

Gouverneur H. Schnee, Deutsch-Ost- Afrika im if 'eltk'riege, Leipzig, 1919. La campagne de l'Est-Africain a soulevé beaucoup d'enthousiasme en Allemagne. On. se rappelle la rentrée triomphale de von Lettow Forbeck à Berlin après l'armistice. C'était d'abord une fiche de consolation au milieu de la catastrophe sombrait le militarisme prussien. En outre,

475

avouons que cette défense de l'Est-Africain a été bien conduite et adroite- ment combinée.

Le Gouverneur Schnee publie à ce propos des souvenirs qui venant après ceux de von Lettow manquent un peu d'originalité. Comme il fallait s'y attendre, l'ex-gouverneur n'est pas satisfait du traité qui enlève à l'Allemagne ses colonies. Il soutient avec énergie qu'un peuplescomme le peuple allemand ne peut être exclu de l'expansion coloniale, que l'admi- nistration allemande était au-dessus de tout reproche et que la Conférence de la Paix a commis une lourde faute en donnant mandat aux Anglais, aux Français et aux Belges de prendre en mains la direction des anciennes colonies allemandes. Il réédite non moins naturellement contre nous spécialement les accusations qui avaient suscité autrefois la campagne anglaise contre l'Etat Indépendant du Congo.

N. M. Penzer, Cotton in British West Africa, London, 1920.

Voici un petit ouvrage très précieux II est édité par la Fédération des industries anglaises et préfacé par lord Milner, l'impérialiste très connu. L'auteur donne un aperçu de l'histoire du coton en Afrique occidentale anglaise, depuis 1860, puis étudie les méthodes, essais, résultats de culture en Nigérie, Côte d'Ivoire, Sierra-Leone, Gambie et aussi dans les anciennes colonies allemandes du Togo et Cameroun. L'auteur fonde les plus grands espoirs sur la culture du coton, surtout en Nigérie.

L'ouvrage se termine par une bibliographie très importante du coton de 1881 à igzo.

Il est inutile de souligner l'importance de cet ouvrage au moment l'industrie belge va tenter la culture du coton au Congo.

T. S.

R C. F. Maugham, The Republic of Liberia, London, 1920

Description générale de la république nègre, avec son histoire, son commerce, son agriculture, sa flore, sa faune, ses méthodes adminis- tratives, sa population. C'est un travail bien fait et documenté. L'auteur (consul général d'Angleterre à Monrovia) a la plus grande confiance dans l'avenir de la république. Acceptons-en l'augure, mais non sans quelque scepticisme.

West Africain Market Handbook, London, 1920.

Nous croyons utile de signaler aux lecteurs de la Revue ce petit annuaire qui renseigne toutes les sociétés minières de Nigérie dont les actions sont négociées au « Stock Exchange » de Londres. R. Griffith, Madagascar. A Century o f Adventure, London. 1919.

Petit livre édité par le Baptist Missionary Society, à l'usage de ses missionnaires. Il donne un aperçu substantiel de l'histoire de la grande île, de la psychologie des Malgaches, de l'éducation et des progrès des missions à Madagascar. L'ouvrage est accompagné de cartes et d'illus trations.

476

Sir Charles Lucas, The Gold Coast and the War, Oxford, 1920.

Excellent résumé de la contribution apportée- par la colonie de la Côte d'Or à la mère-patrie pendant la guerre. A remarquer les récits très suggestifs de la conquête de Togoland (pp. 17 et suiv.), Nous appren- drons, avec quelque étonnement, que la valeur totale du commerce de cette petite colonie atteignit en 19! 6 la somme coquette de 10 millions 300,000 livres sterling. La comparaison avec notre Colonie n'est pas à notre avantage.

Alys de Caramax-Chimay-Borgiièse, Belges et Africains. Rome, 1916.

Mme la princesse de Caraman-Chimay a fouillé, pendant les années d'exil, les archives du Vatican (fonds Borghese) et y a découvert cer- taines pièces relatives à l'arrivée à Rome, en 1608, de l'ambassadeur envoyé par le roi du Congo, Al vare II, au pape, Paul V, Borghese. L'auteur reproduit la photographie d'une fresque des salles delà Biblio- thèque du Vatican, représentant la visite du pape à l'empereur mourant, et une médaille frappée pour commémorer la venue de l'ambassadeur à Rome (p. 21). La fin du petit volume relate l'effort belge au Cameroun et dans l'Afrique allemande.

E. E. Gautier, V Algérie et la Métropole. Paris, 1918.

Livre très intéressant et fort bien écrit. On en jugera par les lignes qui suivent et qui traitent de la rivalité entre colons et indigènes :

« Parmi tant de choses que cette guerre nous aura apprises, on tombera peut-être d'accord qu'il y a celle-ci : les Français sont un peuple religieux. On savait bien qu'ils ont fait les croisades et créé les cathédrales, mais on croyait que c'était périmé. On sentait confusément que la Révolu- tion française ne rentre pas exactement dans un cadre rationaliste.

» On se tirait d'affaire en disant que le Français malheureusement se bat pour des idées au rebours des peuples mieux doués qui se battent pour des intérêts. Si on avait tenté à ce propos de supposer une tour- nure d'esprit religieuse, on eut été arrêté par l'acharnement de notre anticléricalisme: objection de faible valeur pourtant, puisqu'on sait que l'intolérance est une conséquence directe de la foi. Aujourd'hui, au spectacle merveilleux que notre armée a brusquement donné au monde, des mots comme « miracle » ou « martyrs » sont naturellement montés aux lèvres. Il vaut mieux, i)our la clarté, appeler les choses par leur nom. Cette magnifique abnégation contagieuse a sa racine dans le sen- timent religieux. Elle suppose la suggestion d'une foi commune. J'en- tends bien que nous avons assisté à une explosion de patriotisme, c'est à-dire à un sursaut de 1 instinct de conservation.

» Mais il y a autre chose. Dans cette guerre mondiale, ce ne sont pas seulement des patries qui sont aux prises, ce sont deux conceptions opposées de la vie. La nôtre, très en gros, en schématisant, est celle qui est formulée dans notre cathéchisme démocratique des droits de l'homme. Ce catéchisme est aussi absurde que vous voudrez, au point de vue rationel. Mais au point de vue sentimental, qui importe peut-

477 -

être davantage, il n'y a peut-être pas un Français qui en soit dégagé. Le catéchisme démocratique a pénétré nos mœurs. En tout cas, si le nom effarouche, la chose est bien claire. On n'a pas discuté chez nous sur « les buts de la guerre » parce que tout le monde est d'accord là- dessus. Il s'agit des Alsaciens-Lorrains, des Belges, des Serbes de Serbie et d'Autriche, des Roumains de Hongrie. Le principe des natio- nalités est si irrésistible que l'Angleterre donne à l'Irlande le home rule. Cela ne peut vraiment pas être plus net, et voyez la conséquence de l'autre côté de l'eau ici, en Algérie. Ces Arabes et [ces Kabyles qui se battent pour la France, par quoi lui sont-ils donc rattachés? Par la force toute nue. Il y a une contradiction intolérable, pour le besoin de logique d'un peuple qui aime les idées, j'aimerais mieux dire un remords déchi- rant pour l'âme d'un peuple religieux à qui l'égalité des hommes est article de foi : et par égalité il ne voit pas d'inconvénient à entendre similitude.

» Voilà donc nous en sommes à la fin delà guerre mondiale. La Métropole assurément a pris violemment parti sur la question des Jeunes Algériens. Elle a pris parti contre les colons et elle est la métropole, elle aie droit d'exiger. Peut-on compter pour lui inspirer la prudence sur les spectacles de l'écroulement jeune-turc en Orient. Mais ici même, en Occi- dent, sous les yeux de tous, par une expérience quotidienne, la métropole a eu sous les yeux un spectacle qui aurait pu refroidir sa passion. »

En effet, considérez ceci : en 1912 et 1913, on prédisait en Algérie des catastrophes. L'attitude de la Colonie dans la question indigène a été décrite comme une souveraine imprudence « qui mettait en danger » tout l'avenir de notre empire africain (Revue Indigène, p. 324). « Dès qu'une menace de guerre se manifestera en Europe, il nous faudra distraire 2 ou 300,000 hommes pour aller en Algérie prévenir les insurrections » (Revue Indigène, 1913, p. 602. Lamenace de guerre s'est réalisée en 191 i, et on eût pu difficilement rêver pour l'Afrique française une épreuve plus sérieuse de solidité. Le bloc n'a pas bougé; entre ces deux éléments, européen et indigène, qu'on nous disait séparés par des haines inexpiables, aucune fissure n'est apparue. Ils ont combattu côte à côte sur le front avec une égale bravoure. Ce résultat magnifique, ce loyalisme des indi- gènes, il n'est vraiment pas possible que les colons y soient tout à fait étrangers, eux qui sont le cadre social des indigènes, eux, à travers qui, dans un contact quotidien, les indigènes voient la France.

En Egypte, pendant cette même guerre mondiale, l'Angleterre n'a pas osé confier un fusil à un seul indigène. En Algérie, nous avons introduit la conscription et elle a été tolérée; les classes indigènes depuis !9!o ont marché comme les nôtres. Pour la première fois Jes fils des deux races ont combattu côte à côte, au même titre, levés par la même circonscrip- tion, confondus dans les rangs des mêmes régiments, indiscernables sous le même uniforme; dans une guerre victorieuse, et quelle guerre. . . Cola noue un lien tout nouveau, extrêmement fort Dans les deux camps tout le monde sent confusément que la vie, après, ne pourra pas recommencer exactement comme avant. Il faut une sanction. On a sous les yeux, il est vrai, ce que la Métropole ne voit pas, l'obstacle de réalités redoutables C'est dans ces conditions que, sur l'initiative de M. Jonnart, l'AIgéri

478

vient do modifier ses lois fondamentales en matière indigène II est encore trop tôt pour dire en détail dans quelle mesure et avec quel succès.

J. G FRAZER, Folk Lore in the OUI Testament. Studies in Comparative Religions Legend and Law. London, 1919, 3 vol.

L'éminent folkloriste continue ses vastes compilations. Le fameux (iolden Bough s'est allongé au point de devenir un immense répertoire des habitudes universelles concernant la magie ou la religion Les recherches sur le votémisine et l'exogamie comportent quatre gros volumes. Et ce nouvel ouvrage n'en compte pas moins de trois. On reste abasourdi, littéralement hébété devant une telle puissance de travail. D'aucuns prétendaient naguère que M. Weendt était le plus grand « poly- histor » des temps modernes. Mais nous pensons que le «record de l'ency- clopédisme » est détenu par M. Frazer. Son principal mérite demeurera toujours d'avoir fourni aux chercheurs de l'avenir une masse énorme de faits concernant les coutumes des peuples primitifs ou demi civilisés. Quant à ses théories comparatives, il n'en restera probablement pas grand'chose. L'école anthropologique anglo française, issue directement de l'époque de YAufklarung, a hérité de son esprit trop généralisateur et trop peu historique. L'idéologie classique a ce défaut : celle de ne pou- voir sortir d'elle-même et d'envisager dans tout groupement plutôt l'unité de l'espèce que la diversité sociale. Ainsi, nous trouvons dans l'Ancien Testament le récit du déluge. Aussitôt, M. Frazer va, avec la plus grande sagacité, découvrir des histoires de déluge en pièce, en Baby- lonie, aux Indes, dans l'archipel mélanésien, dans les deux Amériques, en Afrique.

M. Frazer ne songe pas un instant à se demander s'il n'y a pas eu trans- mission de ces récits d'un peuple à l'autre, d'une civilisation à l'autre. Non : retrouvant ces récits chez beaucoup de peuplades et en des points très éloignés, il recourt aune explication purement psychologique.

Ces récits ont i)robablement partout pour base des « inondations locales » que l'imagination du peuple a ensuite partout agrandies au point de les transformer en « déluge » anéantissant toute l'humanité (I 343).

Rien n'est dlus invraisemblable qu'une pareille explication Elle fait penser aux philosophes du XVIIIe siècle qui expliquaient de grands évé- nements par des causes infimes. Ceci prouve une fois déplus qu'il faut en finir résolument avec la comparaison hâtive et la classification à priori. L'ethnologie deviendra historique ou ne sera pas. La comparaison peut venir, mais après l'histoire.

T. S.

Codes et lois en vigueur dans le protectorat français du Maroc. Supplément an tome /<-''•. Organisation et lois judiciaires 1914 1918. 2 vol. Paris, 1919.

Le premier volume renferme les dispositions relatives à l'organisation judiciaire, au droit pénal et à la procédure criminelle. Le volume II con. tient la procédure civile, obligatoire en matière de contrat, droit coin-

479

mercial, immatriculation, régime international. Ouvrage indispensable à celui qui veut étudier et comparer entre elles les législations des colo- nies d'Afrique.

H. Ci-OUZOT'et A. LEVEL, L'art nègre et l'art océanien. Paris, 1920.

Les auteurs ne sont pas ethnologues de profession, on s'en aperçoit immédiatement. Mais ils ont un sentiment très vif de la perfection plas- tique et leur intuition du beau leur fait émettre certaines hypothèses qui se vérifieront peut-être un jour : ainsi, la répétition systématique des ligues droites et l'analogie de cet art primitif avec l'art classique II se rencontre ainsi, disent les auteurs, que l'art dont nous faisons notre étude, a obéi aux mêmes lois que celui des plus hautes époques et des plus belles écoles d'architecture et de sculpture. (Art océanien, p. 29. j Ils retrouvent également dans l'art nègre le goût commun des primitifs pour les dessins géométriques et les lignes droites sculpturales; ils soulignent particu- lièrement l'habileté des noirs à choisir et à suivre les indications de la matière, le fil du bois (p. 61) Toutes ces observations sont fines et inté- ressantes. Mais quelle idée de choisir des références dans La Cité antique de Fustel de Coulanges et surtout. . dans l'Essai sur l'inégalité des races humaines de Gobineau !

T. S.

Congrès d'Agriculture Coloniale ,21-20 mai J918). Compte rendu des tra- vaux publiés sous la direction de M. J. Challey, par A. Fauchère et D. Zolla. T. II et III, Paris, 1920.

Il est inutile de signaler l'intérêt de ces deux gros volumes. Tous ceux qui s'intéressent à l'agriculture et au développement des plantations trouveront une mine de renseignements de toutj genre. Le premier volume réunit les rapports publiés par la section des oléagineux (huile de palme, ricin, arachides, cocotier, etc ). Une très importante bibliographie sur les graines oléagineuses figure à la fin du volume Le second volume est consacré aux sections du café, du cacao, de la canne à sucre du riz, lu tabac et du caoutchouc. Signalons à la page 450 une bibliographie touffue sur l'exploitation et la culture des plantes à caoutchouc pendant les cin- quante dernières années. L'ouvrage se termine par les notices consacrées à la question du coton et des soies.

SlR Harry H. Johnston, A comparative study of Bantu langaages, nous donne en un gros volume le résultat de sept années d'études suivies km gages bantus. Il cite 306 langues bantoues et 87 dialectes et dans une notice précédent chaque vocabulaire, il exx>lique l'origine de chaque idiome en remontant jusqu'au XVIe siècle. Une bibliographie très détaillée est jointe à cet ouvrage.

N. B. P.

Major Pearce. Zanzibar. Quoique le nom de Zanzibar soit familier, peu de travaux ont été publiés à son sujet.

480

L'auteur examine d'abord le passé historique de l'Ile et ses associations étroites avec les Arabes.

La seconde partie traite de Zanzibar tel qu'il est actuellement et nous donne entre autres de très intéressants détails sur l'industrie des clous de girofle dont dépend la prospérité de l'Ile.

Dans la troisième partie, l'auteur donne une très intéressante descrip- tion des anciennes ruines persanes et arabes qui sont cachées dans les forêts de Zanzibar et de Temba, qui sont d'un grand intérêt archéologique.

W. B. P.

CONGO avec les Renseignements de l'Office Colonial

(Juin-Juillet).

CENEX

Société Générale d'Exportation

VAN SANTEN & VAN DEN BROECK

18 et 20, RUE DES RECOLLETS, ANVERS

Téléphone 5246 Adresse télégraphique : GENEX-ANVERS Bureaux Londres : Great Tower Street. E. C. London

Fournisseurs du Ministère des Colonies, des Missions Catholiques et Principaux Établissements et Sociétés Coloniaux.

Spécialité d'Articles d'Exportation

vers le Congo et la Côte Occidentale d'Afrique

ALIMENTATION (Monopole de la Maison Rödel «& fils, frères de Bordeaux) : Bière, Biscuits de mer, Beurre et Saindoux, Conserves de viandes, légumes et poissons. Conserves de viandes et poissons pour indigènes Eaux minérales, Farine hongroise spécialement préparée pour les tropiques, Lait condensé et stérilisé. Riz et légumes secs, Sucre et épices, Sardines de traite.

TISSU* DE COTON (Tissus de Manchester de la Maison James F. Uutton A

uimited) ; CouverUres en tous genres, Foulards, mouchoirs et écharpes, Pagnes en tous genres, Tissus imprimés et indiennes, Tissus pour confections, Tulle pour moustiquaire, Velours, toiles à matelas.

■abillemeit a me-kceries : Bas et chaussettes, Bonnets de coton, Boutons, Bretelles, Casques coloniaux. Casquettes et smoking caps, Ceintures en cuir, coton et élastiques, Chapeaux de feutre et paille, Chaussures en cuir, toile à voile en toutes qualités. Chemises en tous genres et Pijamas, Costumes complets en tous genres, Espadrilles, Fez et chéchias, Fil à coudre. Guêtres, jambières en cuir et étoffe, Maillots et Singlets, Martin Spring belis, Parapluies et parasols, Ser- viettes de toiliette et essuie-mains, vieux effets réparés et désinfectés.

otjeivcaillerie : Aiguilles à coudre, Anneaux en cuivre, laiton, métal blanc, etc , Articles de ménage émaillés et étamés, Assiettes fer-blanc, Cadenas et serrures, Canifs, Chaînettes en laiton et fil de tcheng. Ciseaux, Clairons et instruments de musique, Clous dorés, Couteaux de table, de cuisina, de chasse etc Cuillères et fourchettes Faïence, assiettes, cuvettes bols, mugs, etc Fers à repasser, Fil de cuivre et de laiton, Hameçons et articles de pêche, Houes haches hachettes indigènes, Lampes, .lanternes et photophores, Limes et scies, Machettes en tous genres et toutes dimensions, Machines à eoudre. Malles en bois et en fe', Miroirs cadre bois et zinc, Peignes Pelles et bêches, Rasoirs, Réveils-ma'in et montre, Serpes et faucilles Sonnettes et grelots, Verres à boire

peri.es et fausse rijoutiorie : Bagues, Bracelets, Boucles d'oreilles, etc.

divers: Allumettes, Amidon, Blanc pour casques, Bougies. Cartes à jouer Cauries et coqui- lages, Cigares et cigarettes, Cordes, ficelles et cordages, goudron, poix et peinture. Meubles en fer et en bois. Parfumerie, extraits d'odeurs, huiles pommades, etq Sacsjute. fibre de coco, toile, etc Savon en barres et parfumé, Sel fin gros, etc., en sacs ou en touques, Tabac en feuilles et en paquets, Pétrole, Pipes en bois, en terre, etc.

IMPORTATION-CONSIGNATION

de tous produits d'Afrique

===== Marques déposées : GENEX-SGE ===

EMBALLAGES

Installation pour emballages spéciaux pour les transports en Afrique

Envoi en Afrique de prix-courants et échantillons sur demande Prix établis sua* demande

Franco bord : Anvers, Liverpool, Hambourg, Rotterdam ou le Havre

Coût fret et assurance : Matadi ou Borna

Franco de port rendu : Kinshassa

rP.J.LEFRANCQ

30, Avenue Fonsny, 30 ' BRUXELLES

COMBATTEZ le mal du pays au Congo par une habitation fraî- che et riante en la peignant

au

DURESCO

peinture prête à l'emploi, mate, lavable, artistique, hygiénique, spéciale pour PAYS CHAUDS.

En boîtes métalliques hermétiques de 5 kilog.

Votre Boy peut l'appliquer

Fournitures Générales pour la Chirurgie et la Pharmacie

F. BRASSEUR

BRUXELLES

Installations complètes pour Hôpitaux, Mobilier opératoire. Stérilisation, Lava- bos, Meubles pour malades.

INSTRUMENTS DE CHIRURGIE

Pansements aseptiques et Antiseptiques liygiénica. Accessoires de Pharmacie, Caoutchouc souple et durci, Bas à varices, Bandages, Ceintures, Corsets, etc.

Bureaux et salles d'exposition :

149, Rue du Midi, 149

(Place Eouppe)

Téléphone : Adresse télégraph. :

Brux . 111.94 Chirurgica Bruxelles

Liebers-Gode. A. B. C. 5e édition

Vve THIROUX & Fils 1o.RuedesBoiteux> Bruxelles

1 TÉLÉPHONE : B. 2354

Fournisseurs du Ministère des Culonies et de nombreuses Sociétés congolaises

ARTICLES DE MERCERIE POUR L 'EXPORTATION

BOUTOIVS de corozo, de nacre, de porcelaine, d'os, de métal.

Aiguilles, épingles, dés, ciseaux, miroirs, nécessaires de mercerie.

ifiiis jf± ootjid:r:b ex autres

liubuns, lacets, galons de coton en couleurs,

dentelles

Bretelles, Jarretelles, Ceintures en tissu élastique et en cuir

MARQUE DÉPOSÉE

. aitui.icliirc Coloniale de Ubacs, Cmares, Cigarettes Articles divers pour Fumeur*,. Spécialité pour colonies

IMPORTATION Grosetdemi-gros EXPORTATION

G. VAN MAELE-WEYSEN = Üiï£S£3i

Fournisseur du Ministère des Colonies, Sociétés Commerciales et Missions

Exposition de Bruxelles 19J0, MEDAILLE D'ARGENT

MANUFACTURE DE VÊTEMENTS CONFECTIONNÉS

pour le Congo et les pays tropicaux

107, Boulevard du Midi

BRUXELLES

Costumes en tous genres pour Européens. Pij amas. Caleçons. Chemises. Costumes de toutes formes en blanc, khaky et bleu, Chemises de flanelle. Tous les vêtements indigènes de toutes formes, tels que burnous, paragias, chemises

Maison VAN BUGGENHOUDT

et surtouts arabes, culottes musulmanes, etc., etc.

Prix sans concurrence. Téléphone : lt. 23o4

EXÉCUTION RAPIDE ET SOIGNEE

- POUDRERIES KEUNIiSiüElBELGIQÜEsoc.ÉTÉ anonyme

57£.Bou LEy^tóMöyï^ B ruxel-l.es

Poudres wowni^mMm^^t^ÊMMSSSW^^^^^ /; dynamites .

=-jEXPLÔSlFS de SECURITE

ET EN GRAIN ES POpiESjjjWES

LA CHASSE ET LA 6 U Ë RM^qj-^^

Poudres F.FF.FFEfc^^^^^^^m^g,

A MÈCHES -ETCETci^

=J^^=~D ÉTONATEURS

NlTRO COTONS^^^^^^g

Poudres sans

EN LAMELLES. PAILLETTES ET EN GRAINS POUR LA GUERRE ET LA CHASSE POUDRES POUR PISTOLETS AUTOMATIQUES

qVjiECHES DE SURETE ^^"POU R M I M ES

Cartouches de chasse Mulleriteetclermonite

Prière de demander la notice 27.

0

John P.Best&C

36-37, Place Verte

ANVERS

Service régulier rapide par steamers

de la

Union-Castle

Mail Steamschip Company Ltd.

entre Anvers et Capetown, Algoa Bay (Port Elizabeth), East-London, Natal (Durban), Delagoa Bay (Loin enzo Marques), Maurice, Beira, Chinde, Mozambique, Port Amelia, Dar- es- Salaam, Zanzibar, Mom- bassa (Kilindini).

Service de transports en destination

du

KATANGA

, ,. , rnpirTr

SOCIETE

Commerciale & minière

DU CONGO

SOCIÉTÉ ANONYME

Siège social : BRUXELLES

S. CM. ELISABBTHVILLE

Magasins de gros et de détail

Vivres-Conserves

Entreprises

Vins

Générales

Toutes espèces de

«le Travaux Publie»

Marchandises

et Privés

Grand Stock

Matériaux «le

Automobiles

Construction

Motocyclettes

Atelier» «le

Uicveletles et Pneus

Menuiserie et

de toute Marque

Scierie niéca nique

minoterie A vapeur

Fourni turcs pour

Atelier mécanique

Installations d'eau,

pour

d'électricité, en-.

toutes réparations

Juin

fiVII Hl Assure santé du bétail en écartant les mouches, les moustiques

U LUL et les tiques et en hâtant la cicatrisation des plaies.

OXILOL

désinfectant assure le confort et la santé aux Blancs habitant la Colonie.

Doit être demandé par tous les Européens séjournant au Congo belge.

»4N. Chaussée de Mon s Brumelles

POUDRERIE ROYALE DE WETTEREN

Fondée en 1778

COOPPAL et CIE

SOCIÉTÉ ANONYME

= WETTEREN, près Gand =

USINES A WET», CAULILLE et MATAENE-LÀlÂiÊ

Poudres de chasse NOIRES et SANS FUMÉE en tous genres,

Poudres de mine en grains et en cartouches comprimées,

POUDRE DE TRAITE POUR LES COLONIES,

TONITE

Dynamites Détonateurs Mèches.

CARTOUCHES IDE CHASSE

PRIX SPÉCIAUX POUR L'EXPOPvTATION

S. A. L'ÉTOILE DU CONGO

anciennement A. HENRION genees dominassions Consignations IMPORTATION l'RODLTTS ALIMENTAIRES EXPORTATION

Vin«, Liqueurs, Cigares, Tissus, etc. Emballage spécial pour les Colonies

Rue Sandérus. 95 - ANVERi - Téléphone: 2616 •hliQ

A "^ H .

Anrçrpj/ 143, rue du Midi , ULOLÜrV BRUXELLES

Fournisseur de la Maison du Roi, du Ministère des Colonies, etc.

liistruineBïts pour la CHIRURGIE et les Sciences Installation complète d'HOI'ITAUX et LAZARETS

Mobilier cliirnrgical et opératoire Stérilisation

Orthopédie Bandages Ceintures Corsets Bas varices MAISON FONDÉE en 1900 Téléphone : BRUXELLES 6144

Juin

fiYM f\\ ASSAINIT LES POSTES LES MOINS CONFORTABLES ET LES PLUS UÀILUL MARÉCAGEUX PAR DE SIMPLES ARROSAGES JOURNALIERS

MAISON BELGE D'EXPORTATION

FONDEE en 1809

ara

Henri Kullmann -Thom

Négociant-Commissionnaire

Successeur de KULLMANN-SINGEB, et

68, Rue Joseph M, BRUXELLES **i*Pk.«, ii-ti»-* ***»

11 ' "" ' ' " ' Télégr. : « Kullchamp »

Fournisseur de l'ancien État Indépendant du Congo, du Ministère des Colonies et des principales firmes coloniales

belges et étrangères

Exportations Générales

de tous les articles vers le Congo et l'Afrique

Visitez notre salle d'échantillons

CORRESPOlSTDAlSrOE SOLLICITÉE Demandez nos nouveaux catalogues illustrés

Accumulateurs TIJBOH j

Société anonyme

Capital : ,500,000 francs

79, rue Joseph II, 79, BRUXELLES

Téléphone : Linthout 1410 Télégrammes : TUDOR, BRUXELLES

Accumulateurs stationnaires, transportables.

Emballages pour les Colonies

Réception Expédition Dédouanement

SOCIÉTÉ ANONYME A ANVERS Anciens Etablissements Mois et Co Bureaux : 42, rue Nationale. Ateliers et Magasins : 42, 44 et 46 rue Nationale.

92, rue de la Ruche. 71 et 87 rue Everaerts.

Emballage des marchandises en transit, en caisses et en ballots

pressés livdrauliquenient

Ballots imperméables du type Congo

Boîtes, bidons, tambours métalliques en tons genres

Spécialité de bidons à benzine et à pétrole

Produits Coloniaux Koloniale Voortbrengsels Cigares - tabacs - allumettes Sigaren - tabak - stekjes

HANDELSHUIS VOOR IN EN UITVOER - Geeraerdsbergen

COMPTOIR COMMERCIAL d' COMMERCIAL OFFICE FOR

et

Export d Import

GRAMMOXT-BELGIUM

E. LERCANGÉE ET V. DIERICX

Fabrique de Bonneterie

Téléphone 30

Loiselet-Dopchie

à LEUZE (Hainaut)

Télégrammes : Loiselet- Leuze

zzzzzz Spécialité d'articles d'exportation

ARTICLES POUR EUROPÉENS :

Gilets en filet, tàilets et Caleçons eu coton écru, blanc on rayé, en Vigogne Sonnai, demi-laine et pure laine normal.

ARTICLES POUR INDIGÈNES :

Singlets. Maillot* et Vareuses, en coton et en laine, blanc, unis, rayés,

multicolores et fantaisie. Konuets rayés et bariolés. Pagnes. Juin

MHHHMM

STANLEYVILLE 'LUSAMBO UKATARAKA

LISALA LUEBO

MATAOI

MARCHANDISES.

RAVITAILLEMENT.

MATERIAUX DE CONSTRUCTION

PRODUITS DE TOUS GENRES.

IMPORTATION» EXPORTATION

CONSIGNATION

M

LES BATEAUX

DE LA SOCIÉTÉ

ASSURENT LE SERVICE

SUR LE FLEUVE ET LES

AFFLUENTS PRINCIPAUX

AU CONGO BELGE .

La Société ç'pçcupe cie toutes formalités en DOUANE pour l'importation et- l'exportation.

Se DeC

WÉMtoa**.

sonfcSPELTINCKX

354, AND

Chaussée d'Anvers

Bureaux : 3, rue aux Vents \ télégr. :Léon SPELTINCKX Gand Les : A.B.C. 5 th. Edition, Bentley.

^ïiiïiSi

ali;iJ"j:"lii!3'i:i::":i^:iiPl*illii

MA€H11VI<:§ kfllriques, à Tuiles « HERCULE »

Machines combinées BIQUES, à TUILES, Système breveté', [aclilues complètement démontables pécialement construites pour les besoins des pays exotiques Fournisseur du Ministère des Colonies, d'un grand nombre de Sociétés Coloniales,

et de nombreuses Missions. lus de 350 machines sont en emploi au Congo Belge jtdag

Plantations Coloniales

LALUKI"

SOCIÉTÉ ANONYME

FACTORERIEJE BOMA

Commerce général de Marchandises pour Européens et Indigènes

ACHAT DE PRODUITS COLONIAUX

MANUTENTION & TOUTES OPÉRATIONS DE TRANSIT

Vastes Magasins pour l'entreposage de toutes espèces de marchandises

coisrsiGrnsr-A.Tioisr

SIÈGE SOCIAL :

41, rue des Minimes

BRUXELLES

De Ridder et Hughes «.«SES™

Marque déposée " CHANTECLER ,,

! TIIR\HODT (Belgique)

Nous recommandons nos articles spécialement traités pour les pays tropicaux. Nos tins brevetées ont données pendant de nombreuses années, entière satisfaction à notre clientèle. Au Congo les consommateurs peuvent se procurer notre marque à Oïl Ml M Africain, Kinshasa. - LA LLlil, Borna.

Prix-courant et échantillons sont envoyés sur demande

1

SOCIETE ANONYME

DES

ENGRAIS CONCENTRES

UIttilS (Belgique

FRODUITS : sirERPHOiPHATE co^Cemré ou DOiiiLE titrant 42 à 47 p . c . d'acide pliospliorique soluble eau et citrate dont 9/10 soluble eau. EHRMANITE platbe rnosriiAiÉ environ 60 p. c. sulfate de chaux, 2 à 3 p. c acide phospliorique. fHOSPeiiE de potasse environ 36 p. c. acide pnosphorique, 25 p. c dépotasse. - juin

Le meilleur Vin de Bordeaux vieux en dames-geannes est celui de la marque

"EVO„

CONNU ET APPRECIE PAR TOUS LE» COLONIAUX

■Fourni par l'a eienne firme

E. Van Oudenhove Vinsengros Bruxelles

13, rue de la Prospérité Vins de Bordeaux, de Porto et de Champagne

en caisse» spéciales

Juin

Société ap™ Etablissements De Clercq et Cie FILTERIE MODERNE

NINOVE (BELGIQUE)

PILB A COUDRE DE COTONS ET LINS EN TOUS GENRES

FILS A CROCHETER, A FAUFILER, A BRODER ET A DENTELLE

SPÉCIALITÉ DE FILS SUR BOBINES ET TUBES

mu

jar m ***** -.aaw»

J. VAN DEN HAUTE 8 F. DE CLERCQ

manufacture de CHAUSSURES Nînove (Belgique)

Chaussures en cuirs et tissus, cousues et clouées Spécialité d'articles en toile a vnli» nn„ MTO »!...,„■

III

isUiiuu aveu lbo uónwiyèwinmvó ue lufjtbb LUiuriiUt

Spécialité d'Articles photographiques pour le CONGO BELGE

«^E^CHRISTIAENS

ANCIEN CONGOLAIS

107, Marché-aux-Herbes, 107

BRUXELLES =

Téléphone : Bruxelles 9698

Appareils photographiques

de toutes marques. Appareils stéréoscopiques

Richard - Joux, etc.

Produits chimiques, révélateurs, «te en conippimés et sous tubes pour tropiques

Lanternes d'agrandissement et de projection

Cinématographes Jumelles à prismes Occasions nombreuses en magasin

AFRICAN and EASTERN TRADE CORPORATION m&) LIMITED

ANCIENNEMENT

African Association (Congo) Limited

Siège social :

ROYAL LIVER BUILDING

LIVERPOOL

Siège social au Congo Belge :

KINSHASA

Assortiments complets et variés de toutes espèces de marchandises toujours en stock dans nos dépôts.

DEPOTS :

Kinshasa Star.leyville

Coquilhatville Yanonge

Bumba Ponthierville

Bulungu Kindu

Acheteurs de tous

produits coloniaux

LE MÉTAL ANTIMCTM"B£LG1ÇA..

(Marque déposée le 27 octobre 1909)

pour Locomotives, Machines, Moteurs, Tramways, Automobiles, Remorqueurs, Transmissions, etc. est le PRODUIT BELGE

le plus employé.

Seuls fabricants: SEVRIN ET MlGEOT, A AUVELAIS

Stock important en magasin Livraison rapide

Télégramme : Belgica-Auvelais Téléphone : Tamiues 61

Fournisseurs des Ministères des Colonies, Chemins de fer

et de nombreuses Sociétés Congolaises

Juin

Désinfectez vos habitations avec la

CRÈOSOTINE EtoiIe * Rouge

vous serez protégés contre les maladies contagieuses et éloignerez les insectes et les moustiques si dangereux dans les pays chauds.

Fabricant* J. LEGRAND A O

! Rue du Tivoli, 27, BRUXELLES

Toutes Constructions en Bois enduites de

CARBOLINEUM

Etoile ^ Rouge

seront préservées de la pourriture et des dégâts occasionnés par les Termites et autres insectes.

Juin

OUTILLAGE

COLONIAL

ARTICLES

DE MÉNAGE

COMPTOIR DE QUINCAILLERIE

INSTALLATIONS DE POMPAGE

ARTICLES

DE TRAITE

BUREAU

TECHNIQUE

MAISON

DUTRY-COLSON

GAND

Fondée en 191Î

12, rue des Champs

FOURNISSEUR DE LA COUR, du Ministère

des Colonies, des Missions et des principales

Sociétés coloniales

LA MAISON EST RECONNUE POUR LE SOIN QU'ELLE APPORTE A L'EXÉ- CUTION DES COM- MANDES, DES EM- BALLAGES ETDES EXPÉDITIONS.

Livraison rapide

et soignée

Juin

Maison FELDBLUM & SONS

75, Leadenhall Street,

LONDON E.C.3

Adresse télégraphique : Téléphone :

Feldblum LONDON Avenue 3621

FOURNISSEURS A DIFFÉRENTS GOUVERNEMENTS ALLIÉS Même Maison à Paris :

80, RUE DE TOURENNE PARIS III

FOURNISSEURS au Ministère des Colonies.

Spécialité de vêtements usagés pour la traite. Rayon spécial pour le Congo.

Nous faisons un choix pour le Marché Congolais répondant aux besoins

de la Colonie.

DEMANDEZ-NOUS NOTRE TARIF F. O. B. HULL. Emballage soigné dans nos Magasins par presse hydraulique.

Stocks importants et toujours nouveaux.

Juin

GRANDE DISTILLERIE DIJONNAISE fondée en 1836 K. OUSTKflC & Cie

Successeurs : VAN DEN BOOGAERDE & BLOMME

23, rue Claessens, 23 BRUXELLES et DIJON (Téléphone Brux. 127.36

CRÈME DE CASSIS DEDIJOI SflROPS PURS FRUITS Liqueur «VIEILLE CURE,)

DEMANDEZ PRIX-CGURANT No 4.

Juin

toi Tassy & De Bodx

Fabricants d'Huiles Importateurs de Graines

COPRAH PALMISTE ARACHIDES

MARSEILLE

YINAIGREBIB L'ÉTOILE

5, Rue de la Verveine := BRUXELLES

Vinaigre de vin» de fruits

fabriqués spécialement pour

le CONGO

Juin

Graines potagères

récoltées spécialement pour les pays chauds.

CTttlies SIM03^r»-«...».«r

Successeur de Nestor D'ARGENT 12, Place Ste-Gudule, Bruxelles téléphone : 4278

Fournisseur du Ministère des Colonies, des Missions

et des Sociétés Coloniales, etc.

Spécialité d'assortiments de graines potagères pour Colonies.

Outillage pour les plantations. Insecticides, pulvérisateurs, etc.

Emballages spéciaux. Catalogues sur demande Juin

Georges HI-A-HSTIETïT

VBRIQUE DE MIROITERIE

Exportation

Savon Bertin 565 vaut de lO

Nos savons sont purs, onctueux et finement parfumés.

Ils conservent indéfiniment leurs qualité sous toutes les latitudes. Emballages spéciaux pour le Congo, sans frais pour le client.

BERTIN et Cie, 10, Place du Châtelain, BRUXELLES

: TÉLÉPHONE : 7493 : Juin

TOUS LES PRODUITS LACTES POUR L'EXPORTATION

Lait naturel liquide Lait condensé avec et «sans sacre Beurre Crème de lait Babuiyrose (Babeurre concen- tré) — Farine luctée Sucre de lait Ca«éïne.

142, rue Fransman, LAEREN BRUXELLES Adresse télégraphique ou postale : NUTBJCIA-LAEKEN Code ABC - 5me Édition.

LA

Soc. Anon Téléphones : Brux. 3492-3494

Les plus hautes distinctions aux expositions universelles et internationales.

GRAND PRIX : Liège 1905, Turin 1911, Gand 1913

Hors Concours (Membre du Jury) Milan 1906 Bruxelles 1910

Juin

77, rue du Midi BRUXELLES

Spécialité

de Reproductions et Agrandissements

10 p. c. de réduction à MM. les Coloniaux

FODERA

En magasin :

Appareils Tendeurs Rivets

Feuiilards de

toutes dimeusions Cisailles à feuillard Arrache-Clous Ouvre-Caisses Emballage spécial

au Ruban métallique pour paquets et petits colis Accessoires d'Emballage.

Appareil à cercler au fer feuillard les caisses pour l'exportation.

Seul machine permettant le serrage automatique et par écrasement parallèle.

Emballage solide et inviolable indispensable pour tout Exportateur comme pour

les expéditions de l'Intérieur, le cerclage au feuillard étant la meilleure garantie

de sécurité contre le vol. Démonstrations gratis sur demande

STÉ DU TENDEUR UNIVERSEL

Sté Coop. fondée en 1912

BRUXELLES 143, Boulevard Anspach

» Juin

AVIS

intéressant la publicité

Dans le but de documenter pratiquement le monde des affaires sur tout ce qui touche à la vie économique de la colonie, Congo, donnera des infor- mations précises sur l'importance des débouchés offerts par la colonie, la description, le conditionnement et le prix des produits que l'industrie belge pourrait fournir; les conditions de paiement, les usages de place, les frets et tarifs et conditions de transport les tarifs douaniers, les règlements d'entrepôt et de transit, les rapports économiques de district, les statistiques commerciales et industrielles, les mercuriales de prix, les i«djudications, les analyses de produits coloniaux et, en général toutes les indications de nature à intéresser les commerçants et industriels. Ces renseignements seront fournis par V Office colonial du Ministère des Colo- nies et le Service d' information et de propagande de l Union Coloniale

On trouvera dans les comptes rendus des séances de la Société pour le Perfectionnement du Matériel Colonial, des études et renseignements pré- sentant un grand intérêt pour nos industriels et nos colons.

ÉQUIPEMENTS COMPLETS

pour le CONGO et

les COLONIES

: 100,73

ique : LUCLAC

.7 uin

JLiTTOIIElSr IL^OIROI

Tailleur Civil et Militaire 5, rue de la Pépinière Téléphone BRUXELLES Adresse Télégrapli maison de confiance fondée en 1904

PLATS CUISINES

pour varier les Menus, Provisions de Voyage, etc.

CASSOULET

PETIT SALÉ aux Choux

CHOUCROUTE garnie

CIVET de LIÈVRE

ROGNONS SAUTÉS

ANDOUILLETTES aux Lentilles

VEAU BRAISÉ

SAUCISSES à la Tomate, aux Choux

BŒUF en DAUBE

TRIPES â la Mode de Caen

POULET ROTI à la Gelée

JAMBON GLACÉ à la Gelée

SAUCES

QUENELLES et GARNITURES etc., etc.

LA MARQUE

AM1EUX-FRÈRE5

GARANTIT

QUALITÉ et QUANTITÉ

Vent de paraître

i

'

?!

E.De Jonghe et Th. Simar, Archives Co/îg-o/azses.Bruxelles,Vromant,19. ;mi 218 pages. Prix : 10 francs. Pour les abonnés de Congo : fr. 7.5'ffl Recueil de documents inédits et curieux concernant l'activité des pre

mières missions dans le Bas-Congo et l'Angola. Ces documents sont extrait

des Archives de la Propagande à Rome.

Th. Simar, Le Congo au XVI* siècle d'après la relation de Lopez-Pigof ettj Bruxelles, Vromant, 1919, 100 pages. Prix : fr. 7.50. Pour les abonii| de Congo : 5 francs. Etude critique sur la plus ancienne relation connue sur le Congo

Dans ses prochains numéros, CONGO publiera :

une série d'articles de coloniaux de la première heure, qui ont promis pour nos lecteurs, de rappeler leurs vieux souvenirs.

Un nouveau type de concession foncière au Congo, par M. Heyse, Docteur en droit. <

L' élevage au Congo, par C. Van Damme, Dr de l'École Supérieure d'Agriculture de Gand. '

Les Forêts du Congo, par E. Van de Ryst, Missionnaire.

La Flore congolaise, par D. Vermoesen, attaché au Jardin Botanique de Bruxelles.

Le Jardin Botanique d'Eala, par Jean Pynaert, de l'Administration coloniale.

Les Modifications de l'Acte de Berlin, par V. Denyn, Directeur de la Revue.

Le Mouvement des études ethnologiques au Congo, par Ed. De Jonghe. Dr de la Revue.

Les Sociétés secrètes indigènes au Congo, par le même.

Sociologie des Bakongo, par P., Van Wing, Missionnaire.

Les l-opulations Ngombe de l'Equateur, par Oh. Engels, Commissaire de district.

La Mortalité infantile chez les Ababua, par Mme Rolleri accoucheuse diplômée.

De Jacht onder de Mongo, door P. Van der Linden, Missionnaris.

Les Institutions sociales et politiques de Baluba, par Ch. Van der Kercken, Commis- saire de district.

Le Xgula, fard indigène, par M. Maes, Chef de la section ethnographique du Musée de Tervueren.

Les Métiers indigènes dans le district du L,ac Léopold IL par le même.

Notes sur les Bashilele, par M. Veriiulst, Administrateur territorial.

Généalogie des chefs Warumbi, par M. Bernard, Administrateur territorial

Mœurs et Coutumes des Baniabungus par Ch. Roy, Missionnaire.

Les Bashi, par F. Colle. Missionnaire.

Etudes de linguistique et d'ethnographie Azande, par C. Van den Plas, Missionnaire.

Les Mogwandi, par B. Tangue Missionnaire.

Les Populations du Ruanda et de l'Urundi, par Th. Simar, Secrétaire de la Revue.

Voyages au Lomami, par le Dr Schwetz, Médecin colonial.

Les Progrès de la Cartographie Congolaise, par le major Maury

Les Bambous en Afrique, par M. De Wildeman, Directeur du Jardin botanique de Bruxelles.

Le « Miando », succédané du chanvre au Congo-Belge, par le même.

■■IBH

■MH

Première année. 5.

Octobre 1920

CONGO

Revue générale de la Colonie belge

Algemeen tijdschrift van de Belgische Kolonie

SOMMAIRE

^AU OF

HNOLOÖY

Edm. LEPLAE. .

. La situation de l'Agriculture au Congo Belge

(suite) . . . J-*?*/^* ... p. 481 L. PHILIPPART . . . L'Organisation sociale dans le Bas-Congo,

(suile) * p. 505

J. SIX Inlandsch huwelijk bij de Bakongo rond

Roma . . ... p. 5:20

Th. SIM AR A propos de politique coloniale p. 527

E. de WILDEMAN . . Le « Niando » succédané du chanvre au Congo

lie'ge •. p. 534

J. MAES Le Ngula au Congo Belge . . '. . . .p. 539

MÉLANGES : Politique coloniale -.L'évolution de la politique économique impérialiste delà Grande-Bretagns pendant la guerre, p. 548. Eéorganisation du Ministère des Colonies français, p. 560. Questions écono- miques : La Commission industrielle indienne, p. 561. L'avenir du caoutchouc et l'exploitation des caout- choutiers cultivés, p. 566. Géographie : Les Grands Lacs de l'Afrique centrale, p. 571. Ethnologie : La métallurgie au Lac Léopold II et dans la Lukenie, p. 576. Médecine tropicale : Les laboratoires de l'Ecole de médecine tropicale de Liverpool, p. 579. Société belge de médecine tropicale, p. 579.

ASSOCIATION POUR, LE PERFECTIONNEMENT

DU MATÉRIEL COLONIAL

Navigation sur le Haut-Congo. Balisage du fleuve (suite et fin), par M. Willemoës d'Obry, p. 163.

RENSEIGNEMENTS DE L'OFFICE COLONIAL DU MINISTÈRE DES COLONIES

Transports : Chemin de fer du Mayumbe, p. 105. Annexe aux tarifs et règlement géné- ral des transports. Classification générale des marchandises, p. 609. Chemins de 1er du Congo supérieur aux Grands Lacs Africains, p 62L, Informations, Société ano- nyme des «Huileries du Congo Belge », p. 621. Liste des firmes belges en mesure d'exporter leurs produits au Congo, p. 624. Actes officiels, p. 639.

BIBLIOGRAPHIE : Les Revues, p. 643. Les Livres, p. 6fi0,

Le numéro : 3 francs

EDITEUR :

GOEMAERE, IMPRIMEUR DU ROI

^ae de la Limite, 21, Bruxelles

CONGO

Publication périodique mensuelle dix livraisons, mille pages 25 fr. l'an Maa?idelijksch tijdschrift-tien afleveringen, duizend bladzijden-25 fr. per jaar

Étranger : 30 francs l'an. Parait chaque mois, sauf en août et septembre. Verschijnt elke maand, buiten Augustus en September. ' Le N°5 paraîtra Ie 1er octobre et désormais la revue paraîtra régulièrement le 1er du mon Nr 5 zal op /st,; Octubir verschijnen en daarna regelmatig den /ste der maand.

COMITE DE REDACTION

Fondateurs de la Revue

Président d'honneur Membres

Cooreman, Ministre d'Etat. Président de l'Union Coloniale. Broden, le Docteur, Directeur de l'Ecole de Médecine tropicale. Caïtier, F., Professeur honoraire à l'Université de Bruxelles,

Membre du Conseil Colonial. De Jonghe. Ed., Professeur à l'Ecole Coloniale de l'Université de

Louvain, Directeur au ministère des Colonies. Denyn,V., Professeur à l'Ecole Coloniale de l'Université deLou- vain et à l'Ecole supérieure Coloniale d'Anvers, Conseiller juridique au ministère des Colonies. Gillain, Ll Général, ancien Chef d'Etat Major de l'armée, Pré- sident du Cercle africain, Secrétaire général de l'Union Coloniale. Halewyck, M.. Directeur général des affaires politiques et administratives au ministère des Colonies, auditeur du Con- seil Colonial. Lepeae, E. .Professeur à l'Université de Louvain, Directeur géné- ral de l'agriculture au ministère des Colonies. Liebrechts, Ch., Conseiller d'Etat, ancien Secrétaire général du département de l'Intérieur de l'Etat Indépendant du Congo. Mahieu, Inspecteur d'Etat honoraire, Directeur Général de la Société Nationale des Transports fluviaux au Congo, ancien Secrétaire Général de l'Union Coloniale. Mortier, Supérieur général des Missions de Scheut, membre

du Conseil Colonial. Olyff, J. Chef du Cabinet du Ministre des Colonies, Directeur « chef du service de l'Industrie et du Commerce (Office Colonial). DIRECTEURS : MM. Y. Denyn et Ed. De Jonghe. SECRÉTAIRES : Simar, Th., Bibliothécaire au ministère des Colonies. JANSSENS, Ai.., Missionnaire de Scheut (pour les articles flamands) . Janssen, Franz., Sous-directeur au ministère des Colonies,

(pour les Renseignements de l'Office Colonial). Tielemans, Colonel retraité (pour l'Association pour le perfectionne- ment du Matériel Colonial .

ÉDITEUR : J. Goemaere. Imprimeur du Roi.

Pour tout ce qui concerne la RÉDACTION, s'adresser aux Directeurs

M. Denyn, 41, rue de la Pépinière, M. De Jonghe, 10, rue Bréderode

Pour les Abonnements et pour les Annonces,

s'adressera l'éditeur: 21. rue de la Limite à Bruxelles.

La situation de Pagriculture au Congo belge {i).

(Suite)'.

III. La Colonisation agricole des régions de haute altitude.

Sommaire :

A. Colon et colonisation. B. Les régions colonisables de la zone equa- toriale. — C. Conditions nécessaires à tonte colonisation agricole : salubrité; sécurité; équipement, bétail, main-d'œuvre; facilité de mise en culture, fertilité ; voies de communication et débouchés ; faci- lités de voyage, d'occupation et d'acquisition de terres ; assistance accordée aux colons pour faciliter leur installation ; assistance spé- ciale pendant la période critique; service médical et religieux, ensei. gnement; cadastre et lotissement des terrains, voirie; assistance technique, fermes expérimentales, publications ; le recrutement des colons agricoles. D. La colonisation agricole au Katanga. E. La colonisation au pays de Itilo et dans la région du Ki vu. F. Mesures prises actuellement en faveur de la colonisation. Conclusions géné- rales .

L'Afrique centrale, presque aussi étendue que l'Europe, n'est plus, comme il y a quarante ans, une terre mystérieuse et redoutable. On la parcourt aujourd'hui par rail, vapeur ou automobile, avec autant d'aisance qu'on traverse le continent européen. Et les Belges ont l'honneur d'avoir été, au cœur même de l'Afrique, les artisans principaux de cette facilité de pénétration.

Que l'on entre au Congo par l'un quelconque des points cardi- naux, on y trouve une voie rapide et confortable, qui transporte en quelques jours au centre du continent noir ou jusqu'à l'autre côté de l'Afrique, et relie le Cap à l'Egypte et l'Océan Indien

(1) Voir numéros avril-mai et juin-juillet.

482 -

à l'Atlantique. Et pendant tous ces énormes trajets à travers le Congo Belge, le télégraphe, le téléphone et quatorze stations de télégraphie sans fils permettent au voyageur de communiquer à tout moment avec toutes les parties de la Colonie, comme aussi avec l'Europe et le monde entier.

Il est donc hors de doute que les enquêtes commerciales, industrielles et agricoles se multiplieront, et qu'après avoir été pendant trente ans preque seuls à occuper le centre de l'Afrique, les Belges vont bientôt, s ils ne font preuve d'ini- tiative, se trouver noyés dans un flot sans cesse grandissant d'entreprises et d'entrepreneurs étrangers.

Ce flot s'annonce et sera impétueux, car la guerre a montré de façon saisissante l'énorme importance des richesses agricoles et minières des terres tropicales. Tous les peuples civilisés auront largement recours à ces grandes réserves de matières premières, capables d'alimenter des industries nombreuses, dont plusieurs sont d'une importance capitale : telles les industries des matières grasses, des boissons aromatiques (café, thé, cacao), du cuivre, de l'étain, du fer, des bois, des fibres textiles, etc.

Bien n'arrêtera l'exploitation de ces richesses. Certains rêvent de réserver le centre de l'Afrique aux Africains : c'est une belle et généreuse idée, mais qui ne se réalisera pas. Le progrès matériel marche trop vite de nos jours, pour que des races arriérées comme les races noires aient encore quelque chance de résister à l'envahissement progressif, Jent ou rapide, mais toujours irrésistible, des peuples civilisés, incomparable- ment plus actifs et plus intelligents. Il est grand temps de songer, comme le font les Anglais, non pas à arrêter la vague qui déjà se gonfle à l'horizon, mais à réserver largement aux noirs, dans toutes les colonies centre-africaines, les terres indispensables pour leur assurer une existence paisible et con- forme à leurs usages traditionnels, et pour empêcher qu'ils ne soient complètement submergés à la longue par les races étrangères.

Parmi les Européens, les Américains, les Asiatiques (1) qui rivaliseront pour l'exploitation industrielle et commerciale de l'Afrique centrale, les compétitions seront vives, et les qualités

(1) Le Japon est entré en ligne pendant la guerre comme fournis- seur de machines et denrées diverses en Afrique.

483

d'initiative, d'audace, d'énergie, de persévérance obstinée, qui furent toujours les vertus maîtresses des colonisateurs, seront également en Afrique centrale, comme elles le furent ailleurs, les meilleurs et même presque les seuls gages de succès.

C'est une perspective que les Belges doivent regarder en face, car l'avenir économique de la Patrie peut dépendre de l'énergie qu'ils montreront aujourd'hui dans l'exploitation de leur admirable colonie. Le Congo est une mine inépuisable de matières premières, agricoles et minérales : il dépend des Belges d'en réserver une grande partie à la reconstitution des industries et du commerce de la Patrie.

Mais pour cela il faut qu'ils se fassent planteurs, colons, éleveurs, mineurs, industriels, commerçants. S'ils se limitent surtout à servir la Colonie à titre de fonctionnaires, leurs ser- vices et leur dévouement, quelque grands qu'ils soient, n'as- sureront pas à la Belgique la large part qui devrait lui revenir dans l'utilisation de l'Afrique centrale et l'avenir de la Colonie sera sombre au point de vue national.

Il n'y a plus un moment à perdre pour convaincre de cette situation notre population belge et le personnel de la Colonie.

Le Gouvernement se préoccupait beaucoup autrefois d'inau- gurer une colonisation agricole belge au Congo, et d'assister nos nationaux en les encourageant et en les poussant vers les entreprises coloniales. Il continuera cette intervention.

Mais son action sera d'autant plus efficace que les Belges comprendront mieux la situation future de la colonie. Trop souvent on perd de vue les points réellement importants, pour s'attarder à des détails. Trop souvent aussi on ne voit que les conséquences immédiates, sans songer suffisamment à l'avenir. Et combien seraient effrayés s'ils envisageaient sérieusement le résultat qu'aurait dans une vingtaine d'années l'application de leurs idées!

Au Congo, surtout, il faut s'interdire de penser trop au présent : il faut songer beaucoup plus à l'avenir. Cette poli- tique, nécessaire au point de vue du développement économique de la Colonie, et surtout de son développement agricole, est une nécessité urgente au point de vue national.

Nous avons démontré, dans la première partie de cette étude, le grand intérêt que nous avons à multiplier dans les régions chaudes du Congo les plantations coloniales propre-

484

inent dites, produisant le caoutchouc, le café, les huiles, le cacao, les fibres, etc.

Nous étudierons maintenant ce qui peut être fait pour éta- blir dans les régions élevées et salubres du Congo, une coloni- sation agricole belge.

A. -r- COLONS ET COLONISATION.

Avant de parler colonisation, il faut se mettre d'accord sur ce qu'on entend par ce terme.

La colonisation, telle qu'elle se pratique dans les colonies tempérées . est l'établissement, dans un pays déterminé, d'un nombre considérable de personnes, qui s'y installent à de- meure, en consacrant à leur établissement les ressources, im- portantes ou non, qu'elles possèdent. Ces personnes sont seules désignées sous le nom de colons.

Les colons ne comprennent donc ni les fonctionnaires, ni les employés de sociétés commerciales, industrielles ou agri- coles, qui n'investissent pas leurs capitaux dans la colonie, n'y séjournent que pour un temps limité, et touchent périodi- quement un traitement ou salaire.

La notion de colonisation implique, comme nous venons de le dire, la fixation dans la colonie d'un nombre de colons assez important, pouvant constituer un peuplement. L'existence de quelques colons isolés n'est pas, à proprement parler, une colonisation.

Ces distinctions présentent une importance, non seulement au point de vue de la colonie, mais aussi au point de vue du peuple colonisateur. Si celui-ci réussit à fixer dans la colonie un grand nombre de vrais colons de sa nationalité, il prend définitivement possession du pays. Il ne fait qu'occuper la colonie, s'il y amène exclusivement des agents coloniaux, des artisans ou des commerçants, qui ne veulent y passer qu'un petit nombre d'années.

Les colons peuvent exercer une profession quelconque, et s'occuper soit d'agriculture, soit de commerce ou d'industrie. Mais dans tous les pays qui se prêtent à la colonisation pro- prement dite, on attache une valeur spéciale aux colons agri- culteurs et l'on s'efforce de les attirer en grand nombre.

Car les colons agriculteurs présentent plus que tous les

485

486

autres ce caractère d'être établis définitivement ou pour une longue série d'années, et d'attacher leur capital à la terre qu ils occupent.

En effet, l'agriculteur qui veut exercer son industrie dans un pays étranger, est obligé de travailler pendant de longues années au défrichement et à la mise en valeur de ses terrains. Il doit consacrer toutes ses ressources, ordinairement fort limitées, à la construction d'une habitation, à l'achat d'animaux domestiques, de semences et de plants, de machines et d'ins- truments agricoles. Le plus souvent même il ne dispose pas de l'argent nécessaire pour payer immédiatement ses dépenses de premier établissement, et doit contracter une dette hypo- thécaire qu'il ne peut rembourser qu'en plusieurs années. Une fois qu'il s'est engagé dans la culture, il y est ordinairement retenu par l'impossibilité de réaliser rapidement ses immobili- sations. Il y a des exceptions à cette règle, mais elles sont rares.

Le colon agriculteur est donc un élément de grande stabi- lité, et qui, par ce fait même, est d'une valeur supérieure au point de vue du pays colonisateur comme du pays colonisé. Mais il possède encore d'autres qualités : il est sobre et éco- nome, comme tous les hommes de sa profession. Il assure par son travail le ravitaillement de la colonie et multiplie la fer- tilité du sol pour produire les matières alimentaires et les denrées commerciales qui sont à la base de la prospérité éco- nomique et durable de toute colonie.

Aussi les Gouvernements coloniaux ont-ils fait de, tous temps un appel spécial aux colons agricoles, et pris des mesures multiples et coûteuses pour attirer ces agriculteurs et les aider à créer et exploiter leurs cultures et leurs élevages. A tel point qu'on ne conçoit pas une colonie de peuplement européen dont l'agriculture ne soit l'industrie principale, exercée par la grande masse de la population.

Au Congo Belge toutefois et dans le monde colonial en Bel- gique, on n'a guère étudié jusqu'ici la question de la colonisa- tion agricole On ne lui a donné tout au plus qu'une attention passagère.

Aussi la façon sommaire et intermittente dont cette colo- nisation fut envisagée, entraîne-t-elle de grandes divergences

487

\//± Altitude 1000 oL *5oo m. 1 5T00 à 2.500 nv

Fig. 2. Les hautes terres colonisables entourant les grands laes africains.

488

de vues et même une réelle confusion au sujet de l'opportunité et de la possibilité de la colonisation agricole, ainsi que des méthodes à suivre éventuellement pour la réaliser.

Certains de nos coloniaux, se basant sur d'anciennes notions géographiques, maintiennent que les pays équatoriaux, comme le Congo Belge, ne se prêtent nullement à l'établissement de populations blanches. D'après eux la colonisation agricole n'a pas d'avenir sérieux dans notre Colonie, donc pas d'impor- tance. L'Administration coloniale ne doit pas s'en occuper. Il suffit de développer le commerce, les mines, peut-être quel- ques plantations et l'agriculture indigène. La colonisation agri- cole, d'après cette théorie, n'est pas d'intérêt national, parce qu'elle ne saurait avoir d'ampleur.

D'autres, au contraire, s'appuient sur des considérations patriotiques, et sur l'exemple d'autres colonies, réclament l'im- plantation en Afrique de nombreux agriculteurs belges. Cer- tains parlent même d'une colonisation « en masse » et veulent aussi que l'Etat dote de terres et d'assistance nombre de nos anciens soldats, dont il ferait des colons agricoles.

Des divergences tout aussi accentuées se constatent quant aux moyens et qualités à rechercher dans les futurs colons et quant aux méthodes à suivre pour les établir en Afrique.

Les uns veulent qu'on s'inspire de l'exemple des colonies anglaises voisines, et qu'on cherche surtout à attirer au Congo des jeunes gens possédant d'assez grands capitaux et capables, par conséquent, de s'établir presque sans assistance de l'Etat.

Les autres esquissent des programmes de colonisation per- mettant une immigration plus démocratique et par lesquels le futur colon n'aurait presque rien à débourser. L'Etat le rece- vrait en Afrique pendant quelques mois dans une exploitation modèle, servant d'école professionnelle agricole, le mettrait au courant de l'agriculture coloniale pratique, et lui céderait ensuite, presque gratuitement, des terrains fertiles et favora- blement situés quant aux communications et débouchés.

Les aptitudes à rechercher dans les colons donnent égale- ment lieu à de grandes divergences de vue. Les uns préco- nisent surtout des éléments issus des milieux agricoles, tandis que les autres déconseillent d'envoyer des agriculteurs. Ils

489

accusent ceux-ci de s'adapter difficilement aux conditions spé- ciales de l'Afrique. L'idéal serait, d'après eux. d'enrôler des hoinmes débrouillards, ayant la volonté de réussir et un peu d'argent, fussent-ils même dépourvus de toute connaissance d'agriculture.

Quant aux méthodes à suivre pour installer les colons, le désaccord est tout aussi manifeste D'après certaines opinions, il faudrait que l'Etat prépare avec soin la colonisation des régions salubres. crée des voies d'accès et des centres équipés de tout ce qui est nécessaire à l'existence. D'après d'autres, ce travail préparatoire, nécessairement fort coûteux, ne devrait pas être envisagé : les colons n'auraient qu'à se tirer d'affaire par beaucoup d'initiative et d'endurance, et l'Etat pourrait se limiter à donner des preuves plus ou moins plato- niques de sa bienveillance à leur égard.

Ces questions ont acquis une importance depuis qu'on a découvert en Afrique centrale et notamment aussi au Congo Belge des régions favorables à la colonisation agricole, et dans lesquelles des nationaux de divers pays cherchent à s'établir en nombre ordinairement plus considérable que celui des Belges.

Pour choisir entre des systèmes si différents, nous devons nous instruire d'abord à l'expérience des peuples qui réali- sèrent dans leurs pays respectifs et sous les climats les plus différents, une colonisation agricole.

La plupart l'ont organisée depuis de longues années. Les colons qu'ils ont fixés sur leurs territoires se comptent par centaines de milliers, en certains cas par millions. Ces peuples connaissent donc fort bien la valeur, les exigences et les diffi- cultés de la colonisation agricole.

Ils ont publié et codifié leurs expériences en cette matière en un très grand nombre de lois, de règlements, de livres et de brochures, formant une littérature aussi abondante qu'in- structive, et qui est placée à notre disposition dans toutes les grandes bibliothèques publiques, dans les ministères, les ser- vices d'émigration, les universités, etc.

Dans les pages qui suivent, je ne fais que résumer et appli- quer à la colonisation agricole des parties les plus salubres du Congo Belge, les indications données par cette documentation.

490

B. LES RÉGIONS COLONISABLES DE LA ZONE EQUATORIALE.

La première eu quête à faire est évi déminent de constater s'il existe réellement en Afrique centrale et au Congo Belge des territoires colonisables. On en a longtemps douté, et ce n'est guère étonnant.

Jetons les yeux sur la planisphère et parcourons la zone equatoriale, bande étroite comprise entre les I0mes degrés de latitude Nord et Sud.

Nous y trouvons surtout des régions fort peu habitées par les blancs : en Amérique, les grandes vallées marécageuses de l'Amazone et de l'Orénoque, les côtes des Guyanes et de la mer des Caraibes ; en Afrique, les lagunes et les forêts des rivages du Golfe de Guinée, les sylves immenses du Cameroun et du Congo ; en Asie, les plages surchauffées de Ceylan et de la Malaisie.

Ce sont certes les domaines, par excellence, des chaleurs étouffantes, des végétations impénétrables, des cyclones et des pluies torrentielles ; des reptiles et des insectes dangereux; des fièvres et des maladies pernicieuses.

Qui se fût avisé autrefois d'y chercher des emplacements pour établir une population européenne?

Et cependant la connaissance plus approfondie de ces régions équatoriales a montré que, dans la plupart d'entre elles, les terres malsaines voisinent avec des régions de salubrité très satisfaisante. En fait, les caractères désavantageux que nous venons de rappeler sont propres, non pas à toute l'éten- due des régions équatoriales, mais seulement à leurs parties les plus basses.

Celles-ci, constamment humides et chaudes, sont très favo- rables à la végétation, mais malsaines pour l'Européen, tout au moins aussi longtemps que celui-ci ne les a pas aménagées et assainies, et qu'il n'a pas appris à modeler sa vie d'après leurs exigences spéciales (1).

(1) Cependant même dans ces régions chaudes, une certaine colonisa- tion européenne est possible, moyennant des précautions. Ceci nous est démontré par les 80,000 Européens, hommes, femmes et enfants, qui habitent de façon presque permanente l'archipel des Indes Néerlandaises

491

Mais la zone equatoriale renferme en un grand nombre de points des étendues considérables de terres élevées, permet- tant le séjour prolongé des familles de race blanche. Le ter- rain s'y élève en collines, plateaux et montagnes. Les diffé- rences d'altitude, qui peuvent atteindre des milliers de mètres, entraînent de grandes diversités de climats et la formation de zones climatériques souvent superposées ou étagées. En bas régnent des climats équatoriaux ou tropicaux caractéristiques; plus haut des climats de plus en plas froids, couronnés par d'autres qui rappellent les régions polaires.

Nos manuels de géographie empruntaient autrefois aux Andes de l'Amérique du Sud les exemples de ces climats étages. Et nous trouvions merveilleux que l'on pût, sur une même montagne de la Bolivie, voir à son pied des plaines basses et fertiles portant le cacao, la vanille, les arbres à caoutchouc et toutes les cultures tropicales ; à 3,000 mètres de hauteur une région saine et densément peuplée, produisant tous les fruits, les légumes et les céréales d'Europe ; à 4,000 mètres une zone pierreuse et froide, balayée par des vents furieux et presque inhabitable; enfin, au dessus de 5,000 mètres, les neiges éternelles et les glaciers.

On sait aujourd'hui que ces climats étages se rencontrent dans tous les pays équatoriaux, en Asie comme en Amérique et même en Afrique centrale, l'on crut longtemps à leur absence. De sorte que les Européens qui cherchent fortune

et surtout l'île de Java. De bounes habitations, une vie régulière et hygié- nique permettent à l'Européen de séjourner pendant de longues années dans les régions équatoriales même les plus débilitantes.

Un nombre considérable d'Européens est établi dans les grandes villes littorales de la zone equatoriale : Batavia compte 9,000 blancs; Samarang en a 5,000 ; Soerabaya 8,000; Singapoore 4,000.

Deux des conditions les plus importantes pour la conservation de la santé du blanc sous les climats équatoriaux sont l'usage d'une habitation confortable et hygiénique, et l'adoption d'un programme journalier d'ali- mentation, de bains, de repos et de délassements analogue aux usages des coloniaux hollandais, passés maîtres en cette matière. J'ai publié en 19 i0 dans le Bulletin Agricole du Congo Belge un grand nombre de pho- tographies et de plans d'habitations coloniales, que j'avais rassemblées à Java, dans les Straits et à Ceylan. Je publierai prochainement une nou- velle série, que j'ai pu recueillir au Brésil en 1901, aux États-Unis en 1900 et 1918, dans l'Afrique du Nord, en Egypte, au Soudan et en Afrique orientale en 1915 et 1916.

492

dans les entreprises coloniales, n'ont parfois qu'à se déplacer d'une centaine de kilomètres pour passer dés régions chaudes et malsaines à des pays tempérés et salubres (1).

Fort heureusement pour la Belgique, le Congo Belge n'est pas, comme on le supi^osait autrefois, une région de climat purement équatorial. Il présente, lui aussi, et de manière très favorable, des climats étages. Notre Colonie est, en réalité, un immense plateau, élevé à plus de 300 mètres au-dessus de l'Océan et doté, pour ce motif, d'un climat moins chaud et d'une végétation moins luxuriante que ceux des régions équa- toriales et basses du Brésil et de la Malaisie. Les parties les plus élevées du Congo et notamment le sud du Katanga, les hautes terres du Kivu, du Ruanda et de rUrundi, les plateaux proches des Lacs Edouard et Albert, le beau pays de Kilo et la frontière orientale de i'Uele, offrent des altitudes de plus de 1,000 mètres, allant jusque 2,000 et 2,500 mètres. Quelques montagnes dépassent 4,000 et même 5,000 mètres, mais sont inhabitables par suite de la rudesse du climat.

Ces faits ne sont d'ailleurs pas spéciaux à la Colonie belge. Des terres élevées de 1,000 à 2,500 mètres traversent l'Afrique centrale de l'est à l'ouest, présentent des superfi- cies énormes et permettent la colonisation depuis les hauteurs de Nairobi et du Uasin Gishu jusqu'aux plateaux élevés de Bihe dans l'Angola. La découverte en Afrique centrale de ces vastes espaces habitables par les blancs est un des événements les plus remarquables de notre temps, et présage rétablisse- ment au cœur de l'Afrique de nombreuses industries et d'une agriculture européenne fort importante.

(I) L'exemple le plus caractéristique de ces transitions rapides se trouve dans l'ile de Ceylan. La grande ville de Colombo, avec ses 180,000 habi- tants, est assise au bord de la mer ; la température moyenne de l'année est de 27oC,; les environs forment une région très basse, humide et chaude, de grande fertilité. Mais la voie ferrée s'élève au sortir de Colombo et atteint rapidement la ville de Kandy, à 500 mètres d'altitude, la température moyenne n'est plus que de 2-i<>C. Puis on gravit les pentes du Mont Xuwara Eliya et atteint la station du même nom, à 1,850 mètres de hauteur. Dans ce séjour idéal, véritable sanatorium pour les blancs déprimés par la chaleur des régions basses, la température annuelle moyenne ne dépasse pas 15' C. Et cependant la distance à vol d'oiseau de Xuwara Eliya jus- qu'à la mer n'est que de 100 kilomètres, soit environ le trajet de Bruxelles à Ostende.

493

D'une façon générale, on peut dire que lorsque l'altitude d'un pays tropical dépasse 1,000 mètres, le blanc peut séjour- ner pendant des années sans trop se ressentir du climat. A 1,200 et 1,300 mètres les conditions climatériques deviennent semblables à celles que nous trouvons dans le sud du Katanga.

Même directement sous l'Equateur, le climat devient suffi- samment tempéré pour permettre une colonisation normale dès que l'altitude dépasse 1,500 mètres. Aux environs de 2,000 mètres le climat est presque idéal, surtout si les pluies ne sont pas trop abondantes.

Comme exemples de pays centre -africain s dont le climat est favorable à l'établissement d'une population blanche, nous citerons les hauts plateaux de l'Afrique orientale anglaise, les terres hautes du Ruanda-Urundi et du Kivu, le sud du Katanga, le plateau de Bihe.

En Afrique orientale anglaise, dès que l'on atteint Nairobi (ait. 1635 m.) le pays se transforme comme par enchantement. Sur les vastes expansions de terres ondulées et de hautes col- lines, couvertes d'herbes aux verdures pales, sur lesquelles se détachent des massifs forestiers plus sombres, l'air est rafraîchi par des brises régulières. De tous côtés dévalent en cascades de nombreux ruisseaux. Au-delà de 2,200 mètres, la tempéra- ture ne dépasse plus 29"C à l'ombre pendant les jours les plus chauds (mars) et ne descend pas en-dessous de C. (juillet). L'ensemble du paysage et du climat rappelle de façon éton- nante certaines parties de l'Ecosse, donne au colon l'illusion de son pays natal, et impressionne profondément tous les Euro- péens qui visitent ces contrées attrayantes. Aussi nombre de fermiers anglais et boers sont-ils établis sur ces hauts plateaux, depuis Nairobi jusqu'à l'extrémité du plateau du Uasin Gishu, au pied du mont Elgon. (Voir les cartes pages 485 et 4 87.)

L'excellence du climat de la région du Kivu et du Ruanda- Urundi a fait l'objet de nombreuses études. La température y montre une douceur et une uniformité remarquables. A Gitega, par exemple, dans l'Urundi, la température à l'ombre ne dépasse pas 26° C, et le climat est un des plus salubres qui soient connus (l).

Aux environs du lac Mohasi (Ruanda), d'après des observa*

(1) Voir entre autres De Greef, Monographie de la région de lTruudi {Bulletin agricole du Congo Belge, 1919).

494

tions allemandes, la température du jour, oscille entre 17.5 et 25.5°. Plus à l'ouest, dans le haut Ruanda, à l'altitude de 1,600 à 2,200 mètres, le thermomètre se tient le plus souvent entre 15 et 18° c, les nuits sont fraîches, des brises soufflent pendant toute l'année, et l'Européen, qui doit se couvrir de vêtements épais, jouit d'un climat qui rappelle notre patrie.

Un exemple qui est beaucoup mieux connu en Belgique, se trouve dans le Sud du Katanga, vivent déjà un certain nombre de Belges. Ils ne font en général que se louer de son climat semi-tropical, qui cependant n'est pas encore aussi tem- péré que le climat des hauteurs du Kivu et du Ruanda.

Les particularités météorologiques des terres hautes de l'Afrique centrale sont d'ailleurs si bien connues aujourd'hui et furent décrites dans tant de publications géographiques et coloniales que nous ne croyons pas nécessaire d'y insister.

Il existe donc, même sous l'Equateur, des régions à climat tempéré, convenant aux Européens.

Mais ce fait ne suffit pas à permettre la colonisation agri- cole. Celle-ci exige, en effet, beaucoup d'autres conditions que nous examinerons brièvement.

Nous indiquerons d'abord les conditions qui furent recon- nues indispensables dans les pays la colonisation est établie avec grand succès depuis de nombreuses années.

Nous y ajouterons les conditions spéciales imposées par les caractères particuliers de la nature africaine, et qui devront donc être observées si la Belgique entend organiser au Congo une colonisation agricole belge.

C. CONDITIONS NÉCESSAIRES A TOUTE COLONISATION AGRICOLE.

Nous avons dit plus haut qu'une colonisation suppose l'éta- blissement, non de quelques personnes, mais d'un grand u ombre.

L'établissement dans un pays sauvage d'un grand nombre d'Européens est, à certains points de- vue, analogue à l'orga- nisation d'une expédition militaire. Le général Smuts, parlant àla Société royale de Géographie de Londres, le28 janvier 1918, constatait que l'organisation d'une petite caravane peut être

495

une tâche aisée ou agréable, mais que les difficultés et les besoins d'une nombreuse expédition obligent à examiner à fond toutes les conditions : la nature du pays, ses montagnes et ses rivières, ses forêts et ses déserts, dans un rayon très étendu ; ses maladies animales et humaines; ses moyens d'approvision- nement et de transport ; ses climats, ses terrains et le régime de ses pluies.

De même l'établissement d'une colonisation importante exige l'étude détaillée des conditions naturelles et économiques, et des précautions multiples et coûteuses pour éviter des désastres et atteindre le but visé.

Les conditions qui sont déjà nécessaires à la création de quelques exploitations agricoles dans un climat tempéré, sout donc encore plus impératives lorsque le nombre des personnes ou familles à installer devient plus considérable, et qu'elles doivent être établies en Afrique centrale.

On ne saurait commettre une erreur plus dangereuse que de considérer la colonisation agricole comme pouvant être faite sans minutieuses préparations, sans personnel technique et sans grands capitaux.

D'ailleurs, si la Belgique veut tirer parti de sa colonie, elle devra consacrer à cette œuvre de grands moyens financiers, officiels et privés, qu'il s'agisse de plantations, d'agriculture indigène, de colonisation agricole ou d'exploitations indus- trielles ou minières.

Il faut donc, lorsqu'il s'agit de colonisation, et surtout de colonisation africaine, s'assurer de l'existence de toutes les conditions qui s'imposent pour que l'entreprise soit exempte de danger et puisse donner les résultats attendus.

En nous basant sur l'expérience acquise dans toutes les colonies de peuplement, nous pouvons, quelle que soit la région à coloniser, affirmer que. les colons doivent y trouver ou pou- voir y créer les conditions suivantes.

I. Salubrité.

On ne peut songer à coloniser une région que si elle présente toutes les conditions voulues pour que les colons et leurs familles puissent, moyennaut certaines précautions, s'y main- tenir en bonne santé.

La première condition de salubrité est évidemment que le climat soit tempéré, donc plus ou moins semblable aux climats

496

européens. Cette condition est admirablement remplie dans les pays de grande colonisation, au Canada, en Australie, en Argentine, en Afrique du Sud. Nous savons qu'elle se trouve également dans les régions élevées de l'Afrique centrale, au- dessus de 1,000 et surtout de 1,500 mètres d'altitude, et permet à l'Européen, non de travailler autant que dans son pays natal, mais d'effectuer des travaux modérés et la direction personnelle de tous les détails de l'exploitation.

La température est à ce point de vue le facteur dominant, car tout excès de chaleur entraîne pour le blanc non seulement un épuisement physique et l'impossibilité de se livrer à des tra- vaux prolongés, mais aussi la fréquence de maladies telles que la malaria, dont les conséquences peuvent à la longue être graves.

Le colon agricole peut, il est vrai, se préserver contre les moustiques et la malaria par des travaux d'assainissement, de drainage et de débroussement autour de sa résidence, mais comme il habite la campagne, il est toujours plus exposé que les habitants d'agglomérations équipés à l'européenne.

On connaît aujourd'hui avec une assez grande précision, les travaux à exécuter pour préserver une localité ou une habita- tion contre les moustiques, propagateurs de la malaria. Mais ces mesures ne peuvent être efficaces si elles ne sont pas orga- nisées et surveillées par les autorités, comme elles le sont à Kharthoum, au Panama, etc. (1).

A ce point de vue les régions d'altitude moyenne, telles que le Katanga, demandent déjà plus de précautions que les con- trées de haute altitude (1,500 à 2,500 mètres).

Il faut ranger aussi dans les facteurs de salubrité la possibi- lité de se procurer dès les débuts une alimentation saine et abondante, ce qui n'est pas toujours facile en Afrique centrale, et deviendrait même fort ardu s'il s'agissait de ravitailler, dans les premières années de colonisation, un grand nombre de per- sonnes. Les régions riches en bétail et habitées par des agri-

(I) Voir la belle étude de M. Emile Hegh : Comment nos planteurs et nos colons peuvent-ils se préserver contre les attaques des moustiques. (Publi- cation de la Direction de l'Agriculture.) Bruxelles. En vente au Minis- tère des Colonies; Direction de l'Agriculture, 7, rue Thérésienne. On peut se procurer cet ouvrage en Afrique, en s'adressant aux agronomes des provinces et districts.

-.

y. ^

T. -

5 ®

497

culteurs indigènes, produisant des céréales, des fruits, légumes et volailles propres à l'alimentation des blancs, sont, à -cet égard, les plus favorables (Ruanda, Urnndi, Kivu).

2. Sécurité.

Les colons agricoles sont obligés de s'installer en pleine brousse, souvent à d'assez grandes distances l'un de l'autre; les conditions de sécurité méritent donc la plus grande attention.

Le danger provenant des indigènes, plus ou moins sauvages, peut être considéré comme inexistant aujourd'hui. Mais il n'en est pas encore de même en ce qui concerne les fauves.

Alors qu'au Canada, en Australie, etc., l'iiomme n'a prati- quement aucun animal à redouter, le colon de l'Afrique cen- trale doit s'établir dans des régions les lions et les léopards sont encore abondants. Il en est ainsi notamment pour toute la frontière orientale du Congo et même pour la région minière du Katanga, bien que l'occupation intense de ce pays éloigne de plus en plus les animaux sauvages.

S'il ne faut pas exagérer ce danger, on ne peut cependant le considérer comme nul, surtout lorsqu'il est question d'établir des familles de colons, des femmes et des enfants. On tue encore des lions dans la banlieue d'Elisabeth ville et certains de ces animaux ont fait récemment des victimes parmi les indigènes et même parmi les Européens. La colonisation exige donc une destruction systématique des animaux dangereux.

Il faut combattre aussi les insectes nuisibles, inconnus ou seulement désagréables dans les colonies tempérées, mais qui abondent en Afrique, et menacent soit la santé des hommes (moustiques, kimputus, tsétsés palpalis), soit la santé du bé- tail (tsétsé morsitans, tiques). D'autres, tels que les termites, sont grandement nuisibles aux installations, détruisent les constructions et les clôtures en bois, ainsi que les plantations.

Ces ennemis, qui ne se rencontrent pas dans les terres cana- diennes ou australiennes, opposent à l'agriculture en Afrique centrale des difficultés bien plus considérables qu'on ne se l'imagine à première vue. Ils exigent que des mesures spéciales soient prises et organisées par lés Gouvernements, comme elles le furent dans d'autres colonies (drainages, pétrolages,débrous- sements, etc.),

498

Au point de vue de la sécurité contre les maladies, la pré- sence de médecins, de médicaments, d'hôpitaux, est beaucoup plus impérieusement exigée en Afrique que dans les colonies des pays tempérés. Or, même dans celles ci ces moyens de pré- servation sont considérés comme indispensables à toute colo- nisation.

Il ne peut donc être question de les négliger lorsqu'on veut attirer des colons en Afrique centrale. Toute négligence au point de vue de la salubrité et de la sécurité des colons serait non seulement imprudente mais coupable.

Déclanclier une colonisation sans avoir pris ces précautions serait un crime.

3. Équipement, bétail, main-d'œuvre.

Après avoir considéré la salubrité et la sécurité du colon, il faut voir s'il pourra se procurer sur place les objets et les animaux indispensables à l'exploitation agricole. Le cas échéant, il faudra les lui procurer.

Il lui faut tout d'abord une habitation. Dans la plupart des colonies, la première maison du colon est très simple et con- struite en bois ; le colon peut l'acheter dans des scieries offi- cielles ou privées (l). Il peut même acquérir des habitations démontables, modestes, il est vrai, mais qui lui donnent un abri. Ce matériel se trouve plus difficilement en Afrique. Il faut une organisation pour en fournir aux colons 'une quantité suffisante. Dans une colonisation de quelque importance, le coût des habitations se chiffre par millions.

La confection de l'habitation provisoire et, plus tard, la construction d'une maison en briques ou en pierres, préférable à tous égards, se solutionne assez facilement s'il ne s'agit que de quelques individus. Mais elles sont beaucoup plus difficiles lorsqu'il faut établir en même temps un assez grand nombre de maisons, étables, hangars, enclos, etc.

D'autre part, dansles colonies tempérées, une habitation en

(i) En Afrique, on utilise des bois bruts, des feuilles et pailles, des bambous, des lianes, de l'argile, etc., que l'on désigne sous le nom de matériaiix indigènes. On peut, avec ces matériaux, construire rapi- dement et à bon marché, mais l'édifice ne dure que quelques années, parfois trois à quatre ans, ou même moins si les termites sont abon- dants .

499

bois et chaume peut servir pendant de longues années. En Afrique, au contraire, elle est rapidement détruite par les ter- mites et doit être fréquemment renouvelée. Ces travaux de construction et d'entretien exigent beaucoup de main-d'oeuvre indigène, toujours rare et instable, et devraient donc être évités par l'emploi de moyens plus pratiques, tels que l'installation de briqueteries, tuileries et scieries.

Pour qu'une colonisation soit relativement facile, les colons doivent pouvoir se procurer du bétail et l'employer non seule- ment pour le lait, le beurre et la viande, mais aussi comme ani- maux de trait et comme producteurs de fumier, entretenant la fertilité du sol.

Dans tous les pays les bêtes à cornes et les chevaux peuvent être entretenus et multipliés, la colonisation se fait sans difficultés généralement, et peut s'établir même à forte distance des centres habités et des voies de communication, à condition de se limiter aux élevages. La colonisation par la culture proprement dite est elle-même très facile lorsque le pays convient à l'entretien d'un nombreux bétail, et que le ter- rain, simplement enherbé, peut être défriché à la charrue.

Ces conditions très favorables caractérisent la colonisation des prairies des Etats-Unis et du Canada, des pampas de l'Argentine et de la plupart des terrains de la Rhodésie et de l'Afrique orientale anglaise.

En Afrique centrale, malheureusement, le bétail ne peut vivre partout. Ainsi la colonisation du Sud du Katanga est fort désavantagée par l'impossibilité de tenir du bétail dans les débuts d'une exploitation : ce n'est qu'après extension des défrichements, donc après quelques années, que les tsétsés morsitans disparaissent; les premières années d'exploitation voient bien des difficultés provenant de l'absence d'animaux de trait.

Cet obstacle ne se présentera pas en Afrique orientale anglaise ni dans la région du Kivu, du Ruanda-TJrnndi et autres terres de haute altitude, le bétail n'a pas à craindre la tsétsé.

Par contre toutes les terres hautes de notre colonie ne sont pas encore pourvues de bétail ou n'en ont qu'insuffisamment. Et dans les régions les indigènes entretiennent de grands

500

troupeaux, ils ne veulent pas toujours vendre les reproducteurs, qui constituent leur richesse principale. ~

On comprend combien cette question de l'acquisition de bétail doit être examinée avant qu'on puisse recommander une colonisation de grande importance.

Le colon agricole ne peut travailler que s'il possède un matériel approprié. Dans les colonies bien équipées, il com- mande charrues, herses, outils, véhicules et meubles dans les grandes villes de la côte et se les fait envoyer par' chemin de fer, à bas prix ou même gratuitement. Mais il n'a pas les mêmes possibilités en Afrique centrale; il doit acheter son matériel à haut prix, le faire transporter au loin, souvent à dos d'hommes, ce qui lui coûte fort cher. Les remplacements de pièces brisées ou usées sont très difficiles.

Aussi une colonisation en Afrique suppose-t-elle l'établisse- ment dès les débuts, dans les centres de colonisation, de magasiûs bien fournis, vendant tous les objets nécessaires aux colons', magasins dont nous voyons de bons exemples en Afrique du Sud, en Ehodésie, à Nairobi, Kampala, etc.

Il faut aussi à l'agriculteur des ouvriers indigènes soit pour garder son bétail, soit pour exécuter certains travaux des champs qui seraient trop fatiguants pour le blanc. En Afrique, malheureusement, les ouvriers sont rares et souvent introuva- bles ; ils sont aussi très instables et n'exécutent guère leurs engagements. C'est une sérieuse difficulté pour la colonisation.

Dans les colonies de peuplement d'Amérique et d'Australie, le colon attelle ses chevaux ou ses bœufs, défriche et laboure lui-même ses champs, exécute de ses propres mains les semis et récoltes; la température modérée lui permet ces travaux.

D'ailleurs, les machines agricoles de ces pays sont con- struites de manière à éviter aux conducteurs la fatigue phy- sique et même à les protéger au besoin contre les rayons du soleil (1).

(1) Les charrues, semoirs, herses, tracteurs, etc. usités dans les colo. nies sont munis de sièges pour les conducteurs, et parfois de toitures légères ou ombrelles protégeant contre les ardeurs du soleil. Ils sont de plus disposés pour être conduits par des personnes inexpérimentées ou peu vigoureuses ou des gamins.

501

Un colon peut ainsi effectuer à lui seul presque tous les tra- vaux d'une ferme et ne doit engager qu'un ou deux aides pen- dant la moisson pour exploiter une surface d'une centaine d'hectares.

Il est évidemment possible de travailler de la même façon en Afrique centrale, mais à la condition de disposer d'attelages et d un matériel approprié. Sinon le colon doit employer un nombre considérable d'ouvriers indigènes, qui sont difficiles à recruter, et donnent peu de rendement. Nous voyons déjà la culture par attelages s'établir tout près du Katanga, aux envi- rons de la Kafue. Elle s'introduit dans les fermes de la région minière à mesure que les tsétsés sont éloignées par l'extension des défrichements.

4. Facilité de mise en culture. Fertilité.

Certaines régions sont couvertes d'herbes, et donc faciles à défricher. D'autres portent des buissons, des arbres plus ou moins nombreux, ou des forêts.

C'est une bien grosse entreprise que de défricher une ferme si le terrain est couvert de forêts, comme il l'est en général au Katanga. Les colons de l'Afrique orientale, comme ceux de l'Argentine, de la Ehodésie, des prairies du Canada^ etc., ne rencontrent pas cette difficulté, car ils défrichent des terrains qui sont simplement enherbés. S'il leur arrive de devoir abattre des peuplements d'arbres ou buissons, ils peuvent utiliser dans ce but de puissants attelages, comme par exemple dans les Mallee lancls de l'Australie. Le colon qui s'établit en forêt mettra donc bien du temps à défricher ses terrains s'il ne peut se servir d'appareils mécaniques ou d'attelages. Pour ce motif l'Etat belge aida les premiers colons du Katanga en leur prêtant des appareils à vapeur pour arracher les arbres et faire les labours de défrichement. Mais il est bien plus efficace et plus économique que chaque colon puisse défricher sa terre lui-même au moyen d'attelages.

La fertilité du terrain est évidemment une des grandes conditions pour la réussite d'une colonisation agricole. On connaît la grande fertilité des prairies du Far West, qui pro- duisent sans fumures pendant des dizaines d'années.

Les terres limoneuses, comme on en trouve beaucoup dans le pays de Kilo et d'une manière générale partout croissent

502

en Afrique les fausses cannes à sucre (éléphant grass), sont les plus favorables, car elles maintiennent bien leur fertilité.

Les terres sablonneuses et latéritiques, au contraire, s'épui- sent plus ou moins rapidement et demandent des fumures vertes ou du fumier, des engrais chimiques, des cendres, de la chaux, etc. Ces matières fertilisantes ne se trouvent pas partout : il est donc très important que les régions l'on veut implanter la colonisation soient bien étudiées d'avance au point de vue de la fertilité, comme on le fait d'ailleurs dans les~ anciennes colonies. Eventuellement, il faut chercher et enseigner aux colons les procédés qui lui permettront de maintenir la produc- tion de ses terrains : c'est le problème qui s'est posé au Katanga, et qui fut résolu par les études "agrologiques et les expériences de la Munama. Ces recherches se font d'ailleurs aujourd'hui dans tous les pays de colonisation.

5. Voies de communication et débouchés.

Après la salubrité, la condition la plus essentielle pour qu'une colonisation agricole puisse réussir, est l'existence de voies de communication et de débouchés pour les produits agricoles.

Il suffit de parcourir la littérature, aujourd'hui très abon- dante, qui décrit les entreprises de colonisation officielles et privées, exécutées dans les diverses colonies du monde, pour constater l'obstacle insurmontable opposé à la colonisation agricole par l'absence de routes et autres moyens de com- munication.

Pour nombre de pays d'une grande fertilité naturelle et possédant des lois et combinaisons financières très favorables aux immigrants, les rapports des agents d'émigration des Etats européens concluent de la manière suivante : « On ne saurait » conseiller à nos nationaux d'émigrer vers ces contrées, vu )) qu'elles sont encore dépourvues de voies de communication » et que le colon n'a aucun intérêt à produire des récoltes » qu'il lui serait impossible de vendre. »

C'est, en quatre lignes, la condamnation de tout essai de colonisation qui ne serait pas accompagné ou précédé de la construction de routes et chemins de fer.

Aussi tout État colonial désireux d'attirer des colons agri- coles dans un territoire bien choisi, doit-il avant tout établir une artère de transport, route ou chemin de fer, allant du

503

siège de la colonisation aux cités, centres industriels ou ports maritimes qui seront les débouchés des produits agricoles. L'idéal, tel qu'on le réalise en Afrique Orientale Anglaise, depuis Nairobi jusqu'à l'extrémité du Uasin Gishu, ainsi que dans la zone du Bilié (Angola), est la construction d'un chemin de fer traversant sur toute la longueur le territoire coloni- sable.

Cette artère principale ne suffit d'ailleurs pas : il est de toute évidence qu'elle doit être reliée à tout un réseau de routes et chemins, desservant chaque village et chaque ferme, et permettant à chacun des colons d'expédier ses produits vers le chemin de fer ou la route principale.

Ce réseau de routes existe dans tous les pays peuplés, quel- que pauvres qu'ils soient. Le premier devoir du Gouverne- ment en matière de colonisation est de pratiquer et faire entre- tenir les chemins indispeusables à toute exploitation régulière du sol. Je n'oserais dire qu'on a suffisamment tenu compte de cette vérité au Katanga : les routes desservant les fermes ne sont pas entretenues.

Quant aux débouchés, on peut les décrire de façon sommaire en disant qu'ils doivent être suffisants et rémunérateurs.

Suffisants, c'est-à-dire capables d'absorber en tous teu^s toutes les récoltes et produits que les colons désirent vendre.

Rémunérateurs, c'est-à-dire capables de payer ces produits, déduction faite du coût du transport, à un prix assez élevé pour que le colon soit indemnisé de ses labeurs et de ses risques par un bénéfice convenable.

Quand on parle de coloniser en Afrique centrale, la question du débouché devient prépondérante : pourra-t-on vendre ce qu'on aura cultivé ou élevé ? Supposons, par exemple, une colonisation belge établie dans la région du Kivu, région qui paraît à beaucoup d'égards très favorable à cette entreprise. Il faudra d'abord construire une voie ferrée qui desserve la région et ensuite des routes qui la parcourent en tous sens.

Mais et à qui vendra-t-on les produits >. Dans la plupart des régions centre-africaines, la réponse serait malaisée en ce qui concerne les produit agricoles ordinaires : céréales, fruits. légumes, œufs, volailles, etc., car on n'y trouve qu'un petit nombre de consommateurs.

Pour le Kivu cependant il existe à peu de distance un dé-

504

bouché déjà important et qui promet de le devenir plus encore: la région minière du Katanga, s'étendant depuis la source du Lualaba jusqu'au Tanganika. Si nos chemins de fer tiennent compte des nécessités réelles de la colonie, les produits du Kivu atteindront Elisabeth ville par une voie convenable, c'est- à-dire rainde et économique, qui n'existe pas à l'heure actuelle.

Un autre débouché s'offrira encore à la région du Kivu- Kuanda-Uruudi : la région aurifère de Kilo- Moto et ses extensions. Un chemin de fer longeant les grands Lacs depuis le Tanganika jusqu'au lac Albert, ouvrirait à la fois le débou- ché du Katanga et celui de la région aurifère. Ce dernier sera peut-être un jour plus important même que le débouché du Katanga, car les régions riches en minerai d'or se sont tou- jours peuplées très rapidement lorsqu'elles étaient salubres et que leur exploitation était autorisée.

La région du Kivu pourrait, d'ailleurs, ravitailler en certains produits le reste de la colonie, si elle était reliée à Stanleyville ou Ponthierville par une voie ferrée.

Enfin, une région de colonisation peut aussi produire des récoltes exportables et c'est le cas notamment pour toutes les grandes colonies qui exportent des céréales, de la viande con- gelée et de la laine, des fruits, du café, du maïs, des bois, etc. (Argentine, Canada, Australie, Afrique du Sud, Brésil). Les colons anglais établis à Test de Nairobi et dans l'Uganda exportent surtout du café, du coton, du caoutchouc, du tannin, du cacao et du sisal. Le chemin de fer leur accorde pour ces produits des tarifs spécialement favorables, leur permettant d'exporter avec bénéfice malgré la longueur du transport.

Dans toute entreprise agricole et surtout dans la colonisation agricole, les possibilités de vente rémunératrice et donc les transports et les débouchés doivent être étudiés avec le plus grand soin. Sinon le résultat pourrait être semblable à celui de certaines colonisations sud américaines, toutes les con- ditions étaieut favorables sauf les transports, et qui, pour ce motif, ont abouti à des échecs.

(A suivre). Emi. Leplae.

Professeur à V Université de Louvain,

Directeur général de V Agriculture

au Ministère des Colonies.

505

L'Organisation sociale dans le Bas-Congo,

(Suite.)

CHAPITRE IV, L'autorité.

\

Avant de parler de l'autorité qui régit la société congolaise, je dois, pour être complet, rappeler d'abord en y ajoutant quelques détails, ce que j'ai dit de la situation de l'oncle maternel ou de son successeur, dans la famille.

Il y jouit d'une telle autorité qu'on pourrait dire que lui seul y est personne civile. Rien de ce qui concerne les membres de sa famille, ne peut être traité à son insu. Aucune décision qui les atteint, n'est légitime devant la coutume, que si elle a été prise en sa présence ou du moins s'il en a reçu notification.

Et c'est raisonnable, puisque le vrai responsable devant la société, c'est lui. Un des siens incendie-t-il pendant les grandes chasses une maison ou un champ de plantations ; ou bien dans une bagarre blesse-t-il son adversaire; les troupeaux de la famille pénètrent-ils dans les cultures; une de ses parentes trahit-elle la fidélité conjugale, tout retombe sur lui et il sera appelé devant les tribunaux en même temps que le délinquant. Un jeune homme est-il en retard pour le paiement de l'impôt, c'est à la bourse de son oncle que le chef fait appel. Faut-il conclure un mariage, c'est l'oncle de nouveau qui doit inter- venir de son argent.

L'oncle couvre donc en tout la famille de sa responsabilité. Mais, d'autre part, j'ai montré combien son autorité est excessive. L'enfant lui doit une obéissance aveugle, et ne peut prendre aucune décision sans avoir reçu son autorisation. Ainsi il est inutile de vouloir engager un jeune homme pour quelque travail, si le possesseur n'en a été avisé, et Pexpê-

506

riençe nous a appris que les engagements les plus sûrs sont ceux qui ont été arrangés avec ce dernier, fut-ce même à l'insu de l'intéressé. Des enfants voudraient être baptisés, mais si le veto du maître s'oppose à leur désir, rarement ils feront la démarche décisive, et bien plus, ils ne trahiront pas d'où vient l'obstacle par crainte de créer des ennuis à leur chef. Les jeunes gens les plus disciplinés et les plus intelligents, dont nous espérions faire d'excellents catéchistes, fuient la mission sur un ordre secret venu du village.

Au foyer conjugal, le véritable maître n'est pas répoux, mais l'oncle à qui ]a femme obéit presque passivement et qui peut rompre les mariages les mieux unis et les plus heureux. Les pouvoirs du chef de famille sont tels que la coutume lui' reconnaissait même, autrefois, le droit de vendre ses parents. Au dessus de l'autorité familiale, et réglant les rapports des familles entre elles, vient se placer l'autorité politique. Kous examinerons la source d'où elle découle, les attributions qu'elle a reçues de la coutume indigène, et les sanctions dont elle dispose pour faire respecter ses décisions.

Quant à sa source, la réponse est assez simple, si nous exami- nons la situation actuelle, telle que l'a établie le Gouvernement. Celui-ci a divisé tout le pays en chefferies, qui sont constituées par la réunion d'un certain nombre de villages groupés autour d'un même chef -lieu. Ces chefferies sont d'étendue et d'impor- tance inégales. Les unes comprennent cinq ou six villages seulement et peuvent être traversées, sur leur plus grande étendue, en cinq ou six heures. D'autres sont grandes presque comme une province. Ainsi, un mois entier de voyages me suffit à peine pour visiter la seule chefferie de Kimpese. Or, à côté des villages je m'arrête, il y a en outre Ces villages protestants et d'autres complètement païens qui n'ont pas encore voulu recevoir de catéchiste.

Chaque chefferie est placée sous l'autorité d'un chef unique, nommé par le pouvoir central, et auquel on donne le nom de chef médaillé à cause de la médaille spéciale par laquelle le représentant de l'Etat lui confère l'investiture. Le chef médaillé est seul reconnu par le Gouvernement, mais à son tour il nomme dans chaque village un chef qu'il peut révoquer à volonté, appelé par les congolais petit chef, qui est comme le bourg- mestre du village, qui règle les petites affaires, et est respon- sable devant le médaillé, de ce qui se passe chez lui.

507

Mais tout ce système était inconnu avant l'arrivée des blancs au Congo, et autrefois l'autorité était uniquement basée sur l'existence des clans.

Chaque groupe du même clan, habitant le même endroit avait son chef. Aussi si le village ne comprenait qu'un clan, il ne s'y trouvait qu'un chef. S'il était constitué par la réunion de deux ou trois branches de clans différents, on y avait deux ou trois chefs. Lorsque quelque difficulté s'élevait entre deux membres d'un même clan, c'était le chef commun qui la tranchait: lorsque les deux adversaires appartenaient à des clans ou à des villages différents, les deux chefs respectifs examinaient l'affaire; que s'ils n'arrivaient pas à s'entendre, ils portaient le différend devant un chef voisin, qui malheureusement n'avait d'autre moyen que la persuasion pour imposer sa décision.

Au dessus de ces autorités locales, il n'existait donc aucun pouvoir régional qui put établir un lien entre les villages dis- persés dans la brousse et se plaçât en dehors des querelles de villages.

Et par le fait de l'absence d'une autorité supérieure, les affaires qui surgissaient entre deux villages, étaient, pour ainsi dire, sans solution, du moins sans solution pacifique. D'où naissaient des luttes fréquentes et sanglantes entre les vil- lages. Le Bas- Congo était sans cesse en état de guerre, et se trouvait dans une insécurité continuelle.

Maintenant encore, quand les indigènes me demandent pour- quoi ils doivent payer à l'Etat qui ne leur rend rien en retour, cet impôt annuel qu'ils supportent aussi impatiemment que les Juifs d'autrefois ne supportaient l'impôt romain, je n'ai pas de meilleure réponse à leur donner que celle-ci : « L'Etat ne vous rend aucun service, dites- vous, mais depuis qu'il a établi la police dans votre pays, n'y jouissez-vous pas d'une complète sécurité? » C'est vrai, avouent-ils ; autrefois à peine pouvions- nous sortir de notre village, et encore n'était-ce qu'armés de notre fusil ou de notre gourdin, tandis que maintenant nous pouvons circuler à travers tout le pays, avec notre seule cou- verture sur l'épaule. Les guerres sont finies et ne s*bnt plus que des histoires qu'on se raconte le soir, autour du feu. »

Mais l'autorité des rois de San Salvador? Sans doute leur ro3^aume s'étendait, dit-on, jusqu'au fleuve. Peut-être; et quoi qu'il en soit, leur influence était complètement nulle vers le

508

Nord. Les villages qui y étaient répandus, ne leur devaient aucune redevance ni en hommes, ni en troupeaux; ne rece- vaient jamais la visite de leurs agents, et ne portaient jamais leurs procès devant les tribunaux royaux.

Au Sud de Kimpese, pays plus rapproché de la capitale, les relations avec le pouvoir central existaient encore, mais com- bien tenues. Les commissaires royaux visitaient parfois la région, appelaient les affaires et les jugeaient au nom du roi. J'ai encore vu un grand marché l'héritier du trône était venu en personne, rétablir l'ordre que troublaient des batailles et des meurtres continuels, et les villages se rencontraient pour vider leurs querelles.

Mais même dans la région du Sud, les visites des agents royaux étaient rares, leurs jugements sans sanction; si bien que les indigènes étaient toujours libres de se faire justice à eux-mêmes et que les meurtres restaient impunis.

Mais cette autorité des chefs de clans est donc maintenant remplacée par celle des chefs médaillés. Il paraît que, dans certaines parties du Bas-Congo plus rebelles à la pénétration européenne, les notables, afin d'éviter tout rapport avec les agents de l'Etat, ont présenté pour la médaille, des esclaves ou des gens de peu de considération qui servent d'intermédiaires entre les autorités et les populations. Nécessairement le pres- tige de tels chefs est nul, et dans ces pays, les grandes déci- sions sont encore prises par les anciens chefs, au fond des forêts, loin des indiscrets.

Mais je n'ai pas à m'occuper de ces cas, car il n'en fut pas ainsi dans la région de Kinrpese. Ici les grandes familles se sont disputé la médaille et le chef médaillé, grâce au prestige de sa naissance auquel est venu s'ajouter celui que lui confèrent ses fonctions officielles, est devenu le personnage le plus important du pa}Ts, devant qui doivent s'incliner et les indi- gènes les plus considérés et les féticheurs les plus redoutés.

Le chef médaillé, outre les pouvoirs qu'il a reçus de l'Etat, comme celui de percevoir l'impôt et d'appliquer toutes les mesures administratives dans son canton, a aussi hérité de tous les privilèges des chefs de clans, au point qu'il les a coinp>lète- ment supplantés. Il nous suffira donc d'examiner ses attribu- tions dans la société actuelle, pour savoir comment s'exerçait l'autorité dans la vieille société congolaise.

En résumé, on peut dire qu'il a le droit de s'occuper de

509

tout. Si la chefferie est très étendue ou si lui-même est peu jaloux de son autorité, il laisse d'ordinaire la plupart des affaires aux petits chefs et ne traite lui-même que les plus graves, ou celles qu'on lui soumet spontanément. Mais si le chef est un autocrate ou s'il veut se réserver à lui seul le profit des affaires, alors les questions les plus diverses doivent passer par son tribunal.

D'abord et surtout, ce qui se rapporte au mariage est son ressort. Lorsqu'un mariage est conclu, les parties contrac- tantes doivent le lui notifier et lui faire connaître la somme qui a été payée. Si l'un des époux se méconduit, c'est le tri- bunal du chef qui fixe l'amende à payer. Veut on rompre un mariage, le chef doit en être averti, ainsi que des motifs du divorce; et si, comme c'est habituellement le cas, les deux parties ne s'entendent pas sur la somme à restituer, c'est au chef qu'il appartient de trancher le différend. Ces seules affaires de mariage suffiraient pour occuper la vie d'un homme.

Ajoutez à cela les procès pour injures, coups, surtout si le sang a été versé. Il n'est pas bon, disent les chefs, de laisser des querelles pendantes, car les coups de feu s'égarent trop facilement à l'époque des grandes chasses, qui est l'époque les vengeances s'exercent de préférence. Un dicton populaire dit : Si tu possèdes un chien, veille à ce que ses petits ne se battent pas, car si l'un d'eux périt, toute la perte en est pour toi. Ce qui veut dire qu'une bonne police est tout à l'avantage des chefs.

D'autres questions viennent encore s'ajouter : deux villages sont-ils en contestation pour la propriété d'une forêt, d'un étang, ou sur une question de succession, c'est de nouveau le chef qui devra prononcer.

Bref, toutes ces affaires sont sans nombre, et qui connaît le caractère chicaneur du Congolais en conviendra facilement. pourrez- vous trouver un noir qui n'ait quelque affaire sur les bras, ou du moins dans la tête. Aussi, les villages des grands chefs ne sont jamais sans quelque députation venue des environs pour des affaires et le tribunal de ces chefs ne chôme jamais.

D'ailleurs, ceux-ci ne s'en plaignent pas. Un pays sans procès est un triste pays, disent-ils ; les procès, en effet, constituent la principale source de leurs revenus. Ailleurs,

510

c'est l'Etat qui paie les juges, mais ici cette charge incombe aux parties en cause, car tout procès se -termine invariable- ment par une somme à payer, dont la base est pour les grandes causes, le prix d'un cochon ou d'un mouton, et pour les affaires de moindre importance celui d'une chèvre ou de quelques poules. Autrefois, si le condamné était insolvable, on l'obligeait à quelque prestance, par exemple, à aller tuer un éléphant et à en rapporter les défenses au juge. Mais ce mode d'amende a maiu tenant disparu.

Le Gouvernement qui professe un respect parfois même outré, nous semble-t-il, pour les coutumes indigènes, a cependant défendu d'infliger encore des amendes et a voulu les remplacer par le travail forcé et la prison.

Qu'il me soit cependant permis de dire que cette mesure est impopulaire et opposée aux idées des Congolais.

Conçoit-on un notable de village condamné à une de ces peines infamantes ? Ces punitions sont d'importation euro- péenne, protestent les noirs, et nos ancêtres ne les connais- saient pas. Aussi, ils eurent vite trouvé le moyen de concilier les décrets de l'Etat avec leurs coutumes. Ils rachètent, disent-ils, leur prison ou leur travail au moyen d'une somme qu'ils versent au juge. .

Voici la procédure habituelle des tribunaux indigènes. D'abord il faut être poli avec le chef. On ne peut donc paraître devant lui les mains vides, et quiconque veut porter une cause à son tribunal, doit se présenter avec une grande calebasse de malafu. Faute de quoi, il n'est ni reçu ni écouté. Le malafu vidé, le chef appelle l'affaire en litige, et quelle que soit la sentence rendue, il doit être payé pour son travail. Si c'est d'une question d'argent qu'il s'agit, le chef partage la somme avec la partie dont il a reconnu le bon droit. Si c'est un délit public qu'il juge, il touche seul l'amende à laquelle est con- damné le délinquant.

Puis, si le délit est énorme, par exemple, si c'est un meurtre qui a été commis, il transmet l'affaire aux autorités judiciaires et administratives, à moins que le délinquant, ne voulant pas paraître devant les tribunaux des blancs, n'ajoute une nou- velle somme pour étouffer l'affaire. Si c'est un conseil qu'on est venu lui demander, on doit lui faire un cadeau pour le remercier du service rendu.

Je ne pourrais citer de plus bel exemple de la rapacité de

_ 511

certains chefs et de la folle mentalité des noirs que celui-ci : deux villages se disputaient depuis un an ou deux pour la pos- session d'une chèvre exceptionnellement belle. Des mariages avaient même été brisés à ce sujet. L'affaire vint enfin chez le chef médaillé, qui, la jugeant compliquée, fit appel aux lumières du chef voisin. Et voici la décision prise, qui rappelle la fable des plaideurs : Les titres de possession ne sont clairs ni d'un côté ni de l'autre, donc je m'adjuge la chèvre. D'autre part, mou collègue ne s'est pas dérangé pour rien ; il doit recevoir aussi sa chèvre que vous lui paierez en commun. Pense-t-on que les plaideurs aient trouvé la décision inique ? Nullement, et ils s'en allèrent tous contents, les uns parce qu'ils avaient enlevé la chèvre aux voisins, et ceux-ci parce que leurs adver- saires ne l'avaient pas obtenue !

Ces coutumes obligent les notables des villages à avoir tou- jours en réserve un petit troupeau, en prévision des procès aux- quels ils sont sans cesse à la veille d'être mêlés. L'État a donc bien fait d'intervenir pour protéger les noirs contre la cupi- dité de leurs chefs, mais le moyen qu'il a pris pour réprimer les abus, n'est pas heureux. Il eût simplement, semble-t-il, fixer le taux des amendes à payer. Cette mesure eût été acceptée, et ainsi eût été efficace.

Telle est l'autorité des chefs médaillés, telle fut celle des anciens chefs indigènes. Par le fait de son origine familiale (1), qui lui permettait de s'immiscer dans la vie intime et les affaires privées du village, cette ancienne autorité était abso- lue et avait ses abus. Mais cette même origine empêchait l'au- torité de devenir cruelle et sanguinaire. Le juge ne pouvait oublier que les accusés étaient ses parents, et il n'eût jamais consenti à leur infliger une peine corporelle. L'adage congolais dit que tous les membres du même clan ont un seul et même sang. Par conséquent c'eût été son propre sang qui eût coulé, si le juge eût fait verser le sang du coupable.

Les indigènes n'ont aucun souvenir de condamnation à mort prononcée par leurs tribunaux, et les meurtres qui se commettaient étaient des actes de vengeance privée que l'au-

(1) Le R. P. Philippart ne parle que de la région deKimpese. Il n'entend point affirmer que tout chef politique aurait été à l'origine un chef de famille. L'organisation familiale et L'organisation politique sont essen- tiellement distinctes chez un grand nombre de peuplades non civilisées.

(Note de E. De Jonghe.)

512

torité n'approuvait pas, mais qu'elle était impuissante à punir. Maintenant encore, et presque sous les yeux de nos fonctionnaires, ces coutumes criminelles n'ont pas disparu. Le noir a une science consommée des poisons; les morts mys- térieuses sont encore très fréquentes Et il n'y a pas d'espoir de les voir disparaître aussi longtemps que ces crimes reste- ront impunis et que la justice ne prendra pas des mesures sévères contre les coupables.

Ajoutons que l'absolutisme des chefs a cependant un cor- rectif dans les traditions du pays. Le noir a un vrai culte pour ses ancêtres et toute nouveauté lui est suspecte. Je n'en donne- rai comme preuve que le reproche qu'on adressait autrefois à nos chrétiens, lorsque, prenant une comparaison de la chasse, on leur disait : la piste que vous suivez nous est inconnue et nous ne savons elle mène ; pour nous, nous marchons sur la trace de nos ancêtres et nous voulons suivre le sentier qu'ils nous ont montré.

En vertu du principe que sous p>eine de voir périr le pays, on doit garder religieusement tout ce qu'a laissé la tradition, les jugements rendus par les ancêtres ont force de loi devant les tribunaux, et sont une protection contre les caprices des chefs .

Comme toute institution humaine, l'autorité chez les congo- lais, se présente avec de bons et de mauvais côtés. Qu'on ne se fasse pas illusion : malgré la présence des blancs, quelles que soient les marques de respect qu'on leur témoigne, et l'empressement qu'on met à exécuter leurs ordres, l'autorité indigène, qu'elle s'exerce encore dans les conseils des anciens, ou qu'elle soit passée dans les mains des chefs médaillés, reste toujours forte, plus puissante même que celle des agents blancs, parce qu'elle est mêlée à la vie de tous les jours, mais surtout parce qu'elle rappelle aux noirs, le temps des an- cêtres.

CHAPITRE V.

L'Esclavage.

Lorsqu'on parle de l'esclavage au Congo, on pense, comme d'instinct, à ces longues théories de malheureux traversant la savane, la chaîne au cou, à la file indienne, et marquant les chemins des caravanes de leurs cadavres laissés en pâture

513 -

aux bêtes de proie, et de leurs ossements blanchis au soleil. De fait, la tradition raconte que des négriers européens venaient, il n'y a pas très longtemps encore, « faire de l'ébène», le long de la côte; mais les montagnes du Bas-Congo, qui se succèdent sans fin et sans nombre comme les vagues de la mer, préservèrent notre coin de ces razzias sanglantes.

L'esclavage y exista cependant, mais sous une autre forme. Heureusement le Gouvernement de la Colonie est intervenu d'une façon si efficace que le commerce des esclaves a com- plètement disparu. Mais les mesures édictées n'ayant produit aucun effet rétroactif, ce qui eût été dangereux, sinon impos- sible, sous peine de désorganiser la société, le nombre des esclaves ou par naissance ou en vertu d'anciens contrats, est encore assez important. D'où la nécessité de ce chapitre, pour tracer complètement la physionomie de la société congolaise.

Après avoir fait connaître les sources s'alimentait l'esclavage, je tâcherai de déterminer quelle était et quelle est encore la situation des esclaves dans la société.

Ils se recrutaient de manières assez variées.

Il y avait d'afoord les prisonniers de guerre. Les hostilités, ai-je dit, étaient continuelles entre les villages. Dans les ren- contres, on laissait parfois des morts sur le terrain. Mais plus souvent le noir surprenait ses ennemis dans des embuscades dressées avec la patience et l'adresse du léopard de ses forêts, et les faisait prisonniers. Or, nos Bakou go se défendent éner- giquement d'avoir jamais maDgé de la chair humaine; ils laissent cet honneur aux peuplades du Haut Congo. Leurs prisonniers n'étaient donc pas servis dans les festins, mais emmenés au loin sur les marchés d'esclaves.

Il faut y ajouter les enfants volés. Profitant de l'absence complète de police, il se rencontrait partout des bandits de profession, rôdant près des villages, comme des bêtes de proie, enlevant les enfants qui s'aventuraient hors des aggloméra- tions et en faisant ensuite le commerce.

Ces deux espèces d'esclaves : les prisonniers de guerre et les enfants volés, par le fait que leur trafiquant n'était pas leur possesseur légitime et que, par conséquent, leur vente était injuste, était un bien peu sûr. Pour empêcher leur fuite, ils •étaient habituellement vendus au loin, par exemple sur la rive droite du fleuve, d'où, d'autre part, les convois d'esclaves arrivaient dans le pays de Kimpese. Leur maître les amenait

514

sur les grands marchés, une corde au cou et autour des reins, les attachait à un pieu, attendant l'acquéreur avec qui il discu- tait la valeur et le prix de la marchandise exposée.

Mais c'étaient les dettes et les procès, et on a vu comme ils étaient nombreux , qui fournissaient surtout les esclaves. Celui qui avait été condamné à une amende assez forte n'avait pas toujours de quoi payer. Si la partie adverse se montrait exigeante, il ne restait plus qu'une ressource. Le débiteur prenait un membre de sa famille sur qui il avait des droits et le vendait à son adversaire ou dans quelque village voisin. Les amateurs ne manquaient jamais. Ainsi, lorsqu'un village menaçait de disparaître par la mort des habitants, les survi- vants, si leurs moyens le leur permettaient, le reconstituaient par l'achat d'esclaves qu'ils établissaient sur leurs terres.

Usant de ce même droit absolu, si le chef de famille avait sur les bras quelque mauvais sujet dont il devait payer trop souvent les délits, il l'avertissait d'abord, et puis, si les remontrances étaient inutiles, il s'en défaisait en le vendant : c'était le moyen le plus simple pour ne plus s'exposer à des amendes.

Ces esclaves vendus pour dettes ou pour mauvaise conduite ne quittaient d'ordinaire pas le pays et restaient en relations avec leur famille d'origine. Il n'y avait de risque qu'ils échap- passent à leur maître. Car lorsque le marché était conclu, l'acheteur et le vendeur prenaient un fétu de paille ou un brin d'herbe, et tandis qu'ils le tenaient chacun par un bout, le vendeur disait : « Cet homme que vous avez acheté est com- plètement vôtre. Il sort de notre famille, nous ne le connais- sons plus, nous n'avons même plus le droit de le racheter, et si quelque jour il vous échappe et veut revenir chez nous, nous nous engageons à vous le ramener. » Puis chacun tirait le brin d'herbe de son côté et en emportait un morceau. D'où est venue l'expression : « zenga titi » (couper l'herbe en deux pour désigner une vente d'esclaves ». L'acquéreur, de retour à son village, tirait quelques coups de fusil pour annoncer aux alentours que le nouveau venu était son bien. Par ces coups de feu, la dernière formalité était remplie et le contrat consommé.

Enfin, à ces différentes catégories d'esclaves réduits en ser- vitude par les hasards de la vie, il faut ajouter ceux qui 1 étaient par leur naissance, ainsi qu'on le verra quand nous parlerons de la condition des esclaves.

515

Quel prix pouvait coûter un esclave ? .Nécessairement ce prix variait suivant l'âge, la force de l'esclave et le sexe, les femmes coûtant plus cher que les hommes J'ai assisté à plu- sieurs rachats d'esclaves, et j'ai remarqué que la somme res- tituée pour un adulte était habituellement une centaine de francs. Mais le prix des enfants pouvait s'abaisser jusque 20 francs. J'ai eu moi-même l'occasion de pouvoir en racheter. Il s'agissait d'enfants qui, désirant passer en ma possession, me disaient qu'avec 25 francs, ils me seraient cédés par leurs maîtres.

Il est assez difficile de déterminer quelle était la proportion des esclaves dans l'ensemble de la population. Cependant, comme toutes les familles ne possédaient pas d'esclaves, et que les propriétaires de trois ou quatre esclaves étaient rares, je pense que, tout calculé, on peut dire qu'ils représentaient environ un dixième de la population. Grâce aux mesures prises par le Gouvernement, les principales sources de l'esclavage se sont taries et le nombre des esclaves diminue sans cesse.

L'autre question à traiter est celle de la situation que la coutume leur donne dans la société.

On ne doit pas oublier que notre conception de la dignité humaine n'est pas celle du noir, que la civilisation chrétienne n'a pas imprégné du principe de l'égalité des hommes. Sans doute ce n'est pas un compliment que le Congolais fait à son voisin quand il lui dit : « tu es un homme acheté » ; cependant le déshonneur qui s'attache à la condition servile n'est pas pour lui ce qu'il est pour nous. Je pourrais en fournir des preuves nombreuses.

Je parlerai tantôt de la fréquence des mariages entre hommes libres et esclaves, phénomène qu'on ne pourrait com- prendre si l'esclave était l'être méprisé que nous nous ima- ginons.

Dans les rapports de société, la coutume n'a pas établi de barrière rigoureuse entre le maître et l'esclave. Ils vivent presque sur le pied d'égalité : nourriture, logement, vête- ment, occupations, tout se ressemble et en examinant le genre de vie des habitants d'un village, il nous est difficile de déterminer leur condition sociale.

L'esclave peut même devenir un personnage important dans son pays. Dans un de nos grands villages, le chef indigène, c'est-à-dire reconnu parla population et le chef médaillé, est

516

un esclave. Voici à la suite de quelles circonstances. Les parents d'an de nos catéchistes actuels possédaient un esclave, et à leur mort, ils confièrent leur jeune enfant à ses soins. Plus tard, l'enfant vint à la mission; puis, pour devenir caté- chiste, abandonna à son esclave, les droits qu'il avait sur son village. Tous approuvèrent sa décision, et l'esclave est mainte- nant un vieux chef respecté.

Semblable situation est rare, mais ce qui est fréquent c'est l'importance que, grâce à son âge ou à ses talents, prend l'esclave dans la famille de son maître, dont il devient le repré- sentant et le défenseur officiel. Et même, si la famille s'éteint, c'est habituellement lui qui hérite ses biens, en même temps qu'il recouvre la liberté. La distinction entre l'esclave et l'homme libre tend de plus en plus à s'effacer, depuis l'occupa- tion européenne. Pour nous, nous nous préoccupons peu que les enfants que nous recrutons pour notre mission soient esclaves ou libres; souvent même nous l'ignorons, et c'est à dessein que nous évitons de nous renseigner sur ce point : nous voulons ainsi montrer que pour nous il n'y a pas d'esclaves, mais que tous sont libres dans le Christ, devant la loi et à nos yeux. Xous avons même eu pendant longtemps un esclave comme catéchiste inspecteur de toute la région du Xord. Grâce à son zèle et à son intelligence, il s'était assuré l'obéissance des autres catéchistes, et le respect des populations ; le chef médaillé l'appelait volontiers dans ses conseils et aimait à suivre ses avis.

En quoi consiste donc la condition spéciale d'esclave? En ce qu'il ne peut ni acquérir ni posséder, et sur ce point l'esclavage congolais se rencontre avec l'esclavage antique. Tout ce que peut gagner l'esclave revient de droit à son maître, d'où celui-ci peut en disposer comme il veut, pour en tirer profit. Si l'esclave est une femme, toutes ses plantations appartiennent à son propriétaire. Si c'est un homme, le maître peut l'envoyer travailler il veut. Il peut donc l'obliger à aller s'engager chez les blancs, ce qui est fréquent, et de temps en temps quelqu un arrive du village pour recueillir son salaire, au nom du maître. Il peut l'envoyer au loin faire le commerce ou vendre ses produits. Tout le travail de l'esclave est donc pour son maître qui, en retour, doit le nourrir et le vêtir. Je deman- dais un jour, à propos d'un jeune homme esclave revenu avec quelque argent de Matadi, il avait travaillé deux ans :

517

« Mais avec ses économies, ne peut-il donc pas se racheter? » Quelles économies? me dit-on; cet argent qu'il a rapporté, à qui appartient-il? A son maître sans doute, à qui il devra le verser. Par conséquent, comment pourrait-il se racheter ?

J'assistai à un procès intéressant à ce point de vue : c'était une affaire de divorce. Le mari était un esclave possédé par sa propre femme, et c'était lui-même qui réclamait la séparation. Les époux se présentèrent devant le médaillé. Le mari voulut faire le compte de tout ce qu'il avait donné à sa femme pendant les années de mariage, afin d'obtenir restitution de son argent. Le chef le rappela à la réalité : « Que voulez-vous donc comp- ter, lui dit-il ? Lorsque vous avez tué du gibier à la chasse, vous l'avez rapporté chez vous, et vous l'avez mangé avec votre femme ; mais le morceau que vous-même avez mangé lui appar- tenait, puisque vous êtes son esclave. Vous avez tiré du vin de palme, vous l'avez bu le soir en compagnie de votre femme et de vos enfants ; mais le verre que vous-même avez bu, à qui appartenait-il ? A votre femme encore. Cessez donc ce jeu, ou sinon c'est votre femme qui pourra faire les comptes et vous obliger à lui restituer tout ce que vous avez bu et mangé chez elle ».

C'est quand il s'agit du mariage des esclaves que se mani- feste surtout l'esprit réaliste du noir. Voici comment il rai- sonne : « J'ai acheté un esclave, je ne puis le laisser se marier et s'établir au loin, sinon je perds le profit de son travail, donc mon argent. Je vais, par conséquent, le marier dans mon vil- lage, et même de préférence dans ma famille. J'en retirerai ainsi double profit : je ne serai pas frustré de son travail et de plus, ses enfants seront pour moi. » C'est ce qui fait que les mariages entre les maîtres et les esclaves sont si fréquents. Je dis mariages et non concubinages, car ces unions sont légi- times au même titre que les mariages entre personnes libres. J'ai parfois demandé si ce n'était pas un déshonneur d'épouser son esclave. Les noirs ne saisissent pas le sens de cette ques- tion et répondent crûment : « Mais le maître l'a acheté, ne doit-il donc pas profiter de son argent ? »

Et en effet, si on se rappelle ce que j'ai dit de la constitution de la famille, qu'importe au mari que sa femme soit esclave ou libre, puisque, dans l'un et l'autre cas, il ne possède pas ses enfants, et qu'importe à la femme que son mari soit un chef ou un serviteur, puisque la condition de celui-ci n'influe en rien ni sur sa propre situation, ni sur la condition de ses enfants.

518

Bien plus, cesinariages sont plus avantageux que les autres. D'abord, les divorces y sont plus difficiles, et puis, comme me disait un de mes catéchistes : « J'ai épousé mon esclave et j'en suis heureux. Voici pourquoi : puisque je suis le propriétaire de ma femme, je le suis donc de mes enfants. Par conséquent, aucun oncle maternel n'aura le droit de me les enlever, et moi seul pourrai m'occuper de leur éducation chrétienne »(1).

Car on devine aisément quelle est la situation des enfants d'esclaves. La question ne concerne que les enfants issus de femmes esclaves, puisque le père, libre ou esclave, n'a comme tel aucun droit sur ses enfants. Le principe est que qui pos- sède la mère possède les enfants. D'où la femme est un bien plus précieux, et par suite plus cher que l'homme, elle seule procréant des esclaves.

La coutume reconnaissait autrefois au maître le droit de tuer l'esclave rebelle. Mais les cas, il usait de son droit, étaient pour ainsi dire iuouïs, et même l'esclave était rarement l'objet de sévices. Ah ! on ne doit pas l'attribuer à un sentiment de pitié naturelle. C'était une simple affaire de calcul. Tue-t-on ou même blesse-t-on sa chèvre dans un mouvement de colère ? Ce serait de la folie. Ainsi en serait-il pour celui qui tuerait ou blesserait son serviteur : tout le dommage en serait pour le maître. Et puis c'était gênant et même dangereux de le faire, sous les yeux de la famille de l'esclave qui souvent habitait dans le voisinage.

Quand on considère la situation de l'esclave congolais, on a l'impression qu'elle est assez douce, et qu'elle ressemble plus à la domesticité qu'à la servitude. Dans cette société primitive et sauvage, l'esclave est mieux traité que dans les sociétés poli- cées de l'antiquité.

Ce régime familial, dont bénéficient les esclaves, prédisposait les Congolais à accepter les mesures prises contre l'esclavage. On peut juger combien les idées antiesclavagistes ont pénétré les esprits quand on pense à l'accord conclu entre beaucoup de chefs médaillés qui, de leur propre mouvement, se sont engagés à obliger le maître à libérer son esclave lorsque la famille de ce dernier offre de restituer la somme dont le propriétaire l'avait payé autrefois.

(1) Userait intéressant de rechercher si dans certaines régions, les eu- rants de la femme esclave n'appartiennent pas à l'ancien maitre de la femme, c'est-à dire à celui qui l'aurait vendue sons la réserve que les enlants à naître de cette esclave lui feraient retour.

(Note de E. De Jonglie )

519

Entre les hommes libres et les esclaves, il existe une classe intermédiaire, que les Congolais appellent les « gens prêtés ». Ce nom indique immédiatement leur origine et leur condition. Le débiteur insolvable n'était pas toujours amateur de vendre ses parents. Il recourait alors à un autre moyen : il s'acquittait de sa dette, en livrant au créancier un membre de sa famille qui servait de gage, mais qu'il se réservait le droit de reprendre quand il lui plairait, moyennant paiement de la dette. Aussi longtemps qu'il ne s'exécutait pas, le créancier disposait de cet homme comme d'un véritable esclave : son travail, son argent, ses enfants même étaient pour lui. Mais comme je l'ai dit, il y avait une différence fondamentale entre ce serf et l'esclave : c'est que le premier pouvait recouvrer sa liberté. Aussi, à l'occasion de ces contrats, on « ne rompait pas la paille » et le maître ne pouvait tirer des coups de fusil pour annoncer que cet homme était son bien.

Il n'y a pas longtemps, j'ai encore rencontré ce cas. Un chrétien vint me dire : « Il y a quinze ans environ, ma mère étant veuve, fut engagée dans un village situé à une heure d'ici pour une dette de 15 francs, que mon oncle ne pouvait payer. Comme j'étais assez grand, je ne fus pas compris dans le contrat et restai dans ma famille. Depuis lors, ma mère a été mariée dans son nouveau village, et a eu des enfants qui sont également aux mains des créanciers. Un de ses enfants a été tué dernièrement à la chasse, et depuis sa mort, je ne suis plus heureux. Je voudrais faire revenir ma mère et mes frères chez nous. J'ai de l'argent, mais les créanciers sont des gens puissants qui ne voudront sans doute pas m'entendre ». Nous arrangeâmes l'affaire. Le jeune homme s'adressa directement au chef médaillé dont il gagna les bonnes grâces par son savoir-vivre : il se présenta en effet chez lui, porteur d'une 'calebasse de malafu exceptionnellement grande. Le chef appela les créanciers et en sa présence leur fit remettre les 15 francs dus par l'oncle défunt. Puis pour terminer l'affaire à l'amiable, il dit (je reproduis ses paroles) : « Et maintenant, pour enlever la tristesse du coeur de vos créanciers et pour leur témoiguer votre reconnaissance de ce que pendant longtemps ils ont bien soigné votre mère et vos frères, vous leur offrirez une chèvre.» Conclusion bien congolaise, car le chef ne s'oublie pas, et de cette chèvre, il prendra sa part pour payer les frais du tribunal.

(^4 suivre.) L. Philippart,

MlSSIONNAIRE-RÉDEMPTORISTE .

520

INLANDSCH HUWELIJK

BIJ DE BAKONGO ROND BOMA

In de Bakongo dorpen, vooral in deze welke westwaarts van Boma langs den Kongo-stroom gelegen zijn, bestaan voorna- melijk vier wijzen waarop de vrouw zicli aan den man geeft of door hare ouders en bloedverwanten, aan denzelven gegeven wordt.

I. Het Tshinduinba. II. Het Tshimpele-kadu.

III. Het Tshindiku.

IV. Het Kuela of eigenlijke huwelijk.

I. Het Tshindumba.

De vrouw geeft zich aan wien zij wil, zonder vooraf- gaande overeenkomst, doch verblijft niet in het huis van den eenen of den anderen man, bereidt voor hem geen eten. Zij komt en weigert als zij wil. Is zij wars van den eenen, zij gaat bij een anderen, alles volgens haar believen en zonder de toe- lating van haar ouders te vragen Al de geschenken welke zij krijgt zijn voor haar; doch meestal deelt zij mede met hare ouders. Dit « tshindumba» , in de dorpen is het algemeen gebruik van de meisjes die, huwbaar geworden, aan geen man verloofd of besproken zijn, en is niets anders als de toepassing van het recht dat de zwarten toekennen aan een vrije vrouw van haar zinnelijke neigingen te voldoen.

Wordt de vrouw dienvolgens bevrucht en baart zij een kind, dan is dit « muana tshindumba» de eigendom van de familie der moeder of van de moeder zelve als deze geen familie heeft.

521

II. TSHIMPELO-KADU.

Met een vrouw en har e ouders gaat een man een verbintenis aan dat de vrouw een zeker getal maanden bij liem zal verblij- ven en al liet huiswerk zal doen, mits betaling van een zekere som te maande, gewoonlijk 5 frank. Verlaat de vrouw den man vooraleer de vastgestelde maanden uit zijn, dan dient enkel datgene teruggegeven wat geschonken werd toen de overeen- komst gesloten werd : maar hetgeen de vrouw gekregen heeft voor de maanden dienst mag zij houden.

Dit a tshimpelo-kadu » is een uitbreiding van het bestaande gebruik vrouwen uit te leveren aan de blanken mits een bepaalde som maandelijks te betalen. Heel lang bestaat het das niet ; doch het valt fel in den smaak van ouders en meisjes (het is immers het genot met de minst mogelijke wederzijdsche ver- bintenis). Dit gebruik wordt hoe langer des te algemeener, zoodat in enkele dorpen er onder de meisjes bijna geen spraak meer was van trouwen. Tot nog toe waren de Asolongo, die den blanke meer ongunstig zijn en meer aan eigen zeden hou- den, van dit tshimpelo-kadu bevrijd gebleven. Doch deze laatste tijden begonnen ook reeds eenige dorpen in de onmiddellijke nabijheid der blanken-posten door de plaag aangetast te wor- den.

Het godsdienst-onderricht is juist te goeder ure gekomen in de dorpen om te beletten dat de toestand hopeloos werd en om de kwaal, zooniet uit te roeien, dan toch hier en daar te stuiten. Over 't algemeen is het jong mansvolk gewonnen; het wil trouwen en niet meer met een bijzit zijn schoonste jaren slijten. Verschillende meisjes ook, die oprecht begeeren kris- ten te worden, willen van geen tshimpelo kadu meer hooren, en durven zelfs reeds weerstand bieden aan hun ouders die niets zoozeer verlangen als geld te trekken zonder gevaar het ooit te moeten teruggeven .

III. Het tshindiku, Een soort proeftijd voorbereidend

TOT HET EIGENLIJKE HUWELIJK.

Van weerskanten wordt overeengekomen om eerst eenigen tijd samen te leven om malkaar te leeren kennen en zich van malkaars gebreken en hoedanigheden rekenschap te geven, maar toch met het gedacht te trouwen, indien zij overeenkomen

522

en zien dat ze voor malkaar geschapen zijn. Gedurende dien tijd moet de man zijn vrouw kleeden en voeden.

Deze tshindiku-proeftijd was vroeger onbekend. Het is het gevolg van den invloed der blanken die de gedachten van vrij- heid en ontvoogding der vrouwen ingebracht hebben. Als het meisje niet van kindsgebeente af besproken werd mag men zeggen dat er bijna geen huwelijken aangegaan worden zonder proef, bijzonderlijk met het vooruitzicht van het kristelijk huwelijk omdat ze weten dat, eens ze getrouwd zijn, er van scheiden geen spraak meer kan zijn.

Bij de Asolongo is dit gebruik nog weinig in voege, daar bijna al de meisjes uitgetrouwd zijn als ze nog klein zijn.

Zijn beide voldaan en stemmen de ouders erin toe, dan wordt de huwelijksgift vastgesteld; is er feest, de vrouw wordt door hare vriendinnen... officieel... binnengeleid, en het huwelijkskontrakt is gesloten. Verlaat de vrouw den man gedurende den proeftijd, of zendt de man ziju bijzit weg om tamelijk zware redenen, dan moet al het gegevene : geld, stoffen, kleeren, enz., teruggeschonken worden.

Men schel ijker wijze zal dit « tshindiku » heel lastig zijn om uit te roeien, en er zal heel omzichtig dienen te werk gegaan.

Het grootste getal onzer gedoopten der Bakongo-dorpen zijn jongelingen die kristen geworden zijn hetzij te Boma, het- zij in hun dorp. De jongens moeten een buitengewoon goeden naam hebben opdat een meisje en hare ouders erin zouden toe- stemmen van den beginne af een vaste en onverbreekbare ver- bintenis aan te gaan ; en omgekeerd zijn er weinig jongens die een meisje zullen willen trouwen zonder er mee geleefd te hebben.

Onzes inziens zal het in vele gevallen geraadzaam zijn eenigen tijd niet te gebaren dat men het weet en het gunstig oogenblik af te wachten waarop men denkt te mogen hopen den gewenschten uitslag te bekomen.

III. Het kuela of het eigenlijke huwelijk.

Het eigenlijke huwelijk, is de eenige manier van samenleveu die eertijds in de dorpen bestond.

De jongen die begeert zich een vrouw aan te schaffen stuurt twee gezanten naar de ouders van het meisje om hun ter ken- nis te brengen dat hij een oog heeft op hun dochter of nichtje

523

en om hun te vragen of zij erin toestemmen in onderhan- delingen te komen. Natuurlijk moet er te dier gelegenheid een geschenk gegeven worden : kieken, en drank bestaande vroeger uit genever, thans uit wijn. Indien het meisje groot is, wordt gewoonlijk haar gedacht gevraagd; anders zijn het de oudste oom van moederskant en de ouders die een bescheid geven en zeggen of de jongen er mag komen over spreken. Het gebeurt ook, zelfs zeer dikwijls bij de Asolongo, dat de ouders van den jongen hem een meisje bespreken als hij nog klein is. Dan zijn het de ouders die al het noodige doen en de gezanten sturen.

Krijgen de gezanten een gunstig antwoord, dan komt de jongen ofwel zijn ouders om de onderhandelingen aan te vangen en beginnen zij de eigenlijke geschenken uit te deelen : eerst en vooral een kist gene ver of wijn voor oom en ouders en naaste verwanten; deze maken een schotel eten gereed, en bij beker en bord wordt van trouwen gesproken. Komt men overeen, dan krijgt oom dit, moeder dat, enz., zoodat al de naaste familieleden deelachtig zijn aan de mildheid van den toekomstigen man van hun dochter of nicht. Het meisje zelf krijgt kl eederen, arm- en halssnoeren, enz.

De huwelij ksgift wordt dan ook na lang redekavelen vast- gesteld. Van dat oogenblik af aanziet de jongen het meisje als het zijne, en blijft in betrekking met de familie. Dikwijls gaat hij het meisje bezoeken en brengt haar bijna altijd een of ander geschenk mede. De ouders vergeet hij ook niet.

Is het meisje huwbaar geworden, dan wordt het door hare ouders in de nzo a kumbi of nzo a tiiknla gebracht, waar het gewoonlijk vier of vijf maanden moet in blijven; moest het aan die gewoonte te kort blijven en bij haren man komen zon- der de nzo a kumbi te hebben doorgemaakt, dan zou zij het slachtoffer worden van Mbumba-nkisi: zij zou puisten krijgen, en haar kroost zou ellendig zijn.

Is haar tijd in de nzo a kumbi uit, dan is er groot feest op de kosten van den toekomende. Er wordt gedronken en gedanst en de bruid wordt bij haren geliefde binnengeleid en wordt door hem een eersten keer... oflicieel... bekend. : de man sendula't zijn vrouw en door het feit zelve is de vrouw ge-sendula't; 't is te zeggen het eigenlijke huwelijksverbond is aangegaan.

Heel zeldzaam is het dat op dit oogenblik reeds gansch de

524

lmwelijksgift betaald zij ; door gedeeltelijke giften wordt ze ingekort en zoo gebeurt dat verschillende jaren verloopen vooraleer alles effen zij. Doch dat is ook niet vereischt opdat het huwelijk kunne als vast aangezien worden; het is vol- doende dat de som vastgesteld en dat een deel gegeven zij.

Aanmerkingen over de huwelijksgift.

1. Gansch cle huwelijksgift gaat niet naar een persoon, namelijk naar den « ngudi nkazi » of den oudsten oom van moederskant die de eigenlijke meester is van het meisje. Deze ontvangt zeker het aanzienlijkste deel, maar al de oomen en moeien alsook moeder en grootouders van moederskant krij- gen het hunne, ook de vader of, indien deze gestorven is, zijn broeder ; zoodat soms acht of tien man er hun profijt uit- trekken.

Vandaar ook soms de moeilijkheid de vaste verbintenis te sluiten omdat er te vele hun woord te zeggen hebben, hoewel niet allen in dezelfde maat. Over 't algemeen nochtans indien de « ngudi nkazi » en de ouders ja knikken, is de zaak effen.

2. Tegenwoordig wordt hoe langer hoe meer rekening- gehouden met de voorkeur van het meisje, althans in de dor- pen waar wij sinds eenigen tijd zijn binnengedrongen en waar de katechist zijn best doet.

3. Het is zeldzaam dat de jongen alleen al de onkosten van het huwelijk draagt; bijna altijd komt zijn moederlijke oom ( « ngudi nkazi >■) of zijn vader er voor een groot deel tnsschen. Doch het is een leening, en vroeg of laat moet het voorschot terugbetaald worden.

4. Daar de vastgestelde som gewoonlijk nogal groot is, is het soms moeilijk voor de jongens een meisje te kunnen betalen, en de oudere mannen, veelwijvers, die over vele stof- fen beschikken, werven de meisjes aan vooraleer het jonger mansvolk erop kan aanspraak maken, bijzonderlijk als zij geen rijken oom of vader hebben.

5. Somtijds gebeurt het dat de ouders van het meisje, hetzij zij tegen een jongen vooringenomen zijn, hetzij dat zij ter oor- zaak van zijn vroeger gedrag of van zijn karakter vreezen dat het huwelijk niet zal duren, weigeren de huwelijksgift vast te stellen, of indien zij vastgesteld werd toen het meisje klein was, verdere giften weigeren te ontvangen en het reeds gege-

525

vene terugbetalen. « Samenleven kunt ge, zeggen zij, maar stoffen ^villen wij niet ontvangen ».

6. Sterft de vrouw dan dient al liet gegevene teruggeschon- ken, zelfs de voorafgaande geschenken.

7. Sterft de man vóór de vrouw, deze blijft de eigendom der familie van den man. Dikwijls trouwt zij met den broeder van den man. Wil een andere joDgen ermee trouwen en stemt -de familie erin toe, dan is het deze die de huwelijksstoffen zal ontvangen, tenzij de vrouw zichzelf vrijkoopt.

8. Sterft de vrouw eerst en kort daarna de man, dan is het de familie van den man die de terugbetaling eischt van de familie van de overleden vrouw.

9. Laat de afgestorvene vrouw een kind achter, dan gaat dit over tot den vader; in dit geval dient niets terugbetaald.

Wil de familie der vrouw volstrekt het kind, dan ontstaat er zwaar geschil, en ofwel zal zij het kind krijgen mits terug- betaling der huwelijksgift, en nog een groote som erbij, ofwel het kind zal van kant gemaakt worden (door hun tshindoki natuurlijk).

Zijn er verschillende kinderen dan worden zij verdeeld en er wordt niets teruggegeven.

Nochtans, is de dikandaoi familie der vrouw uitgestorven, en dit is wel eens het geval, dan worden zij allen aan den vader gegeven.

10. Is de man eerst gestorven :

a) Indien de vrouw oud is, blijft zij bij de familie van haren man « biuakuntula mu luwa ». Zij krijgt eene hut dicht bij ; zij wordt gekleed, maar moet werken en de vrucht van haren arbeid is voor de familie.

b) Als de weduwe nog jong is, bij rechte wordt zij de vrouw van den broeder des overledenen, zooals hooger reeds gezegd werd en de kinderen worden verdeeld. Wil zij niet blijven en vlucht zij, dan blijven de kinderen toch verdeeld en zij moet een deel der stoffen teruggeven.

Dient het gebruik der huwelijksgtft afgeschaft?

Onzes inziens mag het in onze Bakongo-dorpen niet onvoor- waardelijk tegengewerkt en zeker niet afgeschaft worden.

Eenerzij ds beweren de ouders dat ze recht hebben op de betaling :

a) Zij hebben hun meisje zoolang gekweekt.

526

b) Het heeft hun veel gekost toen het ziek was om gemees- terd te worden.

c) De meisjes zijn hün rijkdom.

Het meisje van zijnen kant zal zich nooit vast verbonden achten als het geen stoffen gekost heeft. Dit is natuurlijk een verkeerd begrip, maar men dient er rekening mee te houden wil men zooveel mogelijk moeilijkheden vermijden.

Ook de jongen zal de vrouw nooit als volkomen de zijne aanzien als hij er niet voor betaald heeft.

Daarbij in geschillen en moeilijkheden is de ontvangen huwelijksgift de reden waarom de ouders zich uit al hun krachten' verzetten tegen het vluchten der vrouw. Het voor- uitzicht de stoffen te moeten teruggeven zal hun de middelen doen aanwenden om scheiding te beletten. A^lucht de vrouw, zij zullen haar straffen, zelfs slaan, tot verschillende malen toe. En in onze dorpen hebben wij dit gezag der ouders, hoe gevaarlijk ook in sommige omstandigheden, soms hoogst noo- dig, daar de ontvoogding en vrijheidszucht der vrouwen zich Hier veel te rap ontwikkelt, dank zij den invloed der blanken. De man ook zal zich terughouden om zijn vrouw weg te zenden omdat hij weet dat, indien hij ze henen stuurt zonder zware redens, het hem zal moeilijk zijn zijn stoffen terug te krijgen.

Besluit.

Hetgeen, naar onze meening, te doen valt, is, naarmate het godsdienst-onderricht in de dorpen vasten wortel schiet, voorzichtig te werken om het bedrag te doen verminderen. Zoo doende, te beletten dat de rijken, de hoofdmannen, zich door opbod, de vrouwen toeeigenen en de veelwij ve rij in stand houden, ten groote nadeele der ongefortuneerden, die dikwijls, door gebrek aan rijkdom, zich geene vrouw kunnen aanschaf- fen. Op het oogenblik dat de te geven stoffen bepaald worden, zou voor getuigen moeten vastgesteld worden dat, bij sterf- geval, het gegevene niet zal terugkeeren. Wij hebben reeds een paar gevallen aldus kunnen regelen.

Over 't algemeen zijn de jonge mannen voor die gedachten gewonnen. De dorpshoofden en eenige ouden alleen toonen kwaden wil : zij willen rijk schijnen. Doch, met een weinig geduld, hopen wij dat ook die weldra zullen toegeven.

J. Six, Missionnaris van Scheut

527

A propos de politique coloniale.

La revue Notre Colonie publie, dans son numéro de juillet 1920, un long manifeste résumant les travaux de la Commis- sion coloniale constituée par la Ligue nationale.

L'article débute par cette déclaration : « Les critiques for- » mulées sans parti pris, dans le but d'arriver au progrès, » n'excluent pas un légitime hommage aux efforts déiDloyés » par le Gouvernement depuis 1908, malgré la froideur et « l'hostilité de l'opinion publique. »

Le document n'est cependant qu'une longue critique à l'adresse des méthodes gouvernementales suivies depuis la reprise du Congo par la Belgique. Qu'il envisage le problème administratif, le problème économique, le problème politique ou le problème international, le lecteur emporte l'impression qu'au Congo tout va mal, pour la seule raison que les méthodes administratives y sont surannées et que l'incapacité y règne en maîtresse.

Le personnel colonial ne comprend pas ses devoirs dans le domaine économique et n'apporte pas au commerce toute l'aide qu'il est en son pouvoir de lui donner. La paperasserie admi- nistrative qui sévit au Congo « est, de loin, le mal le plus nui- sible au développement de la Colonie ». Au surplus, le per- sonnel est mal payé, mécontent de son sort. Le heurt des organes administratifs de la Colonie frappe ^l'observateur impartial. La centralisation à outrance y fleurit dans toutes sa splendeur. La politique économique du Gouvernement a provoqué l'élimination progressive des éléments belges dans les affaires importantes. La législation douanière est insuffi- sante et les fraudes se multiplient. L'absence de tarifs diffé- rentiels nuit aux commerçants et industriels belges, la poli- tique des transports est lamentable. L'administration directe a énervé l'autorité des chefs indigènes. Les fonctionnaires ne

528

connaissent pas les us et coutumes des populations indigènes. La mortalité atteint, dans plusieurs régions, des proportions telles qu'une rapide dépopulation est à craindre. L'enseigne- ment des missionnaires est trop théorique. Leur formation médicale est presque nulle. Au point de vue international, la révision de l'Acte de Berlin, n'a pas amené l'abrogation com- plète des servitudes imposées au territoire du bassin conven- tionnel. La délimitation du Ruanda n'est pas satisfaisante. "Notre accès à la mer reste insuffisant, etc., etc.

Quel tableau sombre.., et c'est naturellement le Gouverne- ment qui est la cause de tout le mal. Cela n'est pas dit en toutes lettres, mais cela se lit entre toutes les lignes.

Pour ramener lage d'or dans la Colonie, il suffit de « réor- ganiser » l'administration locale. Il est certain que du moment que le gouverneur général serait entouré d'un directeur général des affaires économiques, d'un directeur général politique, d'un directeur général des transports et d'un directeur général des travaux publics, tout irait pour le mieux dans le meilleur des mondes.

Ayant pris connaissance du bizarre projet de réorganisation signé par Mgr de Hemptinne, et constatant que la Ligue natio- nale s'oriente dans la même voie, l'auteur de ces lignes s'est dit : « assez d'organisation, de réorganisation et de reréorga- nisation... » et il a résolu dédire tout haut ce que d'autres disent tout bas.

Est-ce à dire que les critiques de la Ligue manquent de fondement ?

Non, je le reconnais, un grand nombre d'entr'elles sont justes. Mais il n'est pas juste de dire que l'administration est seule responsable de tous les abus.

Les vraies causes de la situation peu satisfaisante de notre Colonie sont économiques et politiques, mais très peu admi- nistratives. En outre, ces causes sont métropolitaines et, par ricochet, font" sentir leur action dans la Colonie.

Commençons par les causes économiques. La Belgique est un pays peuplé, le plus peuplé du monde au point de vue rela- tif, et cela, parce que la situation géographique du pays, au carrefour des grandes voies de communication entre le Xord et le Centre de l'Europe, en ont toujours fait un marché éco- nomique de première envergure. La Belgique, dans le cours de son histoire, a beau être ravagée, foulée aux pieds par les

529

armées qui s'y heurtent; dès que la paix renaît, l'activité industrielle et commerciale refleurit et le pays se repeuple.

Depuis que l'Angleterre a conquis la première place parmi les puissances industrielles, c'est par notre pays qu'elle déverse vers la France, l'Italie, l'Allemagne, l'Autriche, la Russie, ses produits manufacturés. Tant que la mer du Nord et l'Atlantique demeureront le pivot de l'activité économique, sa situation éminemment favorable fera de la Belgique un des entrepôts du commerce mondial.

Ajoutons à cela ses richesses minérales propres, le dévelop- pement de son industrie textile et métallurgique, la place qu'elle avait conquise avant la guerre sur les marchés extérieurs grâce aux bas prix de revient des produits de ses manufactures, et nous comprendrons que la nature permettait à huit millions d hommes de vivre sur 29 milles kilomètres carrés de superficie.

Les propagandistes coloniaux clamaient avant la guerre : « Attention, nous vivons d'exportation... Cherchons des débou- chés à notre surproduction... Allons au Congo... » L'industriel et le commerçant belges haussaient les épaules. Nous sommes, le pays de la vie à bon marché et des bas salaires, répon- daient-ils, soyez tranquilles .. Nous battrons toujours nos con- currents sur les marchés mondiaux. Nous n'avons pas besoin de votre Congo.

Mais, reprenaient les dits propagandistes : Nous sommes trop nombreux en Belgique. Nous devons écouler à l'extérieur le trop plein de notre population... Allons au Katanga. Nou- veaux rires... Loin de souffrir d'un surcroît de population, la Belgique demandait de la main-d'oeuvre pour ses métallur- gies, ses hauts-fourneaux, ses tissages, ses mines.

Et si sa population agricole était un peu forte, le nord de la France réclamait des bras et des cultivateurs.

Résultat de cet état de choses : la population belge ne s'in- téressait pas à la Colonie, car elle n'en sentait pas le besoin.

Voilà la guerre finie. On se figure que « la mentalité belge va changer, et que l'intérêt pour le Congo passera au premier plan ». Erreur. Qui donc va s'expatrier? L'industriel et le commerçant font de bonnes affaires: l'ouvrier jouit de beaux salaires. Il faut retenir la main-d'œuvre qui se précipite vers les zones dévastées de la France. Le paysan,... n'en parlons

530

pas. Résultat : indifférence générale pour les choses coloniales.

Voici maintenant les causes politiques.

C'est l'initiative privée qui a fait la grandeur de nos pro- vinces. L'esprit de liberté a toujours animé nos vieilles com- munes à telle enseigne qu'elles se jalousaient et se concurren- çaient l'une l'autre. La poigne de fer des Ducs de Bourgogne n'a même pas suffi à mettre à la raison nos particularistes incapables de comprendre que leur prospérité économique dépendait d'un Etat fort.

Xos ancêtres ont tour à tour subi le joug de l'Espagnol, de l'Autrichien, du Français, du Hollandais. Mais leur indéraci- nable esprit de clocher a survécu à tous les malheurs, à toutes les vicissitudes. Que dis-je? Depuis 1830, l'autonomie pro- vinciale et communale a toujours résisté vigoureusement aux tentatives centralisatrices. Malgré les efforts de nos souve- rains, l'Etat n'a jamais pu être constitué solidement en Bel- gique, et les provinces se sont toujours efforcées de se sous- traire à l'empire de la capitale jugée trop centralisatrice et trop unificatrice.

Sans doute, le sentiment national existe en Belgique comme ailleurs : le sursaut de colère qui souleva le peuple entier en 1914 l'a démontré. Mais on dirait que ce sentiment ne se mani- feste qu'en temps de crise et de douleur. Sitôt le danger passé, le peuple belge retombe dans ses errements. Conscient de sa petitesse, cro3Tant qu'il ne peut jouer dans le monde qu'un rôle secondaire, il se résigne, pourvu qu'on le laisse libre, à n'en pas jouer du tout.

La neutralité que les traités de 1839 lui avaient imposée, était un habit taillé à sa juste mesure. Il a toujours préféré ses aises et ses intérêts d'un jour, à l'idée de fonder du durable et de préparer l'avenir des jeunes générations.

Placez cette mentalité un peu étroite et terne vis-à-vis de l'héroïque aventure coloniale. Elle se rebiffera ou se montrera indifférente. Et, de fait, nous avons tous vu l'œuvre de Léopold II incomprise et même sourdement combattue. L'âme belge n'a pas vibré à l'appel de la terre africaine.

Un sociologue, M. T. Partridge, prétendait récemment, dans son livre The Psychology of Nations que les véritables causes de la colonisation n'étaient pas économiques, mais poli- tiques. La colonisation serait l'expression visible de l'énergie

531

nationale, l'incarnation vivante de sa volonté de puissance. Et je crois sa thèse vraie.

La possession de l'Empire- des Indes remplit d'orgueil l'in- sulaire anglo-saxon, dont le pavillon flotte sur toutes les mers. Ecoutez donc l'impériale épopée chantée par Rudyard Kipling !

Or, nous Belges, nous n'avons pas de flotte nationale, et c'est encore un malheur, une difficulté de plus pour pousser le peuple dans la voie de l'expansion. Nous n'avons pas ce lien mystérieux qui unit, par dessus les flots, la métropole à ceux qui travaillent à sa grandeur de l'autre côté des mers. La mère-patrie et le Congo semblent deux entités séparées et sans rapports intimes, presque deux étrangères.

Voyez, au contraire, la cohésion des colonies françaises et l'importance qu'elles prennent dans le domaine politique. A l'heure présente, se constitue de l'Escaut et de la Manche au Tchad et au Congo un des plus grands empires que le monde ait vus depuis celui de Rome, un empire d'une unité parfaite et qui pèsera un jour d'un poids formidable dans les destinées du monde. Et cependant, des Français ont reproché à l'admi- nistration française d'être une des plus routinières et des plus paperassières qui soient. Mais, en présence des perspectives les plus audacieuses, que comptent ces mesquines questions de routine et de paperasse ? Est-ce que l'on croît sérieusement que de pareilles vétilles entravent et empêchent la réalisation du nouvel imperium ? Il est facile de relever dans la littérature coloniale française des critiques violentes contre l'administra- tion. Mais tout Français ne frémit-il pas d'orgueil à la pensée de ce qui s'accomplit maintenant sur les deux rives de la Médi- terranée ?

D'ailleurs, pour comprendre le rôle que jouent les colonies dans l'échelle des valeurs politiques, il suffit de jeter un regard sur l'histoire coloniale. Les mouvements d'expansion se produisent toujours après une violente explosion de senti- ment national. Les Espagnols colonisèrent après leurs vic- toires sur les Maures; les Hollandais, et les Anglais, à la suite de leurs victoires sur les Espagnols; les Français, dans l'éclat majestueux du règne de Louis XIV.

Or, qu'est-il arrivé en Belgique? Le sentiment national trop peu vivant n'a jamais encouragé l'expansion.

Le mouvement colonial n'a pas eu d'appui solide dans les couches profondes de la population. Il est l'oeuvre personnelle

532

du roi Léopold II, qui lui a donné tout d'abord une forme étrangère au tempérament national, celui- d'un Etat Indépen- dant, complètement distinct de la Belgique, pour qui le Congo représentait une puissance étrangère. Je n'examine pas ici si notre grand souverain aurait pu procéder autrement. Je constate simplement le fait que, dès le début, l'entreprise n'est pas patronnée par la Belgique.

C'est un caractère tout à fait particulier de notre colonisa- tion. On n'en trouve aucun autre exemple dans toute l'histoire coloniale. Mais les conséquences de cette situation de fait ont été incalculables.

La Belgique est demeurée indifférente pendant un quart de siècle aux efforts d'une poignée d'officiers et d'administra- teurs, qui lui bâtissaient, au coeur de l'Afrique, un empire superbe.

L'État a vivre de ses propres moyens, faire flèche de tous bois, recruter un personnel de fortune, se créer des ressources au hasard des emprunts. Poussé par la nécessité, il a réduit les dépenses et exagéré les recettes.

Et maintenant que le Gouvernement belge a repris ce lourd héritage, on crie haro sur l'administration parce que l'outil- lage fait défaut, et que le déficit financier est constant. On veut en faire le bouc émissaire de fautes commises par le pays tout entier.

On dit que le personnel n'est pas à la hauteur de sa mis- sion. Mais la Belgique a-t-elle offert à sa colonie l'élite de ses enfants? On dit que le Gouvernement n'a pas de politique de transports ! Mais la métropole est- elle prête à garantir les capitaux nécessaires à cette fin ? On dit que les médecins font défaut. Mais les finances coloniales seules peuvent-elles, sans l'aide de la Métropole, leur assurer de gros traitements? On dit que nos commerçants sont éliminés par les étrangers au Congo. Mais nos nationaux ont-ils fait des efforts suffisants? On dit que le partage des colonies allemandes a lésé nos intérêts. Mais, les plénipotentiaires belges à la Conférence de la Paix, n'ont-ils pas été gênés dans leurs mouvements par des erreurs antérieures?

On ne doit pas considérer les questions coloniales in abstracto mais en relation avec les autres aspects de la vie nationale. L'histoire est une redoutable logicienne. Elle ne moralise pas, elle n'enseigne que des faits. Et le plus haut de

, 533

ses enseignements est celui-ci : an peuple porte toujours avec lui le lourd héritage du passé, et ce sont souvent des innocents qui paient pour des coupables.

Il ne faut pas se figurer que si l'administration coloniale change, les abus constatés" disparaîtront aussitôt. Les causes du malaise sont bien plus profondes et elles relèvent surtout du système politique et économique suivi par la Métropole avant la guerre.

Th. Simar.

534

Le " Niando succédané du chanvre au Congo Belge.

Dans un intéressant rapport envoyé à l'Administration Centrale du Congo Belge par M. Begerem, substitut du pro- cureur du Roi de la Région de Wamba (Province orientale), ce magistrat attire l'attention sur l'utilisation, par les indigènes, des racines d'une plante de la région, dénommée « Niando > .

Comme cette notice était accompagnée de fragments de la plante il nous a été possible de savoir de quelle espèce il s'agissait. C'est YAlchomea floribunda Muell. Arg., une Euphorbiacée très répandue dans notre Congo, et d'ailleurs dans toute l'Afrique tropicale, elle forme des arbustes atteignant, semble-t-il, rarement plus de 3 mètres de haut.

De l'enquête établie par M. Begerem il résulte les conclu- sions suivantes valables pour la région considérée.

« Le « Niando » ou « Yando » est une plante de forêt très répandue et pour ce motif, les indigènes qui en usent n'ont pas besoin de la cultiver. A pleine croissance, l'arbuste atteint une hauteur d'environ lm.20 ; il porte des feuilles larges assez semblables aux folioles du maronnier. L'usage de cette plante est plus fréquent que celui du chanvre, mais paraît moins répandu. Il est courant chez les Mabudu, les Mangbetu et les races qui en dérivent, mais si, je dois en croire l'Administra- teur d'Avakubi. les indigènes de ce territoire, notamment les Babali-Bandaka n'en usent pas ou guère bien que, à raison de leur proximité des Mabudu, ils aient adopté plusieurs coutumes de ces derniers et que le « Niando » et ses effets leur soient connus. Les Walese et les Mam vu n'en feraient guère usage fréquent non plus ; mais, en revanche, il paraîtrait que toutes les peuplades de l'Uele en seraient grandes consom- matrices et ce serait à l'influence de ces dernières que cette

s _ 535

pratique se serait introduite dans les territoires limitrophes de de Nepoko.

» Les indigènes emploient le Niando sous trois formes dont les effets sont variables.

» L'écorce de la racine (non de la tige) est détachée, sèchée et réduite en poudre; celle-ci mêlée aux aliments ordi- naires, mais principalement au sel ou aux arachides, provoque une ivresse qui, suivant la dose et la réceptivité du consom- mateur, sera bénigne ou violente. Exactement comme la provoquerait l'abus plus ou moins grand de l'alcool. Dans ce cas aucune scène spéciale (danses ou chants) n'a accompagné l'usage du Niando.-

» L'usage sous cette forme est, le plus souvent, le fait d'un individu qui cherche une vigueur anormale et momen- tanée, la verbosité de l'indigène qui expose un palabre, l'im- pétuosité du porteur qui accomplit son étape en courant, sont fréquemment dues à l'excitation du Niando prise en quantité modérée. Un des effets les plus certains de la poudre de Niando est l'excitation sexuelle. Ce but est souvent recherché par la femme Mangbetu. Normalement une dose de 150 gram- mes de cette poudre est suffisante pour provoquer l'ivresse d'une personne. Il faut néanmoins tenir compte de la consti- tution physique de l'intéressé et surtout du degré d'intoxica- tion des habitués de la drogue.

» Une autre forme de l'emploi de Niando est l'absorption d'un liquide (généralement le vin de palme ou de bananes) dans lequel, pendant de longues heures et parfois pendant une période qui peut aller jusqu'à trois jours on a laissé macérer les filaments de la racine. Généralement ce sont des réjouis- sances en commun, des festivités publiques, avec danses et chants spéciaux et très caractéristiques qui accompagnent la consommation sous cette forme.

•> Ces réunions sont connues chez les Mabudu sous le nom de Nang-wendii.

» Plusieurs individus prennent part à la fête qui se termine par des orgies presque scandaleuses et souvent dégénèrent en querelles et en rixes.

» Les scènes de ce genre sont très fréquentes. C'est surtout sous cette forme que le Niando provoque ses effets les plus graves, car l'ivresse qu'il produit est toujours mauvaise. Il m'est affirmé que les chefs et capitas, qui partent en guerre,

536

font boire de cette liqueur à leurs homnies pour les exciter et les rendre féroces :

» Enfin aussi, l'indigène mâche les éplucliures de la racine et absorbe le suc.

» Les effets du Niando sont donc variables et peuvent aller de l'excitation simple à l'ivresse dangereuse.

» En tous cas le sujet est facilement irritable et toujours une dépression physique profonde, véritable prostration, en rapport direct de la dose absorbée succède à la période d'agitation. Consommé sans ménagements, le Niando peut avoir des conséquences mortelles.

» Chez l'homme, et surtout chez le novice, soumis à l'in- fluence du Niando, on constate une activité anormale du cœur qui bat plus vite et avec une plus grande violence; le sujet devient nerveux, est l'objet de crises bruyantes de joie ou de tristesse sans raisons apparentes, fait preuve d'une vigueur insolite et transpire abondamment. Ses yeux se congestionnent. L'individu intoxiqué acquiert une démarche chancelante et trébuchante; son regard devient hébété, fixe et vague; son intelligence s'atrophie, il est querelleur, se met en fureur sans motifs, parfois s'abat et reste apparemment sans conscience.

« L'opinion unanime est que le Niando est aussi néfaste que le chanvre sinon plus ; bien des crimes qui sont attribués à l'influence du second sont dus en fait à l'action du premier ou mieux des deux réunis, car la grande majorité des fumeurs de chanvre sont des fanatiques du Niando.

» Je conclus donc que pour les mêmes raisons qui ont fait interdire l'usage du chanvre, celui du Niando devrait être prohibé également. »

L'usage de la plante en question paraît non seulement répandu dans la Province orientale de notre colonie, mais dans bien d'autres régions.

Nous possédons, en effet, dans l'Herbier congolais, déposé au Jardin botanique, de nombreux spécimens de cet Alchornea, accompagnés de notices rappelant un usage similaire à celui rapporté par M. JBegerem.

M. Boone, qui avait commencé l'étude botanique de la région de Nala, y a observé cette plante dont les indigènes, écrivait- il, pilent et mangent la racine; elle posséderait d'après eux des

537

propriétés analogues à l'opium. Pour les Azande et les Mayo- go le nom indigène de la plante est : Liando.

Dans la région de Likirni, M. Malchair renseigne la même plante sous le nom de « Liboia » et la déclare médicamenteuse sans malheureusement indiquer &es effets.

Pour MM. Peygaert et De Giorgi, qui ont séjourné dans la région de Dundusana, cet Alchornea est un fétiche de chasse; il porte le nom de «Me». C'est au même nsage, et sous le même nom, que M. Lemaire le signale dans la région de Mobwasa.

F. Seret, ancien Directeur du Jardin botanique d'Eala rapporte un usage analogue chez les Mangbetu et les A_zande, de certaines parties de cette plante, dénommée : Nandu (Mang- betu-Medje), Liandu (Azande et Abarambo).

Les indigènes prétendent que 1'iugestion de la racine leur procure de la force et une grande résistance pour la danse. Certains font sécher la racine au soleil, raclent la racine séchée et mangent la poudre mélangée à du sel.

D'autres raclent la racine fraîche pour la débarrasser de l'écorce, puis la font macérer dans de l'eau qu'ils boivent.

Les Medje (Wala) et les Abarambo faisaient, aux dires de Seret, une très grande consommation de cette plante, très commune dans les forêts de la région.

Pendant son passage au Jardin botanique d'Eala, M. le Dr. Lathouwers, assistant à l'Institut agricole de Gembloux, signala cet Alchornea sous le nom de « Ilandu » dans les envi- rons de ce poste. Il apparaît fréquemment, d'après lui, comme rejet de souches, dans la forêt secondaire qui se constitue après l'abandon des cultures indigènes. D'après les observations recueillies par M. Lathouwers, la plante jouirait de propriétés aphrodisiaques et stupéfiantes. Les indigènes utilisent la racine seule, ils la mâchent pour obtenir l'effet désiré.

Enfin A. Sapin, durant son exploration botanico-écono- mique de la région de Giri (Entre-Congo-Ubangi), remarque que l'écorce de la plante, qu'il nous rapporte sous le nom indi- gène de « Ilando » est pulvérisée, façonnée en boulettes et mangée par les indigènes. Cette ingestion provoquerait, d'après ses dires, une véritable ivresse.

De l'Est à l'Ouest de notre Congo, et probablement encore dans bien d'autres parties de la colonie, V Alchornea flori- bunda est donc utilisé par le noir dans des buts peu avouables.

538

Il conviendrait d'essayer de faire disparaître cet usage comme le propose M. Begerem.

Il est curieux que dans d'autres colonies africaines un emploi analogue de cette plante n'ait pas été signalé; car de l'enquête à laquelle, à notre demande, a bien voulu se livrer M. le Dr. O. Stapf, il résulte que rien de particulier n'a été inscrit dans les documents réunis au Jardin botanique de Kew sur des usages de cet Alchornea.

É. De Wildeman.

539

LE NGULA AU CONGO BELGE

(i)

Le ngula est une poudre de bois d'un rouge vif, et qui s'ob- tient en raclant le Takuîa, bois rouge provenant généralement de différentes espèces du genre Pterocarpus. L'usage du ngula chez l'indigène est double. Il sert de matière teinturiale ou de fard de toilette. Nous ne donnerons ici que quelques appli- cations du ngula aux différents produits de l'activité écono- mique de ces populations primitives.

Dans toutes les régions les figurines humaines sculptées sont connues, le ngula est fréquemment employé pour les ornementer. Les statuettes en terre glaise qu'érigent sur la tombe des défunts, certaines populations de l'Equateur sont généralement teintes de ngula. L'analyse des ingrédients les plus hétéroclites qui composent la majeure partie des sub- stances magiques, des sachets amulettes ou fétiches, montre, dans des proportions variables, la présence de ngula. Le bar- riolage et la décoration des masques sont souvent faits au ngula.

Il est possible que dans ces diverses circonstances l'indi- gène rattache une idée relico-magique au ngula. Malheureuse- ment nous ne possédons aucun renseignement précis à ce sujet.

L'indigène se sert également du ngula pour teinter les étoffes en écorce d'arbre battue ou en fibres de raphia tissées. Les tissus des rabanes brodées de la région du Kasai-Sankuru sont généralement teints au ngula avant l'exécution de des- sins. Pour broder, l'indigène obtient ainsi un fond dont la tonalité varie du rouge au violet amarante suivant la concen- tration plus ou moins forte des colorants : caractère qui con-

(1) La collection complète des métiers à ngula et des illustrations qui s'y rattachent, est exposée au Musée Colonial de Tervucreu, dans la salle de la toilette indigène.

540

tribue beaucoup à rehausser la valeur artistique de leur travail. Dans la région du Kwango-Kasai, les indigènes teintent géné- ralement au ngula les fibres utilisées dans l'exécution des dessins de broderies. Au Congo Central, les tissus tissés, à dessins rectilignés, damasés ou symétriques à technique double ou multiple, sont très souvent exécutés au moyen de fibres colorées au ngula. Il en est de même des coiffures en éclats de bambou tressés de la région de l'Uele et de FAruwi- mi. Enfin, des couteaux de parade, des insignes de dignité, des ustensiles de ménage et jusqu'aux lances de certaines tri- bus, notamment des Mongelima, sont le plus souvent enduites ou teintes de ngula.

Cependant la poudre de ngula sert avant tout à la prépara- tion du fard de toilette. C'est à cette utilisation que le ngula doit sa valeur principale, sa vogue comme objet d'échange et sa distribution dans toutes les parties de notre Colonie.

L'indigène se sert de la poudre sèche pour se saupoudrer le corps préalablement enduit d'huile.

Dans les régions le ngula s'obtient par le raclage du Takula au moyen d'un couteau, l'indigène doit, avant de s'en servir, le réduire en fine poussière sur la pierre meulière. Dans les autres régions, il écrase une partie du ngula dans un petit récipient ou mortier à ngula.

Le Musée du Congo Belge possède de nombreuses petites poteries servant à la préparation du fard de toilette dit ngula.

Le plus souvent les blocs de ngula sont écrasés dans de petits mortiers en bois, et la poudre fine versée en un petit récipient de terre cuite, pour la mélanger à l'huile de palme.

L'indigène conserve la poudre de ngula dans des boîtes en bois. Plusieurs exemplaires de ces boîtes figurent dans nos collections. Celles qui proviennent de la région du Kasai- Sankuru sont particulièrement intéressantes à cause des des- sins sculptés dont elles sont généralement ornées.

Les indigènes se servent du ngula comme poudre hygié- nique, comme fard de toilette et, dans certaines circonstances spéciales, comme couleur fétiche. Les coutumes qui se rap- portent à ce dernier usage ne sont guère bien déterminées. Nous ne possédons à ce sujet que des indications spora- diques et très peu précises. Nous tenons à signaler ce point à l'attention de ceux qui s'intéressent sur place aux mœurs des primitifs. Les documents qu'ils pourront recueillir à ce sujet

541

seront du plus grand intérêt, spécialement en ce qui concerne le développement de nos connaissances sur la vie religieuse des Congolais. Comme fard de toilette, le nguîa mélangé à l'huile de palme est plus spécialement employé pour la coif- fure. Les femmes s'en servent beaucoup dans ce but.

Lors de notre séjour dans la région de Bena-Dibele-Kole, nous avons pu constater que certains vieillards se servaient de cette pâte pour relever leur coiffure.

Enfin, le ngula a surtout un rôle hygiénique. Délayé dans l'eau et l'huile, il forme une pâte qui sèche rapidement tout en adhérant à l'objet L'indigène s'en recouvre tout le corps. Hommes, femmes et enfants s'en servent. Ainsi, ils sont moins sujets aux piqûres, et leur peau supporte mieux l'ardeur des rayons solaires, comme aussi les variations de la température.

*

Nous avons dit que le ngula est la poudre de bois du Takula. Il existe cependant au Congo belge beaucoup d'autres espèces dont le bois pourrait être employé par l'indigène pour la fabri- cation du ngula. Nous croyons avec M. De Wildeman, direc- teur du Jardin botanique de Bruxelles, que 1'indrgène du Congo belge emploie des bois très différents de l'une région à l'autre pour obtenir la poudre de ngula si répandue dans notre Colo- nie. Si nous nous basons sur l'aire d'extension delà fabrication et de l'usage du ngula nous pouvons assurer, que le bois à ngula doit se retrouver à peu près dans toute notre Colonie. Le Musée du Congo belge possède à l'heure actuelle 25 métiers à ngula.

La majeure partie de ces métiers à ngula est formée de deux blocs ou planchettes de bois rouge, dit Takula. Ces planchettes sont généralement creusées vers la partie médiane et s'adap- tent en croix l'une sur l'autre. Pour s'en servir la femme indi- gène (en général la fabrication du ngula incombe à la femme) place l'un des blocs à terre. L'autre tenu des deux mains, est frotté vigoureusement d'un mouvement régulier sur la surface supérieure du premier ; les deux surfaces de contact sont régu- lièrement aspergées d'eau mélangée d'un peu de sable, ce afin d'activer l'usure du bois. Il arrive aussi que l'indigène fixe l'un des blocs de bois sur un petit établi formé de deux, trois ou quatre pieux fixés en terre. D'après une note jointe au métier à ngula des Bangala récolté par Gustin, ce procédé serait d'usage

542

courant dans toute la région de la Mongala. Le croquis donné par l'auteur montre tout le procédé du travail. L'indigène se tient debout, la pâte raclée est rassemblée et roulée en boule, puis mise sécher à l'ombre.

La fabrication du ngula semble être très en vogue dans la région des Ban gai a et Mongwandi, mais c'est surtout dans le District du Lac Léopold II et en particulier chez les Mosengere que les installations sont nombreuses. La fabrication du ngula est devenue pour ces populations une véritable industrie; la base d'un commerce très florissant et très lucratif. Dans un village voisin du j)Oste de Bongo, nous avons compté 35 instal- lations consacrées à la fabrication de la poudre de ngula. L'établi le plus simple est formé par deux blocs de bois de « Takula », un petit récipient contenant de l'eau, une poignée de sable et une petite brosse ou pinceau. L'un des blocs est placé à terre, maintenu en place par la pression des cuisses de la femme assise au travail. Le second bloc est placé à plat sur la surface supérieure du premier. Cette face est humectée d'eau et saupoudré de sable. La femme tient le bloc supérieur des deux mains, y imprime un mouvement de va et vient en rota- tion tout en ayant soin de tenir les deux faces frottées bien humides. Sous l'action du frottement et des grains de sable faisant fonction de fines râpes, la femme racle le bois et obtient une poussière rouge, fine au point d'être à peu près impalpable. Mélangée à l'eau, cette poussière forme une pâte, assez épaisse, dite « ngula ». L'habileté de l'ouvrier est d'empêcher que le sable râcleur se mélange à la poussière de bois. Certains fabricants sont à tel point adroits, que l'on retrouve à peine dans leur ngula quelques rares traces de ce sable.

Dans la région des Mosengere, le métier à ngula est plus perfectionné. Une forte écorce d'arbre sert de cuvette de r as- semblage. Sur cette cuvette sont montés 5 ou 6 bâtons assez forts, auxquels l'indigène attache l'un des blocs de Takula. Un dispositif spécial permet de fixer ce métier. Certains indi- gènes en sont même arrivés à établir devant leur hutte, sous un auvent très rudimentaire, un métier perfectionné permettant de fabriquer le ngula en se tenant debout. Quatre forts pieux fixés perpendiculairement en terre, soutiennent à 15 centi- mètres du sol un grand bassin en écorce d'arbre. A un mètre de hauteur des traverses horizontales sont attachées aux extré- mités fourchues de ces pieux et sur ses traverses vient se fixer

543

l'un des blocs de Takula. Un récipient en terre cuite, suspendu dans les trois branches d'un pieu fixé en terre à côté de l'éta- bli contient le mélange d'eau et une minime partie d'huile. Une brosse faite d'une section de bois tendre plonge dans le mélange et permet à l'artisan de mouiller à volonté le bloc de Takula. Une petite calebasse sectionnée contient la réserve de sable qui active le raclage de la poussière du bois sous l'effort du frottement. Comme je l'ai fait remarquer tantôt, malgré toute l'habilité de l'ouvrier, ce sable se mélange à la poussière raclée, et doit en conséquence, être remplacé de temps à autre. Le fabricant de ngula se tient debout devant l'établi. Le mélange d'eau, de poussière de ngula et de quelques grains de sable, tombe dans le bassin réservoir. Quand le stock est un peu sérieux, l'indigène tresse de petits paniers de forme tron- conique d'une contenance moyenne d'un décimètre cube. La pâte de ngula est tassée dans ces paniers. L'indigène les suspend ensuite sous l'auvent à l'abri du soleil. Au bout de quelques jours la pâte est desséchée; le cône de ngula est moulé, détaché du moule, enveloppé de feuilles de bananier et soigneusement ficelé avec des lanières de rotang, éclats de bambou ou de fibres de raphia.

La réserve familiale reste en général dans les réservoirs des métiers fà> ngula. Toute la production moulée est écoulée sur les marchés étrangers. Les paniers servant de moules sont tous tressés d'après une même technique. Des lanières de rotangs sont placées en croix par série de quatre, sans être entrelassées ou tressées au point de croisement. Le fond du panier est formé par le cadre de croisement. Les lanières sont relevées sur les quatre côtés de ce carré et maintenues par une ligature en fibres de raphia tordues Puis les parois sont tres- sées à technique simple, c'est-à-dire d'entrecroisement alter- natif de la lanière verticale et de la bande transversale. Comme tous ces moules présentent en outre la même forme, une hau- teur et un diamètre approximativement uniformes, il en résulte que les cônes de fard présentent à la fois la même forme et un poids très régulier. Tous ces détails ont été adoptés insensi- blement depuis que les indigènes du Lac Léopold II ont fait du cône de ngula un objet d'échange dans leurs relations com- merciales tant externes qu'internes. Pour certaines régions les cônes de ngula forment une véritable monnaie, d'un usage courant et ayant un cours réglé de l'une tribu à l'autre. Au

544

passage des steamers à Mushie, par exemple, les passagers voient s'organiser régulièrement un marché les gens de l'intérieur échangent volontiers les produits de leurs industries contre les objets importés qu'apportent les noirs au service des blancs. Les cônes de ngula comptent parmi les principaux objets d'échange et se trafiquent à un cours très élevé. Dans la région de Oshwe, le vieux chef Etuta était grand trafiquant de ngula. Régulièrement il passait avec quatre ou cinq de ses femmes emportant de la région de l'entre Kasai Lukenie des produits divers pour aller les échanger contre le ngula fabri- qué dans la région de la Lokoro.

Dans toutes les régions du Congo central la forme du ngula d'échange est celle du cône allongé tronconique.

Le musée du Congo belge possède, à côté de nombreux spécimens dont l'origine est peu précise, douze cônes de ngula dont la provenance ethnique est déterminée.

Sept spécimens ont été transmis en même temps que le petit panier servant de moule de fabrication; les cinq autres, entourés de leur emballage en feuilles de nse-nse ou bananier et ficelés au moyen de fibres de raphia, d'éclats 'de rotang ou de bambou.

Dans la région du Bas Congo, du Kwango et du Bas-Kasai, le ngula se présente généralement sous une forme tronconique plus trapue, à base irrégulière et surface supérieure carrée.

Le petit panier moule est fait en éclats d'osier, tressés à technique multiple. Le musée du Congo belge possède six spé- cimens identifiés de cette forme.

Plus à l'Est et en particulier dans la région du Haut-Kasai et du Sankuru,les blocs de ngula se présentent sous une forme aplatie, longue et étroite. A en juger d'après les empreintes du moule, celui-ci doit avoir été découpé dans un bloc de bois. Il avait le fond plus étroit que la surface supérieure, des côtés obliques; caractères qui avaient probablement pour but de rendre le démoulage facile et éviter que le bloc de ngula ne se brise en l'enlevant du moule.

Des treize spécimens que possède le musée du Congo belge, un seul a son origine bien déterminée et provient des Bayaka. Les douze autres spécimens appartiennent tous au même type et sont renseignés comms provenant de l'entre Kasai-Sankuru. Ces diverses pièces proviennent d'une collection gracieuse- ment offerte au musée par la Compagnie du Kasai. Elles sont

Métier à ngula de la région de la Mongala.

545

très anciennes, très rares et dune grande valeur ethnique. Leur intérêt particulier résulte des dessins moulés qui orne- mentent la surface supérieure. La majeure partie de ces dessins nous rappellent les motifs d'ornementation des tissus brodés de la région de l'entre Kasai-Sankuru et en particulier ceux des rabanes Bakuba. Par comparaison avec les Pigment Blocs of tlie Bushongo dont parle Joyce dans Man 1910, nous pour- rions rattacher ces pièces aux Bushongo. Soumises à M. Tor- day, celui-ci leur donna comme provenance ethnique Bambala Bushongo. En prenant comme base les caractères de dessins et les motifs d'ornementation de l'une des surfaces de ces blocs et leur technique d'application, nous croyons devoir préférer à cette détermination ethnique, la localisation régionale Kasai- Sankuru. Les motifs d'ornementation varient de l'un bloc à l'autre, ils ont été exécutés d'après des méthodes et des procédés bien différents, tantôt imprimés, tantôt moulés, tantôt même obtenus par un moulage plastique en relief. La forme des blocs tarie du carré au rectangle long et étroit. Enfin, l'exis- tence au spécimen du même type provenant des Bayaka nous montre que d'autres tribus exploitent le ngula sous cette forme caractéristique. Toutes ces constatations sont pour nous autant de motifs qui justifient notre attribution régionale. Si nous y ajoutons que les tissus brodés dont on peut rapprocher les motifs ornementaux des blocs de ngula, se retrouvent bien en dehors de la zone occupée par les Bambala-Bushongo et que parmi les spécimens de notre collection étrangers à cette région, nous trouvons plus d'un tissu dont les dessins peuvent être comparés et rapprochés des motifs d'ornementation de certains de ces blocs de ngula; nous croyons que chacun com- prendra notre réserve, et la préférence que nous avons donné à la localisation régionale.

Si nous passons dans la province Orientale, le Congo Central au Nord du Bassin de la Lulonga et dans la région de l'IJele, nous retrouvons le ngula sous forme d'une boule plus ou moins régulière.

Le Musée du Congo Belge possède de nombreux spécimens de ce type; douze ont leur état-civil bien déterminé.

Dans la région de l'Ubangi et chez les populations de la Haute Mongala, la fabrication de la poudre de ngula est tout autant en honneur que chez les tribus environnantes. Cepen- dant la méthode d'obtention et le procédé de fabrication

546

diffèrent assez de ceux que nous avons décrits plus haut. Au lieu de se procurer la poudre en frottant deux blocs de bois de Takula l'un sur l'autre, les indigènes de cette région l'obtien- nent en raclant la planchette de bois rouge au moyen d'un couteau. Les boules de ngula, telles que les indigènes les présentent aux marchés de cette région sont donc formées de fins éclats de bois de Takula rapé, mélangés à de la poussière de même nature. Le Musée du Congo Belge possède une série de sept spécimens de ce genre à provenance déterminée.

Avant de s'en servir les indigènes de ces régions sont obli- gés de réduire ces fins éclats de bois rapéen poudre. Ils utilisent dans ce but une pierre meulière dont leMuséepossède un exem- plaire. Il arrive aussi que l'indigène fendille le bois de Takula et écrase les éclats sur la pierre meulière. Il a spécialement recours à ce procédé lorsqu'il veut fabriquer un peu de poudre de ngula pour son usage personnel. Les métiers à ngula de cette région diffèrent ainsi totalement de ceux que nous avons décrits précédemment. Une petite natte pour recueillir les rapures, une planchette de bois rouge dont l'une extrémité repose sur la natte placée à terre, l'autre étant appuyée contre le côté gauche ou droit du buste de l'indigène, enfin un couteau manié des deux mains d'un mouvement régulier de haut en bas; voilà toute l'installation à ngula de cette région.

En résumé nous pouvons conclure que dans l'état actuel de nos connaissances, des documents et collections du Musée du Congo Belge, la fabrication du ngula se pratique dans toute notre Colonie. Elle comprend deux méthodes : celle du frotte- ment de deux blocs et celle du raclage au couteau d'une planche de Takula avec réduction ultérieure sur 1& pierre meulière. Si nous examinons la forme donnée par l'indigène au ngula pour en former un objet d'échange, nous remarquons que la région ou la première méthode est courante comprend quatre subdivisions ou zones ethniques :

celle du cône étroit allongé ;

celle du cône trapue avec sommet carré ;

celle de la boule irrégulière ;

celle de la tablette rectangulaire.

Il est cependant possible que le ngula se présente encore sous d'autres formes types et que certaines populations de notre Colonie emploient dans la fabrication du ngula une méthode toute différente de celles que nous avons décrites plus haut. Il

547

y a sous ce rapport d'intéressantes recherches ethnogra- phiques à faire. Elles mériteraient d'autant plus de fixer l'attention des résidents au Congo Belge que la base de cette industrie, le bois de Takula; doit être considérée comme une des ressources les plus précieuses de notre Colonie. Le jour le développement de nos moyens de communications, la réduction des frais de transport et l'organisation économique générale du Congo Belge permettront la mise en oeuvre au profit de l'industrie nationale, des richesses de la forêt tropi- cale, la connaissance précise de l'extension, de l'intensité d'exploitation et des méthodes de la fabrication du ngula seront des indications précieuses pour l'orientation générale du commerce des bois d'ébénisterie. .

J. Maes.

Conservateur au Musée du Congo Belge.

548

Mélanges

POLITIQUE COLONIALE

L'évolution de la politique économique impérialiste de la Grande Bretagne pendant la guerre.

Par suite des circonstances, cet article de M. J. Belin attira un peu tard notre attention. (Asie Française, XIX, -1919, p. 207 et suiv.) Mais, nous n'hésitons pas à le signaler, dans la conviction que les lec- teurs en prendront connaissance avec intérêt,

Quand les Anglais, après les premiers moments de surprise et d'hési- tation, furent bien convaincus de l'importance de la lutte ils se trouvaient engages, quand la conscience individuelle de chaque citoyen britannique, en quelque lieu du monde qu'il se trouvât, fut acquise sans réserve à la cause de la guerre, vers l'automne de 1915, il se dessina dans l'opinion publique un mouvement qui semblait annoncer une réforme profonde dans l'organisation économique et même politique de l'Empire.

On sait comment il s'était constitué au cours de ces trois derniers siècles. Avec ce goût de l'initiative, de la responsabilité, avec ce respect de la liberté individuelle qui les caractérisent, des Anglais étaient suc- cessivement partis chercher fortune au-delà des mers, sans conserver le plus souvent d'esprit de retour et sans trop se soucier d'établir des liens solides qui les rattachassent à la mère-patrie.

Les Dominions qu'ils avaient ainsi créés en Amérique et en Australie, et dont la prospérité s'accrut très rapidement an cours du XIXe siècle, prirent une autonomie d'autant plus grande que leur force était plus assurée.

Quand la guerre éclata, les esprits superficiels purent même craindre que le Royaume-Uni n'entrât seul dans la lutte ; il était difficile de prévoir quelle serait leur attitude ; aucune constitution, aucun texte ne les obli-

549

geait à prendre une part active dans un conflit leur intérêt pouvait ne pas paraître évident.

Mais si l'Empire Britannique n'est pas construit avec la solidité exté- rieure et l'harmonie logique auxquelles sont accoutumés nos esprits latins, il a été cimenté par un esprit commun de confiance en soi qui a groupé autour de la mère-patrie les Britishers venant de tous les points du globe presque aussi rapidement et aussi sûrement que si une loi for- melle les y avait contraints.

Beaucoup d'Anglais eux-mêmes furent surpris de la spontanéité de cet élan, de la loyauté de ce concours et ils sentirent rapidement la néces- sité qui les poussait à témoigner aux Dominions leur reconnaissance et à resserrer les liens qui les unissaient à la vieille Angleterre. Comme d'autre part, après le mouvement d'étonnement que provoqua chez eux la déclaration de guerre, ils furent surtout préoccupés de s'affranchir de l'hégémonie industrielle et commerciale que l'Allemagne commençait à établir partout et même chez eux, il n'est pas étonnant qu'un désir se soit manifesté, dès l'automne de 1915, de provoquer un rapprochement économique entre les différentes nations qui constituent l'Empire Bri- tannique.

Le moment paraissait favorable pour reprendre avec des chances nou- velles de succès la campagne qu'avait menée en 191*2 Joseph Cham- berlain. Les conditions naturelles qui ont déterminé l'Angleterre à adopter une politique nettement libre-échangiste, la nécessité d'importer des denrées alimentaires et des matières premières qu'elle ne produisait plus en quantité suffisante et d'importer, d'autre part, les nombreux pro- duits de son industrie, restaient bien les mêmes. Mais les raisons poli- tiques qui avaient rallié à la tariff-reform une grande partie des conser- vateurs, recevaient une force nouvelle de la haine que soulevait la conduite barbare des Allemands et de l'indignation que provoquait la découverte subite de leurs méthodes malhonnêtes d'envahissement com- mercial.

Dès le mois d'octobre 1915, le Morning Post ouvrait une enquête sur la politique économique d'avant-guerre, qui concluait à une réforme profonde du régime en vigueur. Certains de ses correspondants, comme M. J. Laurence, proposaient l'établissement d'un tarifa trois degrés : le tarif général, le tarif minimum réservé aux colonies et le tarif maximum destiné aux pays qui frappent les produits anglais de 15 p. c. ad valorem et au-dessus

Le 25 décembre, Sir John Pilter, président d'honneur de la Chambre de commerce britannique de Paris, publiait, après enquête, un Afier the war scheme il préconisait le système suivant :

550

Un tarif maximum pour les nations alliées (l'expression maximum signifiant « qui ne peut être dépassé », mais ce tarif pouvant être réduit même jusqu'à l'exemption) ;

Un tarif générai considérablement plus élevé pour les neutres et les ennemis ;

Un tarif maximum pour l'Empire Britannique un peu inférieur à celui des Alliés, pouvant d'ailleurs être supprimé notamment pour ren- trée en franchise en Angleterre des objets d'alimentation et devant être établi par une conférence impériale à convoquer le plus tôt possible.

Le Gouvernement libéral de M. Asquith se faisait lui-même l'écho de ce mouvement de plus en plus puissant d'opinion. Le 25 décembre, M. Runciman, le président du Board of Trade annonçait que son admi- nistration étudiait les moyens de combattre la puissance économique allemande, et le 10 janvier 1916, à la suite d'un débat soulevé par M. Hewins, l'ancien lieutenant de Chamberlain, la Chambre des Com- munes votait une motion pendant que le Gouvernement britannique entrerait en consultation avec les Dominions pour pouvoir ensuite mettre l'entière puissance économique de l'Empire en coopération avec celle des Alliés au service d'une politique dirigée contre les ennemis,

A la fin de février, l'Association des Chambres de commerce tenait à la suite de son assemblée annuelle un Congrès extraordinaire elle pro- posait, entre autres vœux, une résolution demandant que le Gouverne- ment fut requis, par députation de l'Association, d'inviter les représen- tants des colonies et des pays alliés à conférer d'abord séparément et et ensuite collectivement avec les représentants nationaux, en vue de fixer les bases d'une entente ayant une action commune pour objet, résolution que le Congrès abandonna, quand M. Bonar Law, alors Ministre des Colonies, lui eut déclaré le Ier mars que le Gouvernement britannique avait accepté l'invitation qu'il venait de recevoir d'assister à Paris à une conférence économique interalliée.

* *

Tandis que se préparait la réunion de cette conférence, la campagne impérialiste se poursuivait avec une activité de plus en plus grande. Elle était menée surtout au Parlement par M. Hewins, placé en 1903 par Chamberlain à la tête de la Tariff Commission et membre depuis 1912 de la Chambre des Communes, et par M. Hughes, le très énergique pre- mier ministre d'Australie, connu par l'audace des lois sociales et de défense économique, qu'il y avait fait voter. Arrivé à Londres, en mars 1916, il y entreprenait aussitôt une série de discours qui lui valaient une

551

popularilé telle qu'on demandait son envoi à la Conférence de Paris, et même son entrée dans le Cabinet.

Après certaines hésitations, M. Asquith, qui craignait de voir M. Hughes entraîner la délégation britannique dans une voie protectionniste, le premier ministre d'Australie fut désigné pour accompagner à Paris, en juin 1916, lord Crewe, M. Bonar Lawe et sir George Foster, ministre du Commerce du Canada. Il y joua un rôle actif dans les discussions.

On sait que cette Conférence posa les principes d'une collaboration intime entre les pays alliés tant pour la période de reconstitution qui suivrait les hostilités, que pour la période de paix définitive. Cette colla- boration économique devait être particulièrement étroite entre les diffé- rentes parties de l'Empire. M. Asquith, en rendant compte à la Chambre des Communes de ses travaux, pouvait en donner l'assurance avec d'au- tant plus de sécurité, que peu avant la réunion de la Conférence de Paris, les 6, 7 et 8 juin, l'Empire Business Conference, groupant à Londres les délégués et les invités du British Impérial Council o f Commerce, avait adopté à l'unanimité, sauf trois voix, quatre résolutions ayant pour objet :

D'établir des relations réciproques de préférence entre toutes les parties de l'Empire britannique;

D'établir des relations commerciales entre toutes les parties de l'Empire et ses alliés ;

D'accorder aux neutres un traitement favorable;

De restreindre par des tarifs, ou autrement, les relations commer- ciales avec les pays ennemis, de façon à rendre impossible le dumping, ou le retour à la situation antérieure à la guerre.

Aussi, M. Asquith pouvait-il déclarer, le 5 août, aux Communes, en étant certain de répondre aux vœux du pays, que le Gouvernement se proposait de réunir une Conférence seraient représentés la Grande- Bretagne, les Dominions et l'Inde. Il annonçait, en même temps, qu'il avait déjà constitué un comité chargé « d'étudier la politique commer- ciale et industrielle qui devait être adoptée après la guerre en se référant particulièrement aux conclusions adoptées à la Conférence économique des alliés ». Elle devait notamment rechercher « dans quelle mesure et par quels moyens pouvaient et devaient être développées les ressources de l'Empire; et dans quel e mesure et par quels moyens on pouvait empêcher les sources de production à l'intérieur de « l'Empire de tomber sous un contrôle ennemi ».

Ce comité, présidé par lord Balfour of Burleigh comptait parmi ses membres |des représentants très connus du monde des affaires, comme M. Joseph Maclay, armateur à Glasgow, sir Alfred Mond, trésorier de

552

l'Unicn libre-échangiste, M. Prothero, M. P., conservateur spécialiste en matière d'agriculture, M. F. H. Smith, directeur des mines du North Wales, M. Wardle, M. P., travailliste et les représentants de plusieurs comités du Board of Trade. 11 commença aussitôt ses travaux et les poursuivit pendant tout le second semestre de 1916, non sans une cer- taine lenteur; car il était entravé par les discussions constantes qui s'éle- vaient entre les partisans les plus enthousiastes de la réforme douanière, comme M. Hewins, et les libéraux de l'ancienne école, parmi lesquels se trouvait le président, lord Balfourof Burleigh lui-même.

Malgré le désir général et solennellement proclamé au début des dis- cussions d'arriver à une solution prompte et pratique, le Comité n'avait abouti à aucun vote décisif, quand le ministère de M. Asquith fut rem- placé, en décembre 1916, par celuideM. Lloyd George. L'entrée de plu- sieurs membres du Comité dans le cabinet, l'ignorance l'on était des intentions du nouveau premier, firent craindre alors que le Comité ne fût dissous avant d'avoir donné aucune conclusion à ses travaux.

Cependant, le mouvement impérialiste prenait une importance chaque jour grandissante dans les colonies et certains Dominions adoptaient des mesures qui indiquaient déjà nettement dans quels sens ils voulaient orienter leur politique économique.

Le 24 juillet 1916, lord Liverpool, gouverneur du Commonwealth d'Australie publiait un ordre en Conseil qui « soumettait à l'octroi préa- lable d'une licence émanant du contrôleur des douanes le commerce d'im- portation de toutes les marchandises, sauf de celles qui provenaient de la Grande-Bretagne, des possessions britanniques ou des États-Unis ». Encore ces licences ne pouvaient-elles être accordées que si les marchan- dises n'avaient aucune relation avec l'ennemi. Toute contravention entraînait la saisie et la confiscation. Le même jour un autre ordre en conseil interdisait l'exportation des peaux de mouton avec ou sans laine, des peaux de porc, de la peausserie y compris les poils et doublures.

Le 13 septembre, il se produisait en Afrique australe une manifestation de ce désir de rapprochement, impérial plus significatif encore, quoique moins officielle. Le congrès annuel des Chambres de Commerce sud- africaines, réuni à Capetown, votait la proposition suivante, proposée par la Chambre de Commerce île Johannesburg :

« A l'effet d'encourager la création de nouvelles industries et le déve- loppement des industries déjà existantes dans l'Empire Britannique, demander aux Gouvernements de l'Angleterre et des Dominions d'obliger

553

les départements ministériels, les municipalités, les ports et docks, les Compagnies de chemins de fer, d'eau, de gaz et d'électricité, les entre- prises gérant des intérêts publics ou exerçant leurs pouvoirs en vertu de chartes octroyées par le Gouvernement ou tout autre autorité con- stituée :

De n'acheter que des marchandises produites dans l'Empire;

De ne contracter qu'avec des firmes britanniques, toute exception ne pouvant être apportée à cette règle que lorsque l'application de celle-ci sera contraire aux intérêts publics et après autorisation spéciale, dûment obtenue. La presse du Natal s'élevait, d'ailleurs, contre cette résolution qu'elle trouvait vraiment excessive et contraire au principe de l'entente économique des Alliés.

Les déclarations des hommes d'État coloniaux ne pouvaient laisser aucun doute d'ailleurs sur les tendances de l'opinion dans les Dominions.

Au mois d'octobre, à un banquet que M. Bonar Law offrait à la Chambre des Communes à M. Massey, président du Conseil, et à Sir Joseph Ward, - ministre des Finances de la Nouvelle-Zélande, les deux ministres colo- niaux, après avoir affirmé qu'après la guerre « les responsabilités de l'Empire devraient être réparties d'une façon plus satisfaisante et plus équitable », faisaient les déclarations les plus catégoriques sur la poli- tique que le Gouvernement néo-zélandais entendait suivre.

« Durant la génération présente, disait M. Massey, la population de la Nouvelle-Zélande n'achètera pas chez l'ennemi les marchandises qu'elle pourra se procurer dans l'Empire... Si nous établissons un régime préfé- rentiel de l'Empire, nous pourrons ouvrir largement la porte à nos Alliés et développer nos relations commerciales avec eux. » Et Sir Joseph Ward rappelait que la Nouvelle-Zélande avait décidé de taxer à la fin de la guerre tous les produits ennemis de 50 p. c. et même s'il le fallait de 100 p. c. En d'autres circonstances, M. Massey avait encore affirmé qu'il existait dans toutes les régions de l'Empire un désir croissant de voir s'établir des relations commerciales plus étroites entre la Métropole et les Dominions et de Dominion à Dominion.

C'étaient exactement les principes que ne cessait de soutenir M. Hughes depuis la première campagne qu'il avait commencée en Angleterre à la fin de 1915. Ces tendances qui se manifestaient maintenant de toutes parts en faveur d'un rapprochement entre toutes les parties de l'Empire devaient trouver une première satisfaction dans la réunion de la Confé- rence impériale que M. Lloyd George, reprenant le projet de M. Asquith, pensait convoquer en février.

554

Tandis que les colonies manifestaient aussi nettement leur désir de voir se resserrer les liens qui les unissaient à l'Empire, tandis que le concours qu'elles apportaient à l'Angleterre pour la poursuite de la guerre lui faisait comme un devoir de plus en plus pressant de leur témoigner sa reconnaissance, l'opinion publique, en Grande-Bretagne même, se prononçait chaque jour plus ouvertement en faveur d'une réforme économique profonde.

Le Comité Balfour, entraîné lui-même par le mouvement, se réunit de nouveau au début de Tannée 1917 et, le 2 février, il adoptait à l'unani- mité un projet de motion qu'il transmettait immédiatement au premier ministre. Cette motion qui posait le principe de la préférence impériale comportait les trois résolutions suivantes :

« A la lumière de l'expérience acquise pendant la guerre, nous considérons que des projets doivent être faits pour stimuler la production des denrées alimentaires, des matières premières et des produits fabri- qués dans l'Empire;

» Nous recommandons donc au Gouvernement de Sa Majesté de donner dès maintenant son adhésion au principe que la préférence doit être accordée aux produits manufacturés des Dominions britanniques d'outre-mer, à l'aide de droits de douane imposés maintenant ou plus tard sur les importations du Royaume-Uni.

» En outre, notre opinion est qu'il sera nécessaire de prendre au plus tôt en considération, comme un des moyens d'exécution des objets ci-dessus, l'établissement de droits de douane plus étendus qui seraient remis ou réduits sur les produits ou objets manufacturés de l'Empire et qui constitueraient là-bas des traités commerciaux avec les Puissances Alliées ou Neutres. »

La Conférence impériale qui se réunit en avril adopta ces résolutions: elle déclarait, d'autre part :

« Le moment est venu d'encourager par tous les moyens le dévelop- pement des ressources impériales, notamment d'adopter les mesures qui rendront l'Empire indépendant des autres pays en ce qui concerne l'approvisionnement en denrées, matières premières et industries essen- tielles.

» Dans ce but, la Conférence adopte le principe que chacune des par- ties de l'Empire accordera un traitement préférentiel et des avantages particuliers aux produits et objets manufacturés des autres parties de l'Empire, tout en gardant en vue les intérêts des Alliés. »

Cependant le Comité Balfour établissait son rapport définitif et le sou- mettait aux autorités des Dominions et des Possessions de l'Empire. Il contenait tout un chapitre sur la préférence impériale. Il y était dit que

555

l'Angleterre serait naturellement amenée à donner à ses Dominions, en échange des avantages qu'ils lui avaient accordés dans leurs tarifs douaniers, des traitements de faveur, non seulement pour ses produits manufacturés, mais aussi pour les denrées et les matières premières. On y recommandait de prendre immédiatement des mesures de préférence impériale en abaissant pour les colonies les droits de consommation qui frappent, même en Angleterre, certains produits, comme le thé, le café, le cacao, le sucre, le vin et les spiritueux. On y prévoyait l'établissement de droits de douane modérés, même sur les matières premières des pays étrangers quand il en existe de semblables dans l'Empire. Mais on y envi- sageait aussi les moyens de réaliser la préférence impériale autrement que par l'imposition de droits de douane.

« Parmi ces moyens, disait le rapport, on peut citer les contrats con- clus par le Gouvernement pour plusieurs années en vue d'acheter à des prix minima, garantis tout ou partie de la production d'objp.ts, présen- tant une grande importance pour l'industrie; procédé déjà employé pour le zinc raffiné d'Australie. Tel est aussi le concours pécuniaire apporté par le Gouvernement métropolitain au développement des ressources de l'Empire, comme cela a été le cas pour le nickel canadien. »

Pendant toute la fin de l'année 1917, l'Angleterre travailla activement à préparer cette réorganisation économique, qui devait l'affranchir de plus en plus de la dépendance de l'étranger. Le droit fiscal de 33 p. c. qu'elle avait imposé sur certains articles de luxe, les efforts qu'on y fai- sait pour crper des industries nouvelles et développer l'agriculture avaient pour résultat de réduire en 1917 de deux tiers les importations de 4913.

En même l'Empire s'organisait, véritable Société des Nations avant la lettre, comme le remarquait M. Balfour. L' Impérial War Cabinet, com- posé d'abord des premiers ministres des quatre Dominions, sous la pré- sidence du premier ministre anglais, devenait un conseil permanent, dès lors qu'on décida d'y remplacer les premiers ministres, qui ne pouvaient rester constamment éloignés de leurs pays, par des ministres résidant à Londres, et spécialement désignés à cet effet.

Malgré ces preuves si nombreuses et si évidentes de la tendance nou- velle qui pousse les différentes parties de l'Empire à s'unir plus étroite- ment, il ne semble pas» au moment la guerre prend fin, que des réso- lutions définitives soient sur -le point d'être adoptées dans le domaine économique.

556

Le Ier juillet 19i8, M. Wal ter Long, secrétaire d'État aux Colonies, a bien déclaré que la Conférence impériale avait voté trois résolutions net- tement impérialistes. La première recommande aux Dominions d'imiter la mesure prise en Grande-Bretagne par le Non Ferrons Métal Act et de n'autoriser l'exploitation des minerais autres que le fer qu'après l'octroi d'une licence, qui sera toujours refusée aux ennemis. La seconde tend à réserver les matières premières à l'Empire Britannique et à ses Alliés. La troisième prévoit la création d'un comité qui étudiera la répartition équitable et utile à l'intérieur de l'Empire de certaines denrées et matières premières.

Mais quand, à la f\n de juillet, M. Walter Long annonça « qu'un projet » clairement mis au point pour l'adoption de la préférence dans les n limites, avait reçu l'approbation du Gouvernement de Sa Majesté », le premier ministre canadien déclara que la décision ne concernait que le Gouvernement du Royaume-Uni, et qu'en ce qui concernait le Canada, ce pays n'exigeait nullement que la Métropole modifiât sa politique fis- cale, « contrairement aux vœux d'une portion considérable de l'opinion » britannique, dans Tunique dessein d'accorder une préférence au » Canada. »

Sans doute encore, pendant la période électorale, le 2 novembre 1918, M. Lloyd George écrivit à M. Bonar Law une lettre il se posait nette- ment en partisan d'une réforme économique.

« J'ai déjà accepté la politique de préférence impériale, y disait-il, » telle qu'elle est définie dans les résolutions de la Conférence Impériale, » c'est-à-dire, qu'il sera accordé une préférence sur les droits existants » et sur tous les droits qui, par la suite, pourront être établis. J'ai dit » en même temps que notre politique ne comprend pas de droits sur » l'alimentation ; mais cela, il va sans dire, n'empêchera pas de donner » une préférence sur aucun autre produit, comme, par exemple, le thé )) ou le café, sur lesquels, pour notre convenance, ïnous avons mis des )> droits... En ce qui concerne les autres côtés du problème, j'estime que » les industries-clefs dont dépend l'existence de la nation, doivent être » conservées. J'estime aussi que, pour conserver le niveau actuel de la » production et la développer dans la plus large mesure possible, ii est » nécessaire de donner une assurance contre la concurrence déloyale à » laquelle nos industries ont été exposées dans le passé par le dumping » des marchandises au-dessous du prix de revient. En outre, je suis » d'avis que nous devons envisager ces questions sous un jour nouveau, » sans égard pour les opinions et les discours d'avant-guerre. »

Mais quelle que soit la sincéiité du premier ministre dans son inten- tion d'instaurer une politique économique nouvelle, on ne peut s'empé-

557

cher de voir un certain manque de précision dans l'annonce de ces réformes. Les mesures contre le dumping ont toujours été demandées par les libre-échangistes aussi bien que par les protectionnistes, et la défense des industries-clefs est de même acceptée par tout le monde.

Le temps est bien passé les parties se combattaient sur ce terrain économique. Beaucoup d'autres préoccupations assiègent les hommes politiques. Dans les discours qui ont été prononcés pendant la campagne électorale, dans les programmes qui ont été publiés, la question d'une réforme économique impérialiste n'a pas été traitée.

* * *

Il semble bien, en somme, que toute cette agitation qui a soulevé la Grande-Bretagne pendant la guerre n'aboutisse pas à des réalisations prochaines, et qu'on n'y soit pas encore disposé à bouleverser de fond en comble un système économique qui a amené tant d'années de prospé- rité, à un moment des problèmes si grèves sollicitent l'attention des hommes d'État.

De fait, si on serre de près la question, on ne voit pas trop bien ce que l'Angleterre gagnerait en réalité à cette réforme. Ce n'est pas en ce moment qu'on peut songer à taxer les produits alimentaires, d'une façon générale, même si on a l'intention d'accorder un régime de faveur aux colonies.

L'élévation du prix de la vie qui en serait la conséquence serait trop grave dans la situation sociale actuelle, et d'ailleurs M. Walter Long a déclaré que le projet gouvernemental excluait lès denrées.

Il semble bien difficile également, alors que toutes les industries vont avoir besoin de matières premières abondantes et à bon marché, qu'on se décide à taxer celles qui viendront de l'étranger.

Quant aux produits manufacturés, ils représentent pour les Dominions et l'Inde 13 millions et demi de livres sur un total de 150 millions. Le Morning Post remarquait très justement que, limiter ainsi, la préférence impériale, ne pourrait guère profiter qu'aux planteurs de canne à sucre des Antilles, du Natal et de l'île Maurice.

11 n'y a sans doute pas lieu de trop nous alarmer des projets de nos Alliés. Depuis qu'ils les ont formés d'ailleurs, ils ont toujours manifesté l'intention de nous y associer. Ils se rendent un compte exact des sacrifices spécialement lourds que la guerre nous a imposés, et ils sont loyalement prêts à nous en tenir compte pour peu que nous sachions franchement faire valoir nos droits.

Ce nous sera particulièrement facile si la Grande-Bretagne n'adopte

558

pas prochainement un syslème protectionniste, mais si, comme il est vraisemblable, c'est par d'autres moyens par des ententes politiques, financières, économiques mêmes qu'elle réalise cette union impériale, que l'intérêt et le sentiment lui imposent en quelque sorte aujourd'hui. Nous ne saurions être lésés dans ces accords qui nous permettront toujours de conserver nos relations d'amitié avec toutes les parties de l'Empire.

Loin de prévoir une lutte de tarifs, il serait plus opportun pour les deux pays, de rester unis dans la paix comme ils l'ont été dans la guerre, et d'organiser par des réformes fécondes dans les méthodes commer- ciales, une collaboration qui nous associerait à l'Empire britannique sans nous asservir à lui.

Les revues coloniales allemandes n'ont pas cessé de paraître, comme d'aucuns pourraient le croire. Nous avons sous les yeux quelques numéros du Deutsche Kolonialzeitung et de Koloniale Rundschau. Le format est réduit et la parution est mensuelle. Les pauvres périodiques sont marqués du signe indélébile de la débâcle et leur aspect est plutôt lamentable. La Deutsche Kolonialgesellschaft s'efforce cependant de ranimer l'élan colonial devenu si vif et si dangereux en 1914.

M, Diedrich Westermann, connu par ses travaux sur les langues du Soudan, morigène ses compatriotes avec amertume (Koloniale Rundschau , Juni 1920, p. 97-99). Du moment, écrit-il, que les colonies sont perdues et qu'il n'y a plus moyen de gagner de l'argent grâce à elles, on les abandonne à leur sort et on n'y pense plus. On est trop réaliste pour se soucier du passé : « Man ist zu realistisch, um einer Vergangenheit, nachzutrauern ».

C'est une profonde erreur, dit-il. Un jour viendra où. la question du partage de l'Afrique se posera à nouveau. Le monde ne pourra tolérer que les ogres anglais et français aient dépecé l'Afrique à eux deux. Et puis, unautre esprit règne là-bas depuis la guerre. Les nègres ne sont plus disposés à se laisser traiter comme du bétail humain. « Un jour ou l'autre, se poseront des problèmes qui deviendront actuels pour nous aussi et à la solution desquels nous aussi nous prendrons part » (p. 99). Tenons-nous prêts et continuons à nous intéresser aux choses coloniales... Nous signalons tout ceci à nos compatriotes. A bon entendeur, demi-mot suffit.

Il faut lire le Mercure de France du 15 août. M. Cari Siger y admi- nistre une volée de bois vert magistrale a M. Pickering Jones, directeur

559

de Y Association of West African Memhants de Liverpool, et à... M. Charles Gide, professeur d'économie politique à la Sorbonne. Le premier avait fait, dans la revue West Africa (Ier juin 1920) des décla- rations assez bizarres, en effet, au sujet de la possibilité pour la France de mettre en valeur son empire colonial, M. Pickering Jones, tout en s'affirmant grand admirateur de la pensée française, estimait que la France « n'est pas encore arrivée à considérer ses colonies de l'Afrique comme un dépôt confié à ses soins... mais qu'elle les a plutôt regardées comme une source de richesses destinées à être exploitées pour le seul bénéfice et avantage de la mère-patrie». Il lui reprochait aussi l'incorpora- tion des noirs dans l'armée française, pour combattre les Européens, le maintien des grandes concessions et l'existence de droits différentiels dans les colonies au profit des négociants français.

M. Siger n'éprouve naturellement aucune peine à remettre les choses au point et il le fait de main de maître, surtout à propos de l'incorpora- tion des noirs et des tarifs différentiels.

Quant à M. Charles Gide qui proposait de céder l'Indo-Chine à l'Angle- terre ou aux États-Unis en échange de leurs créances sur la dette française, il est bien arrangé. Oyez plutôt : «Une stupidité aussi épaisse que celle de ce Gide nous casse bras et jambes. Quand on sait, quand on sent le prodigieux effort de création que représente une colonie comme flndo-Chine et qu'on voit méconnaître à ce point cet effort par un uni- versitaire qui devait, lui aussi, savoir un peu et avoir eu, du moins, la bonne foi de se renseigner, on serait tenté de perdre courage et de désespérer de notre avenir colonial » .

« Tous nos braves alliés, continue M. Siger, dansent autour de nous la danse du scalp. Leur affection pour nous est telle qu'ils voudraient nous voir crever pour le mieux et définitivement affamer. Ah ! chères et évangéliques âmes ! en vérité, doux alliés anglais, je n'arrive pas à comprendre pourquoi les Irlandais vous exècrent, pourquoi l'Inde vous supporte impatiemment, pourquoi les Tasmaniens se sont laissés mourir jusqu'au dernier sous votre tendre domination. Irlandais, Hindous, Tasmaniens, sans doute n'avez vous pas su comprendre votre exact intérêt tel que l'entend Albion... »

Le ton est, comme on le voit, un peu sévère, mais il donne à réfléchir. Noublions pas qu'un article tout récent {Roy-Devereux, « The Anglo- French Colonial policy », Anglo-French Review, juillet 1920, 560 et suiv.), comparant la politique coloniale française et anglaise, reconnais- sait certains mérites et même certaines supériorités à la colonisation française. L'anglomanie en matière coloniale est une bonne « manie » à condition de ne pas la transformer en « marotte ».

560 Réorganisation du Ministère des Colonies français.

Un décret, paru au Journal Officiel, le 15 août, vient de remanier le ministère des colonies. La division géographique instituée par M. Mes- simy en 4911; est remplacée par une organisation des services selon la nature des affaires à traiter, qui apparaît plus appropriée aux nécessités de l'heure. Ce remaniement marque une heureuse tentative de décen- tralisation, dont M. Albert Sarraut, ministre des colonies, s'est toujours déclaré partisan.

En 1911, la distribution des services s'établissait ainsi : Secrétariat et Contreseing; Direction du Contrôle; Inspections générales des Travaux publics aux Colonies et du Service de Santé; Indo-Chine; A.O.F. et A. E. F.; Océan Indien ; Amérique et Océanie ; Services du personnel, de la comptabilité, administratif, militaire, pénitentiaire et des ports.

En juin 1919, des modifications assez profondes furent apportées à cette organisation. Les Colonies ne demeurèrent pas groupées d'après leur seul voisinage et ne constituèrent plus que trois directions : Direc- tion de l'Indo-Chineet de Madagascar, Direction de l'A.0 F., de l'A.E.F. et de la Côte des Somalis, Direction de la Guyane, Guadeloupe, Marti- nique, Saint-Pierre et Miquelon, Inde, Réunion, Etablissements Français de TOcéanie, Nouvelle-Calédonie. En outre, furent créés de nouveaux services techniques : Inspections générales de la Justice, de l'Instruction publique, des Services Economiques, de la Marine marchande et un service des Banques coloniales et des Douanes.

Désormais, le ministère des colonies comprendra neuf services prin- cipaux :

Cabinet du ministre (comprenant l'enregistrement général, les archives coloniales, etc., le bureau de l'inspecteur conseil de l'instruction publique);

Direction politique (quatre bureaux) : a) constitution générale du domaine colonial de la France, etc.; b) affaires politiques et administra- tion générale des possessions de l'Afrique continentale et de Madagascar; c) affaires politiques et administration générale de l'Indochine et des colonies à gouvernement autonome; d) affaires judiciaires et adminis- tration pénitentiaire);

Direction économique (quatre bureaux) : a) commerce, industrie, main-d'œuvre, crédit colonial, exportations, rapports avec les agences économiques; b) législation économique, régime douanier; c) agricul- ture, forêts, élevage; d) outillage économique, transport, câbles et T. S. F.;

561

Direction des services militaires (un secrétariat et deux bureaux) ; Direction du contrôle (quatre sections) ;

Direction du personnel et de la comptabilité (trois bureaux et cinq sections);

Inspection générale des travaux publics (trois sections) ; Inspection générale du service de santé (une section); Service de la marine marchande (une section).

(Gazette Coloniale.)

QUESTIONS ECONOMIQUES

La Commission industrielle indienne

a publié naguère un rapport dans lequel elle propose la création d'un service chimique général pour la recherche des produits eommerçables dans i'Empire des Jndes. La revue The Nature (29 juillet 1920) donne à ce sujet de précieux renseignements. La Commission demande :

1. Qu'un service chimique soit constitué.

2. Que le service soit intitulé : Le service chimique indien.

3. Que le service soit contrôlé par un directeur général.

4. Qu'un institut central, impérial de recherches chimiques soit établi à Dehra Dun, sous la direction d'un directeur général du service chimique, assisté par un nombre de directeurs députés.

5. Que chaque directeur député aurait la charge d'un département séparé, et que, en premier lieu, il y aurait quatre départements : a) chi- mie inorganique et physique; b) chimie organique ; c) chimie métallur- gique ; (/) chimie analytique ;

6. Qu'un institut provincial de recherches, sous le contrôle du gouvernement local, soit érigé dans chaque province, près du siège principal de l'industrie dans cette province, que chnque institut pro- vincial de recherches soit sous la direction d'un directeur de recherches.

7. Que les fonctions de l'institut central impérial soient les suivantes:

I) Créer de nouvelles industries et effectuer le développement des nou- veaux procédés sur une échelle assez étendue, ou davantage si c'était nécessaire.

II) Examiner avec soin ces problèmes de caractère fondamental, pro- venant de l'ouvrage des instituts provinciaux qui ont été transmis à l'Institut central par le directeur local des recherches, en consultation avec le directeur général. Ces problèmes seront ceux qui n'ont pas l'apparence d'une importance pratique immédiate, mais qui, d'après

562

l'opinion du directeur général et du directeur des recherches, peuvent vraisemblablement amener des découvertes d'importance industrielle fondamentale, concernant généralement les industries du pays.

III) Aider à la coordination de l'ouvrage en progrès dans les provinces i à la fois au moyen de discussions personnelles entre les orriciers des instituts cen'ral et provinciaux, au cours des tournées faites par le direc- teur général et les directeurs députés, et au moyen de conférences pério- diques données par les administrateurs provinciaux et impériaux.

IV) Effectuer le travail analytique qui pourrait être requis, et mettre en relation les méthodes d'analyse d'usage général à travers tout le pays;

V) Maintenir un bureau d'information et un « Record Office ».

VI) Faire publier les publications qui seraient considérées comme- nécessaires.

S. Que les fonctions des instituts provinciaux seraient :

I) Se tenir au courant constamment des ouvrages chimiques et des ouvrages en général, et résoudre tout problème qui pourrait leur être soumis.

II) Développer et mettre sur pied industriel de nouvelles industries,, qui auraient été étudiées auparavant dans le laboratoire, et l'Institut central impérial.

III) Effectuer tel autre travail qui pourrait être nécessaire à l'établis- sement et à l'entretien de nouvelles industries particulières à la province.

IV) Effectuer le travail analytique, ou de caractère chimique qui pourrait être requis dans la province.

V) Ériger et contrôler des sous-stations dans certaines parties de la province si le développement de l'industrie l'exige.

9. Que, sous (8) (1) ci-dessus, des arrangements doivent être pris pour qu'une firme ayant solutionné un problème puisse user de la solu- tion pendant une période déterminée antérieure à sa publication.

10. Que des employés du service soient prêtés aux firmes privées si l'occasion s'en présentait, et que pendant leur période de service, ils soient payés d'une somme convenue, par les firmes.

H. Que les instituts de recherches ne peuvent entreprendre des manufactures en concurrence d'entreprises privées," mais que les indus- tries chimiques, développées d'après le (8) ci-dessus, doivent être livrées, aux firmes privées aussitôt qu'elles sont praticables.

12. Que, chaque fois que la chose est nécessaire, des experts soient employés pour établir des industries chimiques basées sur des- procédés connus.

Parmi les autres recommandations, l'on demande que les chimistes agri-

563

coles ne fassent pas, pour le moment, partie du service; qu'un ministère des sciences soit créé aussi vite que possible; qu'un service d'inspecteur chimique de l'Inde soit établi dans le plus bref délai possible; et que le Gouvernement de l'Inde donne aux étudiants les subsides nécessaires pour leur entretien et leur équipement, de façon à leur permettre de suivre les cours de recherches chimiques nécessaires au recrutement.

Il est vraiment remarquable que le seul membre du comité qui fasse objection à la création d'un service de chimie unique pour toute l'Inde, soit le seul membre indien, sir P. C. Rày. Une note séparée, dans laquelle il expose ses objections avec force, est jointe au rapport. L'opi- nion de Sir P. C. Rây doit être fortement considérée, non seulement à cause de sa grande expérience et de sa valeur comme professeur et inves- tigateur, mais aussi à cause de sa grande connaissance de tous les besoins et de toutes les possibilités industrielles; il s'occupa longuement de l'aménagement d'établissements chimiques, dont il fut un des fonda- teurs. Le présent auteur eut l'occasion de visiter ces établissements étant à Calcutta en novembre 1914, et il fut le plus frappé par l'ingéniosité déployée dans la constrnction du matériel : de nombreux produits chi- miques lourds y étaient fabriqués, en fortes quantités, entre autres l'acide sulfurique.

Malgré que Sir P. C. Rày considère que l'époque des services gouver- nementaux est passée, et que le développement des industries au moyen d'un service gouvernemental n'est pas le moyen le plus efficace de s'oc- cuper du problème, il admet que, si un service gouvernemental est constitué, les propositions du Comité représentent la meilleure façon de constituer et d'effectuer ce service. D'après lui, de meilleurs résultats seraient obtenus si on améliorait l'enseignement de la chimie dans les universités indiennes ; si on attirait des jeunes gens brillants par l'offre de bourses de recherches et si on attachait un institut technique à chaque université.

Les circonstances dans les Indes sont si particulières qu'il est impos- sible de juger le projet du point de vue ordinaire. Un certain nombre de ceux qui contribuèrent à la récente correspondance dans la Nature paraissent craindre que la liberté de celui qui s'engage dans les travaux de recherches pourrait être à tort combattue et limitée par l'institution d'un service chimique séparé.

Ceci ne devrait pas être le cas. Il est à supposer que les études entre-* prises seront strictement de caractère utilitaire l'objectif principal étant l'encouragement aux «recherches industrielles», et d'assurer la coopération de la science et de l'industrie. Le fait est que le terme « recherches » devrait être mis de côté dans le cas actuel il a main-

564

tenant tant de sens, si tant est qu'il en ait un bien particulier. Il faudrait le limiter strictement à la recherche originale et être considéré comme un mot d'importance sacrée. Organiser des recherches scientifiques dans les problèmes industriels, voilà le but auquel tendent les promoteurs du projet : c'est pourquoi le titre de « Institut scientifique central » convien- drait mieux que celui de « Institut central de recherches » . ««Recherches» étant un mot inconnu par la multitude et pour lequel elle ne pourra jamais avoir aucun sentiment.

L'Inde est une contrée d'étendue énorme, divisée en une infinité de petites possessions; ses problèmes sont plus que nombreux; la nature et l'élendue de ses matières premières doivent être examinées sans perdre de temps : on a fait très peu de chose pour développer les industries. Le besoin le plus pressant semble être une oiganisation d'effort. Un service est nécessaire, ne fût-ce même que pour la protection des travailleurs.

L'objection principale à faire au projet est peut-être son importance et par cela même son coût élevé. Il comprend l'établissement simultané de tant d'instituts dans les différents districts, pour satisfaire le désir de plusieurs provinces qui désirent exercer un contrôle administratif sur leur propre territoire. La vraie difficulté sera de trouver des hommes capables d'agir comme directeurs des hommes qui soient non seule- ment compétents au point de vue technique, mais aussi des imaginatifs, ayant des vues larges capables de tenir leur rang social et de diriger des hommes. Des hommes pareils ont été demandés ici depuis longtemps, et ils se présentent trop rarement. En effet, on se plaint fréquemment de ce que ceux qui embrassent les carrières techniques peuvent connaître la science de la chimie, mais qu'ils manquent d'initiative et sont inca- pables de porter une responsabilité.

La science de nos jours n'attire pas dans ses rangs le vrai type d'in- telligence. Ne nous faisons pas d'illusions en pensant que nous pourrons réparer nos erreurs passées et devenir à volonté une nation scientifique, en admettant de nombreux élèves dans les écoles et en créant de nom- breux postes nouveaux : sans finesse, sans expérience, rien ne peut se faire. Le succès du projet indien dépendra largement du choix du pre- mier homme qui remplira le rôle de directeur de l'Institut central. Il doit être doué d'un esprit libéral et d'idées : il ne doit pas employer trop de temps à la surveillance de détails administratifs; il doit être lui-même un habile travailleur scientifique. Seul, un homme pareil peut aider l'œuvre des universités, et. être le critique généreux et capable des hommes qu'elles préparent pour l'industrie et le service de l'État.

Sir P. C. Rây voudrait, dans tous les cas, commencer les industries à l'aide d'experts techniques venus de l'étranger, et n'essayerait pas de

565

faire réussir ces industries sur place avec l'aide des Instituts de re- cherches, comme le comité le propose. Il a incontestablement raison quand il s'agit de grandes industries, bien établies ailleurs ; et le fait est que le comité conseille de suivre cette voie dans tous les cas. Les propo- sitions du comité s'appliquent spécialement aux industries établies sur une petite échelle, et dans lesquelles il est désirable d'encourager l'acti- vité indigène : l'œuvre accomplie par Sir Alfred Chatterton à Madras, en développant l'emploi de l'aluminium, peut être citée comme exemple. L'Indien est éminemment conservatif, et ne se laisse pas persuader faci- lement à faire des choses nouvelles, mais on peut souvent l'y amener par des démonstrations occultes : ce sera le rôle des instituts provinciaux de les lui donner.

Dans son rapport concernant l'exploitation des produits forestiers, le comité mentionne la fabrication des allumettes comme une industrie que le Ministère des forêts envisage, et à laquelle il semble donner son appro- bation. La fabrication des allumettes est si entièrement connue qu'il semble inutile que des travailleurs académiques s'en occupent. Dans un cas pareil, il vaudrait mieux faire appel immédiatement à un expert.

L'utilisation de nombreuses fibres pour la fabrication du papier est une toute autre question : il est hautement désirable que ces fibres soient tout d'abord vérifiées sur place, de façon à ce qu'on puisse (enir compte des nombreuses variations auxquelles la matière première doit être assujettie.

La grande valeur du rapport réside dans la recommandation d'un ser- vice scientifique pour toute l'Inde les instructions à donner pour que le service rende le plus d'avantages possibles, seront découvertes gra- duellement quand le service commencera à fonctionner. Il est tout à fait certain que l'avenir industriel de l'Inde peut être assuré seulement avec l'aide des recherches scientifiques et en plaçant l'industrie sur un pied scientifique. Nous devons remercier le Prof. Thorpeet ses collègues pour la façon habile avec laquelle ils ont accompli leur tâche difficile.

M. Howard, le botaniste impérial du gouvernement de l'Inde, a récemment attiré l'attention de la société royale des Arts, sur l'avenir de la botanique économique dans l'Inde et sur les problèmes complexes qui attendent sa solution : après avoir demandé si la meilleure façon d'at- teindre le but, serait de s'appuyer sur une organisation ou de se fier aux particuliers, il exprime l'opinion que l'élection individuelle est préfé- rable. Mais il est certain qu'un individu compétent devrait être capable d'influencer la population réceptive, bien qu'inimaginative. Un accrois- sement de savoir est de peu de valeur, s'il ne nous donne pas une aug- mentation de notre habileté à nous servir de nos connaissances : nous

566

savons qu'il en est ainsi. Pendant la guerre, de nombreux travaux d'équipe furent accomplis par des ouvriers scientifiquemment dressés sous l'influence de quelques esprits dirigeants. Ceux qui font les travaux de recherches dans les différentes écoles sont pour la plupart des mem- bres inconscients d'un ensemble qui agit sous l'inspiration d'un petit nombre de dirigeants : il n'y a aucun motif pour que le système ne soit pas transposé de la vie académique dans les services publics. Nous nous rendons compte des inconvénients qui se manifesteraient probablement dans un système public, et serons donc à même de nous prémunir contre eux.

Toutes ces observations pourraient mathématiquement s'appliquer à nos possessions congolaises.

L'avenir du caoutchouc

et l'exploitation des caoutchoutiers cultivés.

M. É. De Wildeman {Revue des questions scientifiques, avril 1920) croit à l'avenir de la production caoutchouctifère.

La culture des arbres à caoutchouc, écrit-il, a acquis une telle exten- sion et promet à l'avenir des bénéfices si considérables, qu'il faut la considérer comme une science d'ores et déjà industrialisée. Or, dans toute industrie ayant acquis un certain degré de développement en étendue et de perfection technique, l'accroissement ultérieur du rende- ment est dû, non à des procédés découverts par l'empirisme ou par hasard, mais à une mise au point de détail que seule peut réaliser l'étude scientifique.

Si donc l'on veut que les capitaux considérables engagés dans la pro- duction du caoutchouc rendent, il faut que les études scientifiques soient poussées, non seulement pour lutter contre les champignons et les insectes, mais encore pour préciser les conditions d'exploitation ration, nelle des estâtes.

Des études de science pure peuvent être la source d'indications pré- cieuses pour la saignée, celles, par exemple, de M. W. H. Arisz, sur la structure du système laticifère de V Hevea. Elles ont fait conclure que le latex découlant d'une incision à la base du tronc provient de tout le système laticifère du tronc et de celui de la plus grande partie des racines, mais ne provient pas des ramifications latérales, des feuilles, ni des parties supérieures de la couronne (1).

1) D. W. H. Arisz. De structuur van 'het melk sapvaatstelsel bij Hevea, in Ned. lud. Rubbertijdschrift, nr 11, février 1919, p. 258.

567

On a également pu démontrer que la production moyenne de caout- chouc chez X Hevea est en proportion, jusqu'à un certain point, avec le nombre d'anneaux, de vaisseaux laticifères de l'écorce, quoique, dans deux des types bons producteurs, celte proportion ne soit pas toujours .gardée (I).

L'élude anatomique de l'écorce, la recherche de la disposition des vaisseaux laticifères dans un échantillon très petit, a pu donner des indi- cations très utiles pour la pratique. Ces études microscopiques peuvent être dirigées dans un autre sens encore : il faudrait asseoir la sélection sur des bases sérieuses, comme Ta fait entrevoir M. le Dr W. Bobilioff. Jusqu'à ce jour, il n'a été possible de se servir des graines d'un arbre qu'au bout d'une certaine période de production, la sélection étant basée en grande partie sur le rendement en latex de l'arbre, rendement qu'il fallait d'abord contrôler. Or, si, comme l'a démontré M. Bobilioff, les bons producteurs possèdent une écorce dont la grande partie est consti- tuée par un tissu lâche à plusieurs couches de cellules laticifères, occu- pant le tiers ou plus de l'épaisseur de l'écorce, il sera facile de sélec- tionner les plants encore tout jeunes, et on pourra utiliser, pour la reproduction, leurs toutes premières graines, sans attendre le contrôle de la récolte (2).

Rappelons aussi les résultats scientifiques déjà obtenus dans le domaine chimique, les méthodes de coagulation ont fait des progrès, et les chercheurs opérant dans cette direction, escomptent de bien meilleurs résultats encore. Dans le domaine de la préparation du coagulum, de sa transformation en feuilles : crêpes ou sheets, que de progrès n'a-t-on pas réalisés !...

Aussi ne faut-il point s'étonner de voir surgir dans différents pays des organisations scientifiques importantes exclusivement consacrées à l'étude de l'exploitation du caoutchouc. Ce mouvement a pris naissance à Londres, en 1918, pendant la guerre, alors qu'il ressortait avec évi- dence de tous les événements que le succès dans tous les domaines irait aux nations qui sauraient, avec le plus de logique, appliquer aux indus- tries diverses les conclusions des études scientifiques.

En -France, à Marseille, l'Institut Colonial a créé une organisation nou- velle et a même chargé un de nos confrères belges, le Dr Van Pelt, chef

(1) E. A. Stuut. Eeiiige waarnemingen betreffende het verband tus- schen liet aantal ringen der melksapvaten en de rubberproductie bij Hevea, in Ned.-Ind. Rubbertijdschrift, nr 11, février 1910; p. 258.

(2) Cf. W. Bobilioff. Beschouwingen over het anatomisch Bast-Onder- zoek van Hevea Brasiliensis, in Ned.-Ind. Rubbertijdschrift, nr 9, lo jan- vier 1919, l'on trouvera une plus ample littérature sur le sujet.

568

de service dans une entreprise à Sumatra, d'études très importantes sur les caoutchoucs afiicains. Ce n'est pas le moment de rappeler ici les cenclusions de sa mission en Afrique. Elles sont consignées dans le Bulletin que l'Institut Colonial de Marseille a commencé à éditer.

Il est indiscutable que la Rubber Growers Association, de Londres, a fait dans cette voie des efforts louables, que le Comité d'Action Agricole Coloniale de Paris, qui s'est constitué après le Congrès Colonial tenu à Paris en 1918; que V Institut Colonial de Marseille, qui a développé ses sections, en particulier celle du caoutchouc ; que V Institut Scientifique de Saigon, que l'A. E. R. 0. S. ou Algemeene Vereeniging voor Rubber Cultuur Oost-Sumatra, dont le siège est à Medan, pourront donner ou ont déjà donné des résultats positifs.

Mais il faut multiplier les efforts, et, comme le spécifiait M. le Dr E. J. Butler, dans un rapport sur les recherches concernant le caout- chouc en Malaisie, il y aurait lieu, avec l'aide des Gouvernements, des planteurs et des industriels, d'installer, en les dotant largement, des instituts'de recherches pour toutes les études relatives à la culture du caoutchouc.

M. Butler, qui a récemment repris l'étude du problème du caout- chouc (1), arrive à la conclusion que la création d'instituts spéciaux est devenue absolument nécessaire.

Il voudrait que le comité de direction d'un tel institut fut constitué par un président choisi parmi les fonctionnaires supérieurs du Gouverne- ment; deux membres feraient partie de l'État-Major du Département de l'Agriculture et cinq membres appartiendraient au monde des planteurs et des industriels. Ceux-ci auraient ainsi la majorité, avec raison, puisqu'ils y ont le plus d'intérêt.

Pour 31. Butler, les fonctions de ce conseil seraient de gérer les fonds destinés aux études et de recruter le personnel, en première ligne le personnel scientifique. A ce conseil devrait être adjoint un conseil tech- nique comprenant au minimum :

Un ingénieur agricole; deux botanistes; trois entomologistes; quatre chimistes ; cinq mycologistes.

En outre, il faudrait joindre à ces hommes des praticiens en nombre plus considérable.

D'après M. Butler, les chefs de service devraient pouvoir poursuivre leurs études avec des assistants, et nous le voyons en proposer trois

(1) Rubber research in Malaga in India Rubber Journal, 6 décem- bre 19 i9, p. lo.

569

pour l'ingénieur, quatre pour les botanistes, un pour les entomologistes, quatre pour les chimistes, trois pour les mycclogistes.

On voit, par ces quelques chiffres, l'importance que le Dr Butler veut accorder à ce service.

Il établit même le budget de cette institution, budget élevé, naturelle- ment Mais la nécessité urgente do créer des instituts spéciaux de recherches pour l'industrie du caoutchouc, et la nécessité de préparer des agents aptes à mener à bien ces recherches sont si impérieuses que la question budgétaire doit passer au second plan. Une autre question se pose, grave celle-là.

ira-t-on chercher ce personnel? De quelle école pourront sortir les hommes de compétence voulue?

En Hollande, à l'Université polytechnique de Delft, M. le Dr A. Van Rossem vient d'être chargé récemment d'un cours de chimie appliquée au caoutchouc et d'un cours de technologie du caoutchouc; à l'Institut supérieur de Wageningen, on forme forme spécialement des jeunes gens aux fonctions de directeurs, d'entreprises coloniales. Mais, hélas... les Universités, les Instituts agronomiques de la plupart des autres pays ne font rien pour préparer ce personnel d'élite.

Trouvera-t-on, par exemple, en Belgique, pays qui est pourtant par sa colonie, une nation productrice de caoutchouc, un programme de leçons analogues à celles que donne, à la Station d'essais de Malang, M. le Dr Hartjens? Il a commencé en 1918 un cours, dont voici le pro- gramme :

I. 1. Récolte de latex ;

2. Produits chimiques utilisés;

3. Détermination du rendementen latex;

4. Dilution de latex et valeur de l'eau ;

5. Préparation des sheets;

6. Examen d'une installation. II. ! . Préparation des crêpes ;

2. Machinerie;

3. Fumoirs et séchoirs;

4. Considérations générales.

II convient, en effet, que tous ceux qui ont à diriger une plantation de caoutchouc, aient au moins une idée de l'ensemble des questions se rap- portant à cette culture.

Un des collaborateurs de la Neder landsch- Indisch Rubberlydsc.hr i ft avait grandement raison quand, à propos de The Incurporated Society o f Planters de Kuala Lumpur, il faisait ressortir la nécessité d'un enseigne- ment pour les planteurs.

570

« Qui pourra méconnaître, dit-il, que, de nos jours, la moyenne des planteurs est insuffisamment formée pour lutter contre les maladies qui se présentent?

« Qui connaît le traitement scientifique du Hevea, les méthodes scien- tifiques pour prévenir et combattre les maladies?

» Qui oserait méconnaître que les méthodes de culture des caout- choutiers demandent, de la part du planteur, une étude soignée s'il veut être vraiment « planteur » et non « cultivateur ordinaire »? Il y a beau- coup à apprendre quant au sol, à la plantation, au triage des graines, aux amendements, etc. (I) ».

Nous avons appelé plus haut question secondaire, la question du sou- tien financier des instituts spéciaux à créer et à maintenir.

Elle est secondaire, parce que nous sommes persuadés que l'État seul, avec ses ressources étendues, est capable de doter convenablement ces organisations. Il en a le devoir, d'autre part, car il y va d'un intérêt général de tout premier ordre, et l'État est d'ailleurs seul à pouvoir assurer la pérennité de ces institutions.

Il y a place de par le monde pour de nouvelles et nombreuses planta- tions de caoutchoutiers; il y a place aussi pour des exploitations étendues de caoutchouc sylvestre; mais pour être rentables, pour rémunérer les capitaux qu'elles absorbent, pour se développer et vivre, les unes et les autres doivent être gérées suivant des méthodes scientifiques, par des hommes à la hauteur de leur mission.

C'est en grande partie aux Gouvernements qu'incombe la formation de ces hommes; c'est à eux d'introduire dans l'enseignement les éléments de la science coloniale, indispensables aux futurs planteurs; c'est à eux de faire germer les vocations coloniales; c'est à eux de former, dans les instituts spéciaux, des hommes capables de gérer, au large des colonies, les immenses estâtes que féconde le soleil des tropiques, source merveil- leuse de richesse et de puissance pour la mère-patrie.

(1) Cf. Onderricht voor planters Xederl.-Indisch Rubbertydschrlft, 2, 1er octobre 1919, p. 431.

571

GÉOGRAPHIE

Les~Grands Lacs de l'Afrique Centrale.

Le lac Tangànika.

Nous extrayons^'des r' Annales de la Société Géologique de Belgique (publications relatives au Congo belge) les renseignements curieux qui vont suivre sur cette question assez controversée : celle de l'origine des lacs du Graben central africain. Ils sont dus à la plume de M. P. Four- marier.

L'origine du Tangànika, si l'on veut expliquer les détails, est plus complexe qu'on ne pourrait le supposer au premier abord. Il est à noter que les deux rives du lac présentent, sur la plus grande partie de sa longueur, un parallélisme très remarquable jusque dans les inflexions principales des côtes. C'est ainsi qu'à l'origine de la Lukuga, la rive occidentale forme un angle presque droit; sur la rive opposée, on observe la même disposition. Au sud de M'Pala, la rive occidentale change légèrement, la rive orientale montre une inflexion analogue.au Sud de Kibwezi; plus loin encore, un peu au Sud du parallèle, les deux rives reprennent leur direction primitive.

Je rappellerai que dans la région de Tangànika, j'ai reconnu, outre l'existence d'un système de fracture de direction à peu près N.-S. uu N. N.-W. S. S.-E., la présence de failles et d'affaissements du sol de direction W. N.-W., E. S.-E. et S.-W. N.-E. N. Les dislocations du premier type sont cependant de loin les plus importantes : ce sont elles qui ont donné au lac Tangànika son orientation générale.

Quant aux deux autres, dont l'importance est secondaire, elles ont eu pour effet de rompre la régularité qui serait résultée de la seule influence de la direction principale de dislocation.

C'est ainsi que la déviation du lac au Sud d'Albertville peut s'expli- quer par une ondulation transversale de direction S.-W. N.-E., et nous trouvons des traces de ce mouvement dans la terminaison rapide vers le Sud du massif cristallin du Kianza et du massif qui borde le Tangànika au voisinage d'Albertville.

Le changement de direction au Sud du parallèle peut être à un mouvement de direction W, N.-W. E. S.-E.

On peut donc considérer le Tangànika comme représentant le fond d'une dépression due à l'effondrement d'une zone de l'écorce terrestre suivant trois directions, dont l'une est de beaucoup prépondérante sur les deux autres.

572 Les autres grands lacs de l'Afrique Centrale.

Cette manière de concevoir les choses ne s'applique pas seulement à la région même du Tanganika. Nous pouvons l'étendre à toute la zone des Grands Lacs de l'Afrique Centrale.

Qu'on examine la carte de ce pays, on constate que ces lacs ne sont pas distribués au hasard, mais que leur forme et leurs relations réci- proques répondent à une règle générale.

A part le Victoria Nyanza, qui est de forme presque rectangulaire, tous ces lacs sont beaucoup plus longs que larges; le Tanganika, le Nyassa, le Lac Rodolphe sont les plus caractéristiques à cet égard ; dans certains cas, plusieurs lacs se trouvent dans le prolongement l'un de l'autre. C'est ainsi que le Kivu semble continuer le Tanganika ; les Lacs Albert-Edouard, et Albert-Nyanza, sont disposés en ligne droite. Dans la vallée du Lualaba, les Lacs Kabels, Upemba, Kisale, Kabamba sont alignés dans une même dépression qui a été désignée par M. Cornet, sous le nom de « Graben de TUpemba ». Au N.-E. du lac Rodolphe, se trouve une série de petits lacs orientés suivant une même ligne. Il est à remarquer aussi que les lacs de l'Afrique Centrale sont disposés suivant trois directions principales : la première, parallèle à l'allongement du Tanganika, comprend le Nyassa, le Tanganika et le Kivu, le lac Rodolphe et quelques petits lacs, à l'Est du Victoria.

La direction S.-W. N.-E. correspond aux lacs du Lualaba, au Moero, aux Lacs Albert-Edouard et Albert-Nyanza, à plusieurs petits lacs au Sud-Est du Victoria et à l'alignement des lacs au N.-E. du lac Rodolphe.

La troisième direction, W. N.-W. E. E.-S.-E, est moins bien caracté- risée : je citerai néanmoins le lac Rikwa, situé à l'Est de l'extrémité Sud du Tanganika, qu'il semble rattacher au Nyassa.

Le lac Victoria, à première vue, paraît très différent des autres par sa forme; il est presque rectangulaire et ne présente pas d'allongement bien caractérisé; cependant son grand axe correspond en somme à la seconde direction indiquée ci-dessus.

Ces trois directions suivant lesquelles sont disposés les lacs de l'Afrique Centrale correspondent précisément aux trois directions de déformations que j'ai distinguées dans la région du Tanganika. Pour ce dernier, j'ai montré l'influence de chacune d'elles sur la forme du lac. On admettra facilement que cette explication puisse être étendue et s'appliquer à la distribution des autres lacs. Suivant que Tune ou l'autre des dislocations a pris la prépondérance, les lacs se sont orientés de l'une ou de l'autre manière.

Cette interprétation est, d'ailleurs, appuyée par des faits positifs. On a

573

reconnu que le Nyassa correspond à une zone de fracture, les lacs Albert- Edouard et Albert-Nyanza sont alignés suivant une zone affaissée; la présence de grandes failles a été reconnue sur les bords de la dépression occupée par le lac Rodolphe; les bords du Victoria montrent de nom- breuses fractures; les lacs jalonnant le Lualaba occupent un « fossé » comme l'a montré M. Cornet, hypothèse confirmée par des observations d'autres géologues.

Dans la région du Moero, il existerait aussi des cassures semblables d'après des observations faites récemment par M. l'ingénieur Marc Minette d'Oulhaye. Dans le centre de l'Afrique Orientale, on aurait reconnu l'existence d'un grand fossé tectonique; une dépression géogra- phique jalonnée de petits lacs en marque le passage.

1!es mouvements du sol.

On peut se demander à quelle époque il faut faire remonter ces mouve- ments du sol qui ont donné à la région ses caractères géographiques.

Il ne me paraît pas possible de répondre d'une manière précise à cette question, parce que les sédiments les plus récents dort l'âge soit déter- miné avec précision remontent à l'époque permotriasique (formation du Karoo). Je crois cependant que ces mouvements ont commencé à se faire sentir à une époque très ancienne et se sont continués jusqu'à nos jours; en d'autres termes, que le sol a été presque constamment en mou- vement,

J'ai montré que les dépôts postprimaires de la rive occidentale du Tanganifea présentent des changements de faciès paraissant en relation avec les dislocations principales. Celles-ci auraient donc fait sentir leurs effets déjà à l'époque de la formation des couches sédimentaires les plus récentes.

Les mouvements principaux sont évidemment postérieurs à ces dépôts qui ont été disloqués lors de la production des grandes failles. Mais il est vraisemblable que ces mouvements se sont accentués à une époque récente. C'est ce que je vais essayer de mettre en lumière.

En mains endroits, dans l'étendue du territoire que j'ai parcourue à l'ouest du Tanganika, j'ai observé la présence de cailloux et de blocs de roches cristallines sur des éminences séparées actuellement des massifs cristallins par de larges et profondes dépressions. Le phénomène est sur- tout bien développé, dans la région située à l'ouest de la chaîne côtière du Tanganika, dans l'angle formé par le massif cristallin, et la pointe des monts Malimba.

Sur les crêtes formées par le grès rouge horizontal, on trouve des

574

dépôts importants de fragments non roulés de quartz blanc et de roches anciennes ; ces crêtes sont séparées des massifs cristallins par des vallées très profondes et dans l'état géographique actuel, il serait absolument impossible de faire arriver en ces points, par le jeu naturel des choses, des débris tels que ceux que l'on y rencontre.

D'autre part, au pied des massifs cristallins, on trouve généralement des masses considérables d'éboulis formant une nappe épaisse au pied du versant, et cachant le contact avec les roches récentes.

Il est donc vraisemblable que les fragments que l'on trouve dans la situation décrite ci-dessus ont fait partie d'une ancienne nappe d'éboulis actuellement morcelée par le creusement de vallées postérieures à la formation de cette nappe.

Il faut en chercher la cause dans une modification du régime des cours d'eau. Si nous raccordons ces lambeaux d'éboulis isolés à ceux qui se rattachent encore à la montagne cristalline, nous constatons qu'il fut' un temps le relief du sol était moins accentué que maintenant, les vallées étaient moins profondes et probablement le réseau hydrogra- phique moins compliqué.

Par suite d'un d'un soulèvement du sol, la pente des cours d'eau est devenue plus forte, le creusement de leur lit s'est accentué, les méandres se sont encaissés (on en trouve des exemples tout à fait remarquables entre Mugila et Busindi Kasanga, au pied ouest de la chaîne qui borde le Tanganika), les ravins qui entamaient à peine les aboutis descendus sur le flanc des montagnes ont atteint et profondément entaillé la roche sous-jacente, démentelant le manteau qui la recouvrait.

Les oscillations du niveau du Tanganika.

Il me reste à dire quelques mots encore au sujet du Tanganika lui- même.

J'ai noté, en effet, certains faits qui semblent indiquer que le niveau des eaux de ce lac ne s'est pas seulement abaissé, par suite du creuse- ment du lit de son émissaire, mais a subi de véritables oscillations.

A Kankomba, à l'endroit la Lukuga prend naissance, il existe une grande plaine plate, couverte de sable rempli de coquilles identiques à celles du Tanganika. Actuellement, même aux périodes le niveau de la Lukuga est le plus haut, à la saison des pluies, cette plaine n'est plus recouverte par les eaux. Il faut en conclure que le niveau du lac s'est abaissé. On peut faire la même observation au nord de ce point dans la partie inférieure du bassin de la Lugumba. Une grande plaine sableuse, analogue à la précédente, s'avance très loin vers l'intérieur des terres et n'est plus immergée à aucune époque de l'année.

575

En de nombreux endrotis, tant sur la rive orientale que sur la rive occidentale, on trouve de semblables indices du retrait des eaux du lac.

En réalité, le phénomène est peut-être plus complexe encore. En effet, sur la côte ouest, entre Albertville et la Lukuga, et sur la côte orientale, au sud d'Udjidji, j'ai observé au bord du lac, du grès blanchâtre grossier, accompagné, au pied des falaises formées par les roches plus anciennes, de poudingue à gros cailloux provenant de la désagrégation de ces falaises, et dont le ciment est un grès grossier. Ce dépôt a une pente faible (10°) vers le lac; on y trouve parfois des coquilles analogues à celles du lac, ce qui prouve qu'il s'agit d'un dépôt récent du Tanganika. Ces roches durcies sont elles-mêmes recouvertes par les sables à coquilles dont j'ai parlé tout à l'heure et qui sont donc plus récents.

Actuellement, le Tanganika désagrège, par endroits, ces grès durcis qui, au Sud de la Lukuga notamment, forment des récifs à fleur d'eau r à peu de distance du rivage. La formation de ces divers sédiments paraît avoir nécessité des mouvements oscillatoires d'avancée et de recul des eaux. Or, pour un lac comme le Tanganika, de tels mouvements ne peuvent, à mon avis, s'expliquer que par des mouvements du sol venant interrompre, ou plutôt ralentir, la vidange progressive du lac, qui doit se faire par le creusement continu du lit de la Lukuga.

Si Ton se reporte aux falaises de grès rouge bordant la plaine à l'ori- gine de la Lukuga, on voit à une certaine hauteur un dépôt horizontal de poudingue formant un étroit palier sur la paroi presque verticale. Ce poudingue est identique à celui que l'on [obseive dans la plaine au pied même] de cette falaise, et l'on peut dire qu'il a la même origine. C'est une formation lacustre plus ancienne. Le lac Tanganika a donc atteint un niveau bien plus élevé que son niveau actuel.

La structure géographique de l'Afrique orientale peut donc s'expliquer par une série de mouvements qui ont commencé probablement à une époque très ancienne, et se sont accentués à diverses reprises, mais dont les effets les plus marqués pour la géographie physique sont de date assez récente.

11 n'est pas douteux que ces mouvements continuent à s'accentuer à l'époque actuelle. Les tremblements de terre qui se produisent dans cette vaste contrée, nous en donnent la preuve.

L'Afrique du Sud est une région qui a toujours été en mouvement et qui, à l'heure actuelle, n'a pas encore atteint un état d'équilibre relative- ment stable.

576

ETHNOLOGIE -

La métallurgie au Lac Léopold II et dans la Lukenie,

M. J. Maes donne, dans la Revue des questions scientifiques (avril 1(.>20) des détails intéressants concernant la métallurgie au Congo.

Lors d'un séjour dans la région du Bongo, Elundja, fils du chef Mosen- gere Ebandja, attira un jour mon attention sur un tas petits cailloux et de pierres concassées. « Ici, me dit-il, ont passé des gens qui possé- daient encore le Nkisi (fétiche) de l'extraction du fer de la terre. Ils ont traversé notre contrée quand j'étais encore dans l'oubli, et que ma mère ne m'attendait même pas. Mon père ma dit que personne ne pou- vait s'approcher d'eux. Ils chantaient jour et nuit. Ils construisaient des grands fours en terre à poterie. La nuit les hommes apercevaient jusque dans nos villages les flammes qui en sortaient et illuminaient tout l'hori- zon. Ils creusaient de grands trous en terre, en retiraient des pierres qu'ils transformaient ensuite en fer, après les avoir broyées à grands coups de marteau. Mon père le leur racheta pour en faire des couteaux, des lances et des flèches. Ces hommes ne sont pas restés dans notre pays. Avant de partir, ils détruisaient toutes les installations, brûlaient leurs huttes, dont ils dispersèrent les cendres ; mais les petits cailloux, les déchets des grandes pierres. qu'ils ont concassés à grands coups de marteau, sans jamais se fatiguer, nous rappellent l'endroit ils se sont arrêtés et ils ont fait agir leur Nkisi. Ces hommes venaient du pays de la grande rivière qui coule là-bas au loin, et ils sont descendus vers la région coule la Lufimi. Bien longtemps avant ma naissance, d'autres hommes, au même Nkisi, ont traversé notre pays, et eux aussi sont allés vers la Lufimi.

Maintenant ils ne passent plus, et nous achetons le fer aux Mundele (blanc de l'Europe). Eux aussi possèdent-ils ce Nkisil »

Ultérieurement j'eus l'occasion d'interrogerà ce sujet le père d'Elundja, vieux chef de la terre, et plusieurs notables très âgés. Tous confirmèrent le récit.

D'après leurs témoignages, eux et leurs ancêtres ignoraient le Nkisi de l'extraction du fer, mais les gens qui le possédaient avaient passé par le pays pour descendre vers la Lufimi.

Nous pourrions déduire de ce récit que l'extraction des minerais de fer et le secret de la fonte étaient en principe un Nkisi exclusivement connu d'une caste spéciale de la société anceslrale, et exploité par elle seule.

Dans cette civilisation toute primitive et maintenant éteinte, cette caste

577

doit avoir joui de grands avantages sociaux, car la connaissance du Nkisi de la réduction du minerai de fer et son exploitation lui assurèrent évi- demment une situation économique prédominante.

Cette caste comprenait vraisemblablement plusieurs classes. Celle des fondeurs et des forgerons occupait très probablement les places les plus importantes. Nous sommes portés à croire que ce fut de leur milieu que sortirent les grands chefs de la région, dont les potentats actuels sont lés descendants héréditaires. Ce qui semble confirmer cette hypothèse, c'est qu'à l'heure actuelle encore, tous les chefs indigènes, depuis les Mfumu de villages, si importants soient-ils, jusqu'aux grands chefs terriens, les Mfumu natse, sont des forgerons ou tout ou moins savent forger le fer et ont le droit de pratiquer cet art.

Malheureusement nous n'avons pas trouvé d'autres documents nous permettant de soulever davantage le voile qui cache l'organisation sociale et politique de ces groupements d'artisans du fer dans la civilisation ancestrale.

* * *

Les forges se rencontrent dans presque tous les villagss indigènes. Le plus souvent le maître, c'est-à-dire le fondateur du village, en est aussi ie forgeron. Nous avons observé ce fait à plusieurs reprises au cours de notre voyage. Dans la région du Mosengere notamment, nous avons visité différents centres nouvellement installés par un forgeron, sa famille et quelques unités qui s'étaient séparés du village ancien pour se grouper autour du nouveau chef et devenir les notables du village.

Les forges sont toujours installées au centre du village. A les voir, on se demande instinctivement si ce n'est pas autour de ces hangars que la population est venue se grouper, tout comme autour des clochers de nos villages se sont constituées les agglomérations primitives de nos cités d'Europe.

Contrairement aux abris des hauts fourneaux hermétiquement clos, les hangars des forges sont toujours ouverts à tous les vents. Il arrive parfois que les indigènes y installent des bancs. Le toit est supporté par douze à vingt gros pieux, solidement fixés en terre, sur trois lignes parallèles. Le toit est recouvert de chaume, de nse nse (feuilles de pal- mier) ou de tout autre matériel servant à la toiture des habitations. L'ou- tillage des forges augmente avec l'importance des villages. Il comprend, «n principe, une grosse pierre à aiguiser, d'un grain sableux très carac- téristique, un bac à eau, une pierre de nature ferrugineuse formant l'en- clume principale, un foyer creusé en terre, un soufflet, deux enclume

578

en fer forgé, trois marteaux, deux pinces, un panier à charbon de bois et un balai.

Le soufflet de forge est en bois, ou, plus rarement en terré glaise séchée et durcie au soleil. Ce dernier type est le plus intéressant et semble le plus primitif.

* *

Le forgeron a grand [soin de soû soufflet de forge. Il s'en sert le plus longtemps possible, et, plutôt que d'en 'construire un nouveau, il arrive fréquemment qu'il répare au mieux les avaries survenues, en y. appli- quant de la terre à poterie.

Généralement le maître forgeron refuse de vendre ou de céder son soufflet de forge. Plus d'une fois il nous est arrivé d'encourir un refus net lorsque nous voulions acquérir l'un ou l'autre spécimen. nous parvenions à conclure le marché, le maître forgeron n'acquiesça à notre demande qu'entraîné par l'appât du grand prix que nous lui en offrirons. Chaque soufflet de forge nous coûta au moins 25 francs. Or, tout Euro- péen qui a séjourné dans la région du Lac Léopold 11, comprendra ce que 5 pata représentent aux yeux des indigènes. Pour en faire saisir l'importance, disons seulement que le salaire d'une journée de portage est fixé à fr. 0.50. Calculé sur cette base, le plus petit soufflet de forge que nous ayons pu acquérir représente cinquante journées de ce dur travail. Le prix élevé des soufflets de forge résulte à la fois, à notre avis, de la grande difficulté de sa construction, de sa rareté et de sa significa- tion ou de son rôle social. Seul le maître forgeron peut posséder un souf- flet de forge. Lui seul a le droit de le fabriquer. Le nombre de compar- timents ou cuvettes et !a grandeur du soufflet doivent être en rapport avec l'importance du groupement auquel il servira. De ceci, il résulte que cet objet est à la fois un objet précieux et un indice de la dignité du forgeron. Il symbolise en quelque sorte encore l'importance du groupe- ment auquel il est attaché.

Le soufflet de forge doit toujours rester sous le hangar public est installée la forge. Jamais il ne peut être remisé dans une hutte indigène, . par même dans celle du maître forgeron. Le maître fondeur, au con- traire, a la possession de ses soufflets et les emporte avec lui quand le feu du haut-fourneau est éteint.

579

MEDECINE TROPICALE

Les laboratoires de l'École de Médecine tropicale

de Liverpool furent inaugurés le 24 juillet dernier par Lord Leverhulme.

Au cours de la cérémonie, le professeur J. W. W. Stephens fit part de la distinction accordée aux auteurs d'ouvrages scientifiques.

Nous avons eu le plaisir de lire que le docteur Guillaume Broden, directeur de l'École de Médecine tropicale à Bruxelles, est parmi ceux qui ont obtenu le « Mary Kingsley Medal » qui fut attribuée « pour ses nombreuses publications sur les maladies à trypanosome chez l'homme et chez les animaux domestiques.

Cette distinction fera plaisir à tous ceux qui connaissent la haute valeur scientifique du docteur Broden, qui dirige avec tant de compé- tence notre Ecole de Médecine tropicale.

La revue Congo lui présente ses cordiales félicitations.

Société belge de Médecine tropicale.

Nous apprenons la fondation à Bruxelles de la Société belge de Médecine tropicale. Nous nous plaisons à reproduire ici ['Exposé des Motifs que les fondateurs présentent au public.

Exposé des Motifs

La fondation de la Société belge de Médecine tropicale a été motivée par un double but : scientifique et moral.

Le but scientifique est nettement défini par l'article premier des statuts. Nous voulons, en effet, faire d'une façon suivie l'étude des principales affections qui frappent dans notre Colo- nie, les résidents européens et les indigènes.

Les observations, souvent un peu hâtives, de nos médecins absorbés par leur pratiqué, pourront être fréquemment conti- nuées et complétées par les membres de la Société.

D'un autre côté, nos sociétaires, mieux à même de se docu- menter rapidement, pourront en diverses occasions donner à nos praticiens de la Colonie, des indications très utiles, signa- ler des expérimentations à faire ou à compléter.

Ils pourront éventuellement procéder à l'examen de pièces anatomiques, parasites, virus, etc., qui leur seraient envoyés

580

par les médecins de la Colonie. Evidemment ces considéra- tions s'appliquent également aux médecins-vétérinaires, à tous les naturalistes, séjournant aux tropiques.

En un mot entre la Société belge de Médecine tropicale et les médecins, vétérinaires et naturalistes de la Colonie, doivent s'établir des relations suivies, un échange constant de notes, d'observations. La Société en Belgique et le corps médical au Congo, doivent dans un avenir rapproché, constituer deux éléments d'un organisme commun.

Sans doute pourra-t-on objecter que la plupart de nos mé- decins coloniaux n'ont pas les loisirs, ne sont pas outillés, pour faire des observations scientifiques.

C'est exact, et c'est surtout pour leur venir en aide que la- Société belge de Médecine tropicale a été fondée. Nous lui assignons, en effet,, le but moral, de seconder ceux de nos pra- ticiens qui ne poursuivent pas dans la Colonie une carrière scientifique, mais n'en ont pas moins l'occasion de faire des observations du plus haut intérêt.

Bien des faits observés dans la pratique journalière, des constatations faites au cours de voyages nécessités par l'assis- tance médicale aux indigènes, mériteraient d'être relatés. Le médecin les néglige, faute de trouver l'aide nécessaire à la publication, ou se borne à les consigner dans un rapport administratif.

Ces menus faits delà pratique journalière, ces observations statistiques ou d'intérêt local, ne trouvent guère leur place dans les revues coloniales de l'étranger. Celles-ci se réservent la plupart du temps à des publications de science pure et d'intérêt général.

Nous avons l'espoir de pouvoir combler cette lacune. Nous estimons qu'entre les divers médecins de la Colonie, entre les praticiens des diverses régions doivent s'établir des rapports constants.

Les Annales de la Société publieront dans ce but, les ob- servations, les rapports, les statistiques des diverses régions de la Colonie. Nos médecins seront ainsi renseignés sur les divers aspects de la pathologie congolaise, ils auront connais- sance de l'activité de leurs collègues.

Nous avons l'assurance que nous donnerons de cette façon à notre corps médical congolais, une cohésion, une assurance qui lui ont fait défaut jusqu'à présent.

581

Nous estimons que la médecine coloniale belge a été trop souvent ignorée jusqu'à présent : il faut qu'à l'avenir elle s'affirme, il faut qu'elle montre à l'étranger ce qui a été réa- lisé jusqu'à présent dans le domaine de la thérapeutique et de l'hygiène au Congo; il faut qu'elle s'efforce de faire mieux encore.

C'est pour prouver l'existence, la vitalité de la médecine coloniale belge que la Société a été fondée, que les Annales seront publiées. Nous faisons appel évidemment aux Collègues au service des organismes industriels et commerciaux comme à ceux de l'Etat. Dans la Colonie pas plus que dans la Mère- Patrie, nous ne pouvons oublier que l'Union fait la Force.

Nous croyons utile de signaler les règles qui ont présidé au choix des premiers membres titulaires fondateurs de la Société belge.

Ont été nommés d'emblée membres titulaires :

Les médecins ou naturalistes belges, membres de la Société de Pathologie exotique de Paris ;

Les médecins ou naturalistes belges, membres au titre colonial, de la Société belge de Biologie.

A la séance de rentrée du mois d'octobre, le Bureau présen- tera d'office, pour le titre de membre Correspondant, les mé- decins ou naturalistes, belges ou étrangers, résidant ou ayant résidé dans la Colonie, qui ont à leur actif une publication originale et scientifique.

Conformément à l'article 3 des statuts, ces candidats seront soumis à élection à la séance de décembre.

Pour l'année 1920, le Bureau a été constitué de la façon suivante :

Président : A. Broden, Directeur de l'École de mé-

decine tropicale,

Vice-Présidents : L. Gedoelst, Professeur à l'Ecole de

médecine vétérinaire, Tv. Mouchet, Médecin en Chef à l'IJuion minière du Haut-Katanga,

Secrétaire-Trésorier A. Dubois, Médecin à la Société Fores-

tière et Minière,

Secrétaire-Adjoint : P. Gérard, Professeur à l'Université de

Bruxelles.

582

Les autres membres fondateurs de la Société sont :

J. Bequaert, Assistant volontaire au Muséum d'Histoire

naturelle, Xew-York, Ch. Firket, Professeur à l'Université de Liège, O. Goebel, Docteur en médecine, Bruxelles, J Rodhain, Médecin en Chef au Congo belge, H. Schouteden, Conservateur au Musée du Congo, Tervueren,

E. Van Campenhout, Directeur au Ministère des Colonies,

Bruxelles,

F. Vandenb randen, Directeur du Laboratoire, Léopoldville

(Congo), R. Van Sacegheji, Directeur du Laboratoire vétérinaire de l'Est Africain, (Congo belge).

Association pour le Perfectionnement du Matériel Colonial

SECTION I. Moyens de transport intérieurs et étude des moteurs.

Bureau de la Section :

Président : M. Mahieu, directeur au Ministère des Colonies, direc- teur des Transports fluviaux au Congo, avenue Rogier, 51, Bruxelles. Vice-Présidents ; MM. Crets, ancien directeur des Usines Cockerill d'Hoboken, rue Jourdan, 94, Bruxelles;

Debacker, ingénieur-administrateur du chemin de fer du Congo, avenue Louis - Lepoutre, 45, Bruxelles ;

Mathot, ingénieur- conseil, rue du Marteau, 81, Bruxelles ;

Smal, ingénieur, directeur des Chantiers Cockerill d'Hoboken, à Hoboken. Secrétaires : MM. Habig, Jean, ingénieur, rue Herman, 41, Schaer- beek ;

Walterthum, rue Jennart, 18, Bruxelles.

Procès-verbal de la vingt-septième séance du samedi 29 mai 1920.

Navigation sur le Haut-Congo. Balisage du fleuve (suite) par M. Willemoes-d'Obry.

Nous avons déjà dit que les travaux hydrographiques ont, dans le Haut-Congo, un caractère différent de celui des tra- vaux exécutés en Europe ou dans les autres parties du monde civilisé.

En Europe, on peut établir et suivre un programme corn-

584

prenant toujours la division des travaux en plusieurs séries, dont la première est consacrée aux travaux géodésiques, la seconde à la topographie et la troisième aux sondages.

On a le choix des saisons, du personnel et du matériel ; on peut, en quelques heures pourvoir au remplacement du person- nel ainsi qu'à celui du matériel inutilisable.

La documentation spéciale observations limnimétriques et hydrom étriqués est faite pour une longue période d'an- nées. Des observations faites depuis 1850 ont servi de base aux travaux hydrauliques et hydrographiques exécutés au Paraguay en 1906. Les travaux ont pu être préparés sans perte de temps, et la rédaction de la carte hydrographique a été, dès le début, appuyée sur une documentation définitive.

Il en est tout autrement au Congo; les observations y sont rares et le personnel ne peut être remplacé rapidement; quant au matériel, même le plus nécessaire, il n'arrive qu'après de longs mois d'attente.

La nature elle-même semble s'opposer au levé de la carte du pays. A l'Ouest des Monts Cristal se rencontrent beaucoup de points élevés pouvant servir à l'installation des sommets d'une triangulation ; mais, malgré cet avantage, il faut parfois de longs travaux pour procéder à la mise en station des appareils.

Les plaines et les collines non boisées, vues de loin, sem- blent couvertes d'une herbe courte presque tondue, mais en s'en approchant, on s'aperçoit que cette nappe herbeuse unie est assez haute pour masquer complètement l'observateur et ses appareils.

Sur quelques fleuves sibériens, les topographes opèrent en hiver et s'installent sur la glace, comme nous nous installons au Congo sur les bancs de sable, non seulement parce qirils disposent d'un vaste horizon, mais à cause des moustiques qui rendent en été les travaux presque impossibles.

Sur le Haut-Fleuve nous choisissons les bancs de .sable comme emplacement des stations topographiques afin d'éviter le travail onéreux du débroussement de la rive et les petits bancs à peine émergés sont utilisés pour obtenir le plus grand nombre de repères.

Les myriades de moustiques des tundras sibériens sont inconnues au Congo, sauf dans les marais, mais ils ne s'y montrent que la nuit. A certains endroits, sur le Haut-Fleuve et dans le Kasaï, ces moustiques sont très gênants la nuit, et

585

dar s le bief navigable ils sont remplacés pendant le jour par la mouche tsé-tsé.

Les observations astronomiques, sur lesquelles sont basées les opérations géodésiques et topograpliiques, se font dans le Haut- Congo dans des conditions qui sont toutes différentes de celles d'Europe.

Il faut que l'observateur ait un tempérament très calme pour pouvoir écouter les battements du chronomètre pendant que les moustiques le harcèlent de toutes parts et, ce ne sont pas ses seuls ennemis.

Les fourmis attirées par la lumière envahissent parfois la tente de l'observateur; un scorpion ou un scolopendre passant sur la table et sur la main de l'observateur ou de son aide leur fait des piqûres semblables à des pointes de feu.

Les hippopotames, d'une incorrigible curiosité, sortent de l'eau pour suivre de près les opérations, faisant danser les étoiles dans le champ de la lunette sous le tremblement de leur marche silencieuse et lourde (Kasaï 1905, Bokala 1909).

Les léopards, moins audacieux, sont peut-être plus redouta- bles encore pour l'observateur isolé et immobile; nous avons interrompre plusieurs fois nos observations jyonv placer des armes chargées à côté de l'instrument; mais cela n'a pas empêché ces fauves de s'emparer d'un chien à une vingtaine de pas de l'observateur (Mushie 1907), d'une chèvre (Sandy beach 1911) et d'entrer dans une hutte pour chercher leur XDroie parmi nos noirs endormis (Kabeshi 1908).

Si les opérations astronomiques sont fréquemment interrom- pues pendant la nuit, celles du géodèse et du topographe ne le sont pas moins pendant le jour. Les crocodiles qui rôdent autour des îles et des bancs herbeux exposent l'observateur, qui souvent doit travailler dans l'eau jusqu'aux genoux, à un danger constant.

M. Rochet, capitaine du génie français, qui faisait, en 1908, un voyage d'exploration dans l'Afrique occidentale, fait remarquer qu'il est quelque peu énervant d'être attaqué par les insectes et les bêtes fauves pendant une observation stellaire. A vrai dire, ces interruptions continuelles enlèvent, au travail tout ce qu'il pourrait avoir d'agréable et nos opérations sonl infiniment plus pénibles que celles faites dans une région civilisée.

Nous vouons la plus vive reconnaissance à notre personnel.

586

qui, grâce au travail énergique qu'il a fourni pendant trois ans, nous a j)erinis de baliser les passes dangereuses du grand bief d'une longueur de 500 kilomètres et d'assurer ainsi la sécurité de la navigation.

Le programme pour les travaux hydrographiques à effectuer sur le Haut-Fleuve, élaboré en décembre 1910, comportait un levé topographique complet du fleuve et un levé hydrogra- phique de toute la route de navigation du grand bief et des principaux affluents.

Le service comprenait deux sections distinctes : la section topographique et la section de balisage.

Pour des raisons qui n'offrent aucun intérêt pour le déve- loppement de la présente étude, ce premier programme fut modifié de manière à ne comprendre que le balisage urgent du grand bief, notamment celui des passes dangereuses ou diffi- ciles. Ainsi les opérations topographiques furent réduites à la détermination des repères de sondages, et les travaux spéciaux furent provisoirement suspendus.

En 1913, les causes modifiant le premier j)rogramine ayant disparu, celui-ci put être repris méthodiquement.

L'examen des travaux comprend en conséquence deux par- ties :

Les travaux exécutés en 1911-1912;

Ceux exécutés de 1913 à 1915.

La première période de 1911-1912 comprend les levés hydrographiques et le balisage des passes de Koraée- Stanley - ville, d'Umangi-Lisala et de Léfin-Bolobo.

Le personnel, quoique nombreux, était à cette époque sans expérience, sauf une certaine pratique du sondage proprement dit.

Les ordres reçus nous ayant obligés, comme nous l'avons dit plus haut, à précipiter l'exécutiou de nos travaux, leur résultat fut pitoyable, tant au point de vue des sondages que du balisage et, chose qui peut paraître paradoxale, c'est précisément la liât e mise dans leur exécution qui provoqua un retard consi- dérable.

Nous n'entrerons pas dans les détails d'exécution des pre- miers travaux. Quelques plans suffiront pour montrer le carac- tère des erreurs commises, erreurs qui n'ont heureusement pas causées d'accidents graves.

587

La figure 2 nous montre le balisage fait en 1911 dans la passe Belgica (Ile Berlin). Ce balisage était appuyé d'une part sur un levé topograpbique inexact, attendu qu'un même point prenait des positions différentes pour des angles à des repères différents, et d'autre part, sur un levé hydrographique qui ne donnait pour la passe que les grandes lignes du relief sans indiquer toutes les aspérités rocheuses dangereuses pour la navigation.

Le but des sondages en profils espacés, qui était de rensei- gner le navigateur sur les dangers de la route, n'a pas été atteint et sur divers points, la carte établie montre la base d'un macaron, mais non le sommet. Quant au balisage, l'ancrage

La passe devanr Belgica ' d après /es sondées en 19/1 et 19/3 1:2000

'la rou/ï hnhièz dspres ks sondage! en 1911

paraît avoir été souvent trop faible, étant donné le courant, la forme des bouées et le passage fréquent des herbes flottantes. Plusieurs de ces balises se trouvent, en effet, au milieu de la passe navigable déjà très étroite. Sur septante-huit bouées, près de trente se sont déplacées ou ont été enlevées par les herbes. En août 1912, six mois après l'achèvement du balisage, la

588

route était impraticable à cause même des bouées. Une pre- mière rectification fut alors jugée indispensable, et nous y avons procédé en supprimant les doubles voies inutiles et en adoptant de longues lignes droites donnant, d'après la première carte, une route d'une profondeur minimum de trois mètres. Cette profondeur ne fut cependant qu'illusoire.

L'examen, qui se termina par des sondages au gabarit, réduisit la profondeur garantie à l'étiage de 3 mètres à lm.50.

La figure 3 nous montre une partie de la passe examinée

n 1913 n 191»

M.h^Bouéej noires er rouge. - ^ profondeur en mètres

d'après les deux levés de 191 1 et de 1913, et les profils don- nent une idée des pointes rocheuses trouvées à l'aide du gaba- rit au milieu de la route.

L'établissement de la carte et du balisage de la passe de Roinée à Stanley ville avait donc exigé non seulement les six mois des premiers travaux d'août 1911 à février 1913, mais encore, à deux reprises, plus de trois mois pour la vérification.

Quant aux deux passes, les rectifications n'ont pas demandé

- 589

tant de temps, mais la situation n'y était ims moins grave. De même qu'à l'île Bertin, le balisage ne concordait pas avec la carte hydrographique,

La première route balisée dans le chenal de Gundji ne sui- vait pas, d'après les indications de la carte, partout les grandes profondeurs ni les lignes droites. On voit, d'après la figure 3, que la carte indique nettement une ligne droite devant le repère ii° 9, tandis que la route balisée en 1912 y décrit une courbe.

Si l'on a préféré donner à la route une courbe assez difficile à suivre par les grandes unités qui descendent le courant à la vitesse de 300 à 350 mètres à la minute, cela est aux tour- billons qu'on a observés à la pointe 9, et qui ont été proba- blement pris pour l'effet produit par la fosse j)rofonde qui se trouve à cet endroit.

Or les tourbillons dus à de telles causes se montrent évidem- ment en aval de la fosse; de plus, ils n'ont que peu ou pas d'in- fluence sur la marche d'un grand navire. Ils sont dus à des pointes rocheuses en amont de la fosse indiquée par la carte, ainsi que le prouve le levé fait en 1913.

Le service avait rectifié le balisage en cet endroit en 1912 en adoptant la ligne droite devant le repère 9. Cette ligne passe précisément sur les macarons, dont trois au moins sont à une profondeur inférieure à 2 mètres à l'étiage, qui ne cor- respond même pas aux eaux basses.

En 1913, le niveau était à plus de trente centimètres en-des- sous de l'étiage de Lisala, et des bateaux ayant un tirant d'eau inférieur à lm.50 ont touché les roches devant la pointe 9.

Le service a resondé la passe, et le levé de 1913 montre un nombre de hauts fonds qui n'avaient pas été renseignés sur la carte de 1912.

Comme le banc sableux au milieu du chenal avait été fouillé par le courant, nous avons pu baliser une bonne route sans nous approcher des roches. Cette route existe encore, et elle pourra très probablement être stabilisée par l'obstruction définitive du chenal secondaire dont la sortie se trouve à la pointe 9, de telle sorte que les apports d'alluvions par ce chenal soient arrêtés.

Kous avons déjà exposé les règles à suivre pour les sondages d'une passe àfonds rocheux, et il est regrettable qu'elles n'aient pas été suivies.

Les sondages faits aux eaux hautes ou moyennes n'ont pas

590

permis de constater la présence des pointes rocheuses trouvées plus tard. Nous savons que dans l'hydrographie marine on trouve tous les jours des roches qui ne sont pas encore rensei- gnées sur la carte, et il est évident qu'en mer un examen minu- tieux des fonds à grande profondeur n'est possible que sur une étendue assez restreinte.

Mais dans un fleuve, le tirant d'eau est limité à 2 mètres environ et l'amplitude maréographiqueue limite pas les son- dages à une courte période de basses eaux_, un examen à gabarit peut se faire partout sur la route présumée.

Une comparaison entre les travaux exécutés pendant les deux périodes est difficile à établir.

Pendant la première, le personnel était nombreux, mais inex- périmenté et le matériel flottant était inférieur à celui utilisé pendant la seconde période.

L'outillage complet du service hydrographique ne fut mis en état qu'en 1914, et les travaux méthodiques auraient com- mencer aux eaux basses en juillet-septembre de cette année, si des circonstances imprévues n'avaient pas rendu impossible la réalisation de ce projet.

Les sondages ont été presque entièrement faits à bord de bateaux du type Délivrance, les travaux de repérage de topo- graphie et de sondage ont été exécutés simultanément de sorte que les différentes équipes se spécialisaient dans un seul genre de travail, ce qui, à un moment donné, a porté préjudice à la continuité des travaux d'ensemble.

Les opérations topographiques aux eaux hautes 'étaient fort difficiles à effectuer; il fallait procéder à des débroussements très considérables et on devait bien souvent se servir de souches, de troncs coupés ou de grosses branches d'arbres comme pieds d instruments.

Les travaux furent conduits avec une ardeur telle qu'elle aboutit à un épuisement complet du personnel ; pendant les mois de mai et de juin 1914, il était à peine suffisant pour constituer, de temps en temps, une équide de sondeurs.

Après la rectification du balisage à Romée-Stanleyville, la surveillance de cette passe fut confiée à un de nos agents les plus expérimentés de la Section de sondage; le poste de surveil- lance et de pilotage fut transféré de l'île Bertin à Romée.

Le pilotage n'est évidemment pas obligatoire, ni même néces- saire avec un balisage complet de la passe. Comme le service

591

n'a pu mettre la carte à la disposition du public, nous autori- sons, jusqu'à sa publication, le pilotage des vapeurs dans tous les cas le niveau est inférieur à 1 mètre à l'étiage.

La stabilité du nouveau balisage a été remarquable. En rem- plaçant partout l'orin en câble par la chaîne, nous avons pu éviter les pertes très considérables de matériel de balisage, principalement d'orins et de crapauds.

Pour avoir une idée générale des variations de la pente dans les parties du fleuve non encore sondées, la Section du balisage marqua à la rive aux eaux basses de 1914, 81 arbres sur les- quels le niveau est observé à chaque passage de section.

Cette mesure nous permettra d'adopter, à la reprise des travaux de sondages, un étiage local qui ne différera pas trop des eaux les plus basses.

Des échelles linnimétriques permanentes ont été construites aux postes et aux dépôts de bois les bateaux^ s'arrêtent, et aussi aux deux extrémités des passages les seuils sont dif- ficiles à franchir aux eaux basses.

Toutes les échelles linnimétriques placées dans les postes de l'Etat ont été rapportées à un pilier ou autre construction en maçonnerie sur terre ferme et non inondée aux eaux hautes. De cette manière, une vérification du zéro de l'échelle est facile et la réédification en cas de destruction accidentelle peut se faire sans retard ni tâtonnement.

Profitant de quelques heures d'escale aux postes de bois, nous avons construit, partout la chose a paru nécessaire, des piliers en maçonnerie cimentés, qui pourront servir de termes de base et de station géodésiques et topographiques aux levés du fleuve.

Sur différents points du grand bief, le service a déjà con- struit trente-sept piliers, ils comprennent presque tous les points d'appui nécessaires au levé complet de la route de navigation.

La section de balisage a Ùû s'occuper également des reprises de sondages dansles passes devant Kinshassa etàLéopoldville.

La première a été sondée en octobre 1914, en mars 1915 et fin juin 1915.

Ces sondages donnent une idée exacte de l'effet produit par l'obstruction du passage entre les deux îles rocheuses devant la « Citas ».

A Léopoldville, des sondages ont été effectués en septem-

592

bre 1914 et en juin 1915. On voit comment l'absence com- plète de la crue habituelle de mai-juin a permis au grand banc central de pousser une longue pointe devant la partie orien- tale du port de Léopoldville.

Le courant qui, aux eaux hautes, fouille le sable du grand banc, est aux eaux basses, rejeté par les roches de la balise et n'entre donc au port que par la passe longeant la rive de Galiéma.

Le service a baliser provisoirement la passe de Monon - geri avant d'en faire le levé topographique et hydrographique; ce balisage est indiqué sur des feuilles au 1 : 50.000 panto- graphiées d'après la carte de Grenfell et légèrement modifiées selon la disparition ou la création d'îles et de bancs émergeants.

Ces cartes sont d'une utilité particulière. Le moment nous paraît venu d'exposer quelques considérations sur les croquis et les cartes à mettre entre les mains des navigateurs.

Les premiers croquis du Haut-Fleuve furent établis, sur les ordres de Stanley, par le capitaine Schagerström ; ces levés, assez sommaires, furent, plus tard, complétés et rectifiés par d'autres capitaines de la marine, et notamment par MM. Hop- penrath, Berthelius, Ussing et S ön der gard.

Les parties du fleuve la navigation ne rencontrait aucune difficulté, furent quelque peu négligées en ce qui. a trait aux détails du levé (rives, nombre d'îles, configuration, distance approximative, etc.); on n'avait que des lignes générales de direction .

Les passes difficiles furent mieux étudiées, et elles montrent dans la configuration une ressemblance frappante avec la carte togographique actuelle.

Si l'on prend la partie d'Usangi-Lisala, on reconnaît toutes les îles principales et même les endroits la vase ou le sable les a soudées.

Le chenal de Gundji n'a pas été examiné du tout. Cette étude a été jugée inutile parce que les vapeurs passaient par Umangi.

De 1890 à 1910, la route se modifie très peu. Comme il n existe pour cette période aucune observation linnimétrique, nous ne pouvons préciser les différences; nous savons toute- fois, par un rapport de voyage d'une des grandes unités, que la passe était barrée en 1908, par des seuils de lm.50 de tirant d'eau, ce qui correspond à la situation actuelle.

593

On remarque que la passe change avec les bancs devant Lisala. Au fur et à mesure que ces bancs descendent vers l'île devant Upoto, les eaux creusent une route le long des îles au large, en enlevant toute une série de hauts fonds signalés par les croquis comme existants avant 1905.

La carte de navigation que présente ce croquis n'est pas mal faite et, cependant, c'est dans cette passe qu'aux eaux basses les bateaux touchaient les roches. Cela semble extraor- dinaire à première vue, mais la chose s'explique quand on sait qu'il n'y a pas eu d'autres sondages que ceux faits involontai- rement par les bateaux ; ils ont toujours été suivis d'avaries plus ou moins sérieuses.

Le croquis donne la direction des anciennes routes dans la partie en aval, vers l'île devant Umangi et c'est précisément que se trouve toute une série d'aspérités rocheuses, tantôt apparentes, tantôt couvertes d'une couche de sable.

Un grand nombre de hauts fonds a durs » n'étaient pas constitués par des roches, mais bien par des bancs d'huîtres, ce qui a jeté l'incertitude sur les causes des avaries.

Malgré l'exactitude de l'ancien croquis et le balisage des roches dont la présence avait été constatée par les accidents, les capitaines n'ont jamais été certains de passer sans avarie en cet endroit aux eaux basses et ce, parce qu'ils ne connais- saient pas le niveau à un demi mètre près.

Pour éviter d'avoir la coque du bateau éventrée par les pointes Flandre » 1909), il suffit d'une différence de niveau d'un ou quelques décimètres.

La carte de navigation doit permettre aux capitaines de reconnaître les parties du bief ils peuvent marcher à pleine vitesse, et les parties ils doivent ralentir la marche du bateau à cause de la présence de seuils ; mais c'est le capitaine lui-même, qui doit s'en rendre compte à l'aide des échelles d'étiage placées le long de la route.

Le capitaine ne doit plus dans ces passes, essayer de passer malgré tout, comme il faisait jadis; il doit savoir s'il le peut ou non.

Jusqu'ici les capitaines étaient plutôt des explorateurs que des navigateurs, et il leur faut un certain temps pour se rendre compte des facilités qu'offre un balisage méthodique.

Si pareil balisage est indispensable pour les passes rocheuses et même pour les passes sableuses difficiles, il ne

594

Test point pour les parties du bief, les profondeurs sont suffisantes et la route est indiquée par des lignes faciles à reconnaître et à suivre.

L'ancienne carte ne les donne pas avec l'exactitude voulue, il est donc urgent de fournir aux capitaines une nouvelle carte à une échelle connue, indiquant les chenaux, de telle sorte que les navigateurs puissent y renseigner la route suivie par eux aux eaux basses.

La carte de Grenfell à l'échelle de 250,000 ne répond plus aux besoins; un agrandissement au 1 : 50.000 serait suffisant.

Ce croquis établi au Service hydrographique et comprenant la route suivie actuellement par les bateaux, pourrait servir de carte de navigation dans toutes les parties sondées du bief, jusqu'à ce que la carte topographique soit définitivement établie ; les sondages viennent en dernier lieu.

La navigation n'exige pour le moment qu'un croquis un tant soit peu exact à l'aide duquel les capitaines puissent connaître la route suivie jusqu'à ce que le Service ait déterminé la route officielle qui, soumise à une surveillance constante, permettra de naviguer sans tâtonnements.

L'agrandissement de la carte Grenfell était au programme du Service depuis 1911, les conditions très difficiles, dans lesquelles nous avons été obligés de travailler, n'ont permis de réaliser ce projet qu'en 1913.

Comme balises flottantes, une cinquantaine de bouées ont été envoyées d'Europe.

Le nombre de bouées mouillées dans les fonds mobiles varie suivant le niveau et les migrations des fonds. Il ne faut évidemment pas, aux eaux hautes, laisser des bouées exposées à l'enlèvement par les herbes flottantes, alors qu'à cette époque elles ne sont pas nécessaires à la navigation, cependant celles couvrant les roches doivent être permanentes.

Au-delà de cent bouées ont été construites sur place à l'aide de fûts vides et d'une monture spéciale, légère, solide et facile à appliquer.

Elle se compose de trois montants plats en fer, de deux boulons et d'une plaque triangulaire servant à l'assemblage des montants. Les boulons, à doule écrou, sont de forme spéciale, celui du haut constitue la tige portant le tube à voyant et celui du bas forme l'anneau pour l'orin. La plaque triangulaire dont les coins sont relevés tient les montants en place à une distance angulaire constante.

595

Les éléments de la monture sont fabriqués en Europe ; ils pèsent moins de 6 kilogrammes, leur prix à Léopoldville ne .devrait donc pas dépasser 7 francs. On utilise les fûts ayant servi au transport du pétrole ou de l'huile, du modèle Ronet, légèrement bombés et d'une très grande résistance; ils ont une capacité de 100 et de 200 litres, mais on n'emploie que ceux de 200 litres pour le balisage régulier. Les petits fûts servent au balisage provisoire et à la construction de bouées de 300 litres (un grand et petit fût assemblés au moyen du même matériel que celui servant aux bouées ordinaires, et de deux éclisses de serrage). Ces doubles bouées sont mouillées là, ou le courant très fort exige une flottabilité qu'on ne peut obtenir avec les bouées faites d'un seul fût.

L'orin est la chaîne marine, de 10 à 12 millimètres, j)esant de 2 à 3 kilogrammes le mètre courant.

La manille d'assemblage est à goupille pour le crapaud, et à tige filetée pour la bouée.

Les crapauds en fonte de fer, envoyés pour le mouillage des premières bouées en 1911, ont été remplacés par des crapauds en pierre (grès très dur) confectionnés surplace. Les pierres brutes, d'un poids de 250 à 450 kilogrammes, sont extraites d'une carrière de Léopoldville ; elles sont percées et munies d'un solide anneau dont la tige est rivée du bas sur une plaque de tôle.

Le prix de revient de ces crapauds n'est que de 7 francs, pour un poids moyen de 300 kilogrammes, ce qui représente le tiers du prix de transport de ce poids de Matadi à Léopold- ville.

Pour les signaux à terre, on se sert de planches provenant de caisses d'emballage.

Pour les repères de sondages et de mouillages, les douves de barils à ciment sont utilisées. Tous ces repères sont blan- chis à la chaux produite au Congo (province orientale). L'éco- nomie réalisée par la construction de bouées à l'aide de fûts et de crapauds en pierre, est supérieure à 95 p. c. de la valeur du même matériel envoyé d'Europe ; mais c'est surtout le temps gagné qu'il faut envisager.

Si la demande est faite à une firme europénne, il faut comp- ter deux mois pour le transport, dont trois semaines pour le chemin de fer de Matadi à Léopoldville, à cause de l'encom- brement permanent des entrepôts à Matadi.

396

Quant aux planches indispensables à la démarcation des repères, elles seraient d'un prix exorbitant si elles devaient se faire au Congo, les installations assez primitives des scieries suffisant à peine à assurer le débit du bois nécessaire au ser- vice des bâtiments et des chantiers de la marine.

Au programme du Service hydrographique se trouvent, parmi les travaux indispensables au balisage du grand bief et à son entretien, l'élaboration d'une documentation scientifique, comprenant les observations hydrométriques, notamment du débit du fleuve et de ses affluents aux différents niveaux ; la pluviométrie, la psychometrie et quelques documentations sur l'évaporation dans les différentes régions du bassin du Congo.

Le service n'a pas encore fait ses observations. Il ne faut pas perdre de vue que si nous avons pu, grâce à un travail acharné, atteindre le but le plus urgent (balisage des passes dangereuses et difficiles), l'ensemble des travaux n'était pas, et ne pouvait logiquement pas être projeté pour une mise en œuvre avant que nous ne soyons en possession du matériel spécial, c'est-à-dire vers juillet-août 1914.

Le régime du Haut-Fleuve est peu connu ; il est très com- pliqué, par suite d'une multitude de causes secondaires se groupant autour des principes fondamentaux du régime d'un fleuve tropical et surtout équatorial.

Ce régime ne donne cependant pas lieu à des craintes con- cernant une navigation régulière, pas même pour les deux plus grands affluents : l'Ubangi et le Kasaï.

Si l'on a depuis des années rencontré des difficultés dans les transports fluviaux, cela est surtout au matériel flot- tant peu approprié aux conditions qu'imposent les biefs navigables.

Le principe économique des transports fluviaux a conduit partout à une plus large utilisation d'allèges pour les marchan- dises et le matériel de construction.

Au Congo, on a vu se suivre les stern wheel de 20, de 30 et de 150 tonnes, dont chaque unité exige le même nombre d'Européens pour l'équipage.

Le combustible pour ces transports n'est pas relatif au ton- nage utile ; le plus petit de ces vapeurs exigeant pour le chauf- fage un minimum de 20 stères de bois journellement, alors que le plus grand n'en consomme pas 80 stères.

Pour transporter les 20 tonnes à bord d'un vapeur du type

597

Délivrance, il faut que la machine tire un total de 75 tonnes. Les 500 tonnes, qui ne prennent en général que 420 à 450 tonnes au maximum de charge, pèsent en charge plus de 850 tonnes.

On a gagné beaucoup en augmentant le tonnage des unités, mais c'est encore insuffisant.

Il est évident que la machine emprisonnée dans le bateau ne donne pas le rendement qu'elle donnerait si elle se trouvait dans un remorqueur, celui-ci redevenant libre pour un autre travail au moment les allèges sont amarrées au quai.

Le développement de la navigation et des transports flu- viaux s'est arrêté avec la dimension considérée comme le maximum des unités utiles, ce qui constitue une double erreur.

Les expériences faites avec les allèges (barges) ont démontré la supériorité, au point de vue économie, de ce mode de transport de marchandises. Je crois même savoir, que l'auto- rité compétente a proposé un développement de ce genre de transport.

D'autre part, le tonnage de 500 tonnes ne constitue pas le maximum pour les unités pouvant naviguer toute l'année dans les conditions ordinaires sur le grand bief. On pourrait; si ce système présentait un avantage, aller jusqu'à 2,000 tonnes pour un vapeur en charge, ce qui n'est pas le cas.

Il faut des bateaux spéciaux pour le transport des passagers. Ces unités peuvent être plus ou moins confortablement amé- nagées, car il est indiscutable que le confort au cours d'un voyage en pays tropical ne réside pas exclusivement dans la vitesse, mais surtout dans le confort du logement à bord, c'est-à-dire dans l'espace dont disposent les passagers.

Nous savons qu'il existe ce qu'on appelle le « demi luxe />, à bord de certains steamers, le sens de cette expression nous échappe, mais elle indique vraisemblablement le luxe qui consiste à être seul dans sa cabine et c'est ce qu'il faut au Congo.

Le type de bateau pour le transport de passagers est, pour le grand bief, celui du 500 tonnes actuel, aménagé avec pont supérieur, double rangées de cabines, grandes et petites, et salle à manger fermée, de sorte que la nourriture ne soit pas, pendant un voyage de quinze jours saupoudrée d'éphémères, et les voyageurs puissent trouver un instant de repos sans

598 -

devoir se livrer constamment à l'énervante chasse aux mouches tsé-tsé et autres insectes.

Pour les voyages extra rapides, on pourrait utiliser des canots automobiles, mais il ne faut pas oublier qu'on ne peut alors emporter ni bagages, ni ravitaillement.

Xous n'examinerons j)as en détail la réorganisation des transports fluviaux ; mais nous ne voulons pas terminer cette étude sans attirer l'attention sur l'erreur très répandue, non seulement en Europe parmi ceux qui s'intéressent aux problèmes coloniaux sans connaître à fond les conditions locales, mais aussi dans la colonie quant aux moyeas économiques de transports.

Sur un réseau comme celui du bassin du Congo dont le régime n'est pas suffisamment connu, on ne peut songer à améliorer la route naturelle par une seule espèce de travail technique : le dérochement de certains seuils formant des barrages au passage.

Parmi les projets de l'amélioration du bief, on en voit un qui est vraiment séduisant par son apparente simplicité : la création de réservoirs aux lacs Tanganika et Moero, avec déversement de la réserve d'eau aux époques des eaux basses.

Le moment n'est pas venu de discuter, ni la réalisation, ni même la possibilité d'améliorer par ce procédé les conditions de la navigation.

Xotre conception d'une amélioration tient actuellement au matériel flottant, et aux travaux dans les postes, pour l'accostage et le transbordement.

11 est plus simple et plus naturel de déterminer le type d'embarquement à adopter d'après le fleuve, que de trans- former le fleuve d'après le type de quelques bateaux.

En terminant la lecture de la notice de M. Willemoes d'Obry le Président se fait l'interprète de la Section pour rendre hommage au travail consciencieux et intéressant fourni par cet officier. Seul il pouvait faire cette étude pour laquelle ses travaux sur le fleuve l'avaient sérieusement documenté et on doit lui être reconnaissant d'avoir mis le personnel de la marine du Congo à même de profiter de son expérience et d'avoir attiré son attention sur de nombreux points de grand intérêt. Bien qu'il date de 1915 ce travail n'en conserve pas moins un grand caractère d'utilité pour tous

599

ceux qui s'intéressent à la navigation fluviale de notre Colonie.

5. Le Président donne lecture d'une notice sûr l'emploi du bateau glisseur à hélice aériennne inventé par Mme veuve G. Villard qu'il résume comme suit :

En 1914, Mme G. Villard fit breveter la forme de la coque d'un bateau glisseur à hélice aérienne. Son mari, ingénieur belge, en fit construire le modèle réduit pour l'expérimenter. L'appareil propulsé par une hélice aérienne à l'arrière, obtint immédiatement une vitesse considérable, et cela, sans ricocher le moins du monde.

M. Villard en augura des résultats certains, et conclut que la vitesse calculée pour un type de 200 H. P. serait de 120 à 150 kilomètres à l'heure.

De divers côtés on s'occupe fort, en ce moment, de la propulsion aérienne et l'utilisation d'appareils du genre de celui qui nous est soumis serait d'un grand intérêt pour les colonies, tant pour le transport des marchandises et des passagers, que pour le service des postes. Cette embarcation pourrait passer partout grâce à son faible tirant d'eau, qui est presque nul.

En Europe, on pourrait l'affecter au service de la marine, comme garde-côtes, service des renseignements rapides, chasse, etc. Il peut servir pour le tourisme et le sport. Sa conduite, son maniement, son entretien sont faciles. On l'ac- tionne au moyen d'un volant, et il est aussi aisé à conduire en grande vitesse qu'à faible allure.

D'après l'inventeur, l'hydro- glisseur est inchavirable et n'occasionne ni vagues, ni remous, même dans les vitesses les plus grandes. Il offre donc une grande sécurité.

La séance est levée à 18 heures. La prochaine séance est fixée mercredi, 13 octobre, à 4 h. 1/2.

Le Secrétaire, Le Président,

J. Habig. A. Mahieu.

ROYAUME DE BELGIQUE,

MINISTERE DES COLONIES,

Renseignements de l'Office Colonial,

1920. 9e année.

Août,

TRANSPORTS.

CHEMIN DE FER DU MAYUMBE.

Les tarifs et règlements de transport des chemins de fer vicinaux du Mayumbe pnbliés aux Renseignements de l'Office Colonial de janvier 4 920 ont été modifiés comme suit par ordonnance du Gouverneur général du 16 juin 1920 :

Extraits du Règlement.

Stations ouvertes au trafic :

Borna gare .... Kilomètre 14, point d'arrêt

22

Luki

Makaya IN'Tete Temvo

Kilomètre 69 Lukula, gare .... Kiniati point d'arrêt. Lubau

Kangu

Kangu (mission) Urselia

Loango gare .... Seke, poinl d'arrêt . Lurru

Tshela, gare .... Forminière, bout du rail

0 kilomètre,

14

22

33

42

57

69

80

90

99

101

102 108 114 121 127 137 140

602

Calcul des taxes :

a) Les distances sont exprimées en kilomètres, toute fraction de kilomètre comptant pour un kilomètre entier.

Le minimum de distance à appliquer est de cinq kilomètres.

b) Les poids des bagages et des marchandises de toutes classes seront exprimés en kilogrammes et seront arrondis aux dix kilo- grammes supérieurs.

c) La taxe s'évalue en multipliant le prix unitaire du tarif par la distance et en arrondissant au décime supérieur. Ce résultat est mul- tiplié par le poids arrondi aux 10 kilogrammes supérieurs

d) Lorsqu'une expédition comporte des marchandises de classes différentes, les poids en seront indiqués séparément sur la lettre de chargement. Le calcul de la taxe se fera séparément pour chacune des classes.

Si la lettre de chargement n'indique pas la séparation des poids, la taxe sera établie d'après les marchandises appartenant à la classe la plus élevée.

Les marchandises encombrantes seront taxées avec augmentation de 50 p. c. de leur poids brut.

Sont considérées comme encombrantes toutes les marchandises ne pesant pas 500 kilogrammes au mètre cube. Les produits exportables ne sont pas considérés comme marchandises encombrantes.

Le minimum de la taxe est de fr. 1 .50.

è) Tout embarquement entre deux des stations ouvertes au trafic donnera lieu à perception de la taxe depuis la station précédente.

Tout débarquement entre deux de ces stations donnera lieu à per- ception jusqu'à la station suivante.

TARIFS DE TRANSPORT.

1. Voyageurs. Les voyageurs sont transportés aux tarifs suivants :

lre classe . . fr. 1.00 par kilomètre. ï« ... 0.50

5e ... 0.15

L'accès de la 5e classe est exclusivement réservé aux voyageurs de couleur.

Les enfants en dessous de cinq ans n'occupant pas une place spé- ciale voyagent gratuitement.

603

Des voyageurs munis de tickets de 2e classe pourront voyager en 4'° classe moyennant paiement d'un supplément égal à la différence «ntre les deux prix.

Bagages. Les voyageurs ont droit aux quantités de bagages sui- vantes :

1" classe . . . 100 kilogrammes ... 50 3e ... 20

les excédents de bagages seront taxés au tarif de fr.0.015 par kilo- mètre et par 10 kilos indivisibles.

L'administration n'est pas tenue au transport par train de voya- geurs à plus de :

500 kilogrammes de bagages par voyageur de lre classe 500 de 2e

iOO de 3e

Les quantités de bagages dépassant ces poids seront transportées par trains de marchandises aux clauses, conditions et tarifs de celles-ci.

Pourront être considérés comme bagages et transportés comme tels, les vélos, pousse-pousse, tricycles, voitures d'enfant, rickshaws, motocyclettes, side-cars démontés appartenant au voyageur et raccom- pagnant.

Ces objets seront taxés comme tels aux poids suivants:

Vélos, pousse-pousse, tricycles, voitures d'enfant, 20 kilog. minimum. Rickshaws, side cars démontés ..... 40

Motocyclettes 80

Ces poids ne seront pas compris dans la gratuité de bagages et seront, dans tous les cas, taxés comme excédents de bagages.

Les petits bagages de moins de 0.30 x 0.40 x 0.50 maximum et de moins de 20 kilogrammes contenant les provisions d'un jour pourront dans tous les cas, sauf réclamation des autres voyageurs, être trans- portés gratuitement dans les voitures.

Dépôt. Des colis de bagages pourront être acceptés en dépôt aux gares, soit avant le départ, soit après l'arrivée à destination, moyen- nant un droit de garde de fr. 0.50 par jour et par colis, sans que cette mise en dépôt puisse dépasser un mois.

604

IL Marchandises.

A. TARIFS GÉNÉRAUX.

Les tarifs généraux pour le transport des marchandises sont : Tarif I . . fr. 3.00 la tonne kilométrique.

Tarif II . .

. 1.50

Tarif UI . .

. 1.00

Tarif IV . .

. 0.50

Les marchandises sont tarifîées conformément à la classification géné- rale ci-jointe.

Les marchandises non dénommées à la classification générale ou sur la lettre de chargement sont rangées au tarif I.

Chaque expédition doit être présentée à l'acceptation accompagnée dune lettre de chargement.

La lettre de chargement doit être dressée et signée par l'expéditeur en deux exemplaires, si le destinataire est une personne dénommée, et en trois exemplaires, si le destinataire est quelconque, c'est-à-dire si la lettre de chargement est à ordre ou au porteur.

La lettre de chargement doit indiquer entre autres :

1. Le lieu et la date du chargement;

2. Le nom et le domicile de l'expéditeur;

3. Le nom et le domicile du transporteur;

4. Le moyen de transport;

5. La nature et le poids de la marchandise;

6. Le nombre, les marques ou les adresses des colis ;

7. Le prix de transport y compris les frais accessoires.

Elle devra renseigner que l'expéditeur déclare se soumettre aux conditions de transport prévues dans le présent règlement et elle com- portera les déclarations de non responsabilité qui seront exigées éventuellement.

Elle devra stipuler si l'expédition se fait franco, non franco ou en compte courant.

Le destinataire dispose de douze heures ouvrables pour l'enlèvement de la marchandise (6 heures du matin à 6 heures du soir).

Ces douze heures ouvrables seront comptées à partir de la remise de l'avis d'arrivée au destinataire ou à la poste.

Passé ce délai, les marchandises seront mises en magasin et les frais de magasinage seront comptés comme indiqué ci-après.

605

Manipulations. L'administration du chemin de fer se charge de la manipulation des colis transportés par son matériel.

La manipulation comprend le chargement et le déchargement.

On entend par chargement le transport des colis depuis la bascule jusqu'au wagon et la mise en wagon.

On entend par déchargement la sortie du wagon et le transport au magasin du chemin de fer ou jusqu'à un endroit facilement acces- sible au destinataire, en gare.

Les frais de manipulation sont de :

5 francs la tonne pour les colis de moins de 200 kilogrammes ;

10 francs la tonne pour les colis d'un poids égal ou supérieur à 200 kilogrammes et inférieur à 500 kilogrammes;

15 francs la tonne pour les colis d'un poids égal ou supérieur à 500 kilogrammes et inférieur à 5,000 kilogrammes.

Ces frais se calculent sur le poids brut arrondi aux 10 kilogrammes supérieurs.

Les colis de 5,000 kilogrammes el plus ne sont acceptés au transport que moyennant arrangements spéciaux à conclure dans chaque cas avec la Direction du chemin de fer.

Charges complètes. Tout expéditeur qui désire l'usage d'un wagon pour lui seul devra en faire la demande à la Direction du chemin de fer à Lukula au moins six jours et au plus quinze jours à l'avance.

La Direction se réserve le droit de ne donner suite à ces demandes que selon les disponibilités en matériel et au prorata des demandes reçues.

Lorsqu'un wagon sera mis à la disposition d'un expéditeur, celui ci en sera prévenu au moins douze heures ouvrables à l'avance (les heures ouvrables sont comptées de 6 heures du malin à 6 heures du soir).

L'expéditeur disposera de douze heures ouvrables pour le charge- ment du wagon rendu sur les lieux.

Le destinataire dispose du même laps de temps à partir de la remise de l'avis d'arrivée à lui-même ou à la poste.

La manipulation des colis incombe à l'expéditeur et au destinataire si les wagons sont bâchés et plombés par l'expéditeur.

Magasinage. Lorsque les marchandises restent en souffrance à la gare d'arrivée, soit parce que le destinataire est inconnu ou absent, soit parce qu'il n'a pas procédé au déchargement endéans les délais réglementaires, elles seront mises en magasin.

Lorsque des marchandises seront retenues au départ par le fait de l'expéditeur, elles seront emmagasinées également.

606

Le magasinage donnera lieu à la perception d'un droit de garde de 1 franc par tonne et par douze heures ouvrables avec minimum de perception de fr. t. 50.

Les marchandises seront sorties du magasin par les soins de l'admi- nistration du chemin de fer qui percevra de ce fait une taxe égale à 50 p. c. de celle prévue pour la manipulation des marchandises.

Ces taxes sont appliquées sur le poids brut des marchandises arrondi aux 10 kilogrammes supérieurs.

Pendant le séjour dans les magasins, l'administration du chemin de fer n'assume comme responsabilité que celle qui incombe aux déposi- taires et enlrepositaiies publics ou privés, de par les dispositions légales.

Dans les stations et arrêts autres que Borna, Lukula, Tshela, Loango, le magasinage n'existe pas et les marchandises seront débar- quées aux risques et périls du destinataire.

B. TARIFS SPÉCIAUX.

1 . Transports à la valeur.

Ce tarif s'applique aux expéditions de finances, papiers-valeurs, métaux, documents, objets précieux, orfèvrerie, bijouterie, pierres précieuses, horlogerie fine, dentelles, statues, tableaux, objets d'art en général .

Ces objets sont transportés aux taxes suivantes :

a) Statues, tableaux, objets d'art :

Fr. 0.10 par cent francs de valeur déclarée et par kilomètre.

b) Objets d'or, de p'atine ou d'argent, bijouterie et horlogerie fine, orfèvrerie, plumes et documents précieux déclarés à (a vafeur, pierres précieuses, dentelles :

Fr 0 10 par mille francs de valeur déclarée et par kilomètre.

c) Billets de banque nationaux ou étrangers, chèques, actions, obli- gations ou autres papiers-valeurs, or et argent monnayés :

Fr. 0.05 par mille francs de valeur déclarée et par kilomètre.

d) Or, platine, argent ou autres métaux précieux en poudre, pépites ou lingots :

Fr. 0.05 par mille francs de valeur déclarée et par kilomètre.

Pour être admis au transport : 1 . Les statues, tableaux, objets d'art en général doivent être renfermés dans des caisses bien conditionnées et suffisamment solides et y être assujetties de manière à éviter tout ballottement.

607

Chaque expédition devra être accompagnée d'une lettre de charge- ment (du modèle utilisé pour les marchandises) mentionnant, indé- pendamment des indications ordinaires, la valeur de l'expédition.

La déclaration de valeur devra être mentionnée sur les colis.

2. Les valeurs des groupes b, c, d doivent être enfermées dans des sacs, sacoches, caisses, boîtes ou barils. Le transport à découvert est interdit de manière absolue.

Les sacs et sacoches seront entièrement cousus en dedans et parfaite- ment conditionnes, c'est-à-dire ni déchirés, ni racommodés. L'issue en sera fermée au moyen d'une corde ou ficelle intacte (sans épissure ni allonge) dont le nœud sera recouvert d'un cachet à la cire et dont les bouts seront maintenus sur une fiche flottante par un cachet sem- blable.

A défaut de cachet, les bouts de la corde ou ficelle pourront être près du nœud, introduits dans un plomb scellé.

Les boites, caisses ou barils seront cloués ou cerclés avec solidité et ne devront présenter aucune trace d'issues refermées ou de fracture.

Les caisses et boîtes seront fortement liées au moyen d'une corde d'un seul morceau placée en croix avec cachets à la cire ou plombs en nombre nécessaire pour assurer l'inviolabilité des colis.

Une ficelle appliquée en croix aux deux extrémités de chaque baril y sera maintenue au moyen de cachets à la cire ou de plombs.

Les billets de banque, titres de rente, actions, obligations, chèques, etc., devront être présentés dans des sacs, boîtes ou caisses, ou for- mer des paquets revêtus d'enveloppes intactes en papier ciré ou gou- dronné ou en toile cirée.

Toutefois les valeurs présentées sous enveloppes en papier pourront être acceptées si, sous le rapport de la solidité et du conditionnement, ces enveloppes ne laissent rien à désirer.

Tout paquet devra être clos au moyen de cachets à la cire en nombre suffisant pour en assurer l'inviolabilité (trois au moins).

2. Animaux vivants.

Les chiens et singes sont transportés au tarif de fr. 0, 10 par animal et par kilomètre.

Ils doivent voyager dans le fourgon des bagages et être enfermés dans une cage ou un panier.

Ils ne seront tolérés dans les voitures de voyageurs que s'il n'y a pas de réclamation de la part d'un autre voyageur.

608

Petit bétail : chèvres, moutons, porcs.

Fr. 0,10 par animal et par kilomètre en. wagons à haussettes ou en wagons-cages.

Gros bétail : taureaux, vaches, bœufs, veaux, chevaux, ânes, mules.

1 franc par wagon-kilomètre de 5 tonnes;

2 francs de 10

plus une taxe de désinfection de 10 francs par wagon.

Félins et animaux sauvages. 2 francs par wagon-kilomètre de 5 tonnes ; 4 de 10

plus une taxe de désinfection de 10 francs par wagon.

Animaux de basse-cours : poules, canards, oies, dindons, lapins, etc, et petits oiseaux en cage.

Se taxent au poids brut augmenté de 50 p. c. au tarif III (1 franc la tonne kilomètre). Ils doivent être transportés en cage ou panier.

Tes expéditions de petit bétail, de gros bétail et de félins devront toujours être accompagnées d'au moins un gardien par wagon.

Ce gardien devra être muni d'un ticket de la classe dans laquelle il voyage.

609 -

Annexe aux tarifs et règlement général des transports Classification générale des marchandises.

Note 1. Tout ce qui n'est pas dénommé à la présente classifica- tion ou sur la lettre de chargement, se transporte aux taux du tarif 1.

Note 2. La mention « cubage » en regard d'une marchandise indique que l'agent du chemin de fer doit s'assurer à l'acceptation si les alinéas 5 et 4 du paragraphe d sous la rubrique « Calcul des taxes » {marchandises encombrantes) ne sont pas applicables.

NOMENCLATURE.

NOMENCLATURE.

H

Animaux vivants (tarif spécial) .

Anes (idem) .

Appareils à gaz 1

photographiques . . 1

Arachides 3

Arbres et arbustes vivants . . 4 Ardoises pour toitures naturelles

ou artificielles 4

Argent (tarif spécial) . . .

Argile .•-.,. .... 4

Armes . . 1

Arsenic 1

Articles argentés 1

coton ou toile ... 1

droguerie-pharmacie . 1

de modes 1

de Paris et fantaisie . 1 Artifices (explosifs) .... 1

Asphalte 4

Automobiles démontées en caisse 1

non démontées (con- ditions spéciales). Avoine ... ..... 4

Axes de voitures, de charrettes 4

Acajou en grume . . . 4

Albâtre 4

Alfa (cubage) 3

Amadou (idem) 1

Acétates quelconques .... 1 Acides quelconques .... 1 Aciers en lingots, barres, pro- filés, tôles, façonnés, etc. . . 4

Aciers autres 4

Aéromoteurs 4

Agrès 4

Agneaux (tarif spécial) ...

Agricoles (machines et matériel). 4

(produits non dénom-

més) 2

(semences et graines). 4 Aiguilles ... .... 1

Alcali volatil 1

Alcool à brûler 1

Alcools de consommation . . 1

Alimentaires (pâtes, denrées) . 2

Allumettes 1

Aloès 1

(usage vétérinaire) ... 4

Alun 1

Amidon 1

Amandes de palme (coconottes). 3

alimentaires. ... 2

autres 2

Ammoniaque 1

Amorces 1

Ananas 4

610

NOMENCLATURE

NOMENCLATURE.

Aiichois . 2

Ancres de marine 4

Appareils à acétylène .... 1

Amiante 4

Bâches 3

Bagages (tarif spécial; . ...

Baignoires (cubage) 1

Balais (idem) . ... 2

Balances t

Ballast ......... 4

Balustres en fer ... .4

Bambous cubage) . . .4

Bananes 4

Bandages de roues 4

Baraques et maisons démonta- bles 4

Barattes . .... .4

Barils vides non démontés, conte- nance de 1 00 litres (cubage) . . 3 Barils vides non démontés, conte- nance plus de 100 litres (ne sont acceptés que par charges com- plètes) . 4

Barils vides démontés .... 3

Baromètres 1

Barres en fer, acier, cuivre, laiton

à mine . . 4

Bascules i

Bateaux démontés 4

Batteuses ........ 4

Bêches et manches (pour) . . 2

Benzine .1

Bétail, bestiaux (tarif spécial) .

Béton comprimé 4

Betteraves 4

Beurre frais ou conservé ... 2

Bicarbonate de soude .... 1 Bicyclettes démontées et embal- lées en caisses à claire voie

(cubage) i

Bicyclettes montées et embal- lées en caisses à claire voie

(cub.-ige) 1

Bicyclettes montées et non em- ballées (seulement au tarif spé- cial des bagages ; cubage) . Bidons vides . . .... 3

Bières en caisses, paniers ou fûts. 2 Bijouterie, joaillerie (tarif spé

cial valeur i

Billards î

Billes en bois 4

Bibeloterie. l

Biscuits 2

Bitter I

Bitume 4

Blanc d'Espagne 2

Blanc de zinc i

Blé ... . ... 3

Blocs de fonte pour freins. . . 4 Bœufs tarif spécial) ....

Bois de balais et de brosses . . 2

de charronage . . . . 4

de chauffage 4

de construction . . . .4

courbés 1

en grume 4

de fusil 1

de menuiserie 4

de mines ... . 4

de teinture 2

Boissellerie ... .... 1

Boissons non dénommées titrant .

moins de lo° 2:

Boissons non dénommées titrant

plus de 15° \

Boîtes à huile en fer, fonte, acier

ou cuivre ". 4

Boîtes et malles vides (cubage) . 3

Bondes 2

Bonneterie 1

Borax 1

Bouchons de liège (cubage) . . 1

Bougies .4

Boulons et écrous en fer, acier,

laiton, bronze .4

Bouteilles vides emballées (cu- bage 3-

611

NOMENCLATURE.

NOMENCLATURE

Brài 4

Briques à bâtir ordinaires . . 4

Briques en ciment 4

Bourellerie 1

Bourres (cubage). ... .3

Beurres de coco et de palmiers

(cubage) .... 3

Briques émaillées et d'ornement. 4

en plâtre et réfractaires. 4

Bronze brut 4

Brosses, brosserie (cubage! . . 2

Brouettes i cubage 4

Buttoirs de wagons .... 4

Broderies 1

Bronzes d'ameublement ... 1

Benzol . ...... 1

Buses métalliques ... .4

Caisses et chassis de charrettes

et de voitures (cubage). . . 4 Câbles en fer, acier, cuivre,

chanvre, aloès. . ..4

Cacao 2

Cadres de portes et de fenêtres

(cubage 4

Cadres de tableaux 1

vides pour emballages

(cubage) 3

Café 2

Caisses et chassis de wagons . 4

Caisses vides en retour (cubage). 3

Calebasses vides (cubage). . . 4

Calicots 1

Cailloux pour construction . . 4

Camions (voir charrettes) . .

Camphre !

Canons de fusil 1

Canne à sucre 4

Cannelle 2

Caoutchouc brut ..... 1

Caoutchouc (objets en» . . . 1

(déchets de) ... 2

Capsules (explosifs) I

Canots munis ou non de leurs apparaux (seulement par char- ges complètes) 4

Caractères d'imprimerie . . 1

Câpres 2

Carbonates divers . . - . 1

Carboniléum 1

Carbone pour lampes électriques 1

Carottes . 2

Carrosserie 4

Carreaux de pavement en ci- ment, en grès, de revêtement,

émaillés, etc. ...... 4

Cartes . 1

Carton bitumé 4

Carton . 1

Cartonnages (cubage) . . . 1

Cartouches de sûreté .... 1

Casques (cubage:. . 1

Casquettes 1

Cassonnade 2

Cédrats 2

Céleris 2

Cercles en fer 4

en bois ....>.. 4

Cendres et scories ..... 4

Cercueils vides (cubage) 1 Cercueils avec corps ( conditions spéciales à régler dans chaque

cas)

Céréales en conserve .... 2

indigènes .... 4 Cerises .......... 2

Céruse 1

Chaînes en fer ou en acier. . 4

Chaises (cubage). ..... 1

Champignons 2

Chandelles i

Chapeaux i cubage) 1

Charbon de bois 4

de terre . .... 4

Charcuterie 2

Charnières et gonds l

Charpentes en bois, fer ou acier 4

Charpentier (outils de). . . 2 Charrettes, chariots, camions

démontés I

612

NOMENCLATURE.

NOMENCLATURE.

Charrues iet pièces dei . ... 4 Chassis en fer ou en acier (cu- bage) . . 4

Chassis de locomotives et de

tender (cubage) . . 4

Chassis de voitures de chemin de

fer ou de wagons (cubage) . . 4

Chaudières diverses ... 4

Chaudronnerie 4

Chaussures et lacets .... 1

Chaux 4

Chevaux, chèvres (tarif spécial.

Cheddite (explosifs) ... . . 1

Chèvres, crics, vérins, treuils . 4

Chevrons 4

Chicorée 2

Chiffons 1

Chimistes (articles pour) ... 1

Chlorates et chlorures ... 2

Chocolat 2

Choucroute 2

Choux conservés 2

Cidre 2

Cigares, cigarettes . . . 1

Ciment 4

Cirages . . « .... 1

Cire importée 1

à cacheter 1

de provenance indigène . 2 Ciseaux divers . .... 2

Citrons verts 4

Clavettes en fer, en acier . 4

Clefs et serrures 1

Cloches en bronze 1

Clôtures en bois ou en métal . 4

Clous et vis quelconques. . . 4

Coaltar 3

Coco (noix de) 4

Coffres-forts 1

Coffres divers 2

Cognac l

Cognées 2

Coins et matrices en fer ou en

acier 4 I

Cokes 41

Colles I

Colonnes en fer, fonte ou acier 4

Cols et manchettes 1

Colza (huile de) 2

Comestibles .... . . 2

Compteurs à gaz ou autres. . 1

Confections 1

Confiseries 2

Confitures 2

Conserves 2

Copal - . 2

Coprah 3

Cordages, cordes .... 3 Cordon détonnant (mèche de

mine, explosifs) ... .1

Corinthe i raisins de) .... 2

Corne ouvrée ou non . 1

Cornières en fer ou en acier . 4

Cornues industrielles .... 4

Coton brut indigène .... 2

(étoffes de) . .1

(semences de; .... 4 Couleurs pour peintures ... 2 Coupoles en fer, en acier . . 4 Courroies de transmission . . 1 Coussinets . .... 4

Coutellerie 1

Coutils 1

Couvertures 1

Craie 4

Crampons .1

de chemin de fer . . 4

Crayons 1

Créosote .3

Creusets 1

Crics, chèvres, vérins, treuils . 4 Crin animal ou végétal . . . 1 Cristaux et verreries , . . . 1 Croisements de voie .... 4 Cruches et cruchons vides (cu- bage) 3

Cuillers. . . 1

Cuir travaillé ou non .... 1

Cuivre brut 4

613

NOMENCLATURE

NOMENCLATURE.

Cuves (cubage) .... .3 Cuves de grandes dimensions (seulement par charges com- plètes) . . . 4 Cycles (voir bicyclettes) . . Cylindres (pièces de machines) . 4

Dames jeannes vides (cubage) . 3

Dattes 2

Déchets de coton 2

Déchets pour engrais (seulement

par charge complète) . . 4

Denrées coloniales . . 2

alimentaires .... 2

Dentelles (tarif spécial, valeurs), i

Désincrustants 1

Désinfectants . 3

Détonateurs (explosifs) ... 1

Dextriue 1

Drap, draperies 1

Droguerie (produits de) ... 1

Dynamites diverses (explosifs) . 1

Dynamos 1

Douves empaquetées .... 3

Eau de- Cologne .... 1

de Javel 1

de vie .... ... 1

- minérale . 2

gazeuse 2

Écailles. 1

Échalottes 2

Échantillons ...... 1

Échelle 2

Éclisses 4

Écorces, sauf celles de caout- chouc et de pharmacie ... 4

Écrous enfer, acier, cuivre, etc. 4

Effets 1

Émail 2

Emballages vides en retour (cu- bage) . 3

Idem seulement par charge com- plète) 4

Émeri 1

Enclumes . 4

Encres à écrire et à imprimer . 1 Engrais (seulement par charge

complète) . . .... 4

Enveloppes 'papeteries) ... 1

Épiceries i

Épingles . 1

Éponges (cubage) ..... 1

Esprit de sel 1

Essence de parfums 1

Essences d'autos, detérébenthine

et autres 1

Essieux et trains de roues. . . 4

Étain (minerai d') 4

non travaillé 4

(objets en) 1

Établis de menuisier . . . 4

Étaux 4

Éternit (fibro ciment) .... 4

Étoffes de coton, laine, soie . . 1

Étoupe (cubage) 4

Excentriques 4

Explosifs non dénommés (explo- sifs) 1

Extrait de viande 2

Fagots 4

Faïence .... .... 1

Farine indigène 4

- importée 2

Farineux alimentaires pour indi- gènes . . 4

Idem pour blancs 2

Faulx et faucilles ..... 2

Fauteuils (cubage) 1

Fécules 2

Fenêtres et portes 4

Fers, aciers, fontes 4

Ferblanterie (cubage) .... I

Ferraille 4

Ferronnerie 4

Feuilles de zinc, plomb, cuivre.

laiton 4

614

NOMENCLATURE.

NOMENCLATURE.

Feutre asphalté, goudronné pour

toitures 4

Feutres (tapis de) ..... 1 Feux d'artifice (explosifs). . . 1 Fèves et féverolles importées . 2 indigènes. 4 Fibres de raphia ou autres (cu- bage) 3

Fibre ciment . . .... 4

Ficelle 1

Filasse (cubage) 1

Figues 2

Fil de chanvre, de coton, de soie,

de lin. etc 1

Fil de fer, acier, cuivre, laiton,

plomb, etc 4

Fil de jute, à voile 1

Filtres .... 1

Flanelle . 1

Fleur de soufre 3

Foin (cubage) 4

Fonte brute, moulée, etc. . . 4

Foreuses 4

Forges portatives 4

Fourches et râteaux .... 2

Fourchettes 1

Fourneaux et grilles industriels. 4

de cuisine .... 1

Fournitures de bureaux . . 1

Fourrages cubage,) 4

Fourrures .......... 4

Foyers de locomotives .... 4

Fromage ..... . . 2

Froment indigène 3

importé 2

Fruits indigènes 4

séchés ou conservés . . 2 Fumiers (seulement par charges

complètes) . . . .4

Fûts vides démontés (voir barils .

Gants 1

Gaz en bonbonnes 1

éuérateurs de vapeur ... 4

Genièvre baies de genièvres . . 2 Genièvre en récipients quel- conques ... . . . 1

Gentiane (liqueur de . 1

Gibier frais 2

conservé . . . . . .2

Gin 1

Gingembre . .... 2

Girofle 2

Glace (eau congelée) .... 2

Glace avec ou sans tain ... 1

Glacière . 1

Glycérine ..-..,..]

Gobeleterie . 1

Gommes copal . . . . > .3

Gommes autres, sauf caoutchouc. 1

Gonds 1

Goudron 3

Gourdes .... . . 1

Gouttières 1

Graines pour semences ... 4

Graines comestibles .... 2

Granit pur ou travaillé ... 4

Gravier. . .4

Grès brut et travaillé ... 4

Grilles et fourneaux industriels. 4 Groseilles (sirop et confitures

de), 2

Gruau d'avoine 2

Grues d'élévation 4

Guano (seulement par charges

complètes) . 4

Haches, hachettes 2

Harengs saurs et salés. . . 2

Haricots indigènes . . . . 4

importés, conservés . 2

Harmonium 1

Harnais et sellerie ..." .1

Herboristerie . . . . 1

Horlogerie. ... 1

fine (tarif spécial, va- leurs) .

Houblon . 2

615

NOMENCLATURE.

NOMENCLATURE.

Houes

Houille. . ...

Huiles alimeutaires. Huiles d'éclairage . Huiles lubréfiantes ou pour

peinture

Huile de palme . .

Imperméables

Imprimés

Imprimerie (matériel)

Indienne

instruments aratoires .

Instruments autres.

Isolateurs pour téléphones

Ivoire

Indigo

Iris en poudre ou en racine

la

Jarres de fabrication indigène

vides (cubage) . ... 3

Jambons 2

Jantes de roues en bois ou en fer 4 Jarres et bouteilles vides (cu- bage) 3

Joaillerie fine (tarif spécial va- leurs). .... . .

Jouets 1

Jougs pour bestiaux .... 4

Jus de citron .2

Jute brut (cubage) 3

Kaolin . 4

Kirsch (liqueur) 1

Kola (noix de) 2

Lainages 1

Lacets 1

Laines brutes ou ouvragées . 1

Lait frais ou condensé .... 2

Laiterie (ustensiles de). ... 4

Laiton 4

Lampes (et garnitures de). . . 1

Lanternes (et garnitures de) . . 1

Lapin en conserve . . . 2

Lard 2

Laque (et objets en) .... 1

Lavabos (cubage) 1

Légumes frais 4

séchés et conservés 2 Lentilles (légumes) ... .2

Lessiveuses 1

Leviers en fer ou en acier . . 4

Levure ... 2

Librairie articles de) . 1

Liège et bouchons (cubage) . . 1

Limes ou râpes enfer ou en acier. 2

Limonades 2

Lin brut 3

travaillé ...."... 1

Linge de ménage .... 1

Lingerie .1

Lingots de métaux précieux

(tarif spécial valeurs) .

Linoléum . 1

Liqueurs 1

Literies, matelas, oreillers (cu- bage) . , 1

Lits en bois ou en fer (cubage) . 1

Livres . 1

Locomobiles 4

Longerons en tôle . . 4

Lustres . .1

Mabula Panza 4

Machettes ......... 2

Macaroni 2

Mâchefer . 4

Machines agricoles et indus- trielles 4

Machines à coudre, à tricoter, à

écrire, à calculer 1

Machines outils 4

(pièces de) !

Madriers 4

Maïs ......... 4

Maisons et baraques démon- tables. . . . ... 4

6J6

NOMENCLATURE.

NOMENCLATURE.

H

Malles vides (cubage) . . .3

Malt 2

Manches d'outils en fer ou en

bois . . . .... 2

Manioc, racines ou farine. . . 4

Manchettes et cols 2

Marbre brut 4

Marbre travaillé ..... 1

Marne 4

Margarine ....... 2

Maroquinerie 1

Marrons 2

Marteaux et manches .... 2

Matelas 1

Matériel de chemin de fer. . . 4

Mazout 2

Mèche de mine à combustion

lente 1

Médicaments 1

Mélasse 2

Mercerie ... ... 1

Métaux bruts ordinaires ... 4 Métaux bruts précieux (tarif

spécial valeurs) .....—

Métiers à tisser. . . 4

Meubles montés cubage). . . 1

démontés et emballés 1 Meules à aiguiser 4

de moulins 4

Miel indigène 4

importé 2

Mil 4

Minerais 4

Minium 2

Miroirs \

Modes (articles de 1

Moellons 4

Monnaie (tarif spécial valeurs) . Montants en bois, en fer ou en

acier 4

Morue ou poisson séché ou salé 4

Motocycles (voir tarif bagages). 1 Moules de fondeur . . .4

Moulins agricoles ou industriels. 4

Moutarde ....... 2

Moyeux en bois ou en fer . Munitions (explosifs) . Musiques (instruments de» Matériaux pour empierrement

de construction .

Mesures en fer blanc (cubage) Matériel de sondage ... Matières inflammables ou ex plosives (explosifs) .

Mercure

Mérinos

Nacre (objets en) 1

Naphtaline 1

Naphte 1

Nattes (cubage) i

Navets 2

Nitrates pour engrais (seulement

par charges complètes) ... 4

Nitrates autres 1

Noix 2

de coco vertes 4

de palme . . . . . .3

Noisettes 2

Nouilles 2

Nourriture indigène non dénom- mée 3

Noyaux de mangues .... 4 Noir animal pour engrais (seule- ment par charges complètes) . 4 Noir de fumée 1

Objets d'art (voir tarif spécial

valeurs)

Objets de valeur (voir tarif spé- cial valeurs)

Ocre 2

Oeufs 2

Oignons frais et séchés ... 2

Olives 2

Ombrelles et parapluies ... 1

Oranges 4

Orge perlé 2

Orgues 1

617

NOMENCLATURE.

NOMENCLATURE.

Ornements 1

Orseille 4

Os calciné pour engrais (seule- ment par charges complètes) . 4

Ouate (cubage) 1

Outils agricoles (machines) . . 4

de métiers divers ... 2 Or en lingots ou monnayé (tarif

- spécial valeurs)

Osier brut . . 3

travaillé (cubage). . . . 1

Pagnes 1

Paillassons (cubage) 1

Paille (cubage) 4

fine ou tressée (cubage) . 1

Pains 2

Pain d'épices 2

Palans 4

Palétuviers (bois ou écorce de) . 4 Paniers vides pour emballage

(cubage) 3

Papeterie .

Papier à écrire ou à imprimer .

d'emballage

d'émeri .......

Papiers peints ...:... Parapluies et parasol s -. . .

Parfumerie

Passementerie ... ...

Patates douces 4

Pâtes alimentaires 2

Pâtes à papier . 3

Pâtisserie 2

Pavés naturels ou artificiels . . 4

Peausserie 1

Peaux de bœufs séchées ou sa- lées (cubage) 3

Peaux d'animaux sauvages (cu- bage) 3

Peignes 1

Peintures (couleurs pour) ... 2

Pelles, bêches et manches pour. 2

Pelleterie , 1

Pendules 1

Perles en verre 1

Pétrole d'éclairage 2

Phosphore 1

Phosphates de chaux pour en- grais (seulement par charges

complètes) 4

Photographiques (appareils et

produits) . 1

Pianos 1

Pickles et cornichons, etc. . . 2 Pièces de monnaie (tarif spécial

valeurs)

Pièces de machineset de bateaux. 4 de charpente en bois, en

fer ou en acier 4

Pièces d'artifices (explosifs) . . 1 Pierres précieuses (tarif spécial

valeurs)

Pierres pour constructions ou

empierrement 4

Pierres à aiguiser ou à l'huile . 2

calcaires brutes. . . . .4

de moulins 4

lithographiques ... 1

ponces ....... 1

tombales 1

Piles électriques ...... I

Piments 2

Pioches, pelles et manches . . 2 Pirogues (seulement par charges

complètes) 4

Pipes 1

Planches sciées et rabotées . . 4

Plantes et arbustes (cubage) . . 4 Plaques de revêtement pour rails

tournantes 4

Platine (tarif spécial valeurs) .

Plâtre 4

Plats en fer pour caoutchouc. . 2

Plomb en lingots, feuilles, etc. . i

Plumes à écrire. ... . . 1

Plumes d'autruches ou d'ai- grettes (Tarif spécial valeurs .

618

NOMENCLATURE.

Pneus i

Poêles 1

Poids à peser 1

Poignées en bois ou en fer. . . 2

Poils divers {cubage j 1

Poireaux 2

Poires 2

Pois indigènes 4

conservés 2

Poisson frais 2

séché, fumé ou salé pour nourriture indigène . . 4

Poissou conservé 2

Poivre 2

Pommes . . . > 2

Pommes de terre 4

Pompes 4

Ponts tournants 4

à peser, à bascule ... 4 Porcelaine ordinaire 1

de valeur (tarif spé- cial valeurs)

Portes et chambranles en bois

ou en métal 4

Porte-plumes 1

Porte . . 1

Potasse 3

Poterie indigène (cubage) . . 3

fine de valeur (tarif spé- cial valeurs)

Poudre (explosifs) 1

Poulies, en bois ou en métal . . 4

Poutres et poutrelles 4

Préparations pharmaceutiques . 1

Presses à copier ...... 1

à foin, hydrauliques . . 4

à usage agricole ... 4

lithographiques ... 1 Produits agricoles non dénom- més 2

Produits chimiques 2

pharmaceutiques. . . 1 Provisions alimentaires pour in- digènes non dénommées. . . 3

NOMENCLATURE.

Provisions alimentaires impor- tées 2

Prunes 2

Pulpes quelconques 3

Quartz pour empierrements . . 4

Quincaillerie . . .... 1

Quinquina 1

Quinine 1

Rafia (cubage) 3

Racines médicinales 1

Rails et accessoires 4

Raisins frais et secs 2

Râpes et limes 2

Râteaux, fourches et manches . 2

Rayons de roues 4

Réglisse 1

Réservoirs en tôle (cubage) . . 3 Résidus pour engrais (seulement

par charges complètes; ... 4 Ressorts en aciers pour wagons

et locomotives 4

Résine d'importation 1

d'exportation. .... 3

Rhubarbe 1

Rhum 1

Ricin (huile de) 1

d'exportation 2

Rideaux .1

Ringards 4

Rivets 4

Riz décortiqué ou paddy ... 4

Robinetterie 1

Ronces artificielles 2

Rondelles et vis en fer .... 4 Roues de wagons, voitures, cha- riots, locomotives 4

Rouleaux d'impression .... 1

Rouleaux de route, de jardins . 4

Rubannerie .1

Ruches à miel (cubage). ... 2

Sable 4

619

NOMENCLATURE. g

__ £_

Sabots de frein 4

Sacs vides (cubage) 3

Sacs et sacoches en cuir. . . - . 1

Sagou 2

Saindoux 2

Salpêtre pour engrais (seulement

en charges complètes) ... 4

Sardines . 2

Sangsues 1

Sarrasin 3

Savons 1

Scieries (machines pour) ... 4

Scies .. 2

Scories 4

Seaux et objets de ménage . . \

Seigle 3

Sel ammoniac 1

anglais 1

de table ou de traite ... 2

Sellerie \

Semences 4

Semoule 2

Serpes 2

Serrurerie . . 1

Sésame (huile de) 2

Sésame 4

Sièges <îe jardin (cubage) ... 1

Siphons 1

Sirops 2

Sisal (cubage) 3

Socs de charrues 4

Soie! et étoffes ou fils de) . . . 1

Sommiers 1

Son (cubage) 4

Sorgho 3

Soude ,3

Soudure (alliage plomb et étainï. 2

Soufflet de forge 4

Soufre brut ou préparé .... 2

Souliers et bottines 1

Spiritueux 1

Stéarine 1

Stockfish 2

Sucre et sucreries 2

NOMENCLATURE.

Suif 1

Sulfate de fer , 1

Tan d'importation 1

Tan originaire de la Colonie . . 3 Tabac brut ou manufacturé de

provenance indigène .... 3 Tabac brut ou manufacturé im- porté 1

Tableaux et encadrements (voir également tarif spécial va- leurs

Tabletterie

Tables (cubage

Tables de billiards

Tafia en fûts

Tamis

Talc

Tanks vides en métal (cubage) . 3 (seulement

par charges complètes) ... 4

Tapioca. . 2

Tapis ordinaires et de luxe . . 1 Taques en fonte pour pavements. 4

Tenders 4

Tentes 1

Térébentine 1

Terres d'industrie 4

Thé 2

Tirefonds et crampons de che- min de fer 4

Tissus

Toile cirée

d'emballage

métallique

à sacs

Tôles de chaudières ou autres .

Tondeuses de gazon

Tonneaux vides non démontés

ou démontés et empaquetés (voir barils). Touques vides (cubage) ... 3

Tourbe 4

Tourteaux (uourriture pour bé- tail 4

620

NOMENCLATURE.

NOMENCLATURE.

Tomates 2

Traverses en bois ou en fer . . 4

Treillis métalliques 2

Treuils, crics, vérins, chèvres . 4

Tricycle (voir tarif des bagages). 1

Tubes en fer, acier, laiton, etc. . 4

Tuiles 4

Tuyaux en béton, grès, terre

cuite 4

Tuyaux en cuir, en caoutchouc. 1

Ustensiles de ménage .... 1

Valeurs (tarif spécial valeurs) .

Valises vides (cubage) .... 1

Vanille 2

Vannerie importée (cubage) . . 1

indigène (cubage) . . 3 Varech en balles pressées ... 3 Vaseline lubréfiante 1

autre 1

Véhicules montés autres que ceux

de chemin de fer (conditions

spéciales dans chaque cas) . .

Véhicules démontés 4

Velours 1

Vérins, crics, treuils, chèvres . 4

Vermicelles 2

Vermouth 1

Vernis et couleurs. ..... 2

Verre à vitre 4

Verres et verreries ordinaire . . 1

Verroterie 1

Verrous et serrures 1

Vêtements 1

Viandes conservées 2

fraîches et congelées . 2

Vinaigre 2

Vins de moins de la» 2

de plus de 15° 1

de palme 4

Viroles en métaux divers. . . 4

Vis diverses et clous .... 4

Voitures (voir véhicules) ...

d'enfant (tarif des ba- gages)

Volaille vivante (tarif spécial) .

conservé 2

Voliges et planches 4

Wagonnets Decauville ou autres

(cubage) 4

Wagons de chemin de fer ... 4

Whisky 1

Zinc en lingots, feuilles, barres,

etc 4

Zinc (articles en) ...... 1

621

CHEMINS DE FER DU CONGO SUPÉRIEUR AUX GRANDS LACS AFRICAINS.

Les tarifs de transports de la Compagnie des Chemins de fer du Congo supérieur aux Grands Lacs africains, publiés aux Renseigne- ments de rOffice Colonial de janvier 1920 sont modifiés comme suit :

une augmentation de 75 p. c. est appliquée à tous les tarifs de transports pratiqués par la Compagnie quelque soit le genre de marchandises transportées et uniformément à la montée et à la descente ;

la direction est autorisée à établir des tarifs spéciaux pour certaines catégories de marchandises à l'effet de répondre à des néces- sités économiques actuelles, de favoriser les industries locales et le ravitaillement des centres miniers ou urbains de la Colonie;

les tarifs de transports des voyageurs sont les suivants :

Voyageurs de lle classe : fi\ 0.40 par kilomètre. de 2e classe : fr. 0.20

La première classe est réservée aux voyageurs européens; la seconde aux voyageurs de couleur.

La Direction jouit de la faculté de réduire à fr. 0.10 par kilomètre, le prix du transport de la 2e classe en faveur des indigènes du Congo.

Les modifications énoncées ci dessus sont applicables sur tous les réseaux ferrés et fluviaux de la Compagnie.

INFORMATIONS.

SOCIÉTÉ ANONYME DES « HUILERIES DU CONGO

BELGE ».

Au 30 juin 1919, la capacité annuelle des différentes huileries de la Société s'établissait comme suit : Région de Lusanga :

A. Usines de Leverville : 24,000 tonnes de fruits ;

B. Usines de Tango : 13,000 tonnes de fruits;

C. Usines de Kwenge : en construction ; Région de Bu tuba :

Usines d'Alberta : 15,000 tonnes; Région de Itarumbii ;

Usines d'KIisabclha : 156,000 tonnes;

622

Région d'lngende ;

Usines de Flandria : 6,000 tonnes.

L'usine de Flandria n'a commencé à travailler qu'en mars 1919. Celle de Kwenge a été mise en marche récemment ; elle est capable de traiter 42,000 tonnes de fruits par an.

D'ici peu, deux nouvelles usines vont être montées, dont l'une à Brabanta sur le Kasai, région de Basongo. Chacune de celles-ci aura une capacité annuelle de 12,600 tonnes de fruits.

Au total, la capacité des huileries déjà érigées ou sur le point de l'être, s'élève donc à près de 120,000 tonnes de fruits, soit environ 20,000 tonnes d'huile.

Mais pendant l'exercice 1918-19, la plupart des usines n'ont travaillé qu'au tiers de leur capacité; seule celle de Leverville a atteint près de la moitié.

La production des usines a marqué la progression suivante au cours des quatre derniers exercices :

Extraction

Noix

Exercice.

Fruits traités.

Huile.

p. c.

palmistes

1915-16

13.876 tonnes.

1.843 tonnes.

13.28

557

1916 17

20.963

2.880

13.73

1.149

1917-18

26.409

4.207

15.93

2.058

1918 19

25.903

4.601

17.76

2.088

La quantité des fruits traités en 1918-19 a donc été inférieure d'environ 500 tonnes à celle de l'exercice précédent.

Cependant, il y a eu une augmentation notable à chacune des usines, exception faite pour celles d'Alberta et d'Eiisabetha, le déchet qui fut de près de 2,000 tonnes, paraît entièrement altribuable à l'influenza.

Malgré la diminution des quantités de fruits traités, la production d'huile et de noix palmistes a augmenté : La Société n'a cessé, en effet, d'apporter des perfectionnements à ses appareils d'extraction. D'autre part, elle a poursuivi avec succès, notamment au laboratoire d'Alberta, s^s recherches sur les procédés à employer pour réduire la fermentation de l'huile de palme, à tel point qu'une grande partie de ses huiles peut servir à fabriquer de la margarine et non plus seule- ment du savon.

Le pourcentage de l'huile extraite n'atteint pas encore celui de la teneur théorique, mais il dépasse de beaucoup celui que peuvent fournir les procédés indigènes.

La Société veille surtout à l'aménagement des palmeraies existantes, dont elle plante les espaces découverts, mais elle crée, en outre, des

623

plantations entièrement neuves : La principale a été établie ou préparée à l'Ouest et à l'Est d'Alberta et mesure 2,000 hectares dont 1,050 viennent d'atteindre la phase de production.

Au point de vue du recrutement de la main-d'œuvre noire, la Société se heurte évidemment dans certaines régions aux difficultés inhérente; à la mentalité même des nalifs, encore indolents et peu soucieux d'améliorer leurs conditions de vie; elle s'efforce progressivement de leur inculquer des aspirations meilleures et d'éveiller en eux le goût d'un travail rémunérateur et régulier.

Afin de réduire le portage des fruits, la Société a établi 49,9 16 mètres de voies ferrées : (Leverville et Tango : 26,878 mètres; Elisabetha : 6,538 mètres; Alberta : !6,50() mètres). Elle a passé commande en Belgique pour 25,000 mètres qu'elle espère poser prochainement.

La flottille de la Société comprenait au 30 juin 1019, 16 vapeurs, 8 unités de petit tonnage plus 55 barges, dont 24 barges-citernes, et elle avait une capacité de transport de 3,022 tonnes D. W,

La Direclion a pris des arrangements avec les RR. PP. Jésuites, pour l'organisation à Leverville d'une école industrielle analogue à celle d'Alberta. Les premiers artisans et commis formés dans cette dernière ont trouvé des emplois dansles services de la Société.

Le service médical de la Société comprend 8 médecins dont 1 Relge. Deux des médecins Anglais, dont le terme expire, seront remplacés par des Belges. (Rappelons à ce propos que le personnel européen de la Société doit être Belge jusqu'à concurrence de 50 p. e. Celte proportion, que la guerre avait réduite, est à présent rétablie.) La Société possède 3 hôpitaux et 4 lazarets, sont traités tous les indi- gènes qui se présentent qu'ils soient ou non au service de la Société.

Pendant l'exercice 1918-19, environ 8,000 indigènes ont été traités à Alberta, 3,000 à Elisabetha et 7,000 à Leverville. Les médecins attribuent la faible mortalité enregistrée parmi les travailleurs de la Société à Elisabetha, au cours de l'épidémie de petite vérole qui a sévi dans l'Aruwimi, au fait que la plupart avaient été vaccinés l'année précédente.

Les plus grands efforts sont faits dans la région de Leverville où, avec l'aide de trois médecins, la Société coopère avec l'Administration à la lutte conlre la maladie du sommeil. L'amélioration survenue dans les conditions d'existence des indigènes, et imputable dans une grande mesure à l'action de la Société, contribue peut-être plus efficacement que les injections, à réduire l'emprise du fléau.

624

Liste de firmes belges en mesure d'exporter leurs produits au Gongo.

N. B. Cette liste sera complétée à mesure de la réception de demandes d'inscriptions nouvelles.

Les industriels belges, ainsi que les commerçants s'occupant de la vente de marchandises de fabrication nationale, désireux de figurer sur cette liste sont priés de se faire connaître à l'Office Colonial du Ministère des Colonies, 28, rue de Ruysbroeck, Bruxelles, en indiquant l'objet exact de leur industrie ou de leur commerce.

DESIGNATION ET ADRESSE DES FIRMES.

OBJET

Alimentation.

Les Etablissements Lievens et C , Agent général : Hilaire Volcke, 10, Square de l'Avènement, Bruxelles.

Brasserie de Koekelberg (Société anonyme , 17, Avenue de la Li- berté, Bruxelles

Brasserie Tivoli (Société anonyme', Anvers.

BrasserieWielemans-Ceuppens (So- ciété anonyme), Bruxelles.

Jules Devriese, industriel, Usines Kalvox, 26--28-30, Avenue de la Liberté, Bruxelles.

Van de Poel et Co (Société anonyme), Stabroeck, Anvers

Maison Agniez Frères, 91, Boule- vard de la Revision, Bruxelles.

François De Greef, 31, rue de la Pa- cification, Bruxelles

Fr. Dupont et Cie, 22, rue des Che- valiers, Anvers.

II. et Edg. P. Genucchi Frères, 151 à 155, rue Brogniez, Bruxelles.

Produits farineux alimentaires. Bières.

Bières.

Bières.

Bouillon concentré, sauces pi- quantes dites anglaises, poudre de céleri.

Conserves alimentaires.

Conserves alimentaires. Conserves de légumes. Denrées alimentaires. Denrées alimentaires.

625

DESIGNATION ET ADRESSE DES FIRMES.

OBJET.

Usine L. Reynhout, 111, rue des Bé- guines, Bruxelles.

Louis Delhaize (Société anonyme), Rarsart lez-Charleroi.

Usines G. Petrus Stockman, 377 et 379, rue des Palais, Bruxelles.

Lamby etDabin,5i,quai de l'Ourthe, Liège.

Van Hoorn Frères, 15, rueMontigny, Anvers.

Louis Kutten, 21, Grand'Place, Lierre.

Malterie Bauters (Société anonyme), 29, rue Saint-Gilles, Gand.

Vigor, 15, rue St-Jean, Bruxelles.

Clément Baltus, Montagne de l'Ora- toire, 16, Bruxelles

Godet. 5 et 7, rue du Frontispice, Bruxelles.

F. Leruitte, 135, Avenue Kersbeek, Bruxelles.

R. Van Meessche-Smets, 102, rue du Vieux Canal, Turnhout.

Delco (Société anonyme), 11, rue de l'Entrepôt, Louvain

Auriol et Cie, 16, rue des Mégissiers,

Bruxelles. Dépôt général des Produits Liebig

(Société anonyme^, 21, Longue

rue des Claires, Anvers.

Freddy Van Damme, 24, Avenue Michel-Ange, Bruxelles.

Conserves alimentaires*

Denrées alimentaires.

Denrées alimentaires.

Fabrique de conserves de fruits,

confitures Pommes de terre et oignons.

Pains et biscuits

Malts.

Aliment phosphaté Jambons, lard, conserves de lé- gumes et de fruits, etc. Liqueurs.

Produits alimentaires

Pudding Powder.

Produits alimentaires du DrLicops: lait condensé, farines spéciales, miel au lait, couques.

Vins.

Extrait de viande, bouillon liquide, bouillon eu comprimés, sel céleri, potage en tablettes, langues de bœuf, corned-beef, pressed-beef. graisse de bœuf raffinée.

Huiles d'olive et huiles comestibles.

La Sabulite belge (Société ano- nyme), Moustier s/S.

Poudrerie Royale de Wetteren, Wetteren.

Usine Henri Waroux et Joseph Claes, 28, rue Patenier, Liège.

Armes et munitions.

Explosifs.

Poudre de traite, poudre et cartou- ches de chasse, explosifs, détona- teurs, mèches.

Fusils à silex.

626

Usine Renkin et fils, Liège. D. De marteau Fastré, rue Haye- neux, 527, Herstal*

Armes de traite. Fabrique d'armes.

N. D'Heedene, 29 rue Oedenkoven, Borgerliout.

Ameublement.

Articles en cuivre, ameublement

Appareils de leboratoire.

Emile De Cock, 11, rue de la Blan- chisserie, Bruxelles.

Georges Kottenhoff, 2, rue Keyen- veld, Bruxelles.

Verreries de laboratoire, capsules, creusets et objets en porcelaine et terre réf. ractaire .

Balances de précision, trébuchets, poids, microscopes, appareils et ustensiles pour laboratoires, pa- pier à filtrer.

Produits chimiques purs pour réac- tifs, produits pour la photogra- phie, produits pour l'industrie, appareils de physique.

Ampoules et appareils pour injec- tions hypodermiques.

Bijouterie et orfèvrerie.

Wiskemann, rue du Chêne (Val des Roses, 3-4), Bruxelles.

Orfèvrerie, articles de table argen tés.

Bois et boiseries.

Jacques Fiévé, 13. chisserie, Gand.

rue de la Bl an-

Bois de construction et de menui- serie bruts ou manufacturés.

Bonneterie.

Usine A. Honorez, Leuze.

Usine Ferdinand Colyn, Wetteren. Maison Van Alderwerelt, 2o-27, Mon-

tagne-aux-Herbes-Potagères, Bru- xelles.

Chaussettes en laine pour hommes.

Bas en laine et coton pour dames. Vareuses en laine pour hommes . Articles de bonneterie. Articles du

D'Rasurel.

627

DESIGNATION ET ADRESSE DES FIRMES.

A. Dopchie, Willequet. Renaix. Paul Cantaert, Sottegeni.

Usines Loiselet-Dopchie, Leuze

OBJET,

Articles de bonneterie.

Bonneterie pour femmes, vareuses et normals pour hommes et en- fants.

Vareuses en laine et en laine et co- ton, maillots, singlets, pagnes unis et rayés en coton.

Céramique et poterie.

M. -RE De Wynter, anc. établis. De Bisshop, Audenarde-Leupe- ghem.

Fédération des industries cérami- ques de Belgique, Baudour.

Carreaux céramiques.

Tuyaux et poteries en grès.

Edw. Van Koetsem. Anvers .

Chapellerie.

39, rue Zirk, Fabrique de chapeaux et casquettes

Chaussures, cuirs.

Etablissements Janssen, 9, rue de

Belgrade, Bruxelles . Usines Jules Stern, 75, rue Bara,

Bruxelles. Usine L. et A. Régnier fils, 111, rue

Bara, Bruxelles.

Usine Vve Ad. Van Lierde 124, rue

de Bruxelles, Hal. Tannerie J. Witmeur de Heusch,

77, rue Vinave, Grivegnée lez-

Liége.

Usine Houssière fils, 16-18, rue St- Georges, Binche.

Comptoir belge des cuirs, peaux et Extension, 27, Square de l'Avia- tion, Bruxelles.

Manufacture de chaussures pour

enfants, garçonnets et fillettes. Chaussures en toile à voile et cuir.

Chaussures de ville, de traite en cuir et toile, souliers toile blanche , bottes moustiqiiaires.

Chaussures.

Ceintures en cuir jaunes et noires. Boucle ordinaire et boucle ser- pent. Courroies en cuir pour homme, ceinturons, cartouchières, porte sabre, porte pelle, etc.

Chaussures

Cuirs, sellerie et buiïleterie mili- taire, chaussures.

628

DESIGNATION ET ADRESSE DES FIRMES.

OBJET.

Lefèvre fils, Binche.

E. Geier, 114, rue Masui, Bruxelles.

Tannerie et corroierie. Cuirs lissés battus pour semelles, fabrication et emballage spéciaux pour l'ex- portation.

Fabrique de maroquinerie.

Ciments.

Groupement des fabricants belges de ciment Portland artificiel, 4, Montagne du Parc, Bruxelles.

Usine Levie frères, Cronfestu.

Société anonyme des ciments de Lixhe (Visé).

Société anonyme des ciments Port- land Liégeois. Haccourt.

Usines Dufossez et Henry, Cron- festu.

Société anonyme des cimenteries et briqueteries de Raevels, 72, place de Meir, Anvers.

Usine Pol Madou, 279, boulevard de l'Industrie, Gand.

Ardoisite (Société anonyme), 122, Avenue de la Toison d'Or, Bru- xelles.

Ciments.

Ciments. Ciments.

Ciments.

Ciments.

Ciments.

Carton bitumé, sous produit du goudron, ciment volcanique, car- bonileum, goudron, asphalte.

Plaques en asbeste genre Éternit. Ardoises.

Combustibles.

Groupement de la distillation du bois, 124, Avenue Rogier, Bru- xelles

Charbon de bois.

Confections.

Usine B. Dujardin-De Smet, 107, Vieux Chemin de Bruxelles, Gent- brugge (Gand).

Confections.

La Générale, ^Société coopérative), anc. établis. Yan Duyse frères, Lokeren.

Constructions démontables.

Constructions démontables.

629

DESIGNATION ET ADRESSE DES FIRMES.

OBJET.

Cordes, bâches, emballages.

Jolin Verhaegen, 9, rue Coens, An- Bâches imperméables, bâches pour vers. auto et auto camions, drapeaux

en laine.

Usine F. Vermeire - Hellebaut, Cordages et ficelles. Hamme s/Durme.

Couleurs et vernis.

Usines Martin Mathys et fils, Zeel- hem.

J. Muller- Léger, 3o, rue des Pla- tanes, Bruxelles.

Société belge des couleurs et vernis, 11, rue Bissé (chaussée de Mons), Bruxelles.

Société anonyme d'Auderghem N. Ligot, 1206, Chaussée de Wavre, Auderghem.

Usine J. G. De Coninck et fils, 13, rue du Couvent, Anvers .

L. etPh. Van Espen frères, rue Gai- lait, 48, Bruxelles.

Vernis gras, siccatifs, couleur

émail. Peinture laquée « Lubrosine » .

Vernis pour carrosserie, chemins de fer et marine, émail.

Block Varnish. nium, etc.

Mastic noir, mi-

Usine Pol Madou, 279, Boulevard de l'Industrie, Gand.

Couleurs préparées et en poudre, émaux, vernis et huiles spéciales.

Couleurs, huiles, essence de téré- benthine, siccatifs, émaux, ver- nis, mastic, enduits hydrofuges, couleurs antirouilles, ferriline, brosses à peindre, éponges, peaux de chamois, colles-fortes, papier verre, toiles émeri, chalumeau.

Goudrons, vernis.

Couvertures, torchons, lavettes.

Manufacture A. Willemyns Mullie, 7, rue des Halles, Courtrai.

Société anonyme des Usines Roos Geerinckx et Denaver, Alost.

M. Franck et Cie, Gentbrugge (Sud).

Firmin Tassier, agent général de la firme A. Roos et C°, 104, rue des Pâquerettes, Bruxelles.

Couvertures de laine et de fantaisie.

Couvertures unies, rayées, impri- mées et à la jacquard, torchons et lavettes, châles, pagnes, filature de coton.

Couvertures, tordions en coton, la- vettes ou draps d'essuyage, dé- chets de coton pour le nettoyage de machines.

Couvertures coton et mi laine, tor- chons, lavettes, molletons.

63G

DESIGNATION ET ADRESSE DES FIRMES.

OBJET

Huiles et graisses industrielles.

Callot et De Schrijver, 22, rue Lede- ganck, Borgerhout (Anvers) .

Eug. De Keyser, usines de Pan- nehuis, Laeken.

Usine A. Mottay et V. Pisart, Haren-Xord .

Herssens frères. 177, rue Stévin, Bruxelles.

Usine Rogiers-De Bodt, Rue de Be- ver, 2, Xinove.

Graisses industrielles.

Huiles et graisses industrielles, carbonileum, goudron végétal, essences.

Huiles, essences, graisses, carboni- leum.

Huiles industrielles et autres.

Suifs fondus et graisses pour le graissage des machines.

Installations sanitaires.

Etablissements Lowin,A.M. Serin, successeur, 10, rue Lebeau, Bru- xelles.

Installations sanitaires, appareils, égouts, fosses septiques breve- tées, etc.

Lampes.

Société anonyme d'éclairage des mines et d'outillage industriel, à Loncin-lez Liège.

Lampes à l'acétylène et lampes de mine.

Lingerie.

usines Geo F. Devos, -4, rue du Che- min de fer, Courtrai.

Coster et Clément, 41, rue du Lom- bard, Bruxelles.

Piette Maurice, 69, rue Joseph Claes, Bruxelles.

Lingerie. Toiles tailleurs, toiles bleues et blanches . Coutils pour literies et tentes. Draps de lit en toile. Taies d'oreillers; mouchoirs de poche de toile et coton.

Cols, cravates, chemises, pyjamas, mouchoirs, ceintures et bretelles.

Mouchoirs de poche blancs et de couleurs ; mouchoirs imprimés en toutes teintes pour pagnes.

Machines et mécaniques.

Oscar Wauthier, 131, avenue Albert, Broyeurs « concasseurs » .

Bruxelles .

B. Nickelmann Junior, route de Bo- Machines agricoles et de laiteries,

vigny, Salin-Château. moteurs.

631

DESIGNATION ET ADRESSE DES FIRMES.

OBJET,

Lucien Xhignesse, constructeur, 306 308-310, rue Ernest Solvay, Sclessin.

PiérartLéon, Cuesnies.

A.-C. Raydt, 20, rue du Poinçon,

Bruxelles. Edm. Veuchet, 156, rue Brogniez,

Bruxelles . VveE. Lallemand Charlier, 25, rue

Sainte -Véronique, Liège.

Société anonyme des ateliers B. Le- brun, Nimy.

Les Câbleries belges rue Neuve,

Dour. La Construction Métallique, 16, rue

d'Egmont, Bruxelles.

Chaudières à vapeur; réservoirs, cuves; tuyauterie, appareils de marine, brasserie, distillerie, ve- randah, serres, marquises, ba- nières, grillages, garde-corps, chassis, grosse serrurerie, char- pentes métalliques ; habitations et bâtiments métalliques démon- tables ; chaufferies pour serres ; wagonnets pour mines, carrières et Decauville; voies portatives, ponts, passerelles, escaliers, py- lônes, gitages. ponts roulants, plancher en fer, portes roulantes, etc.

Matériel de chemin de fer, ponts et charpentes, travaux métalliques, fers et métaux.

Produit « Raydo » pour surfaces de friction; garnitures de freins.

Tuyauteries. soupapes, vannes manomètres, pompes, etc.

Cables, courroies, cordages, plans incliués, montes charges grues, ascenseurs, torons pour signaux, palans, treuils, etc., bourrages en chanvre, goudron végétal et mi- néral j.

Chaudronnerie, chaudières, ma- chines à vapeur, compresseurs d'air, pompes centrifuges, instal- lations frigorifiques dans toutes leurs applications et brosseries.

Câbles de mines, pour marine ; appa- reils de levage,

Locomotives, moteurs à vapeur et à explosion, voitures, wagons, ponts, charpentes, chaudières, chaudronnerie, pièces fondues en métaux, boulonnerie, produits galvanisés et émaillés, pièces de forges, etc., mécanique générale, automobiles, motocyclettes et vé- locipèdes, machines, appareils et câbles électriques, matériel fixe de chemins de fer, constructions navales et fluviales, machines ou- tils.

632

DESIGNATION ET ADRESSE DES FIRMES.

OBJET.

Tieberghien Huttert et Cie, quai de la Lieve, Gand.

Comptoir central industriel, 80, rue Gaucheret, Bruxelles.

Etablissement Oscar Comliaire et

Cle, 8, place Edouard Anseele,

Gand. Forges et Ateliers St-Eloi. L.-Y.

Nobel-Peelman, rue de Plaisance,

Saint-Xicolas Waes).

René Wasterlain, boulevard Emile Bockstael. 8, Bruxelies

Joseph Merckx et C- ^Tilleuls, Bruxelles.

De Mol frères Xinove.

10, rue des

Métiers, machines et accessoires pour industries textiles, apprêts, blanchiment et teinture; installa- tion complète de filature et tis- sages, métaux perforés employés en brasserie, distillerie, sucrerie, etc.

Moteur Semi Diesel, locomobiles, moto pompes aux huiles brutes et huile de palme.

Machines outils.

Ponts roulants, bigues, grues, treuils de toutes forces, ponts, charpentes, pylônes, réservoirs, maisons et hangars démontables, garde-corps, portes et fenêtres en fer du commerce et eh profits spé- ciaux.

Amiante, bourrages, mortiers pour joints, verreries de chaudières, graisseurs, caoutchouc pour joints, déchets de coton et la- vettespour essuyage de machines; tuyaux chanvre pour incendie avec lances et raccords.

Matériel industriel colonial.

Mercerie.

Fil à coudre.

Métaux.

Fédération des fonderies de zinc, Zinc laminé.

plomb et argent, 35, Avenue des

Arts, Bruxelles. Société anonyme des Laminoirs et

Boulonneries du Ruau, Monceau-

sur-Sambre.

Société anonyme Forges Saint-Eloy,

Thy-le- Château. Usines à Tubes de la Meuse, Flé-

malle-Haute.

Crampons , tirefonds , éclisses, rivets.

Fers marchands

boulons ,

Tubes à eau et à gaz, soudés par rapprochement et tubes sans sou - dure.

633

DESIGNATION ET ADRESSE DES FIRMES.

OBJET,

Devis Paul. 43, rueMasui, Bruxelles.

Société anonyme des Produits gal- vanisés et de Constructions mé- talliques, rue Grétry, Liège.

L. Demolder, rue Raphaël, 16, Bruxelles.

Bernard frères, Gerpinnes (Char- leroi).

Etablissements Oscar Comhaire et Cie, place Edouard Anseele, 8, Gand.

Veuve Vincent Demaret Heppignies (Fleurus).

Anciens Etablissements J. Peters, H. Van Droogenbroeck et Cie P. Oortmeyer, L. Mercken et Cie, successeurs. 37, rue de la Caserne, Bruxelles.

Etablissements L. Bayet-Schake- wits,AvenueFonsny, 17, Bruxelles.

Société anonyme L'Outil, 145. rue du Laveu, Liège

Société belge pour la fabrication des câbles et fils électriques. So- ciété anonyme, 79, rue du Marché, Bruxelles.

Jean Van Haelen, dépôt de zinc et blanc de zinc de la Société de la Vieille Montagne, 38, rue des Fa- briques, Bruxelles.

Poutrelles, fers, fontes, tôles, aciers et métaux

Tôles ondulées, galvanisées, bou- lons, écrous, etc ; toitures, con- structions en fer.

Coffres-forts démontables, meubles en fer, malles en tôle d'acier, ser- rures et verrous de sûreté, objets en tôle.

Tôles rondes concaves, bacs à mor- tier.

Fers, tôles, poutrelles, pointes de Paris, fils galvanisés, machines outils.

Chaînes et ^pièces de forge.

Poutrelles, limes acier, outils, fer et acier profilés, objets en fer et acier.

Volets mécaniques en fer.

Produits métallurgiques.

Fils et câbles pour installations électriques.

Zinc, plomb, étain, soudure, fers marchands, tôles, etc.; spécialité de boulons, rivets, vis, etc.

Outils.

F. Pottier, Tournai. Machines à scier, scies à métaux,

scies circulaires.

Bernard frères, Gerpinnes (Char- Machettes et outils de plantation.

leroi).

L. et M. Dulry et Cio, 187, Boulevard Outillage général pour plantations.

Anspach Bruxelles.

Henri E. -G Kranse, A ven. Auguste- Machettes, houes, outillage colo-

llodin, 17, Ixelles-Bruxelles. niai.

634

DESIGNATION ET ADRESSE DES FIRMES.

OBJET

Parfumerie et savonnerie.

Ed. van Quickelberglie,riie des Mi- Parfumeries, eaux de Cologne,

ni ères 2-4, Verviers. crème pour chaussures, blanc

pour chaussures en toile, peau et encaustiques.

L. Eeckelaers, 63, rue Gillon. Bru- Fabrique de savons de toilette et de

xelles parfumeries.

Robert DeWandre,57, quai au Foin/ Produits d'hygiène et de toilette.

Bruxelles .

Parfumerie Coryn, 4, rue Yan Orley, Produits de parfumerie.

Bruxelles.

Maison Haanen, 51, rue Yander Parfumeries; spécialité d'eaux de

Meersch, Bruxelles. Cologne.

Freddy Yan Damme, 24, avenue Savons divers.

Michel -Ange, Bruxelles.

Fabrique d'eau de Cologne, Emile Eau de Cologne, parfums, savoLS.

Stohl, 176, rue Verte, Bruxelles.

M. Bertin et Cie, i0, i^lace du Châte- Savons de toilette et parfumeries.

lain, Bruxelles.

Plantes, graines, semences.

Alphonse Gallet, 25, rue de la Sta- Graines, semences, tion, Gand.

Produits chimiques.

Fédération des industries chi- Produits chimiques.

iniques de Belgique 65, rue du

Canal, Bruxelles. Hervé frères et Goffart, Société Carbonyle, antiseptique insecticide.

belge du Carbonyle. Trooz-lez-

Liége. The Eagle Products C°, 225, rue du Créoline. Lysol, carbonileum. acide

Canal, Merxem. j)hénique, etc.

Debbaudt frères et C,p, 35, rue des Céruse et minium de plomb.

Goujons. Cureghem. Laureys frères, 192, rue des Quatre- Verts à base de plomb et zinc.

Vents, Molenbeek-Saint- Jean . Destrée et O, Haeren. Bleus d'outremer.

Société anonyme pour la fabrica- Bleus d'outremer.

tion des bleus d'outremer, Mont- Saint- A mand (Gand;.

635

DESIGNATION ET ADRESSE DES FIRMES.

OBJET.

Société anonyme de la Vieille Mon- tagne, 35, avenue des Arts, Bru- xelles.

Société anonyme Osseine et engrais de Selzaete

R. Van Meesche-Smets, 12, rue du Vieux canal, Turnhout.

Blanc de zinc.

Phosphate de chaux.

Fabrique de produits chimiques.

Produits pharmaceutiques.

CIi.. Delacre et O', rue Villa Her- mosa, 10, 12, 14, Bruxelles.

Groupement des produits chimiques de la pharmacie et de la drogue- rie, rue Simonis, 14. Bruxelles.

W. Autrique, 148, avenue de Ter- vueren, Bruxelles.

Produits pharmaceutiques.

Produits chimiques et pharmaceu- tiques.

Vaseline stérélisée, désinfectant Krésoly, peau divine.

Quincaillerie.

Léon Wiegand, 22, avenue Sleeckx, Bruxelles .

Pi eters frères, 104, rue Gallait,

Schaerbeek. Association des Émailleries belges,

Faubourg de Bruxelles, Gosselies. Adolphe Bleyfuesz, représentant de

fabrique, 74, rue Arlon, Bruxelles.

Tabacs et

Manufacture de tabacs et cigarettes

Gosset, 24-26, rue Lambert Crickx,

Bruxelles. Maison Etienne, 24, rue André Du-

mont, Liège. Havana Compagnie, 80-H2, rue Loos,

Anvers. Manufacture Hubert Zeegers, Ton-

gres. Gilles Lamarche (Société anonymej,

Liège.] H. Schaeken, Hechtel (Linibourg).

Machettes, serrures crémones, crosses, clous, coutellerie, ci- seaux, canifs serpettes, couteaux de bouchers et de table, couverts, lanternes, burettes, bidons à l'huile, cuisinières avec foyer au bois.

Fours et fourneaux de cuisine dé- montables.

Articles en tôle émaillée.

Articles en tôle émaillée.

cigares.

Cigarettes.

Tabac, cigares, cigarettes, papiers

à cigarettes. Cigares et cigarettes.

Cigares.

Manufacture de tabac, cigares, ci- garettes. Manufacture de cigares.

636

DESIGNATION ET ADRESSE DES FIRMES.

OBJET,

Tissus

Van Leynseele frères, Courtrai .

Texas «Société anonyme), quai du Ramage, 28, Gand.

Usines A. Decock et A. Hiltrop, 65, rue de Sweveghem, Staceghem (Harlebeke).

Tissage Maurice Caesens Zèle.

V. Portois-Dopchie, 307, rue de l'Elé- phant. Renaix.

Arthur M, Seynaeve et Ci?, Oost- Roosbeke.

Tissage Florent Peeters, Bornhem.

Usines F.-E. Peeters et Cie, 15, rue Basse, Gand.

Usines A. Dopchie-Willequet, Re- naix.

Joseph Goossens, 12, rue Van Loke- ren, Ledeberg (Gand).

Tissus de lin et de coton- Filature, tissage et retorderie de coton.

Coutils, toiles blanches et bleues, tissus pour confection, fantaisie, calicots.

Tissus de coton et lin.

Tissage: laine, coton, coutil, drap. pantalon.

Tissage de toiles, toiles en fil de lin, de coton, mixtes, bleues et blan- ches, toiles pour bâches en lin, coton et chanvre.

Pagnes, scarves en coton, tissus co- loniaux en coton, tulles pour moustiquaires, toiles imper- méables pour bâches et sacs des- tinés au transport de cacao, cos- tumes Ducks en coton et coton et lin.

Fabrique de toiles, toiles mixtes, essuie-mains, etc.

Tissus de c*)ton et confections pour l'Afrique.

Toiles à voiles, bâches, sacs.

Gustave Franeau, 181, boulevard Maurice Lemonnier, Bruxelles.

Jos. Boel et Zonen, Tamise.

Fabrique nationale d'Armes de guerre, Herstal lez Liège.

Véhicules, bateaux, etc.

Cvcles.

Constructions navales. Automobiles, motocyclettes, byci- clettes.

Société anonyme des Verreries des Hamendes, L. Lambert, Jumet.

Société anonyme des Verreries Ben - , nert,Bivort et Courcelles réunies, Jumet.

Société anonyme des Verreries de Jumet, Jumet.

Verres et porcelaines.

Verres à vitre, bouteilles, gobe- lets, etc. Id.

Id.

637

DESIGNATION ET ADRESSE DES FIRMES.

OBJET.

Société anonyme des Verreries belges, Jumet.

Société anonyme des Verreries du Long- Bois, Gilly.

Société anonyme des Verreries D. Jonet, Charleroi.

Société anonyme desVerreriesDes- gainj Lodelinsart.

Société J. Goffeetfils. Lodelinsart.

Société anonyme Gobbe Rocque- miller, Lodelinsart.

Société anonyme des Verreries de la Marine, Jumet.

Société anonyme des Verreries de Dampremy, Dampremy.

Société anonyme des Verreries de Léon Mondron, Dampremy,

Société anonyme des Verreries de la Faix, Lodelinsart.

Société anonyme des Verreries de Binclie, Binche.

Société anonyme des Verreries de Mariemont, Haine-St-Pierre.

Société anonyme des Verreries de Jemappes, Jemappes.

Verreries H. Lambert et C1*", Char- leroi.

Verreries anversoises, Merxem (An- vers).

Miroiterie nationale (Société ano- nyme), 25, rue Plantin, Bruxelles.

Verreries de la Réunion, Jumet.

Verres à vitre, bouteilles, gobe- lets, etc. Id.

Id.

Id

Id.

Id.

Id.

Id.

Id.

Id.

Id.

Id.

Id.

Id

Gobelets en verre moulé, pintes,

bouteilles, bocaux, flacons. Glaces et cadres.

Verres à vitres, glaces, verres dé- corés et coulés, vitraux d'art, tuiles en verre, bouteilles, dalles lumière, mastic, diamants.

Divers.

Manufacture belge de produits in- dustriels, 66, rue Van Lokeren, Ledeberg (Gand).

Philippart etC , 30, boulevard Bota- tanique, Bruxelles. \

Huiles, graisses, déchets de coton, courroies, lanières, bourrages caoutchouc, etc.

Aciers et outillage métallurgique et miniers, articles d'éclairage, quin- caillerie, verres à vitres. produits galvanisés.

638

DESIGNATION ET ADRESSE DES FIRMES.

OBJET,

L. et G. Petit, 61, rue Rogier, Ver- vier s.

Léon Everaet, 81, rue Dupré, Jette- Saiiit-Pierre.

Etablissements Jos. Hudsyn, 108, rue des Cottages, Uccle.

yve Vandenhoute et C°, 78, rue de la

Prairie, Gand. Albert Meyer, 30, rue Juste-Lipse,

Bruxelles. AVintraecken et Cie, 9, rue St-Josse,

Bruxelles. Société générale d'Exportation Van

Santen et Van den Broeck, 18-20,

rue des Récollets, Anvers. V. Hérin, rue de Lescluze (Ber-

chem) Anvers. Henri E. G. Krause, 17, avenue

Auguste Rodin, Bruxelles.

Fernand Renard, 26, rue de Grave- lines, Bruxelles.

La Générale (Société coopérative), anc. établis. Van Duyse frères, Lokeren.

Les Papeteries d'Ensival t Société anonyme), Ensival lez-Verviers.

Manufacture belge de plumes mé- talliques 'Société anonyme), Flo- reffe, ou 37. rue de Stassart, Bru- xelles.

Marchandises diverses.

Parfumerie, passementerie, pains", café et chicorée en boîte, colle, coutellerie, horlogerie, matériaux de construction, couleurs, crèmes pour chaussures, tissus élasti- ques, produits chimiques, bou- chons, lingerie, aluminium, allu- mettes, stores automatiques, se- melles, étiquettes, etc.

Produits « Champion», à polir tel crème, liquides et pâtes, encaus- tiques, vaseline, cire, etc.

Crin animal pour literie.

Draps à copier « Eureka ».

Encres.

Marchandises diverses.

Marchandises diverses.

Marchandises diverses, confectionsr articles pour blancs, articles de traite.

Marchandises diverses.

Bouchons, lièges, bonbonnes lié- gées, quercine, bacs à glacer constructions démontables.

Papiers de couleur.

Plumes et porte plumes.

639

ACTES OFFICIELS (Ó.

Billets de Banque. Un arrêté ministériel du 8 juillet 1920 déter- mine les limites des circonscriptions des centres d'émission des billets de la Banque du Congo belge (B. 0., 15 août 1920).

Une ordonnance érige en infraction le fait de déprécier des mon- naies ou des billets de la Banque du Congo belge. (B. A. C, 10 juillet 1920).

Bois. Réglementation de l'exploitation des forêts dans le territoire géré par le Comité spécial du Katanga. (Annexe au B. 0., 15 août 1920).

Carte. Carte des territoires du Ruanda-Urundi au 1,000,000e, 1920. (Edition provisoire du service cartographique du Ministère des Colonies).

Dette publique. Relevé des obligations sorties au tirage du 14 juin 1911 et non encore remboursées (Annexe au B. 0. du 15 août 1920).

Ecole coloniale. Un arrêté royal détermine les pouvoirs du Conseil d'administration de l'Ecole coloniale supérieure d'Anvers (B. 0.,15juil- lel).

Emphythéose et superficie. Un décret ciu 20 juillet 1920 détermine le droit d'emphythéose et le droit de superficie, en ajoutant ainsi deux titres nouveaux au Code civil (B. 0., 15 août).

Etat civil. Une ordonnance-loi du 9 février 1920 est relative aux actes d'état civil dressés par les offices qui ont existé près des troupes en territoire étranger, et détermine, en outre, les règles à suivre pour la constatations des naissances et des décès survenant en mer.

Force publique. Une ordonnance du 31 mars 1920 institue des corps de volontaires européens pour les cas de guerre, de révoltes ou de troubles graves (B. 0., 15 juillet 1920).

Frais de justice. Un décret du 11 juillet 1920 fixe les frais de justice en matière non contentieuse (B. 0., 15 août 1920).

Heure légale. Extrait de l'ordonnance du Gouverneur général du 25 avril 1920, fixant l'heure dans les diverses provinces de la Colonie (B. 0.,15 août 1920).

Hygiène. Une ordonnance du Gouverneur général du 1er janvier 1920 modifie comme suit le cadre des médecins :

(1) Abréviations.— B. O. signifie Bulletin Officiel du Congo belge.

B. A. C. Bulletin Administratif et Commercial. J. A. K. Journal Administratif du Vice-Gou- vernement du Katanga .

640

Grade : Traitement initial :

Médecin en chef. . . . 25,000 francs

Médecin inspecteur. . . 20,000

Médecin de district . . . 18,000

Médecin 15,000

Une ordonnance du 1er mars 1920 fixe le règlement sur la police sanitaire maritime du Congo belge. (B. 0., 15 juillet 1920.)

Hygiène industrielle. Une ordonnance-loi du 19 juin 19^0 com- plète et coordonne en un seul texte les divers règlements concernant l'hygiène des travailleurs noirs employés dans la province du Katanga (J. A. K., 15 juillet 1920).

Immigration. Un arrêté royal stipule que les citoyens belges qui éiiiigrent dans la partie de la Colonie formant la province du Katanga, le district du Kivu et les régions des districts de l'Ituri et du Haut Uele, situées à Test du 29° parallèle, peuvent obtenir du gouverne- ment du Congo belge, une indemnité de voyage. (B. 0., 15 juillet )

Impôt indigène. Une ordonnance du 5 février 1920 accorde aux vice gouverneurs généraux délégation aux fins de délivrer aux indi- gènes des réductions et des exemptions temporaires d'impôt. (J. A.K., 1er juin 1920.)

Ivoire. Une ordonnance du 25 juin 1920 modifie l'ordonnancë-loi du 13 juin 1914 relative à la valeur de l'ivoire des éléphants mis à mort en cas de légitime défense ou trouvés morts. (J A. K. du 15 juil- let 1920.)

Mines. Un arrêté royal autorise l'exploitation des mines de_ dia- mant découvertes par la Société Internationale, Forestière et Minière du Congo. (B. 0., 15 juillet.)

Un décret du 51 juillet 1920 approuve la convention conclue entre le Comité Spécial du Katanga et la Société Minière Congolaise. Rapport du Conseil Colonial. (B. 0., 15 août 1920.)

Un décret du 17 août 1920 approuve des permis spéciaux de recherches minières accordés par le Comité Spécial du Katanga Rapport du Conseil Colonial. (B. 0., 15 août.)

Peaux. Une ordonnance du 16 juin 1920 interdit le transit par la province du Katanga des peaux brutes et autres sous-produits prove- nant d'animaux domestiques et autres tués ou abattus dans les terri- toires du Kivu et ceux formant anciennement l'Afrique orientale alle- mande. (J. A. K., 15 juillet 1920.)

Plantations. Un décret du 31 juillet 1920 approuve la cession

641

faite à la Banque de Bruxelles de cinq plantations et de terres d'exten- sion. (B. 0., d5 août 1920.)

Postes. Un arrêté ministériel stipule que les colis postaux du service intérieur de la Colonie peuvent être expédiés grevés de rem- boursement jusqu'à concurrence de 500 francs par colis. Une taxe spéciale de 10 centimes est perçue par fraction indivisible de 20 francs. Un droit de 25 centimes pour formalités douanières est prélevé sur tout colis postal à destination de l'étranger. (B. 0., 15 juillet.)

Une ordonnance du Gouverneur général du 20 avril 1920 déter- mine les attributions des bureaux auxiliaires des postes et télégraphes. (B. 0., 15 août 1920.)

Rapatriement. Un décret du 12 juillet 1920 vise l'entretien et le rapatriement de personnes non originaires du Congo ou des colonies voisines, tombées à charge de la Bienfaisance publique. (B. 0., 15 août 1920.)

Sociétés commerciales. Un arrêté royal porte, en annexe, les sta- tuts de la Compagnie Générale de l'Est Africain belge, qui a pour but de traiter dans l'i st Africain et dans toute l'Afrique, en général, des opérations commerciales, industrielles, foncières, agricoles, etc. Le siège social est établi à Luvungi, district du Kivu (Congo belge) et le siège administratif, à Bruxelles. (B. 0., 15 juillet.)

Katanga Handelsmaatschappij (Liquidation). Société décolo- nisation agricole au Mayumbe (Bilan au 31 décembre 1919). Compa- gnie Géologique et Minière des Ingénieurs et Industriels belges (Augmentation de capital. Changement aux statuts). Société Minière du Bécéka (Composition du conseil d'administration). Compagnie Générale de l'Est Africain belge (Procuration). Liste des brevets concédés et cédés du 26 janvier au 24 juin 1920. (Annexe au B. 0., 15 août 1920.)

Bilan de la Compagnie du Congo belge au 31 décembre 1919. (Annexe B. 0., 15 août 1920).

Constitution de la Société coopérative « Comptoir des Exporta- teurs belges au Congo. (B. A. C, 10 juillet 1920).

Tarifs de chemins de fer. Rapport du Conseil Colonial sur le décret autorisant le Ministère des Colonies à augmenter provisoire- ment les tarifs de la Compagnie du chemin de fer du Congo. (B. 0., 15 juillet). Une ordonnance porte modification aux tarifs et condi- tions de transport sur tout le réseau du chemin de fer du Mayumbe. (B. A. C, 10 juillet).

Télégraphes. Un arrêté ministériel stipule que le coût de la transmission de télégrammes ordinaires en service intérieur est de 30

642

centimes par mot à transmettre exclusivement par fil et de 50 centimes par mot s'il est fait usage de la télégraphie sansfil sur tout ou partie du parcours. La réponse payée par l'expéditeur est soumise aux mêmes taxes. Ces taxes sont doublées s'il s'agit de télégrammes urgents. La taxe terminale de la Colonie sur les télégrammes internationaux est fixée à 30 centimes par mot pour les télégrammes ordinaires de ou pour les bureaux des lignes terrestres de Banana à Coquilatville, de Borna au Mayumbe et de Sakania à Bukama. Klle est de 50 centimes par mot pour les télégrammes ordinaires orginaires ou à destination de tout autre bureau, (es taxes sont doublées lorsqu'il s'agit de communica- tions urgentes. Elles sont réduites de 50 p. c. pour les télégrammes différés et les communications de presse. (B. O., 15 juillet )

Un arrêté royal du 5 juillet et un arrêté ministériel du 15 juillet 1920 déterminent les conditions suivant lesquelles la franchise télé- graphique est accordée. (B. 0., 15 août 1920.)

Téléphones. Un arrêté royal autorise le Gouverneur général à établir des réseaux téléphoniques publics. (B. 0 , 15 août 1920.)

Terres. Une ordonnance du Gouverneur général décide qu'il sera ouvert à la conservation des titres fonciers, à Borna, un répertoire destiné à tenir à jour le relevé des propriétés par localités et par pro- priétaires ou titulaires de contrats de bail. Mention des superficies aliénées ou louées y sera portée. Les conservateurs provinciaux ouvri- ront un registre similaire. (B. 0., 15 juillet.)

Conditions générales de vente et de location de terrains libres de toute destination d'utilité publique dans les domaines du Comité Spécial du Katanga. (Annexe au B. 0., 15 août 1920.)

Territoires. Une ordonnance du Gouverneur général divise le district des Bengala en neuf territoires (B. 0., 15 juillet 1920.)

Transports fluviaux. Une ordonnance réglemente la police fluviale en ce qui concerne le chargement des bateaux et embarcations. (B. A.C., 10 juillet 1920).

Travaux publics. Un arrêté ministériel prévoit l'expropriation éventuelle de terrain et bâtiment en vue de l'agrandissement de la gare et des installations fluviales à Matadi. (B. 0., 15 juillet.)

Vaccination. Une ordonnance du Gouverneur général décide que les indigènes du Congo et les noirs assimilés sont tenus de subir la vaccination antityphique lorsqu'ils en sont requis.

Vente publique. Un décret du 10 juillet 1920 stipule les condi- tions dans lesquelles peut avoir lieu la vente publique de biens immo- biliers ou mobiliers (B. 0., 15 août.)

643

Bibliographie

LES REVUES, LES JOURNAUX, ETC.

Belgique.

L'Etoile du Congo (26 mai . La main-d'œuvre noire dans le Haut- Katanga. - (2 juin). La Malaria. (16 juin, 28 juillet). La main-d'œuvre noire dans le Haut-Katanga.

L'Echo du Katanga (12 juin). La culture du manioc et du maïs au Kisale.

Bulletin des Missions bénédictines belges (mai-juin). Mukabe-Kasari : l'école des catéchumènes et l'enseignement qui leur est donné, etc.

Revue de Droit international et de législation comparée (3e série, tome I, 1, 1920). La télégraphie sans fil et le droit international (Paul Fau- chille). Le droit d'angarie (Alb. Rolin». La responsabilité pénale des actes criminels commis au cours de la guerre de 1914-1918 (A. Mérignhac .

Revue Economique internationale (juin). L'internationalisme dans l'industrie. (La conférence de la fédération des industriels cotonniers à Zurich, crise de la matière première en 1920, amélioration dans la culture du coton, création de réserves de coton, possibilité d'une organisation internationale de l'industrie, etc.). L'avenir delà monnaie métallique. Une exposition impériale à Londres en 1923, etc.

Chasse et Pêche (11 juillet). Chasses aux colonies. La chasse auKivu. (18 juillet). La chasse au Kivu (suite .

Missions d'Afrique des Pères Blancs (15 août). Une tournée au Kivu.

La Tribune Congolaise (numéro spécial consacré à l'exposition colo- niale d'Anvers de 1920). •— Deux augustes figures. Le Congo belge. Les matières premières du Congo belge. La genèse de l'exposition. Ce qu'il y a à voir à l'exposition. La liste des stands. La Chasse et la Pêche. L'Agriculture et les forêts.

Annales de Gembloux (juillet 1920;. La culture moderne du riz au point de vue technique et économique.

La Patrie Belge (Ier août 1920). Le Ministre des Colonies en Afrique.— L'Hygiène au Congo.

Bulletin de la Société belge d'Études coloniales (juillet-août 1920). —La question de la dépopulation du Congo (Dr Dryepondt . A propos de che- mins de fer : Le Cap au Caire, les écartements de chemins de ter, etc.

L,a Renaissance d'Occident (août 1920. ouvre une enquête à l'effet de savoir s'il conviendrait de créer des bourses de voyages en faveur des écrivains et artistes belges. A cette occasion, la question suivante est soulevée : « Estimez-vous que ces bourses pourraient être convenablement utilisées

644

en servant à offrira leurs récipiendaires des voyages et séjour dans notre Colonie africaine?» Dans le même numéro, Notes d'un voyage de France au Congo.

États-Unis :

Commerce Rejjorts (Washington). - La concurrence commerciale aux Congo belge. (Rapport du 30 juin 1920, Consul général des États Unis, à Bruxelles.)

The American Historicdl Review (janvier 1920). L'esclavage et les débuts de l'industrialisme dans les colonies américaines. (Marcus W. Jer- negan.)

Commerce Reports (Washington, 17 mai 1920). Un rapport du consul américain à Dakar (Sénégal) expose la situation commerciale des colonies de l'Afrique occidentale y compris le Congo belge. Comme le commerce d'importation et d'exportation de ces possessions réunies s'est élevé en 1919 à environ 500 millions de dollars, le rapporteur préconise l'établisse- ment de comptoirs américains dans les ports principaux, notamment à Matadi .

France :

Journal Officiel de V Afrique occidentale française (o juin . Décret auto- risant le Gouverneur général à prendre les mesures nécessaires pour pré- venir l'accaparement des denrées de première nécessité. Arrêté portant modifications aux tarifs et conditions de transport sur les chemins de fer de Kayes au Niger et de Kayes à Ambidédi, des cuirs bruts, séchés ou salés et des peaux fraîches, séchées ou salées. Arrêté fixant la compo- sition des comités consultatifs appelés à émettre leur avis sur la taxation, en cas de disette, des denrées vivrières dans les colonies du groupe. (12 juin). Décret relatif à l'organisation du crédit aux sociétés coopéra- tives de consommation des Colonies. Arrêté soumettant à une visite sanitaire les animaux importés ou exportés par mer en Afrique occiden- tale française. (19 juin). Un décret iustitue un service colonial pour les ingénieurs des ponts et chaussées. Un arrêté ministériel autorise la substitution d'uue société anonyme au concessionnaire chargé d'exécuter des travaux d'irrigation de terres et développer la culture du cotonnier dans la colonie du Haut Sénégal et Niger. (26 juin). Un arrêté porte fixation des mercuriales officielles pour le calcul des droits ad valorem à l'entrée et à la sortie de l'Afrique occidentale française.

Journal Officiel de l'Afrique Equatoriale française. (le;' juin' . Un arrêté promulgue le décret visant la réparation des dommages causés par les faits de guerre . (1er juillet). Un arrêté autorise la location à bail à tout particulier des terres faisant partie du domaine privé de l'Etat. Un arrêté réglemente l'exploitation de l'ébène et des essences tinctoriales dans les forêts domaniales du Gabon non concédées.

Les matières grasses (lo juin). Les palmiers à huile d'Amérique. Considérations sur l'industrie d'extraction des huiles et ses principaux

645

appareils. (13 juillet). Le tourteau de palmiste et celui de quelques autres graines oléagineuses. La culture du ricin au Maroc.

Le bulletin financier de l'Indochine (4 mai). Le caoutchouc. L'indus- trie du copra aux Indes occidentales. (11 mai). Coloniser.

Les Annales Coloniales (13 juin). Le thé des colonies françaises. (17 juin). L'ivoire en Afrique Equatoriale française. (12 juin). Les trans- ports maritimes entre les colonies et la métropole. (26 juin). Le Cadastre aux Colonies. (1er juillet) . L'origine du cotonnier en Afrique orientale française.

Annales de V Institut Colonial de Bordeaux (décembre 1919). Essais de bois coloniaux pendant la guerre au Centre des, Bois de Bordeaux. Pro- duction du café et du cacao à SanThomé. Culture du jute aux Indes anglaises. Prix décernés à des ouvrages sur les colonies françaises. Dans une circulaire relative aux termes « blancs » et « noirs » usités à tort dans la correspondance officielle, le* lieutenant-gouverneur de la Haute-Volta invite les fonctionnaires à ue plus employer ces expressions dans leurs rapports ou correspondances de service, et à qualifier désor- mais les administrés « d'européens » ou « d'indigènes», suivant leur statut personnel légal. (janvier 1920). Les oléagineux : l'arachide. Bois coloniaux. Programme de l'Ecole coloniale belge d'Anvers, etc. (Février 1920). Essais de bois coloniaux (suite).

L'Afrique française (juin). L'Afrique de demain. L'âge de l'air en Afrique : « Au Congo belge ». Echos : Expositions coloniales, prix de la Société de géographie décernés à plusieurs Africains, etc. Posses- sions belges : Le développement du Katanga. ^S (Juillet-août). Possessions belges : Demande de réformes. La question des transports.

Renseignements coloniaux (supplément 6 de l'Afrique française). Les Souvenirs du général von Lettow- Verbeek. Le problème des grands travaux en Afrique occidentale française. Un nouveau livre sur le Libéria. (Supplément nos 7 et 8) . L'accord anglo-italien et la position de l'Italie en Afrique. La politique coloniale française. L'hommage de l'Académie française aux coloniaux, etc.

Bulletin de l'Institut Pasteur (n* 10, 30 mai). La peste bovine (L. Teppaz Recueil m éd. vét.). (n° 12,30 juin). Traitement de la maladie du som- meil par le sérum salvarsanisé.

La Gazette Coloniale (25 juin). La culture du coton au Soudan.

Bulletin du Comité d'Études historiques et scientifiques de l'Afrique Occi- dentale française (n° 1, janvier-mars 1920). Les roches gravées du Sénégal. Grottes et cavernes de l'Afrique occidentale. L'introduction à la culture du cotonnier en Afrique occidentale.— Régime foncier des indi- gènes dans le cercle de Goundam. Quelques coutumes de Kroumen du Bas-Cavally (Côte d'Ivoire), Les Guelowars, etc.

L'Exportateur français (8 juillet). Foire de Bordeaux en [9-21 : Une exposition des petites industries indigènes. L'Institut Colonial fran- çais. — Les colonies à la foire de Bordeaux. Le commerce de l'Afrique occidentale française en 1919. Les chambres consultatives du commerce. de l'industrie et de l'agriculture à Madagascar, etc.

646

Annales du Musée Colonial de Marseille (1919, 2e fascicule). Quelques palmiers congolais (E. de Wildeman». Étude bactériologique de la coagulation du latex d'hévéa (Denier et Vernet). Notes sur la composi- tion chimique de deux graines de palmiers de Madagascar (Or. Cloti .

Bulletin de l'Agence Générale des Colonies (avril 1920 . Introduction à l'étude chimique des celluloses des plantes à papier et des jmtes qu'elles fournissent. - Tonneaux français, tonneaux belges (d'après les Annales coloniales du 18 mars 1920). (Mai). Matières tannantes coloniales. Introduction à l'étude chimique des celluloses des plantes, à papier (suite et fin). (Juin-juillet). Les bois guyanais. La culture du coton au Congo belge.

Bulletin de la Société de Pathologie exotique (14 avril 1920). Prophy- laxie de la maladie du sommeil .-Nomination d'une commission. 1 12 mai). Essai de prophylaxie médicale de la maladie du sommeil dans l'Oubangui- Chari. Sur le fonctionnement d'un secteur de prophylaxie contre la trypanosomiase au Congo français.

La Revue Maritime (juin). De St. Raphaël à Dakar en hydravion.

L'Agronomie Coloniale (mars-avril 1920). Consommation delà France en produits coloniaux. (Mai juin 1920. Sur une maladie du palmier à huile aux îles San Thomé et Principe. Les plantes à papier coloniales.

Recherches sur les fruits et graines à huile.

Revue anthropologique (mai-juin). Quelques coiffures indigènes en Afrique occidentale française (17 figures) .

La Revue des Produits Chimiques ; 30 juin . Inventaire détaillé des ressources du domaine colonial français. Chapitre second : Le Sénégal (Industrie)

La Nature {3 juillet . Le Cadastre (ce qu'il a été; ce qu'il est ; ce qu'il sera). (17 juillet). La Da, plante textile du Niger français.

Annales de Géographie 15 mai . Chronique géographique : Le ve loppement du Soudan anglo-égyptien.

Bulletin des Matières Grasses de l'Institut Colonial de Marseille (no 2, 19:0). —La culture des arachides aux États-Unis. L'améliora- tion de la culture de l'arachide au Sénégal (I Rapport de Mission. II. La lutte contre les insectes attaquant les arachides. III. Note sur la sélection des arachides) Le droit différentiel sur les amandes de palme expor- tées des colonies britanniques.

L' 'Aéronautique (juhr. Paris-Alger-Tombouctou Dakar (Rapport du commandant Vuillemin sur son voyage de liaison transsaharienne;.

Les Cahiers Coloniaux (juillet). Deux grandes réunions internatio- nales coloniales : La Conférence franco- anglaise des négociants de l'Afrique occidentale à Londres ; Institut colonial international à Bruxelles.

L'interdiction d'exx^ortation des j)roduits coloniaux. Exposition coloniale de Marseille (Projet de loi).

L'Économiste Français (10 juillet). Le régime douanier du continent africain. (17 juillet). Le Soudan anglo-égyptien (qui englobe l'Enclave de Lado, régie autrefois par la Belgique).

, 647

La Revue Mondiale (15 juillet). La France et ses Colonies.

Revue agricole et vétérinaire de Madagascar (avril-mai juin 1920 Pro- jets de décret et d'arrêtés réglementant le domaine à Madagascar, la gestion du domaine privé, non forestier ni minier, le régime des conces sions, suivis d'observations.

Colonies et M arine '■ juillet-août 1920). - Le Cameroun.

L' Anthropologie (n° 1 2, 1920). Les différences sociologiques entre les sauvages et les anthropoïdes.

Journal officiel de la République française (12 août 1920). Décret insti- tuant une commission préparatoire interministérielle en vue de l'exposi- tion coloniale interalliée de Paris 15*25. il3 août 1920). Décret prescri- vant la visite obligatoire au point de vue de la trypanosomiase de toutes personnes quittant les colonies du groupe de l'Afrique equatoriale fran çaise. (20 août 1920). Décret accordant une concession d'environ cent- cinquante-mille hectares de forêts au Gabon, à l'Administration des chemins de fer de l'État et aux cinq grands réseaux de chemins de fer en France. L'objet de cette décision est de permettre aux chemins de fer métropolitains d'utiliser pour les traverses des voies ferrées les bois colo- niaux, la production des bois d'oeuvre en France subissant une inévitable diminution due à l'exploitation intensive des forêts au cours de la guerre. Il convient de souligner cette mesure qui développera l'utilisation des ressources forestières de l'Afrique française et incitera davantage les entreprises particulières à faire usage des bois coloniaux.

Grande-Bretagne :

South Africa (19 juin). NYASSALAND portugais : Des mesures ont été prises pour que le commerce ne retombe exclusivement aux mains des Allemands. Transvaal : Production aurifère en mai. Congo belge : L'or du Congo. Afrique australe : L'indigène en 1920 (éditorial). Le commerce et la vente de marchandises aux indigènes dans les mines. Les orangers de Jaffa pour l'Afrique du Sud. La question de l'égalité de race au point de vue du salaire the colour bar), etc. (10 juillet). La question indigène au Parlement de l'Union Sud-Africaine. La colonie de Kenia (ancien Est Africain britannique). La question de race au point de vue du salaire (the colour bar : la barrière de couleur). (21 août). A propos d'un éditorial du journal indigène Umteteli wa Bantu préconisant la barrière de couleur au point de vue social. Kenia Colony : La main-d'œuvre indigène dans l'Est Africain.

Board of Trade Journal [il juin . NigéRie : La situation du commerce en 1919. Straits Settlements : Les exportations de caoutchouc Côte d'Or : Le commerce en 1919. Afrique orientale anglaise: Projets d'impôts. Augmentation des droits d'importation sur les liqueurs distillées. NlGÉRIE : Important article sur le (lévelopx)ement de l'industrie cotonnière. AFRIQUE australe : Maintien de l'exemption de droits d'entrée sur certaines céréales 19 août 1920). Commerce direct entre les mines de l'Afrique australe et leurs employés ou ouvriers. Création à Londres d'une asso- ciation des producteurs de l'Est- Africain et de l'Uganda. Locale et le

648

caoutchouc dans le protectorat de l'Uganda. Projet de travaux d'irrigation dans l'Est- Africain portugais. Un emprunt de cent mille livres sterling a été proposé en vue de travaux publics dans la Colonie de Kenya (ancienne- ment Afrique orientale anglaise). Convention relative au trafic des armes. Uganda : Rapport et conseils delà Commission pour le développement de la culture cotonnière.

Sudan Government Gazette (20 mai). Règlement concernant les con- structions urbaines à Suakin.

African World (26 juin). Congo belge : Lettre de Bruxelles relative aux transports fluviaux, au chemin de fer Congo-Nil, aux diamants du Kasaï, à la Journée coloniale, etc. Afrique occidentale anglaise : Déve- loppement de la culture cotonnière. A propos du Congrès nègre de Xew- York du 1er au 31 août. Rhodésie : Affaires indigènes. Supplément spécial consacré à l'Afrique occidentale : La Côte-d'Or et son Gouverneur. La Côte-d'Or 1890 1920. (10 juillet). Les ressources en bois de l'Empire britannique. Une école pour l'étude de la vie et des langues indigènes. Congo belge : Les exportations effectuées au Congo en 1919. Une littéra- ture nègre (d'après La Tribune congolaise). Rhodésie : Les indigènes rhodésiens. Afrique australe : La chaire de bantou à l'université du Cap. La culture cotonnière. (21 août). Notre administration dans l'Est Africain, par Sir Harry Johnston. Le Congo belge. Les propriétés alle- mandes dans le Sud-Ouest- Africain, etc.

The Times (19 juin). Le sisal dans le territoire du Tanganika (perspec- tives actuelles, frais de premier établissement, production, etc.).

The Times Trade Supplement (10 juillet) L'industrie du caoutchouc aux États-Unis.

Tropical Life (juin). A propos du_projet d'association internationale en vue du développement et de la protection de l'industrie des huiles végé- tales L'exploitation de l'huile de palme à Zanzibar.

Engineering (9 juillet). Les ressources forestières de l'Empire britan- nique : A propos de l'exposition des bois coloniaux, le journal cite des essences de l'Est- Africain anglais convenant à l'exportation. Une variété de bois de fer : le musharage, convient pour la confection de billes de chemin de fer et de wagons; l'ekki, des marais et des forêts humides de la Nigérie et de la Gold Coast, peut être utilisé pour les constructions navales. Il convient encore pour le pavage des rues. Le « Mweri » est un bois de carrosserie.

N y as aland Government Gazette (31 mai). Règles visant l'application de l'ordonnance de 1910 concernant le coton.

Government Gazette Accra, Gola Coast, West Africa (12 juin). Projet d'ordonnance en vue de régler les rapports entre employeurs et employés (contrats de service).

Journal of the African Society (juillet 1920). Les mammifères de l'Afrique. Les tribus indigènes de l'Est africain britannique. Le minerai de manganèse de la Gold Coast. Le corps médical indigène en

649

Afrique. Le bantou à Madagascar. L'Afrique et la Société des Nations, etc.

United Empire (août 1920 . Maladies tropicales. L'activité du Royal Colonial Institute, etc.

West Africa ^21 août). L'industrie de l'huile de palme. Une commis- sion américaine chargée d'étudier le problème de l'instruction indigène dans l'Ouest africain séjournera au Congo belge, l'an prochain, de la mi-avril à la fin juillet.

The Garden s Bulletin (28 juin). Le palmier à huile. La culture du ricin. Le bétel, etc.

Catalogue de l'exposition des bois de l'empire britannique organisée à Londres du 5 au 17 juillet 1920. Cet ouvrage de 323 pages donne la liste des échantillons exposés et des exposants. Le chapitre II contient la liste alphabétique des noms botaniques se rapportant aux essences exposées, avec une description des caractéristiques, habitat, usages. La liste des exportateurs de bois dans les pays d'origine forme le chapitre III. Elle est suivie de la liste des importateurs dans le Royaume Uni, et dune bibliographie. Un index alphabétique donnant, en regard de la désignation botanique, le nom vulgaire ou commercial des bois, termine utilement ce catalogue.

The British and South African Export Gazette (août 1920). Le com- merce hollandais avec l'Afrique du Sud. L'industrie des huiles végé- tales en Rhodésie. La fabrication du papier en Afrique australe. La Colonie de Kenya. Outils de jardinage pour l'Afrique australe. Les achats de matériel ferroviaire pour l'Afrique australe. Le tonnage anglo sud-africain.

Italie :

Scientia (1er août 1920). L'expansion européenne et ses phases (P. Silva), etc.

Rivista Coloniale (mai-juin 1920). L'évolution historique de la poli- tique économique coloniale. Législation coloniale italienne, etc.

Union de l'Afrique du Sud :

The South African Journal o f Industries (juillet 1920). La force motrice appliquée à l'agriculture. Glucose et amidon du maïs. Engrais naturels de l'Union.— Le fer et l'acier dans l'Union Sud Afri- caine. — Rapport annuel du service géologique. Propagande par le cinématographe en vue de faire connaître les ressources, l'industrie, les débouchés de l'Afrique du Sud.— Les moyens de transport dans l'Afrique du Sud. Notes climatériques. Tableau de la production minière, etc .

South African Mining & Engineering Journal (31 juillet 1920'. Hist< - ri que de l'industrie du fer et de l'acier dans l'Afrique du Sud.— Les res- sources en fer. Le développement de la production houillère, etc.

- 650

Divers :

Der Tropenflanzer (avril 1920). Sur la culture du cocotier. Un sup- plément (Beiheftzum Tropenflanzer) de 68 pages est consacré à la banane, aux plantations de bananiers et à l'utilisation des bananes. (mai-juin). De l'exploitation du cocotier. Un supplément d'une cinquantaine de pages est co isacré à la gangrène du cocotier (bud ret).

Koloniale Rundschau (juin 1920;. L'avenir colonial. La psychologie indigène considérée comme une science. D'un programme économique en Afrique centrale, etc.

A nthropos (septembre-décembre 1917-19H . Du développement maté, riel des caffres. Contribution à l'étude de la grammaire bantoue. De l'étude des religions primitives. Le problème du totémisme, etc.

LES LIVRES.

M. Dewavrin, P. Delibert, M. Houdard, Comment mettre en valeur notre domaine colonial, Paris, 1920.

Depuis la guerre, un mouvement colonial soutenu et dirigé par une intense propagande, se dessine chez nos voisins du Sud. Livres, brochures tracts, articles de revues consacrés aux questions d'expansion se multi plient à l'envi. Les grands périodiques de vulgarisation qui faisaient naguère une place peut être trop étendue aux romans et aux banalités théâtrales courantes, accordent toute leur attention aux problèmes poli- tiques et coloniaux. Voici encore un de ces ouvrages bien documentés, l'importance des possessions d'outre-mer est fortement mise en relief. « Dans tous les compartiments de l'activité- économique, écrivent les auteurs, nous avons constaté la nécessité d'efforts considérables à accom- plir Parmi les richesses multiples que cache dans son sous-sol, que pour- rait tirer de son sol et exporter telles quelles ou mises en œuvre, notre domaine colonial, combien sont inexploitées » (p. 183). Et voici en deux mots posée la grosse question des transports : c< Il faudrait pour bien faire, construire dans l'ensemble de nos colonies un réseau de chemins de fer au moins égal à celui de la métropole, sans parler des routes et autres ouvrages. «Les communications entre la mère patrie et la France d'Outre- mer ne devront pas davantage être perdues de vue. Cette question n'est d'ailleurs qu'un cas particulier du grand problème de la marine marchande française d'après-guerre .

Xous pourrions, nous Belges, tirer quelque profit de considérations si si avisées. Et au sujet de la main-d'œuvre : « Le problème de la main- d'œuvre présente peu de difficultés en Indo-Chine, pour le riz et le caout- chouc, au Dahomey, pour l'huile de palme, au Sénégal, pour l'arachide, j)arce que la population est habituée à ces cultures. Mais ailleurs... le recrutement du personnel inférieur agricole, minier, manufacturier est et restera laborieux » (p. 184 .

651 -

Les auteurs sont résolument partisans de l'immigration de colons Iran çais les circonstances climat ériques permettent la colonisation de peuplement et ce, malgré la terrible saignée infligée à la France par la guerre mondiale. Ils n'hésitent pas à préconiser l'introduction en France de la main d'œuvre étrangère et une petite quantité d'indigènes des pos- sessions françaises, plutôt que de posséder des colonies a la popula- tion européenne appartiendra en majorité à d'autres nationalités ».

Pendant plus de quatre ans, écrivent ils, notre patrie a vu lutter pour son existence sur les champs de batailles, des milliers de ses enfants. Aujourd'hui, en abordant le problème colonial, elle renouvelle sous une autre forme le même combat, car l'alternative est inéluctable : la France sera une grande puissance coloniale, ou elle ne sera pas p. 188).

Paroles graves et qui détonnent un peu au milieu de l'enivrement de la victoire Et cependant, l'illustre Galliéni, quelques mois avant sa mort, ne se lassait pas de répéter que les Allemands, avant la guerre, ne respec taient la France qu'en tant que puissance colonisatrice, pour ce qu'elle avait su réaliser en Afrique et en Asie. Et cela ne peut être mis en doute. (Maricjs-Ary Leblond, Les dernières semaines de Galliéni, Revue hebdo- madaire, 24 juillet 1920, p. 431.)

Réfléchissons un peu à tout cela et tâchons d'en tirer parti.

T. S. *

Deustches Koloniallexicon, herausgegeben von Dr H. Schnee Leipzig, 1920, 3 vol.

-L'ouvrage est dédié : « dem deutschen Volk, mit dem heissen Wunsch, dass miser Vaterland bald zu erneuter grosse Wiederstehen und seine mit so guten Erfolg begonnene Kulturarbeit über See wieder aufnehmen moge ».

Grâces soient rendues au Dr Schnee, ci-devant gouverneur de l'Est afri- cain ! Mais, nous, i^as plus que nos amis anglais et français, nous ne sommes d'humeur à lâcher ce que nous avons pris. Ce que nous tenons, nous le tenons bien, disait feu von Bissiug d'illustre mémoire. Ainsi, le Dr Schnee s'épanche en espoirs superflus. Nous avons vaincu, et nous sau- rons, mieux qu'Annibal, profiter de la victoire.

Mais, pour en profiter au mieux de nos intérêts, il convient cependant de reconnaître et de mettre en -pratique les précieuses qualités d'organi- sation et de ténacité qui ont permis à nos adversaires de résister au monde entier pendant quatre longues années.

Et c'est ce même esprit de méthode, de collaboration disciplinée que révèle l'examen de ces trois énormes volumes. Le Deustches Kolonialhwicon est une véritable encyclopédie des connaissances relatives aux colonies allemandes en 1914. Toutes les questions possibles et imaginables ont été traitées largement, mais avec précision, par des spécialistes en chaque matière.

Ainsi, parmi les collaborateurs de cette oeuvre gigantesque, nous relè vous les noms de von Danckelmann, K. Dove, P. Matschie, 11. Mar- quardsen, G. Meinhof, O. Meyer. S. Passarge K. Rathgens, A Reicheuow, J. Schmidlin, le P. Schmidt, F. Stuhlmann, G. Thilenius. K. Weule et d'autres autorités scientifiques. L'ouTrage est accompagne de cartes et

652

d'admirables clichés explicatifs. Les articles importants sont suivis de la bibliographie appropriée au sujet.

Je le répète : l'œuvre donne l'impression du « colossal », mais d'un colossal ordonné, méthodique et discipliné. Et il y a quelque chose d'un peu humiliant pour notre amour-propre à devoir constater que nous ne sommes pas en mesure d'exécuter une œuvre pareille. Quand je dis «nous», je songe particulièrement à nos alliés d'outre- M anche. Comment les savants anglais n'ont-ils pas encore songé à dresser un pareil réper- toire de leurs colonies? Comment l'initiative de semblables entreprises doit-elle toujours venir de l'autre côté du Rhin?

J'avoue, pour ma part, avoir éprouvé un ressentiment de stupéfaction profonde, en constatant à ma rentrée à la bibliothèque d'où nous avions été expulsés manu militari en 1914, que le Dr H. Waltz, de l'Institut de Hambourg, avait profité de son séjour dans nos bureaux pour composer, à l'aide de documents puisés dans nos revues et nos archives, deux gros volumes sur le régime des concessions au Congo (Das Konzessionswesen in belgischen Kongo. Eerlin, 1917), qui constituent le répertoire le plus com- plet qui existe sur les sociétés congolaises, leurs administrateurs, leur historique, leurs bilans, leur activité commerciale, etc.; le tout accom pagné de cartes et de diagrammes de la plus grande précision.

Après celle-là, me disait un collègue, on peut tirer l'échelle.

T. S.

Général Lyautey. Lettres du Tonkin et de Madagascar (1894-99), 2 vol.

Paris, 1920.

En recevant sous la coupole le nouvel académicien, qui, modestement» arguait de sa mince production littéraire et de son peu de valeur, Mgr Duchesne répondait spirituellement au général Lyautey qu'il n'était pas si convaincu que cela de son incompétence littéraire, puisqu'il publiait ses lettres du Tonkin et de Madagascar.

Sans doute, l'Académie, en admettant l'organisateur du Maroc dans son sein, n'a pas voulu lui décerner un brevet d'écrivain de premier ordre. Elle a discrètement voulu reconnaître qu'un « Empire builder » valait bien un romancier à la mode et qu'il ne suflisait pas de tourner joliment des phrases ou des vers, pour incarner la quintessence du génie français.

On écrivait peut-être un peu trop en France avant la guerre. Et il n'est pas mauvais que, de temps à autre, un hommage public récompense le dévouement et l'abnégation dont les hommes d'action ont fait preuve au service de la grande France.

Ainsi, ce n'est pas la qualité littéraire des lettres de Lyautey qui nous intéresse, mais plutôt les enseignements qu'elles apportent au sujet de la politique coloniale.

A la fin de son ouvrage surtout, Lyautey discute les mérites respectifs du régime militaire ou du régime civil dans les colonies. Ce sont des éti- quettes, dit-il. Que l'habit du chef soit civil ou militaire, la chose est indifférente, une fois l'homme bien choisi pour cette raison qu'il n'y a pas deux manières (j'entends bonnes) d'exercer le commandement colo- nial : il y en a une ; et celle exige des qualités qui sont à la fois mili- taires et civiles. Le chef militaire ne doit pas seulement commander

653 -

l'exercice et connaître àla lettre des règlements, mais bien posséder le don naturel du commandement, la décision, l'activité communicative la promptitude du coup d'œil, etc. Et l'administrateur colonial ne doit pas seulement connaître ses règlements et ses circulaires, être un parfait « rond-de-cuir », qu'on me passe l'expression mais être doué d'ini- tiative, du sens des responsabilités, faire appel constamment au bon sens (notre glorieux général marque ici que l'intellectualisme et le culte de l'action peuvent parfaitement s'associer), interpréter largement et libéra- lement les décrets, bref, faire montre de qualités aussi nécessaires au chef militaire qu'au chef civil.

Vainement on cherche la démarcation. Il n'y a ni militaires, ni civils, mais simplement des.. . coloniaux.

Pour Lyautey comme pour Galliéni, ce qu'on appelle conquête ou impérialisme que nos humanitaristes ne se voilent pas la face c'est tout simplement « une organisation qui marche ». C'est le vieil esprit de Rome forte mais pacificatrice, qui veut faire régner dans le monde entier l'ordre et la sécurité, et qui règne par l'épée mais aussi par le charrue. Ense et aratro : la devise de Bugeaud en Algérie fut aussi celle de Lyautey à Madagascar et au Maroc. T. S.

P. H. VANDERYST, Notions élémentaires concernant les maladies tropicales .

Bruxelles, 1920.

M. le docteur Broden a préfacé cet ouvrage et il l'apprécie comme suit : Ce petit manuel sera à l'avenir un excellent vade-mecum que l'on retrou- vera dans toutes les missions : il dispensera de l'acquisition de divers ouvrages de protozoologie, bactériologie, médecine coloniale. L'auteur expose en peu de mots les symptômes essentiels des maladies, décrit les méthodes d'examen qu'il a pu expérimenter lui-même.

E. D. Morel, The Black Mans Barden, Manchester 1920.

M. Morel, qui devrait chercher à se faire oublier après certains inci- dents, continue sa bruyante et tapageuse campagne en faveur des nègres . Il propose des réformes humanitaires dans le gouvernement des colonies africaines. Son livre est divisé en trois parties : I, Slave Trade ; II, Inva- sion, Political Control and Capitalisme Exploitation; III, Réparation and Reform .

M. Heepe, Jaunde-Vesete. Von Karl Atangana und Paul Messi.

(Abhandl. des Hamburg. Kolonial-Instituts Bd. XXIV.) Hamburg, 1919. Ce sont des essais de phonétique expérimentale sur la tonalité des langues Jaunde et Vesete (Camerun), suivant les méthodes et les principes de C. Meinhof. Les textes sont traduits en allemand.

H. J. Collard, Petite grammaire du Lala-Lamba tel qu'il se parle de Sakania àElisabethville. Elisabethville, 1920.

C'est un petit manuel sans prétentions scientifiques, mais utile et bien composé (grammaire et vocabulaire) . L'auteur a très bien remarqué le caractère synthétique du Haut ou

- 654

comme beaucoup de langues primitives d'ailleurs et, comme consé- quence, le grand nombre de verbes qu'il renferme.

Le Lala-Lamba est parle dans toute la région Sud et Sud-Est d'Elisa, bethville et il révèle des affinités étroites avec les dialectes voisins. Wisa, Bemba, Lunda, Auslii et Kaonde.

E.. MaüNIER, Manuel bibliographique des sciences sociales et économiques.

Paris 1920.

Nous signalons à l'attention de nos lecteurs ce manuel qui renseigne les principales bibliographies l'on peut se documenter sur les grands pro- blèmes sociaux ou économiques. Il y a un chapitre consacré aux sciences coloniales (pp. 163-171). Tout ce qui concerne les colonies françaises a été assez bien relevé. Mais il y a des lacunes dans le texte des recueils biblio- graphiques relatifs aux colonies étrangères.

S. M. MOLEMA, The Bantu, Past and Present. An ethuographical and histo- rical Study of the Native Races of South Africa, Edinburgh, 1920.

L'auteur de ce livre est un Bantu. Il descend d'une famille de chefs Barolong, sous-tribu desBechuana. Il écrit l'anglais àla perfection et étale une érudition livresque du meilleur aloi Et c'est justement cet étalage d'érudition européenne qui nuit à son ouvrage. On s'imagine volontiers qu'un Bantu, étudiant ses frères de race et de langue, va nous dévoiler leur psychologie spéciale, leur mentalité si différente de notre logieisme euro- péen. Or, il n'en est rien. Tout ce que l'auteur nous dit des coutumes, des manières, des pratiques religieuses bantous, nous le savons depuis long- temps. Tout cela a traîné dans tous les livres, avant d'étoffer la compi- lation de M. Molema. Je le répète : l'auteur a trop lu, beaucoup trop lu d'ouvrages anglais. 11 ne parvient pas à digérer ses lectures ni à en faire sortir quelque chose d'original et de personnel, quelque chose qui ne soit pas du penseur européen. Aussi, le lecteur de ce livre sera profondément désappointé.

Il y a mieux. Nous pourrions même relever dans son exposé des erreurs et d'impardonnables omissions. On n'y trouve, par exemple, aucune allusion au matriarcat, ni à la culture associée à ce système social.

Seule, l'historique des migrations peut fournir des données nouvelles. Les considérations sur les conflits raciaux dans le sud de l'Afrique ne manquent pas d'intérêt. L'auteur déteste cordialement les Boers, mais en revanche, se montre anglomane très décidé. Il défend également avec ardeur la thèse de la perfectibilité des Bantous et réclame, en leur faveur, une plus large part dans l'administration de la colonie.

T. S.

A. De BAUW. Katanga, het land, zijne hulpbronnen en toekomst. Met voorrede van Ernest Dubois, lid van den Kolonialen Baad. Ant- werpen, De Xederlandsche Boekhandel, 1920. (150 blz., 102 platen.)

Deze vertaling van het in het Fransch gestelde werkje van den heer De Bauw komt te goeder ure. Het is een treurige hebbelijkheid onzer

655

burgerklasse dat zij in het koloniaal werk onzer landgenooten niet veel meer belang stelt dan in de gebeurtenissen op Fiji eilanden ! Wat er ook in België door oningewijden worde rondgevent aan smaad en verdacht- making van de koloniale loopbaan, er valt niet langer meer aan te twij- felen of er ligt voor durvers en doeners een prachtig arbeidsveld te wachten in de rijke streek van Katanga. Het zou moeten volstaan te wijzen op het hooge getal der vreemdelingen die in Katanga verblijven (!,399 tegen 1,071 Belgen», om bij ieder de overtuiging nader te brengen dater wel degelijk 'n toekomst is voor alwie de handen uit de mouwen schudt en de krachten van zijn wil en brein te nutte stelt in dit jong, veel-belovend en veel gevend land.

Nu is het zeer goed mogelijk dat de beschrijving van Katanga door den heer De Bauw wat rooskleurig getint is en de keuze der platen is er dui- delijk op aangelegd om een optimistische stemming bij den lezer te wekken. Maar zoo naïef zijn de lezers toch niet om te denken dat in Katanga alle menschelijke kwalen uitgeleefd zijn of dat het goud hun in blinkende brokken op den schoot wordt gebracht. En het doet heusch verkwikkelijk aan, een man als den heer De Bauw met geestdrift te zien schrijven over de streek die hem lief is geworden Overigens moet erkend dat de schrijver eerlijk heeft gepoogd een waar en betrouwbaar kijkje te geven op die prachtige brok van ons koloniaal gebied die wellicht bestemd is om een overwegende rol te spelen in de ontwikkeling van het Afri- kaansche vasteland. Al. Janssens.

Dr O. De Valkeneer. Guide pratique d'hygiène coloniale, Bruxelles, 1920. (310 blz.) Prijs : fr. 6.50.

Voor iedereen die naar de tropenlanden gaat is een grondige kennis der gevaren welke zijn gezondheid bedreigen, der voorbehoed- en geneesmid- delen onontbeerlijk. Het handboekje van Dr De Valkeneer heeft de groote verdienste van kort en klaar te zijn. Verheugend is het te mogen vast- stellen dat de algemeene gezondheidstoestand in de kolonie merkelijk verbetert. In 1905 stierven er 143 blanken (op 2,511); in 1910, 112 op 3,399 ; in 1917, 73 op 6,265. Het getal der geneesheeren is echter nog altijd verre van toereikend.

Met recht steunt de schrijver op de meer dan gewone energie en wils- kracht die noodig zijn om het leven van den kolonist dragelijk en vrucht- baar te maken. Maar logischerwijze volgt daaruit wel dat het hoofdstuk over de venerische ziekten kon achterwege blijven. Zij die aan zulke ziekten lijden of zwak genoeg zijn om er zich aan bloot te stellen, zijn niet geschikt om het beschavingswerk van het zwarte ras vooruit te helpen.

Dat het vraagstuk der uitwijking van gehuwde pareu zoo maar niet rakelings valt op te lossen, moet grif worden erkend. Maar Dr De Valke- neer steunt wat te ve 4 op de gevaren der zwangerschap. Wie het voor en tegen in de weegschaal legt, zal vanzelf tot de overtuiging komen dat het belang der negers en de goede naam van het vaderland evenzeer, slechts kunnen gebaat worden door het scheppen van een gezonde en normale atmosfeer, zelfs wanneer aldus de blanke vrouw eenig risieo van

656 -

ziekte op zich neemt Moed en mannelijkheid passen niet alleen den kolo nist, maar ook zijn gezellin. A. J.

Fr. Gabriel. Essai d'orientation de l'enseignement et de Véducation au Congo. Bruxelles, Dewit, 1920. (31 blz.

De schrijver behoort tot een onderwijzende kloostergemeenschap die rijk is aan ervaring en reeds ettelijke jaren is Kongo is gevestigd. Zijn bevindingen over het negerondèrwijs, hoe eenvoudig en vanzelfsprekend ook, zijn hoogst verdienstelijk. De zwarten zijn vooralsnog niet ontvan- kelijk, meent hij, voor eene hoogere intellectueele kuituur. Er is ander en dringender werk te verrichten dan de negers vertrouwd te maken met de geheimen der wetenschap. Laat de zwarten stevig gegrond worden in de kennis van stielen en ambachten die hun een eerlijk bestaan zullen ver- zekeren ; leert hun hoe zij gezonde, wel verlichte en verluchte huizen kunnen bouwen ; hoe zij zich zullen voeden en kleeden naar de regels der gezondheidsleer waarover zij, tot hun groote schade, geen of verkeerde begrippen hebben; vormt in hen, door jarenlang voorbeeld en ten prijze van veel ontgoocheling, den werklust die de hefboom is van eiken vooruit- gang. Zet de kroon op die opvoeding door de zedelijke en godsdienstige werking die alleen in staat is om een vervallen ras op te beuren uit zijn erfelijke ellende.

Er klinkt in dit boekje een jammertoon op over de diepe misstanden welke het opbouwen van een negerfamilie in den weg staan. De veelwij- verij is stellig de onoverkomelijke hinderpaal van het beschavingswerk, onoverkomelijk zoolang als het recht der zwarte meisjes om zichzelf te zijn niet daadwerkelijk wordt erkend. Op dit stuk herhaalt de schrijver wat in de laatste jaren zoo menigwerf werd geschreven over den jammer- lijken toestand der veelwijversvrouwen in de Revue Congolaise en Onze Kongo . Maar het moet altijd herhaald tot de oogen opengaan van hen die de wet stellen in Kongo.

Een groote Afrikaan, Augustinus van Hippone, schreef : « Geeft me andere moeders en ik zal u een andere wereld geven. » We zeggen hem na : « Geeft ons vrije Kongoleesche vrouwen en we geven u een beter Kongoland. » A. J.

CONGO avec les Renseignements de l'Office Colonial

(Novembre).

CENEX

Société Générale d'Exportation

VAN SANTEN & VAN DEN BROECK

18 et 20, RUE DES RECOLLETS, ANVERS

Téléphone 5246 Adresse télégraphique : GENEX-ANVERS Bureaux Londres : Great Tower Street. E. 0. London

Fournisseurs du Ministère des Colonies, des Missions Catholiques et Principaux Établissements et Sociétés Coloniaux.

Spécialité d'Articles d'Exportation

vers le Congo et la Côte Occidentale d'Afrique

.4L1HEXT.1TIOX (Monopole de la Maison Rëdel A fils, frères de Bordeaux) : Bière, Biscuits de mer, Beurre et Saindoux, Conserves de viandes, légumes et poissons. Conserves de viandes et poissons pour indigènes Eaux minérales, Farine hongroise spécialement préparée pour

V.«^ekiailC0°denle et sténIlsé' Riz et légumes secs, Sucre et épices, Sardines de traite.

TlSfelU» DE COTON (Tissus de Manchester de la Mai*ou James V. Utitton A

TicT! } : .Lo^vert.u e.s en tous. genres, Foulards, mouchoirs et écharpes, Pagnes en tous genres matriasmPrimeS mdiennes' Tlssus pour confections, Tulle pour moustiquaire, Velours, toiles à

rafrrnfc'!L^EII,EM r * ME,lCEItIES ; Bas et chaussettes, Bonnets de coton, Boutons, Bretelles, basques coloniaux. Casquettes et smoking caps, Ceintures en cuir, coton et élastiques, Chapeaux de w?a ra ie' Chaussui;es en cuir> toile à voile en toutes qualités, Chemises en tous genres et i 2 1 ! S ?#SMen,,lOUS gecnres1' Espadrilles, Fez et chéchias, Fil à coudre. Guêtres,

iwfe tïï/T 1 et°^e' MailI°tS et SlDilets' Martin Sprin^ beIls' Parapluies et parasols, Ser- viettes de toiliette et essuie-mains, vieux effets réparés et désinfectés.

H«m^WCA,»ILIjMi*,IE*:.Aig,?ille1s a- coudre' Anneaux en cuivre, laiton, métal blanc, etc., Articles p MAm?ï email*es et etame.s' Assiettes fer-blanc, Cadenas et serrures, Canifs, Chaînettes en laiton pu = « i lë' Clseaux' ,Gla,rons et instruments de musique, Clous dorés, Couteaux de table, de cuisina de chasse etc Cuillères et fourchettes Faïence, assiettes, cuvettes bols, mugs, etc Fers ?nïESeT de îU1!re et de laiton, Hameçons et articles depêche, Houes haches hachettes Senes' HW? ' internes et photophores, Limes et scies, Machettes en tous genres et toutes d mensions Machines a coudre. Malles en bois et en fer, Miroirs cadre bois et zinc, Peignes Pelles

^»e.S^aS^S' Reveils-mann et montre, Serpes et faucilles Sonnettes et grelots.Verres à boire.

«E^«f au FAÜSSE ■wouTKBiB : Bagues, Bracelets, Boucles d'oreilles, etc. loJÎ * i ett«' Al"ldoJn' BJan,Ç Pour casques, Bougies. Cartes à jouer Cauries et coqui- lages, Cigares et cigarettes, Cordes ficelles et cordages, goudron, poix et peinture. Meubles en fer et en bois, Parfumerie extraits d odeurs, huiles, pommades, etc Sacsjute. libre de coco, toile etc Savon en barres et parfume, Sel fin. gros, etc., en sacs ou en touques, Tabac en feuilles et en paquets, Pétrole, Pipes en bois, en terre, etc.

IMPORTATION-CONSIGNATION

de tous produits d'Afrique

=== Marques déposées : GENEX-SGE ====

EMBALLAGES

Installation pour emballages spéciaux pour les transports en Afrique

Envoi en Afrique de prix-courants et échantillons sur demande

Prix établis sur demande

Franco bord : Anvers, Liverpool, Hambourg, Rotterdam ou le Havre

Coût fret et assurance : Matadi ou Borna

Franco de port rendu : Kinshassa

VÏE P.J.Lefrancq

30, Avenue Fonsny, 30 = BRUXELLES

COMBATTEZ le mal du pays au Congo par une habitation fraî- che et riante en la peignant

au

DURESCO

peinture prête à l'emploi, mate, lavable, artistique, hygiénique, spéciale pour PAYS CHAUDS.

En boîtes métalliques hermétiques de 5 kilog.

Votre Boy peut l'appliquer

Fournitures Générales pour la Chirurgie et la Pharmacie

F. BRASSEUR

BRUXELLES

Installations complètes pour Hôpitaux, Mobilier opératoire. Stérilisation, Lava- bos, Meubles pour malades.

INSTRUMENTS DE CHIRURGIE

Pansements aseptiques et Antiseptiques hygiénica. Accessoires de Pharmacie, Caoutchouc souple et durci, Bas à varices, Bandages, Ceintures, Corsets, etc.

Bureaux et salles d'exposition :

149, Rue du Midi, 149

(Place Rouppe)

Téléphone : Adresse télégraph. :

Brux. 111.94 Chirurgica Bruxelles

Liebers-Code. A. B. C. 5e édition

Vve THIROUX & Fils 10, Rue des Boiteux> Bruxelles

1 Téléphone : B. 2354

Fournisseurs du Ministère des Colonies et de nombreuses Sociétés congolaises

ARTICLES DE .MERCERIE POUR L'EXPORTATION

BOCTOIi de corozo, de nacre, de porcelaine, d'os, de métal.

Aiguilles, épingles, dés, ciseaux, miroirs, nécessaires de mercerie.

FILS .A. COUDRE ET AUTRES

£&ubiins, lacets, salons de coton en couleurs, dentelles

Bretelles, Jarretelles, Ceintures en tissu élastique et en cuir

I ^"S** Wr *f'l

MARQUE DÉPOSÉE

lâituiiiciure Cotourale <ie Ubacs, Cigares, Cigarettes

Article divers pour FumeuK. Spécialité pour colonies

IMPORTATION Groë «*t demi-gros EXPORTATION

G. VAN MAELE-WEYSEN = S^»»x3

Fournisseur du Ministère des Colonies, Sociétés Commerciales et Missions

Exposition de Bruxelles 19J0, MEDAILLE D'ARGENT

MANUFACTURE DE VÊTEMENTS CONFECTIONNÉS

pour

Maison VAN BUGGENHOUDT

e Congo et les pays tropicaux

107, Boulevard du Midi BRUXELLES

Costumes en tous genres pour Européens. Pij amas. Caleçons. Chemises. Costumes de toutes formes en blanc, khaky et bleu, Chemises de flanelle. Tous les vêtements indigènes de toutes formes, tels que burnous, paragias, chemises et surtouts arabes, culottes musulmanes, etc., etc.

Prix sans concurrence. EXÉCUTION RAPIDE ET SOIGNÉE

Téléphone : II. 2554

POUDRERIES RÉÜNIMDElBELGJQÜEloc,érÉAi,oNYj

57Ô.BOU LEV^^Mj^^^l^ B RUXELLES

Poudres no i ets gojvi primëes^ ^sfiij

ET ENGRAlNESP^^R.LESJLlISEg

LA CHASSE ET LMÜIEaRE^^ygg

Poudres F. FF.FFE^^^^^^^^ffl'

A MECHES -ETC.ETG

^DÉTONATEURS

NlTRO COTON SBaSrfS^

^^^jJlJ^^^r^^^g^^lLECTRI Q U ES

"py^^@jr,-yr^R D 1 NA I R ES

Poudres sans fumée en lamelles. paillettes

ET EN GRAINS POUR LA GUERRE ET LA CHASSE POUDRES POUR PISTOLETS AUTOMATIQUES

^rgMiECHES DE SURETE ^^^POUR MIMES

Cartouches de chasse Mulleriteetclermonite

Prière de demander la notice 27.

John P. Best &

36-37, Place Verte ANVERS

Service régulier rapide par steamers

de la

Unîon-Castle

Mail Steamschip Company Ltd.

entre Anvers et Capetown, Algoa Bay S (Port Elizabeth), East-London, Natal (Durban), Delagoa Bay (Lourenzo Marques), Maurice, Beira, Chinde, Mozambique, Port Amelia, Dar- es- Salaam, Zanzi bai-, Mom- bassa (Kilindini).

Service de transports en destination

du

KATANGA

"■ cAPirTr -

SOCIETE

ComULB & MINIÈRE

DU CONGO

SOCIÉTÉ ANONYME

Siège social : BRUXELLES

S. CM. ELISABBTHVILLB

Magasins de gros et de détail

Vivres-Conserves

E titre prises

Vins

Générales

Toutes espèces de

de Travaux Publics

Marchandises

et Privés

Grand Stock

Matériaux de

Automobiles

Construction

Motocyclettes

Ateliers de

bicyclettes et Pneus

Menuiserie et

.le toute Marque

Scierie mécanique

Minoterie à vapeur

Fournitures pour

Atelier mécanique

Installations d'eau.

pour

d'électricité, etc.

toutes réparations

Juin

OXILOL

Assure la sauté du bétail en écartant les mouches, les moustiques

et les tiques et en hâtant la cicatrisation des plaies.

a UI f\i désinfectant assure le confort et la santé

aux Blancs habitant la Colonie.

Doit être demandé par tous les Européens séjournant au Congo belge.

•IJ-*. Chaussée de Mons Bruxelles

POUDRERIE ROYALE DE WEITEREN

Fondée en 1778

COOPPAL et CIE

SOCIÉTÉ ANONYME

WETTEREN, près Gand =

USINES a WETTERBN, GAÜLILLB et MATAGNE-LA-BRANDB

Poudres de chasse NOIRES et SANS FUMÉE en tous genres,

Poudres de mine en grains et en cartouches comprimées,

POUDRE DE TRAITE POUR LES COLONIES,

TONITE

Dynamites Détonateurs Mèches.

CAETOUCHES IDE CHASSE

PRIX SPÉCIAUX POUR L'EXPORTATION

S. A. L'ÉTOILE DU CONGO

^ ^ Agences Commissions Consignations

IMPORTATION PRODUITS ALIMENTAIRES EXPORTATION

Vin». Liqueurs, Cigares, Tissus, etc. Emhsillasçe spécial pour les Colonies

Rue Sandérus. 95 - ANVERS - Téléphone: 2616 Juin

Anrçrpl/ 143, rue du Midi « ULOLUIV BRUXELLES

Fournisseur de la Maison dn Roi, du Ministère des Colonies, etc.

Instruments pour la CHIRURGIE et les Sciences Installation complète d'HOPITAUX et LAZARETS Mobilier chirurgical et opératoire Stérilisation

Orthopédie Bandages Ceintures Corsets Bas varices

MAISON FONDÉE en 1900 Téléphone : BRUXELLES 6144

Juin

uTTTuI

ASbALUT LES POSTES LES MOINS CONFORTABLES ET LES PLUS MARÉCAGEUX PAR DE SIMPLES ARROSAGES JOURNALIERS

MAISON BELGE D'EXPORTATION

FONDEE

en 1809

Henri Kullmann -Thom

Négociant-Commissionnaire

Successeur de KULLMANN-SINGEB, et

68, Rue Joseph II, BRUXELLES ™éPho«e •• M»th<mt us»

____^_ - Télégr. : « Kullchamp »

Fournisseur de l'ancien État Indépendant du Congo, du Ministère des Colonies et des principales firmes coloniales

belges et étrangères

Exportations Générales

de tous les articles vers le Congo et l'Afrique

Visitez notre salle d'échantillons

CORRESPONDANCE SOLLICITÉE Demandez nos nouveaux catalogues illustrés

lÊmmÊmmmÊmÊmmmmmaÊÊÊmÊÊÊmÊÊÊHaÊÊmmmBmÊmÊÊÊmÊÊmÊmÊm

Accumulateurs TUDOR j

Société anonyme

Capital : ,500,000 francs

79, rue Joseph II, 79, BRUXELLES

Téléphone : Linthout 1410 Télégrammes : TUDOR, BRUXELLES

Accumulateurs stationnaires, transportables.

Emballages pour les Colonies

Réception Expédition Dédouanement

SOCIÉTÉ ANONYME A ANVERS Anciens Etablissements Mois et Co Bureaux : 42, rue Nationale. Ateliers et Magasins : 42, 44 et 46 rue Nationale.

92, rue de la Ruche. 71 et 87 rue Everaerts.

Emballage. des marchandises en transit, en caisses et en ballots

pressés hydrauliquement

Ballots imperméables du type Congo

Boîtes, bidons, tambours métalliques en tous genres

Spécialité de bidons à benzine et à pétrole

Produits Coloniaux Koloniale Voortbrengsels Cigares - tabacs - allumettes Sigaren - tabak - stekjes

HANDELSHUIS VOOR IN EN UITVOER - Geeraerdsbergen

COMPTOIR COMMERCIAL d' l et

__ ) Export , Import

COMMERCIAL OFFICE FOR and

_ _ GRAMMOJSTT-BELGIUM

E. LERCANGÉE ET V. DIERICX

Fabrique de Bonneterie

Téléphone Lo ÎSe! et- Do PC h î e Télégrammes :

30 à LEUZE (Hainaut) Loiselet- Leuze

zzzzz Spécialité d'articles d'exportation z=z=

ARTICLES POUR EUROPÉENS?

tàilets en filet, Gilets et Caleçons en coton écrn, blanc ou rayé, en Vigogne Normal, demi-laine et pure laine Normal.

ARTICLES POUR INDIGÈNES :

Nina-lots. Maillots et Vareuses, en coton et en laine, blanc, unis, rayés,

multicolores et fantaisie. Bonnets rayés et bariolés. Pagnes. Juin

MARCHANDISES.

RAVITAILLEMENT.

MATERIAUX DE CONSTRUCTION

PRODUITS DE TOUS GENRES.

IMPORTATION. EXPORTATION

CONSIGNATION,

LES BATEAUX

DE LA SOCIÉTÉ

ASSURENT LE SERVICE

SUR LE FLEUVE ET LES

AFFLUENTS PRINCIPAUX

AU CONGO BELGE.

s— -»««— » _ ;.}

La eoçigté s'pçcupe de toutes formalités en DOUANE pour l'importation et- I exportation.

SeDeC

^TTmTmnïïMiïlTî 1 1 i I i üiijiüiiii^B

LéonjSPELTINCKX

354, Chaussée d'Anvers GAND Bureaux :

3, rue aux Vents Adr. télégr. : Léon SPELTINCKX Gand Codes : A. B.C. 5 th. Edition, Bentley.

ÏÏB^k ■- iKâiùii- ■■ ■,.„;ll„i,.....i -.,,., ;;„„■■ liSiiiJil'ft'j»'

il 14 :eilircs

àf Briques, à Tuiles « lli:iU'UI,i: »

Machines combinées)

IIHIO/IJES, a TUILES, Système breveté.

Machines complètement démontables

spécialement construites pour les

besoins des pays exotiques

Fournisseur du Ministère des Colonies,

d'un grand nombre de Sociétés Coloniales,

.et de nombreuses Missions.

Plus de 350 machines sont en emploi

au Congo Belge juin ;

Plantations Coloniales

"LALUKI"

SOCIÉTÉ ANONYME

FACTORERIE DE BOIYIA

Commerce général de Marchandises pour Européens et Indigènes

ACHAT DE PRODUITS COLONIAUX

MANUTENTION & TOUTES OPÉRATIONS DE TRANSIT

Vastes Magasins pour l'entreposage de toutes espèces de marchandises

coisrsia-3sr^k.TiOKr

SIÈGE SOCIAL :

41, rue des Minimes

BRUXELLES

Juin

De Ridder et Hughes de g^gIres tsFiNS

Marque déposée " CHANTECLER ,,

== TURNHOUT (Belgique)

Kous recommandons nos articles^spécialement traités pour les pays tropicaux. Nos tins brevetées ont données pendant de nombreuses années, entière satisfaction à notre clientèle. Au Congo les consommateurs peuvent se procurer notre marque

à OMNIUM Africain, Kinshasa. - JLA MAJK1, Koiua.

Prix-courant et échantillons sont envoyés sur demande

SOCIETE ANONYME

DES

ENGRAIS CONCENTRES

ENUIS (Belgique)

PRODUITS : §ijperpho§ph4TE co^ceitbé ou double titrant 42 à 47 p. c.

d'acide pkosphorique soluble eau et citrate dont 9/10 soluble eau.

EHRMANITE PLATKE phosphaté environ 60 p. c. sulfate de chaux, 2 à 3 p. c. acide pkosphorique. phosphate i>e potasse environ 36 p. c. acide phosphorique, 25p. c dépotasse. - juin

Le meilleur Vin de Bordeaux vieux en dames-jeannes est celui de la marque

"EVO„

CONNU ET APPRÉCIÉ PAR TOUS LES COLONIAUX

Fourni par l'a cienne firme

E. Van Oudenhove Vins en ^T0S Bruxelles

13, rue de la Prospérité Vins de Bordeaux, de Porto et de Champagne

en caisses spéciales

Juin

III

Société anonyme Etablissements De Clercq et Cie FILTERIE MODERNE

NINOVE (BELGIQUE)

FILS A 00ÜDRE DE COTONS ET LINS EN TOUS GENRES

FIL8 A CROCHETER, A FAUFILER, A BRODER ET A DENTELLE

SPÉCIALITÉ DE FILS SUR BOBINES ET TUBES

J. VAN OEN HAUTE & F. DE CLERCQ

manufacture de chaussures |\Jjnove (Belgique)

Chaussures en cuirs et tissus, cousues et clouées Spécialité d'articles en toile à voile pour pays chauds

III

fWWP^^Il'k IJIUJOWIW <!,< lUIJuY tnlonwl.

Spécialité d'Articles photographiques pour le CONGO BELGE

^"E^CHRISTIAENS

ANCIEN CONGOLAIS

107, Marché -aux-Herbes, 107

BRUXELLES =

Téléphone : Bruxelles 9698

- .

Appareils photographiques

de toutes marques. Appareils stéréoscopiques

Richard - Joux, etc. Produits chimiques, révélateurs, etc. eu eoiuppiuiés et sons tubes pour tropiques

Lanternes d'agrandissement et de projection

Cinématographes Jumelles à prismes

Occasions nombreuses en magasin

AFRICAN and EASTERN TRAÜE CORPORATION «j.»*» LIMITED

ANCIENNEMENT

African Association (Congo) Limited

Siège social :

ROYAL LIVER BUILDING

LIVERPOOL

Siège social au Congo Belge :

KINSHASA

Assortiments complets et variés de toutes espèces de marchandises toujours en stock dans nos dépôts.

DÉPOTS :

Kinshasa Stanleyville

Coquilhatville Yanonge

Bumba Ponthierville

Lokandu Kirundu

Bulungu Kindu

Acheteurs de tous

produits coloniaux

LE MÉTAL ANTIFRICTION ^ BiLGJÇA..

(Marque déposée le 27 octobre 1909)

pour Locomotives, Machines, Moteurs, Tramways, Automobiles, Remorqueurs, Transmissions, etc. est le PRODUIT BELGE

le plus employé.

Seuls fabricants: S EVRIN ET MlGEOT, A AUVELAIS

Stock important en magasin Livraison rapide

Télégramme : BELGiCArAuvELAis Téléphone : tam i nes 01

Fournisseurs des Ministères des Colonies, Chemins de fer

et de nombreuses Sociétés Congolaises

Juin

Désinfectez vos habitations avec la

CRÉOSOTINE Etoile * Rouge

vous serez protégés contre les maladies contagieuses et éloignerez les insectes et les moustiques si dangereux dans les pays chauds.

Fabricants J. LEGBAMD A O

Rue du Tivoli, 27, BRUXELLES

Toutes Constructions en Bois enduites de

CARBOLINEUIYI Etoile * Rouge

seront préservées de la pourriture et des dégâts occasionnés par les Termites et autres insectes.

Juin

OUTILLAGE

COLONIAL

ARTICLES

DE MÉNAGE

COMPTOIR DE QUINCAILLERIE

INSTALLATIONS DE POMPAGE

ARTICLES

DE TRAITE

BUREAU

TECHNIQUE

MAl!?OA

DUTRY-COLSON

GAND

Fondée en 1818

12, rue des Champs

FOURNISSEUR DE LA COUR, du Ministère

des Colonies, des Missions et des principales

Sociétés coloniales

Juin

LA MAISON EST RECONNUE POUR LE SOIN QU'ELLE APPORTE A L'EXÉ CUTION DES COM- MANDES, DES EM- BALLAGES ET DES EXPÉDITIONS.

Livraison rapide

et soignée

mXison FELDBLUM & SONS

75, Leadenhall Street,

LONDON E.C.3

Adresse télégraphique : Téléphone :

Feldblum LONDON Avenue 3621

FOURNISSEURS A DIFFÉRENTS GOUVERNEMENTS ALLIÉS Même Maison à Paris :

80, RUE DE TOURENNE PARIS III

FOURNISSEURS au Ministère des Colonies.

.Spécialité de y clements usagés pour la traite. Rayon spécial pour le Congo.

Nous faisons un choix pour le Marché Congolais répondant aux besoins

de la Colonie.

DEMANDEZ-NOUS NOTRE TARIF F. O. B. HULL. Emballage soigné dans nos Magasins par presse hydraulique.

Stocks importants et toujours nouveaux.

Juin

GRANDE DISTILLERIE DIJON NAISE fondée en 1836 - K. OBiTBIt&c

Successeurs : VAN DEN BOOGAERDE & BLOMME

23, rue Claessens, 23 BRUXELLES et DIJON (Téléphone Brux. 127.36

SlKOrS PURS FRUITS Liqueur «VIEILLE CURE»

CREME DE CASSIS ME i»t.lO\

DEMANDEZ PRIX-CGURANT No 4.

Juin

M Tassy & De Roux

Fabricants d'Huiles Importateurs de Graines

COPRAH PALMISTE ARACHIDES

MARSEILLE

Y»ie L'ÉTOILE

5, Rue de la Verveine =Z BRUXELLES

Vinaigre de vin, de fruits

fabriqués spécialement pour

le CONGO

Graines potagères

récoltées spécialement pour les pays chauds.

Successeur de Nestor d'ARGENT 12, Place Ste-Gudule, Bruxelles téléphone : 4278

Fournisseur du Ministère des Colonies, des Missions

et des Sociétés Coloniales, etc.

Spécialité d'assortiments de graines potagères pour Colonies.

Outillage pour les plantations. Insecticides, pulvérisateurs, etc.

Emballages spéciaux. Catalogues sur demande Juin

O- iej o :r, a- :e s ZHI^ZKriTST

MARCHE (BELGIQUE) FABRIQUE DE MIROITERIE

Exportation

Savon Bertin 565 vaut de lOR

Nos savons sont purs, onctueux et finement parfumés.

Ils conservent indéfiniment leurs qualité sous toutes les latitudes. Emballages spéciaux pour le Congo, sans frais pour le client.

BERTIN et Cie, 10, Place du Châtelain, BRUXELLES

===== TÉLÉPHONE : 7493 ================= Juin

TOUS LES PRODUITS LACTES POUR L'EXPORTATION

LA

Soc. Anou. Téléphones : Bnix. 3492-3494

liait naturel liquide Lait condensé avec et sans sucre Beurre Crème de lait Bahutyrosc (Babeurre concen- tré) — Farine lactée Sucre de lait Caséïne.

142, rue Fransman, LAEKEN - BRUXELLES

Adresse télégraphique ou postale : XUTBJCIA-LAEKEX

Code ABC - 5™ Édition.

Les plus hautes distinctions aux expositions universelles et internationales.

GRAND PRIX : Liège 1905, Turin 1911, Gand 1913

Hors Concours (Membre du Jury) Milan 1906 Bruxelles 1910

Juin

En magasin :

Appareils Tendeurs Rivets

Feuiïlarrfs de

toutes dimensions Cisailles à feuillard Arrache-Clous Ouvre-Caisses Emballage spécial

au Ruban métallique pour paquets et petits colis Accessoires d'Emballage.

Appareil à cercler au fer feuillard les caisses pour l'exportation.

Seul machine permettant le serrage automatique et par écrasement parallèle.

Emballage solide et inviolable indispensable pour tout Exportateur comme pour

les expéditions de l'Intérieur, le cerclage au feuillard étant la meilleure garantie

de sécurité contre le vol. Démonstrations gratis sur demande

BRUXELLES 143, Boulevard Anspach

Juin

STE DU TENDEUR UNIVERSEL

Sté Coop. fondée en 1912

CASE À LOUER

REPAREZ VOS TOITURES AVEC

Composé plastique à fil d'amiante.

S'applique à la tru- elle sur le bois, le fer, le feutre as- phalté, la tuile, le zinc, le verre, le plomb, le béton.

Dure indéfiniment.

Un kilo couvre un demi mètre carré.

Prix port Anvers : 3.7b fr. le kg en fûts de 100 kgs. 4.30 fr. le kg en tambour de 25 kg.

MateX

FluideX

Prix révisables.

Composé similaire. Semi-liquide. Antirouille.- S'ap- plique à la brosse.

1 kilo couvre 2 mè- tres carrés.— Prix en 25 kgs 4 75 frs le kilo.

BILLIARD & rue d'Artois, 51

Télép. : B. 118.87 BRUXELLES-MIDI

Usine à HOMERTON Octobre

FOURNITURES GÉNÉRALES

ZZZZZHZ pour la PHOTOGRAPHIE

Edm. BASTYNS

L. MARINUS, Successeur 29, Rue des Tanneurs ANVERS

Appareils photographiques et tous accessoires spécialement fabriqués pour les tropiques.

Envois réguliers de colis postaux 4ans des emballages spéciaux

La maison a photographié tous les départs pour le Congo depuis juillet 1903. Juin

CASE A LOUER

PAGE A LOUER

AVIS

intéressant la publicité

' Dans le but de documenter pratiquement le monde des affaires sur tout ce qui touche à la vie économique de l'a colonie, Congo, donnera des infor- mations précises sur l'importance des débouchés offerts par la colonie, la description, le conditionnement et le prix des produits que l'industrie belge pourrait fournir; les conditions de paiement, les usages de place, les frets et tarifs et conditions de transport, les tarifs douaniers, les règlements d'entrepôt et de transit, les rapports économiques de district, les statistiques commerciales et industrielles, les mercuriales de prix, les adjudications, les analyses de produits coloniaux et, en général toutes les indications de nature à intéresser les commerçants et industriels. Ces renseignements seront fournis par V Office colonial du Ministère des Colo- nies et le Service d' information et de propagande de l Union Coloniale.

On trouvera dans les comptes rendus des séances de la Société pour le Perfectionnement du Matériel Colonial, des études et renseignements pré- sentant un grand intérêt pour nos industriels et nos colons.

ÉQUIPEMENTS COMPLETS pour le CONGO et les COLONIES

LUCiEisr l..a_o:roi:x:

Tailleur Civil et Militaire 5, rue de la Pépinière Téléphone : 100,73

BRUXELLES Adresse Télégraphique : LJJCLAC

liaison de confiance fondée en 4904 juin

PLATS CUISINES

pour varier les Menus, Provisions <k Voyage, etc.

CASSOULET

PETIT SALÉ aux Choux

CHOUCROUTE garnie

CÏVET de LIÈVRE

ROGNONS SAUTÉS

ANDOUILLETTES aux Lentilles

VEAU BRAISÉ

SAUCISSES à la Tomate, aux Choux

BŒUF en DAUBE

TRIPES â la Mode de Caen

POULET ROTI à la Gelée

JAMBON GLACÉ à la Gelée

SAUCES

QUENELLES et GARNITURES

etc., etc. LA MARQUE

AMIEUX-FRÈRE5

GARANTIT

QUALITÉ et QUANTITÉ

Vient de paraître :

E.De Jonghe et Th. Simar,, 4 rchives Co ngolaises. Bruxelles, Vromant, 1919, 218 pages. Prix : 10 francs. Pour les abonnés de Congo : fr. 7.50. Recueil de documents iuédits et curieux concernant l'activité des pre- mières missions dans le Bas-Congo et l'Angola. Ces documents sont extraits des Archives de la Propagande à Rome.

Th. SiMAR,Le Congo au XVIe siècle d'après la relation deLopez-Pigofetta. Bruxelles, Yromant, 1919, 100 pages. Prix : fr. 7.50. Pour les abonnés de Congo : 5 francs. Etude critique sur la plus ancienne relation connue sur le Congo.

Dans ses prochains numéros, CONGO publiera :

une série d'articles, de coloniaux de la première heure, qui ont promis, pour nos lecteurs, de rappeler leurs vieux souvenirs.

Un nouveau type de concession foncière au Congo, par M. Heyse, Docteur eu droit.

L'élevage au Congo, par C. Van Damjie. D' de l'École Supérieure d'Agriculture de Gaud.

Les Forêts du Congo, par E. Vax de Ryst, Missionnaire.

La Flore congolaise, par D. Vermoesex, attaché au Jardin Botanique de Bruxelles.

Le Jardin Botanique d'Eala, par Jean Pyxaert, de l'Administration coloniale.

Les Modifications de l'Acte de Berlin, par V. Denyn, Directeur de la Revue.

Le Mouvement des études ethnologiques au Congo, par Ed. De Joxghe. Dr de la Revue.

Les Sociétés secrètes indigènes au Congo, par le même.

Sociologie des Bakongo. parP% VAN Wing, Missionnaire.

Les l opulations Ngombe de l'Equateur, par Ch. Exgels. Commissaire de district.

La Mortalité infantile chez les Ababua, par Mme Rolleri accoucheuse diplômée.

De Jacht onder de Mongo, door P. Vax der Llxdex, Missionnaris.

Les Institutions sociales et politiques de Baluba. par Ch. Vax der Kerckex, Commis

saire de district. Les Métiers indigènes dans le district du Lac Léopold II. par LE MEME. Notes sur les Bashilele. par M. Verhulst, Administrateur territorial. Généalogie des chefs Warumbi, par M. BERNARD, Administrateur territorial Mœurs et Coutumes des Baniabungu. par Ch. Roy, Missionnaire. Les Bashi, par F. Colle. Missionnaire.

Etudes de linguistique et d'ethnographie Azan.de, par C. Vax dex Plas, Missionnaire. Les Mogwandi, par P. Taxgiie Missionnaire.

Les Populations du Ruanda et de l'Crundi. par Th. Simar, Secrétaire de la Revue. Voyages au Lomami, par le Dr Schwetz, Médecin colonial. Les Progrès de la Cartographie Congolaise, par le major MÀURY Les Bambous en Afrique, par M. De Wildeman, Directeur du Jardin botanique de

Bruxelles.